Malgré la semaine toute pourrie que l’on vient de vivre, semaine sans direction, mais qui, à la fin aura tout de même coûté de la performance à tous les indices de la planète, si l’on prend un peu de recul et si l’on essaye de ne pas regarder tout ça avec notre vision « court-termiste » habituelle, il faudra tout de même noter que le Nasdaq vient de boucler son meilleur semestre depuis 2009 (+17%). Et si vous êtes là depuis 2009, vous savez que ce n’est pas rien.

L’Audio du 3 juillet 2017

Pourtant la fin de semaine aura tout de même été déprimante, forcément avec le début du Tour de France, nous avions la tête dans le guidon et personne n’était capable de prendre le moindre recul sur ce qui se passe en ce moment. Pourtant, comme cité plus haut, il n’y avait pas que des mauvaises choses si l’on était capable d’y regarder à deux fois et de plus loin. Mais ces deux notions sont bien éloignées de ce que les places boursières sont habituées à nous vendre ces dernières années.

Alors encore une fois, dans cette période où tout le monde est plus préoccupé par être le premier à trouver le bon niveau pour vendre à l’aube de la prochaine correction, plutôt que chercher les vainqueurs des prochains mois, nous nous sommes concentrés sur les mauvaises nouvelles du moment. Et il y avait de quoi faire pour qui voulait peindre le « Bear sur la muraille ».

L’obstination de la semaine se faisait principalement sur les déclarations des banquiers centraux qui n’étaient pas claires. Habituellement, les stars des banques centrales rédigent leurs discours de façon à que personne n’y trouve rien à redire. En général on essaye de ne pas y placer des mots qui fâchent ou des expressions qui pourraient éventuellement laisser entendre que l’on est à deux doigts de monter les taux et/ou d’arrêter d’injecter de l’argent dans le systèmes (dépendant du pays ou de la région du monde dans laquelle vous officiez). Pourtant, cette fois ils se sont lâchés. Peut-être involontairement, peut-être que leurs fabriquants de discours habituels étaient en congé sabbatique, peut-être qu’ils se sont autorisés un peu de fantaisie ou alors est-ce que leurs discours ont été « hackés » avant d’être lus, rien n’étant impossible en ce bas monde actuellement.

Cette chronique vous est offerte par

Toujours est-il que depuis le début de la semaine dernière, entre les élucubrations de Draghi et son manque de clarté sur la continuité du QE, les doutes de Yellen sur l’inflation et donc sur la poursuite de la hausse des taux, les tergiversations de Carney sur les taux et sur le BREXIT et les insinuations sur l’évolution du comportement de « SA » banque centrale selon Kuroda, nous avons été servis et il n’en fallait pas plus pour que les marchés soient déstabilisés.

Les taux sont partis dans tous les sens, dans la foulée les monnaies ont fait de même, à moins que ce soit dans l’inverse. Toujours est-il que le 10 ans allemand s’est envolé durant la semaine, renforcé qu’il était par la force de l’Euro. Le 10 ans américain a également pris la voie des airs, mais moins, parce que forcément, le dollar était faible. Certains techniciens se sont d’ailleurs emparés de l’histoire pour tirer des parallèles avec le passé. En effet, à chaque fois que le spread (l’écart) entre le 10 ans US et le Bund allemand se réduit, les marchés se cassent la figure, il n’en fallait pas plus pour motiver les troupes. Pas sûr que cet état de fait soit la seule raison de la baisse de ces derniers jours, mais tant qu’à trouver des justifications, celle-ci en est une bonne.

Pour le reste, on s’est posé plein de questions sur la suite des actes et des décisions des banques centrales et on n’en s’est pas plus qu’avant. Cependant les girations et les doutes du marché se sont retrouvés dans tous les mouvements importants de la semaine.

Néanmoins, le Nasdaq est en hausse de 17% sur six mois, le S&P500 booke près de 9% de hausse sur la même période et c’est le meilleur semestre depuis 2013, tout de même. Alors entre vous et moi, on peut quand même se demander si 17% de gains sur 6 mois ce n’est quand même pas mieux que 2% de hausse sur une semaine sur le 10 ans allemand ?

Les réponses viendront avec le temps et les « experts » ne manqueront pas de venir nous le faire savoir ces prochains jours. Notez bien peut-être pas tout de suite, parce que là, mardi c’est Independance Day aux USA, tout est donc fermé et il est donc plus que probable que plein d’Américains – analystes y compris – en profitent pour faire le pont. Les vraies déclarations, les vraies nouvelles devraient tomber en fin de semaine, en tous les cas, pas avant mercredi, même si, ce lundi nous aurons tout de même – début de mois oblige – les chiffres de l’ISM Manufacturing aux USA et les ventes de voitures. Cela devrait être un premier test pour connaître un peu mieux l’état de santé de l’économie US, vu que les chiffres publiés précédemment dataient un peu et laisser penser que ça n’allait pas aussi bien que cela, contrairement à ce que Yellen nous a vendu jusqu’à très très récemment.

