La première chose qui me vient à l’esprit, si je prend un peu de recul sur ce qui se passe depuis quelques semaines, c’est que nous avons quand même de la chance que les marchés ne peuvent pas aller à droite ou à gauche. C’est déjà largement assez compliqué en ayant la possibilité d’aller uniquement en bas et en haut.

L’Audio du 27 avril

Donc nous voici au troisième jour après avoir franchi la barre des 3% de rendement sur le 10 ans US. Comme prévu, pas grand-chose n’a changé. Les dinosaures n’ont pas repris le pouvoir, aucun tremblement de terre n’a englouti Los Angeles, Trump est toujours Président et François Hollande continue de faire la promotion de son bouquin en disant du mal de Macron.

En conclusion, les 3% n’ont pas changé la face du monde, même si on a eu droit à deux sell-off à cause de cette thématique et globalement les marchés sont plus haut que quand nous passé cette « limite fatidique ». D’ailleurs ce matin nous sommes à 2.96% de rendement et tout le monde s’en tape comme de leur première cravate.

Non, la préoccupation c’est les résultats de la tech américaine qui surprend tout le monde à la hausse. Pourtant on savait que les chiffres de ce trimestre seraient bons. On avait d’ailleurs tout prévu, puisque comme on savait déjà tout en avance parce qu’on était trop trop forts. Depuis quelques jours on avait même commencé à prendre l’habitude de vendre à chaque fois que les chiffres étaient trop bons.

Surtout que l’on savait presque à coup sûr que les chiffres de la tech seraient bons, mais que ça serait probablement la dernière, parce qu’il y a trop de problèmes à l’horizon, que l’an prochain on sera en récession, que le business modèle de Facebook semblait avoir des problèmes, qu’Amazon était trop gros, que les semi-conducteurs étaient en difficulté depuis les annonces de Taïwan Semi’s d’il y a quelques jours, qu’Apple ne vendait (presque) plus d’iPhone et que bref, les FAANG’s étaient morts, surtout après les chiffres moyens publiés par Google.

Pour faire simple, cette fois on savait que lors de cette saison des résultats, on avait atteint un sommet qui nous empêcherait probablement d’aller plus haut surtout que l’on était certain que l’histoire de Facebook qui vend des données privées (qui sont affichées au grand public depuis 15 ans) allait tuer la poule aux œufs d’or.

Bon, je vous le dis tout net, tout ce que l’on croyait, eh ben on a tout cru faux. Mais pas qu’un peu.

Quand on regarde les chiffres de Facebook publiés mercredi soir, on se rend compte que ce que l’on attendait, ce que l’on prévoyait, était juste complètement à côté de la plaque. Le titre a fini en hausse de plus de 9% hier soir à New York, mettant tout le monde d’accord sur le fait que c’est pas parce que Facebook vend des données et que l’on s’est ENFIN rendu compte, que la boîte gagne moins de fric. Encore une fois, on s’est fourvoyé mais qu’un peu et Facebook nous a fait un tsunami de short covering. On pense amicalement à Jeff Gundlach qui est venu il y a trois jours pour annoncer son « idée » de l’année en shortant Facebook. Amen.

Et puis ce n’est pas tout. Hier on s’est massivement rendu compte que les chiffres du trimestre étaient non pas bons, mais excellents un peu partout. Soudainement, alors que nous avions entamé cette « saison des résultats » en regardant les publications avec l’angle de vue du verre à moitié vide, voici que depuis 48 heures, on le regarde à moitié plein et on se fout totalement de la tronche du 10 ans.

Enfin, peut-être pas totalement, mais pas loin.

Hier l’Europe a terminé en hausse parce que le dollar se renforce et que c’est une bonne nouvelle pour les exportatrices européennes (vieil argument bateau qui fonctionne toujours) et en plus Draghi n’a rien dit de nouveau à la réunion de la BCE. