Le marché américain aura mis 15 mois pour finalement rater un mois. Cela faisait depuis octobre 2016 que les indices US n’avaient pas terminé un mois en négatif, c’est dorénavant chose faite. Le S&P500 abandonne donc 2.6% pour le mois, ce qui n’est finalement pas si mal compte tenu de l’état dans lequel nous étions la première semaine de février.

L’Audio du 1er mars 2018

Il n’y a pas besoin d’aller chercher bien loin pour trouver les raisons de la baisse d’hier, puisque c’est les mêmes que la baisse d’avant hier ; le témoignage de Powell qui laisse entendre – si l’on parvient à lire correctement entre les lignes – que la FED pourrait – éventuellement – peut-être – monter les taux une fois de plus que les 3 qui étaient prévues. Oui, parce qu’il y a une tradition dans le monde merveilleux de la finance : à chaque témoignage d’un patron de la FED, on a besoin de deux jours pour bien comprendre ce qu’il a dit. Ce qui est compréhensible, parce que même le patron de la FED n’est souvent pas très sûr lui-même de ce qu’il veut bien vouloir exprimer lors de son témoignage.

C’est pour ça que nous avons souvent besoin de 48 heures pour bien comprendre et bien analyser. Ce qui est d’ailleurs étonnant parce que quand il s’agit des Minutes du FOMC Meeting, il suffit en général de 8 secondes – comme la pub de chez Ovomaltine – pour analyser 3 pages de rapport et en tirer les conclusions qui s’imposent. Mais pour les témoignages des banquiers centraux, ça prend toujours plus de temps.

On ne sait jamais, si ça se trouve, ils nous mentent. Des fois.

Pourtant hier le GDP était révisé à la baisse de 0.1% et le Chicago PMI était en-dessous des attentes, ce qui aurait pu, ce qui aurait dû rassurer les intervenants puisqu’en ce moment, on est plus stressé par une hausse éventuelle de l’inflation que par un ralentissement de l’économie. Ce qui, vous en conviendrez, est plutôt paradoxal.

Non, parce que vous je ne sais pas, mais moi si j’investis dans une société qui vend des casseroles aux USA, j’espère quand même que l’économie va aller mieux pour que les « gens » viennent acheter des casseroles et que ma société va donc monter parce qu’elle vend plus de casseroles, voir même de couvercles de casseroles.

MAIS AUJOURD’HUI, NON !!! On ne veut surtout pas que l’économie aille trop bien parce que sinon on va monter les taux et si les taux montent, c’est pas cool parce que ça va arrêter de faire monter les actions et tout va se casser la gueule et ça sera horrible.

Nous voici donc dans un marché totalement paradoxal où tous les détectives de la finance que nous sommes sont à la recherche du moindre indice qui laisserait supposer que l’économie va mieux ou trop bien et que, par capillarité, la FED soit obligée de monter les taux plus que de raison, ce qui nous pousserait à tout vendre, puisqu’on le sait bien, les taux qui montent ne sont pas bons pour les actions – ce qui n’est pas forcément une vérité, mais pour être franc, nous ne sommes pas dans la réflexion, mais plutôt dans l’action. Et comme notre vision est à 20 minutes avec la concentration d’un labrador devant une assiette de croquettes, on ne réfléchit souvent pas plus loin.

Hier l’enquête était bouclée en moins de temps qu’il ne fallait pour le dire. Les chiffres économiques pointaient du doigt une économie plutôt calme – en tous cas pour le moment – mais nous continuions principalement à nous raccrocher au fait que, selon le témoignage de Powell, il se pourrait que les taux montent 4 fois cette année, contre les 3 fois qui sont attendus à 99,9% selon les experts à Wall Street. Selon les derniers sondages sur Facebook, depuis mardi, la probabilité de voir les taux monter 4 fois est de 74%.

Bref, le marché américain a terminé en baisse de 2.6% sur le mois. En Europe on a aussi fini en baisse. Mais comme on a tendance à sucer la roue des Ricains, mais que l’on fait du zèle et que l’on perd toujours plus qu’eux, le mois n’aura pas été terrible non plus sur le DAX et ses cousins, sans compter qu’en plus l’Euro/Dollar joue contre eux et que pendant que les indices américains rebondissaient, les indices européens déprimaient.

En plus de notre analyse hyper-pointue de l’économie et de notre vision des marchés à 12 secondes, hier il faut tout de même noter que l’on a commencé à s’intéresser à d’autres sujets qui concernent les sociétés individuelles… Mais comme il ne faut pas non plus aller trop vite en besogne, on a commencé a réagir à deux nouvelles qui touchaient deux secteurs, celui de la construction qui souffrait parce que les « pending home sales » étaient plus faibles que prévu, puis le secteur pétrolier parce que tout d’un coup on se préoccupait des inventaires qui étaient plus importants que les analystes avaient anticipé.

Cela fait longtemps que je n’avais plus dit du mal des inventaires pétroliers, mais ça fait plaisir de voir qu’ils sont toujours autant à côté de la plaque et que la capacité des experts en pétrole à être faux sur une estimation d’inventaire, n’a d’égal que la capacité d’un conseiller d’Etat vaudois à tenter d’optimaliser ses revenus fiscalement parlant. Pour faire simple, le secteur pétrolier baissait. Le pétrole baissait à 61.65$ et l’or est à 1315$.

Et puis Bill Ackman a vécu une belle journée. Tout d’abord il a annoncé son intention de sortir sa position en Herbalife en se faisant joyeusement défoncer et en même temps, Herbalife (ex-Ponzi Scheme selon Ackman) a pris 6% pour fêter sa victoire face au Hedge Fund manager et pendant ce temps Valeant a raté son trimestre et perdait 11%. Si Billy est toujours dedans, il se sera encore un fois fait un grand écart magistral qui doit faire mal aux adducteurs.

Celgene perdait 9% après que la FDA ait annoncé un refus sur leur médicament contre la sclérose en plaque et Hertz perdait 6% après un mauvais trimestre. Dans l’autre sens Booking (ex-Priceline) a pris 6% suite à ses chiffres, pareil chez Etsy, mais pour 20%.

Ce matin l’Asie est en baisse. Le Nikkei perd presque 2% et le reste près de 1%. L’ambiance est morose et le mois de mars commence mal. Les Cryptos sont en baisse et le Bitcoin semble buter contre les 11’000$.

Côté nouvelles du jour, il n’y a quasiment rien à dire, si ce n’est que tout le monde se demande combien de hausse de taux il y aura en 2018. Ce qui n’est pas franchement nouveau. À côté de ça, le Barron’s nous dit qu’il nous avait prévenu que les marchés allaient rebaisser – auto-congratulation quand tu nous tiens.

On ne va donc pas perdre plus de temps à brasser de l’air, surtout que ce matin il faut surtout déblayer la neige. Mais globalement tout reste basé sur l’inflation et les taux et ce que l’on en pense ou ce que l’on spécule dessus. Pour le reste, nous sommes au début du mois de mars et statistiquement et historiquement parlant, le mois de mars et le mois d’avril sont des mois super-forts pour les marchés financiers. Ça va donc être facile, après un mois de février pourri, le reste va être trop facile, pour autant que Powell ne soit pas trop « Bull » dans ses prochains témoignages… Comme celui d’aujourd’hui… Oui, parce qu’aujourd’hui il remet ça au Capitole. Il va redire la même chose que mardi, mais comme on ne comprend pas toujours la première fois, on peut craindre le pire.

Côté chiffres économiques nous aurons le GDP en Suisse, le PMI en Suisse, PMI en France et en Allemagne. En Europe il y aura aussi le chômage, les Jobless Claims aux USA, ainsi que le Manufacturing PMI et l’ISM Manufacturing PMI. Clairement les lettres PMI sont les plus utilisées du moment.

Les futures sont en baisse de 0.2% et moi je vous retrouve demain si je ne suis pas sous une avalanche. Que la force soit avec vous. Et les chaînes à neige aussi.

Thomas Veillet
Investir.ch

“It’s Not Whether You Get Knocked Down, It’s Whether You Get Up.” –Vince Lombardi