Et vendredi il y aura les chiffres de l’emploi et c’est probablement ce qui nous servira de « juge de paix » pour cette semaine. Pas forcément la réponse à toute nos questions, mais un début de quelque chose éventuellement. Une chose est sûre, nous sommes déjà en train de nous poser la question habituelle : « Est-ce le début de la fin de la mort du Bull Market » – si, si, ne me mentez pas, je sais que vous y pensez.

Difficile d’y répondre de but en blanc, difficile d’y répondre tout court, mais j’ai envie d’approcher la chose de la manière suivante :

1) en citant un « stratège » qui a parlé ce week-end pour dire que, selon lui nous vivons un période momentanée de hausse des rendements, ce qui pourrait favoriser un « léger repli des bourses mondiales » – mais que la véritable correction (pour ne pas dire KRACH, parce que c’est mal) viendra plutôt dans le courant 2019 lorsque l’économie ralentira pour de vrai. Au passage j’aimerai que l’on salue cet analyste qui ose prendre position sur ce qui se passera en 2019, alors que la plupart de ses pairs ne pensent qu’à ce qui se passera dans le quart d’heure suivant.
2) je voudrais parler d’un seul graphique, celui de l’indice des semiconducteurs. Le Philadephia Semiconductors Index. Dans les anciennes croyances boursières de quand j’étais jeune et crédule, on disait que quand cet indice changeait de direction, c’était un signe précurseur de retournement du marché. En général, on disait que l’on avait entre 3 et 9 mois avant que le reste parte en vrille également. Je ne vais pas vous MONTRER ce graphique, parce que comme tous les graphiques il est laissé libre à l’interprétation de chacun, mais en tirant mes charts ce matin, en vérifiant les tendances, j’ai l’impression que l’indice est en train de casser à la baisse, ce qui serait un mauvais signe pour le reste du marché et pour la technologie. Ce n’est donc pas encore une certitude ni un « coup sûr » comme on nous ne vend régulièrement en bourse, mais il faudra surveiller la chose avec attention et ne pas venir dire qu’on ne nous en avait pas parlé avant.

En conclusion, cette semaine tronquée par le 4 juillet commence un peu comme un lendemain de tempête, on sort de la maison et on regarde ce qui tient encore debout, en se demandant s’il faut tout recommencer à zéro ou s’il y a encore des trucs à récupérer. L’image n’est peut-être pas la meilleure pour commencer la semaine, mais une chose est certaine, la semaine dernière n’aura pas été juste une prise de profit sur un secteur spécifique, tous les aspects du marché ont été touchés et pas qu’un peu. Au-delà des mouvements boursiers, les taux, les monnaies et les matières premières ont tous été victimes de mouvements inhabituels. Alors même si c’est l’été qui commence et les vacances qui démarrent, il va tout de même falloir faire gaffe, sachant que l’on n’entre pas dans une période facile historiquement parlant – la périodicité jusqu’à fin octobre n’est de loin pas la meilleure, la réduction des volumes ne va pas aider, sans compter que dans les semaines à venir, on va parler résultats trimestriels.

Ces derniers seront sûrement le cataylste final, de bons chiffres nous feront oublier cette semaine pourrie, mais si c’est décevant, attendez-vous à en voir plus d’un à la télé pour vous dire : « je vous l’avais dit ».

L’or est à 1237$ est en train de casser les supports. Et pendant ce temps, celui qui nous a foutu les jetons il y a deux semaines et que tout le monde était en train de voir à 30$ est de retour au-dessus des 46$ – en hausse de près de 10% depuis 10 jours, le pétrole est en forme et, étonnement, plus personne n’en parle alors qu’il était LE sujet d’inquiétude il y a peu. D’ailleurs ne disait-on pas que « si le pétrole baissait trop » ça serait mauvais pour l’inflation aux USA et que Yellen n’aimerait pas ça.

Ce qui, en extrapolant, voudrait donc dire que si le pétrole est bien remonté depuis que l’on disait ça, ça serait positif pour l’inflation aux USA et que Yellen devrait aimer ça ou suis-je complètement idiot ???

Ce matin l’Asie est partout en hausse. En hausse de manière homéopathique, puisque le marché le plus fort c’est le Japon et qu’il monte péniblement de 0.13%.

