Il y a une chose que l’on peut dire cette année, c’est que la Réforme Fiscale Made in Trump aura été utilisée à toutes les sauces et surtout pour motiver la hausse. Encore une fois, en cette fin de semaine, qui pourtant semblait vouée à l’échec, les déclarations des uns et des autres ont fait tout d’abord douter le troupeau des animaux à cornes, avant que finalement, on se dise qu’on était quand même pas venu jusque là pour se dégonfler si près du but.

L’Audio du 18 décembre 2017

Un des multiples stratégistes qui pullulent à Wall Street, bardés de diplômes et qui sont certains d’avoir raison, a trouvé la bonne formule ; il a dit : « Ouais, debleu, on n’est quand même monté aussi haut à cause de la réforme fiscale pour tout laisser tomber maintenant !!! » – j’avoue je ne suis pas certain que sa phrase comprenne le « debleu » à l’intérieur, mais c’est pour rendre la traduction en suisse-français plus crédible.

Du coup, vendredi on s’est quand même dit que la Réforme Fiscale c’est chouette et que comme les grosses sociétés américaines vont payer moins d’impôts et peut-être du même coup rapatrier le pognon qui est planqué en Irlande (l’Irlande qui je le rappelle n’est PAS un paradis fiscal – je précise que l’on devient un vrai Paradis Fiscal uniquement si les journalistes créent un nouveau dossier comme les Paradises Papers ou les Panama Papers – comme il n’y a pas encore eu des « Irish Papers », l’Irlande n’est pas un Paradis Fiscal) – comme les sociétés US vont donc peut-être rapatrier leur fric et le dépenser à tout va aux States ; la Réforme Fiscale c’est chouette.

Et si la réforme fiscale c’est chouette, la bourse, ça monte. C’était un peu moins chouette en Europe parce qu’on attendait quand même de voir si les Américains finissaient la semaine en vert ou en rouge et qu’en plus H&M a sorti des chiffres tous pourris et qu’on angoisse toujours sur les élections italiennes – les marchés ont fini en demi-teinte sur le Vieux Continent. Je précise que l’on s’intéresse aux élections italiennes uniquement six mois avant quand on se rend compte que ça pourrait être le bordel (à chaque fois, donc) et quand elles ont lieu, pour se rendre qu’en fait, ça ne change strictement rien.

En résumé, les marchés US sont au plus haut de tous les temps, comme la plupart du temps cette année, l’Europe traîne la patte, mais s’en sort quand même pas trop mal, l’or… en fait on s’en fout de l’or… et le pétrole est à 57.36$ et visiblement il refuse catégoriquement d’aller chercher les 60$ – évidemment comme c’était à peu près ma seule conviction de l’année, autant que j’aie tort aussi… Et puis, finalement le Bitcoin est à 19’500$, malgré les paroles d’Axel Weber, le gros type tout en haut de l’UBS, qui pense que la monnaie n’a aucune valeur et va finir dans une décharge informatique. La Cryptomonnaie a encore accéléré ce week-end et le CME a également lancé sa version des Futures Bitcoin… Dorénavant vous pouvez faire comme Axel Weber, shorter des futures sur le CBOE et sur le CME…

Comme nous sommes à la fin de l’année et que plus personne n’est franchement motivé, je vais commencer à vous résumer l’année qui se termine avec mon abécédaire habituel… C’est la huitième année consécutive que je vous refais l’alphabet à la sauce boursière, sauf que cette fois je l’intègre dans mes chroniques et je vous dispense des nouvelles du jour, vu que (presque) tout le monde s’en fout. À moins qu’Apple rachète Tesla pour faire des voitures ou que le Crédit Suisse se prenne une nouvelle amende pour terminer l’année.

À ce propos, Gemalto a eu raison de refuser l’offre d’Atos, puisque durant le week-end c’est Thalès qui s’y est mis et qui paie 5 euros de plus par action. Ça paiera les cadeaux de Noël du Top Management…

Nous somme donc lundi 18 décembre et nous commençons avec le A, le B, le C, le D et le E…

A comme Apple

Je crois que c’est la cinquième année que je commence avec A comme Apple. Difficile de faire autrement, surtout que chaque année on entend le même discours : « Oui, Apple c’est fini, ils ne se renouvellent plus, sans Steve Job y a plus de créativité, il ne vivent que sur l’iPhone, les gens ne sont pas dupent, ils changent moins de téléphone, Samsung arrive derrière, les Chinois aussi, Apple ils vont finir par se la prendre.

