Si je devais résumer la séance d’hier, je pourrais simplement vous dire : Le Dow Jones a atteint les 24'000 – c’est la cinquième fois que le Dow Jones franchit un millier cette année et c’est exceptionnel – les intervenants étaient enthousiastes à l’idée de l’approbation de la réforme fiscale à venir, même si c’est le même cheval de bataille depuis des mois et même si l’on ne connaît pas encore tous les tenants et les aboutissants du plan, si ce n’est que si vous êtes pauvres, ça ne va pas vous changer la vie et si vous êtes riches, vous le serez un peu plus, mais ça ne vous la changera pas non plus. Mais le Dow Jones est monté de 22% cette année pour ça.

L’Audio du 1er décembre

Mais moi, ce que je ne comprends pas, ou que je ne comprends plus et ça fait un moment que ça dure, c’est la capacité que nous avons de regarder le marché et les investissements avec un vision à 12 heures alors que l’on se présente comme des « investisseurs »…

Je ne sais pas si vous vous souvenez encore, parce que ça fait hyper-longtemps, mercredi soir le Nasdaq et la Technologie se sont fait laminer parce qu’un type de chez Goldman dont on a déjà oublié le nom avait dit que les valorisations étaient trop hautes et que l’on allait droit dans le mur et que le retour de bâton serait magistralement sévère.

Le marché avait limite paniqué sur la chose et tout le monde s’interrogeait déjà sur le fait que la techno était trop chère et qu’il fallait vite partir parce la fin était proche. Pendant la séance de mercredi, le comportement des investisseurs avait fait penser à un poulet décapité qui continuait à courir dans tous les sens – seuls quelques « experts » en investissements technologiques avaient pris le temps de relativiser cette « correction » ou ce sell-off sectoriel avec un peu moins d’angoisse que la moyenne de la presse financière.

« Nous pensons que ce type de réaction font partie d’un marché qui est sain puisqu’ils permettent de « nettoyer » une sorte d’exubérance – certains investisseurs peuvent ainsi prendre quelques profits et leur permettre de ré-investir dans d’autres stratégies qui offrent un meilleur rapport « risque-rendement » et offre du même coup la possibilité, à ceux qui attendait une correction pour entrer dans le marché, de le faire… »

AtonRa Partners

Mais globalement on sentait ce besoin d’appliquer la stratégie du « courage-fuyons », surtout qu’il y a tout de même une grosse partie du monde merveilleux de l’investissement qui reste très « bearish » sous ce déguisement de « bull » qu’ils n’ont enfilé à regret que très récemment.

Pourtant, alors que mercredi on hurlait à la mort pour des raisons que l’analyste de Goldman Sachs jugera comme étant purement fondamentales, hier on rebondissait et on achetait des actions parce que l’on était « rassuré » sur les avancées des discussions qui entourent la réforme fiscale américaine. En gros, nous étions rassurés sur des discussions embryonnaires entre les deux camps politiques américain… ce qui est à peu près aussi stable et rassurant que le job d’entraineur au FC Sion. Mais pourtant, là-dessus nous parvenions à oublier les théories du jour précédent et repartir à l’assaut des plus hauts historiques sur le Dow Jones – le Nasdaq a encore du boulot avant de rattraper le retard et l’indice des semi-conducteurs encore plus, mais au moins la « chute » a été enrayée.

Tout ça pour vous dire que la séance d’hier aura été « drivée » par la réforme fiscale et que l’on a oublié ce qui nous avait fait baisser la veille sans compter que si, sur cette année, nous mettons bout à bout les séances de hausse qui ont été justifiées par la réforme fiscale, je pense que ça doit foutre la trouille. Ou alors c’est que les investisseurs imaginent que dès que le plan sera voté au Congrès et au Sénat, les hélicoptères Blackhawks de la Marine américaine vont décoller et survoler le pays entier en larguant des milliards de dollars et en cash et des millions de clés USB chargées en Bitcoins…

Bref, le Dow Jones a passé les 24’000.

En Europe le Crédit Suisse a publié une bonne nouvelle. Non, ce n’est pas qu’on leur a supprimé ou réduit une amende, mais pour une fois c’est une vraie bonne nouvelle. Ils ont révisé à la hausse certains de leurs profits dans le « Wealth Management » et ont également exprimé leur intention de rendre plus d’argent aux actionnaires via des rachats d’actions ou des dividendes. Le titre prenait 2% hier. Ils pourraient aussi proposer au Departement de la Justice Américain de prendre une participation dans l’actionnariat de la banque, comme ça ils toucheraient indirectement quelque chose chaque année, même s’il n’y a plus d’amende à payer.

Autrement le secteur pétrolier était en délicatesse, bien que le baril reste fermement ancré au-dessus des 57$. Mais comme hier le meeting de l’OPEP a commencé, on se méfie des communiqués de presse à venir. La prudence est donc de mise dans le secteur et l’Europe en faisait les frais hier.

Tout ça pour vous dire que nous sommes le premier décembre, dans 31 jours 2017 sera terminé, probablement dans une euphorie la plus totale, les performances sont stratosphériques et l’année aura été mythique. Mais malgré cela, je reste toujours dans l’incompréhension la plus totale quand je vois la vitesse à laquelle nous sommes capable de tourner la veste, de passer d’un sujet à un autre en moins de trois minutes et de passer du rire aux larmes en 22 secondes.

Pourtant avec un poil de recul, ceux qui ont fait le plus d’argent cette année, c’est quand même ceux qui ont eu le courage d’acheter un ETF sur le Dow Jones, le S&P et le Nasdaq et de se casser en vacances pendant 12 mois, sans JAMAIS regarder les informations boursières… Par contre ceux qui ont passé toutes leurs nuits à scruter les nouvelles financières et à changer d’avis tous les quarts d’heure, ont surtout amélioré les commissions de leur banquier.

Ce matin l’Asie ne fait pas grand-chose. Le Japon en hausse de 0.5%, le reste à peine en baisse. L’or est à 1274$ et le Bitcoin est à 9774$ et vit des heures difficiles depuis les 11’400$ alors qu’il ne parvient plus à monter depuis 36 heures – la dépression nous guette et les « alertes à la bulle spéculative » se font de plus en plus insistantes… Bien que personne, je dis bien personne n’est capable de nous dire quand elle va se dégonfler. En revanche, il est intelligent de le répéter régulièrement, car le jour où ça se produira, vous pourrez toujours dire :

« Ah, ça, je vous l’avais dit !!! »…

Dans les nouvelles du jour, on retiendra que Tillerson risque de perdre son job de Secrétaire d’Etat, puisque Trump envisage de le faire remplacer par Pompeo. Ils faut dire que depuis quelques temps, les deux sont moyennement amis, surtout depuis que Tillerson a plus ou déclaré ouvertement que Trump est « débile » – bien que ce ne soit un secret pour personne, toutes les vérités ne sont pas bonnes à dire.

Le patron de l’UBS se lâche dans la presse et estime que les autorités de surveillances qui tentent de limiter les bonus des banquiers sont juste « jaloux » et ne font pas du bien à l’industrie. Très objectivement, on pourrait demander à Monsieur Ermotti où il était quand des mecs comme Ospel se sont barrés avec 40 millions de bonus pendant que la Confédération mettait à la main au portemonnaie (à nos impôts) pour sauver l’UBS… Mais bon, je dis ça, je dis rien… On ne va rouvrir des blessures qui font encore mal.

GM veut produire des taxis sans chauffeur d’ici 2019. CVS serait sur le point d’annoncer le rachat d’Aetna, annonce qui pourrait être faite dès lundi pour la modique somme de 66 milliards, c’est le Wall Street qui le dit. Dans le Barron’s on pense que Warren Buffet et Berkshire Hathaway pourraient être les grands bénéficiaires de la réforme fiscale et le journal pense que ce qui se passe sur le Bitcoin depuis deux jours et le signe que la bulle est en train de se fendiller et qu’elle pourrait bien nous péter à la figure. Je rappelle qu’historiquement, chaque fois que le Barron’s se montre aussi vindicatif sur l’avenir d’un marché ou d’un indice, c’est l’inverse qui se produit. Je ne sais pas si c’est valable sur les cryptomonnaies, mais on ne va pas tarder à le savoir. Ils pensent également que Gilead peut monter de 50%.

Côté chiffres économiques, il y aura plein de PMI un peu partout, au cas où cela intéresse encore quelqu’un. Pour le moment, les futures sont en baisse de 0.25% et ce soir c’est le week-end.

Je vous souhaite donc un excellent repos bien mérité et on se retrouve lundi matin pour voir si le Bitcoin a survécu, puisque ne nous le cachons pas, le seul truc qui intéresse les médias actuellement, c’est ça…

Très bonne journée à tous.

Thomas Veillet
Investir.ch

“The most popular investing products are the worst ones for investors.”
― Robert Rolih