Dans les nouvelles du jour, on retiendra la nouvelle victoire de Warren Buffet qui va exercer ses options sur Bank Of America d’ici le mois de septembre. En effet, en 2011, Warren Buffet avait acheté une participation de 5 milliards dans la banque américaine. Participation qui lui donnait droit d’acheter 700 millions de titres de plus au prix de 7.14$ et des poussières. Entre deux il a encaissé un dividende ce près de 6% par année sur ses 5 milliards investis, ce qui fait tout de même trois fois le rendement du 10 américain et là, il va acheter 700 millions de titres à 7.14$, alors que l’action Bank of America vaut 24.26$. Non. Ne sortez pas vos calculatrices, ça fait un profit de 12 milliards. Merci d’être venus. Au passage, il faut noter que Warren Buffet est du même coup le plus gros actionnaire de deux des plus grosses banques américaines. Qui a dit qu’investir dans les financières était compliqué et risqué ?

Caterpillar est à nouveau dans le collimateur de l’IRS qui vient encore leur demander des comptes sur leur système complexe d’évasion fiscale ou plutôt d’optimalisation fiscale. Il faut dire que la dernière fois que l’IRS a déclenché un raid sur les « Headquarters » de Caterpillar, c’était en mars dernier. Depuis, le titre a pris 20% – de la à en tirer une conclusion, il n’y a qu’un pas.

Et puis, il y a près de 10 ans, la crise financière dans laquelle nous sommes encore indirectement, si l’on en croit le soutien permanent des banques centrales, apparaissait sur nos écrans et nous prenions la mesure de ce que pouvait être le concept du subprime. Dix ans plus tard, nous n’avons pas toujours bien compris ce que cela pouvait bien pouvoir dire, mais une chose est certaine, en ce temps-là, on clouait les CEO’s des banques au pilori parce que c’était tous des salauds, leurs salaires et leurs bonus étaient scandaleusement beaucoup trop élevés par rapport à la montagne de conneries qu’ils avaient laissé faire au nom du Dieu profit. Mais on ne nous y reprendrait plus, des salaires pareils et des bonus pareils n’arriveraient plus jamais.

Ce matin, une étude américaine fait était du fait que les CEO’s des banques américaines gagnent toujours autant qu’à l’époque. Même pire car selon l’étude, si l’on regarde les performance et les rendements de leurs « employeurs », tout a été réduit, mais les salaires sont restés les mêmes. Et puis, globalement les CEO’s des banques américaines gagnent trois fois plus que leurs compères européens. Comme quoi, des fois on a l’impression que les choses changent, mais en fait elles ne changent pas du tout, nous sommes toujours tous égaux, mais certains sont toujours plus égaux que les autres.

Le FT attire l’attention sur le fait que la course aux médicaments contre le cancer pourrait prendre un virage inquiétant. Actuellement, 800 médicaments sont en test et le journal tire la sonnette d’alarme et prévient que l’envie de trouver le St Graal du médicament contre le cancer, pourrait pousser certaines firmes pharmaceutiques à perdre de la rigueur au profit d’un carton boursier et financier.

Le Barron’s a mis le Bitcoin en première page de son journal. Bon signe ou pas bon signe pour la cryptomonnaie, l’avenir nous le dira. Toujours est-il que le journal revient sur le fait qu’après le Bitcoin, le Blockchain pourrait être un « game changer » pour l’industrie bancaire. Il faut vraiment que je pense à prendre des cours sur le sujet à l’Ecole Club Migros, parce que je commence à être un peu paumé. Le journal du dimanche de la finance pense aussi que si vous investissez dans Bristol Myers durant les 2-3 prochaines années, vous devriez pouvoir générer des profits de 30 à 40%, ce qui sera de toute façon mieux que les rendements offerts par la BNS.

Et puis dans les « dernières déclarations qui comptent avant le 4 juillet », on notera que Ron Paul a déclaré sur CBNC que ça ne serait pas un « choc » de voir les actions corriger de 25% et l’or monter de 50% d’ici le mois d’octobre. Et toujours sur CNBC, le stratège « technique » de Bank of America a déclaré que, selon lui, le S&P500 avait dessiné un signal très rare qui le met dans la position parfaite pour aller rapidement à 2500. Choisissez votre camp, sachant que les deux peuvent avoir raison, juste pas en même temps.

Côté chiffres économiques, nous aurons les Retail Sales en Suisse, chose qui ne devrait pas changer le comportement du 10 ans américain ou du cours de l’Euro/Dollar, puis nous aurons le Manufacturing PMI un peu partout dans le monde, parce que c’est le début du mois. Il y aura aussi les ventes de voitures aux USA et rappelez-vous, demain c’est fermé aux USA, parce que c’est la fête de l’Indépendance, c’est aussi les 7 ans de ma fille, mais ce n’est pas pour ça que c’est congé à Wall Street.

Les futures sont en hausse de 0.23%, laissant présager d’un début de semaine un peu plus sympa, la météo devrait aussi s’améliorer. Il me reste donc à vous souhaiter un beau lundi et un très beau début de semaine. Nous on se retrouve demain, pour ceux qui ne sont pas en vacances.

Thomas Veillet
Investir.ch

“The greatest lesson in life is to know that even fools are right sometimes.”

Winston Churchill