Oui, sauf que les gaillards de Cupertino continuent d’encaisser environ 15 milliards de cash chaque trimestre, que leur compte en banque présente un solde créditeur de près de 300 milliards et qu’à chaque nouveau téléphone, il y a toujours une armada d’idiots qui n’ont rien d’autre à faire que se lever à 4 heures du matin pour aller faire la queue devant l’Apple Store le plus proche pour « être le premier à avoir le nouvel iPhone ». Sans compter que soudainement les autres produits de la gamme reprennent du poil de la bête et qu’il y a de plus en plus de gens qui trouvent trop branché d’avoir une iWatch au poignet – je le répète encore une fois, je préfère me péter les deux genoux et marcher à pieds nus sur du verre pilé en buvant du vin blanc vaudois que de porter une iWatch…

Mais peu importe, ça marche pour Apple, c’est encore et toujours la plus grosse capitalisation du monde et encore quelques dollars d’efforts et le Trillion de dollars sera atteint. Je prends le pari que l’an prochain je ne dirai pas A comme Apple, mais T comme trillion…

B comme Bitcoin

À tout seigneur tout honneur.

On peut dire ce que l’on veut. On peut penser que c’est une bulle, que ça ne marchera jamais – Monsieur Dimon (CEO de JP Morgan) l’a déjà dit. Monsieur Thiam (CEO du Crédit Suisse) l’a dit aussi – « c’est que de la spéculation, les gens qui traitent le Bitcoin ne le font que pour l’argent » (oui, parce que les gens qui achètent des actions Crédit Suisse, ils le font parce qu’ils aiment bien le logo) et puis tout récemment Monsieur Axel Weber, chairman de l’UBS s’y est mis aussi… On peut prendre les paris, mais il y a de bonnes chances qu’il soit ridicule aussi dans trois mois. Bref, tout ça pour dire que l’on peut faire des comparaisons avec les tulipes aussi, qu’il y a effectivement des chance que tout ça se termine en eau de boudin, mais qu’est-ce qui se passerait si finalement ça dure encore deux ans ???

Franchement j’en sais rien et j’ai prévu de prendre un cours sur le sujet dans le courant du mois de janvier, mais toujours est-il que l’on peut dire ce qu’on veut sur le Bitcoin et surtout du mal, mais toujours est-il qu’à la fin, ceux qui ont mis 2% de leur fortune dedans au mois de janvier 2017, ils sont nettement plus euphoriques que les types qui ont shorté le Nasdaq toute l’année en pensant que « cette fois c’est le top » toutes les deux semaines.

L’an prochain devrait voir arriver plein de nouveaux produits sur le Bitcoin et sur les Cryptomonnaies. D’aucuns diront que c’est le signe de la fin et d’autres diront que c’est le début de l’intégration dans le système. En tous les cas le CME et le CBOE ont lancé leurs futures là dessus et ils ne s’en sortent pas trop mal pour le moment…

Je ne vais donc faire aucune prévision là-dessus, mais on va en reparler en 2018, ça va être super drôle, je me réjouis.

C comme « Cette fois c’est différent »

Cette année qui se termine peut revendiquer le fait d’avoir été spectaculairement haussière. Elle peut aussi revendiquer le fait que bien des investisseurs ont regardé passer le train de la hausse en s’entêtant dans la théorie du « krach ». Durant la plupart de l’année – on l’a déjà oublié – bien des stratèges sont montés à la tribune et sur CNBC pour nous dire que ça ne peut pas durer, qu’on va finir par se la prendre et j’ai même rédigé une chronique qui s’intitulait les 7 Mercenaires qui date du mois d’août 2017 et qui résume le fait que 7 grandes stars de la finance du monde mondial prévoyaient que ça ne pouvait pas durer…

Puis, durant les dernières semaines de l’année, après avoir survécu aux « mois catastrophes » (septembre et octobre), soudainement on a vu un vent de « bull market » souffler sur le monde merveilleux de la finance.. Oublié le krach éventuel, oublié le bilan des banques centrales, oublié l’éventuelle récession à venir, oublié que Trump est à moitié barjot et oublié que Kim Jong Un ne va pas le lâcher… Oublié aussi que la technologie n’a pas arrêté de monter que certains de ses sous-secteurs se sont littéralement envolés.

Non, on est simplement passé en mode « Cette fois c’est différent »… Je ne sais pas si le Krach est repoussé aux Calendes Grecques, mais à voir comment certains banquiers s’auto-congratulent de leurs performances annuelles après cette année, je me demande combien de temps ça le sera, différent.

D comme Déception

Cela peut paraître étrange, mais même si les marchés boursiers terminent l’année au plus haut de tous les temps, même si le Bitcoin et ses pairs n’arrêtent pas de monter, on sent quand même une certaine déception à la fin de ces 12 mois. Il faut dire que si l’on fait un zoom arrière, au mois de janvier personne, je dis bien personne n’aurait parié sur une telle performance du côté des indices boursiers – et je ne vous parle pas des Crypto’s, personne n’a encore rien compris à l’histoire. Mais une chose est certaine, il y a de quoi être déçu, car même si l’année n’a pas été aussi facile que la photo finish veut bien le dire, il y avait de quoi sabrer le champagne avec un peu plus de sincérité qu’actuellement.

L’absence de volatilité y était pour beaucoup et l’angoisse de voir ce « bull market séculaire » soudainement suspendre son vol étaient également responsable de la retenue que nous avons pu montrer durant la plupart de l’année. Les « vieux proverbes » disent que tous les « bull market’s » se terminent dans l’euphorie et si euphorie il y a eu en 2017, elle aura été discrète et elle aura mis du temps pour faire son trou – je ne suis même pas certains que les 6 dernières semaines de l’année où l’on a réellement commencé à y croire peuvent être qualifié d’euphorie – j’ai connu mieux ces 20 dernières années – mais à la place de se complaire dans la dépression, nous allons peut-être essayer de nous accrocher au fait que nous ne sommes pas encore dans UNE VRAIE EUPHORIE et que, du coup, le BULL MARKET n’est pas encore mort !!!

E comme Economie

J’ai toujours été fasciné par le terme « sciences économiques » – un peu comme si l’on pouvait, à grand coups de mathématiques et d’expériences scientifiques, prouver ou prédire que l’économie mondiale – ou même locale – allait se comporter de telle ou telle façon. Surtout qu’avec le recul, j’ai tout de même l’impression que peu de prix Nobel d’économie avaient vu venir la bulle internet, le subprime ou même l’avènement de Mister Bitcoin & Co… Pourtant on continue de valoriser les « sciences économiques » comme si c’était la solution à tout et comme si, en étudiant une montagne de chiffres tous plus douteux les uns que les autres, nous allions trouver une réponse à ce qui va se passer dans le futur…

J’ai pourtant bien compris le concept du terme « scientifique » mais j’ai toujours un peu de mal à associer l’économie à une science. Mais bon, c’est peut-être parce que je ne suis pas allé suffisamment longtemps à l’école, mais une chose est sûre, c’est que cette année, la science en question a montré ses limites. Encore une fois.

La prudence que l’on nous a vendu durant une grande partie de l’année s’est montrée totalement inutile, le fait que le tissu économique lui-même est en train de changer n’a, semble-t-il frappé personne. L’économie américaine qui était à bout de souffle et qui allait se faire démonter si Trump était élu, n’a pas totalement répondu aux attentes, le ralentissement de la Chine n’a eu l’impact prévu et même l’Europe, qui était censée être à l’agonie semble avoir retrouvé des couleurs que l’on ne lui attendait plus.

Ça tombe bien, le mois de janvier, c’est la saison des perspectives économiques, des lunchs et des petits déjeuners qui nous donnent des visions sur l’année à venir. Je suis assez tenté d’y aller….et de faire l’inverse.

Voilà, nous sommes lundi 18 décembre, le Bitcoin est à 18560$ et a perdu 1’000 dollars dans la nuit… Les futures américains sont en hausse de 0.2%, il y aura le CPI en Europe et le Trade Balance en Italie. Il est 6h45, il neige à gros flocons et vous n’êtes pas prêt d’arriver au bureau.

Excellente journée à tous et on se retrouve demain pour une nouvelle chronique et la suite de l’année de F à J…

Thomas Veillet
Investir.ch

“If you’re going through hell, keep going.”

Winston Churchill