En début d’année la plupart des investisseurs montraient un intérêt certain pour les titres des pays émergents. Qu’en est-il actuellement et comment appréhender un investissement dans ces régions?

Fin 2017, les investisseurs se sont pliés à l’exercice des prédictions 2018. Parmi les différentes classes d’actifs et géographies, celle des actions des pays émergents se détachait notablement. Les analystes anglo-saxons soulignaient, une fois de plus, leur préférence pour les BRICs (Brésil, Russie, Inde et Chine).

Le regain de volatilité des marchés financiers a conforté le biais «Asie» de ces spécialistes de l’investissement. Plusieurs points militent en faveur de cette région du monde. Premièrement, selon les données de Moody’s, l’Asie se place parmi les économies les plus fortes. En 2018, Taiwan, la Thaïlande et la Corée du Sud auront les plus gros excédents des comptes courants, dépassant 5% de leur PIB.

En revanche, La Turquie aura le déficit du compte courant le plus important cette année avec 4,5% du produit intérieur brut, suivie par l’Argentine et la Colombie.

De plus, et vu sous un autre angle, nous constatons que le Brésil aura le plus grand déficit budgétaire en 2018 à 8% du PIB, alors que seules la République tchèque et la Corée du Sud afficheront des excédents. Toujours selon Moody’s, le Brésil se distingue également comme la nation avec le plus lourd fardeau de la dette publique à près de 80% du PIB cette année. À l’autre extrémité du spectre se trouve la Russie, avec une dette à seulement 14% du PIB.

Mais le meilleur avocat d’un investissement dans les pays émergent est actuellement Jeremy Grantham. L’investisseur de 79 ans connu pour ses opinions baissières, est si optimiste sur les actions des marchés émergents qu’il dit à ses propres enfants d’y investir plus de la moitié de leurs économies. « Ce que je détiendrais serait autant d’actions de marchés émergents que votre carrière ou vos risques commerciaux pourraient tolérer« , a déclaré Grantham, co-fondateur de GMO, la société de gestion d’actifs basée à Boston, dans une lettre le mois dernier. Parmi les points importants, il souligne un écart de croissance et un écart d’évaluation qui favorisent les pays en développement par rapport aux économies avancées.

Mais alors, comment investir dans cette classe d’actifs. Un des véhicules de choix est un ETF Emerging Markets. La composition de cet Indice/ETF que nous retrouvons aux trois premières places les pays asiatiques dont les investisseurs sont friands : la Chine, la Corée du Sud et Taiwan.

Source: MSCI

Au niveau sectoriel, les secteurs de la technologie et de la finance détiennent la part du lion. Les habitués des investissements dans les marchés asiatiques se rappelleront la forte représentation des grandes capitalisations comme Tencent ou Alibaba en Chine. Samsung en Corée et les entreprises de semi-conducteurs à Taiwan.

Source: MSCI

Mais pour un investisseur qui s’intéresserait à l’Europe il existe une sous-pondération des pays qui lui sont proches. La Russie, la Pologne ou la Turquie font partie de l’indice global des pays émergents mais leur pondération combinée n’atteint même pas le seuil des 10%.

Que faire? Une piste d’investissement se dessine avec un ETF focalisé sur la partie émergente de l’Europe. Si nous nous plions au même exercice que précédemment, nous voyons que les caractéristiques géographiques de l’indice mettent en exergue le poids de trois pays. De fait, il existe donc une surreprésentation de la Russie, de la Pologne et de la Turquie.

Source: MSCI

Une situation similaire se retrouve dans l’allocation sectorielle de ce genre d’investissement. Les secteurs de la finance et de l’énergie représentent près de 70% de l’indice.

Source: MSCI

Si un investisseur voulait se positionner dans les pays émergents européens mais sans les biais géographiques ou sectoriels des ETF, plusieurs possibilités existent. L’une d’elles serait d’acheter un fonds actif. Prenons par exemple le fonds New Europe de Quaero.

La composition du fonds est édifiante. Tout d’abord, le gestionnaire se concentre sur des sociétés de petite et moyenne capitalisation. Le fruit de sa recherche l’amène aussi à une répartition géographique divergente de celle d’un indice. Par exemple les cinq premières positions sont la Grèce (22.8%), la Russie (16.1%), la Turquie (15.1%), la Pologne (11.8%) et la Roumanie (6.7%).

Du point de vue sectoriel, les différences sont tout aussi flagrantes. Si le secteur de la finance reste important avec plus de 25% du fonds, nous retrouvons la consommation discrétionnaire (16%) et l’industrie (15.7%) en deuxième et troisième position. L’énergie ne figure qu’au septième rang avec 5%.

Alors quels sont les avantages d’un investissement dans un fonds actif ? Si nous reprenons l’exemple du fonds de Quaero nous pouvons affirmer que la plupart des titres détenus ne font pas partie d’un indice (de facto d’un ETF). De plus, si un investisseur anglo-saxon venait à vendre une géographie particulière ce ne serait certainement pas la Grèce ni la Roumanie mais certainement la Russie et la Pologne. Dans ce dernier cas, l’impact serait atténué par le fait que les plus gros détenteurs de titres polonais sont les caisses de pension de ce pays. Donc l’investissement souffrirait certes de la baisse du cours des actions mais moins que s’il s’agissait de sociétés largement représentées dans des ETF.

Cet exercice peut se répéter dans d’autres géographies et milite pour le choix de véhicules de placement passifs comme actifs. Les pays émergents sont et restent des investissements extrêmement valables mais ne peuvent, à notre avis, pas être déclinés d’une seule façon.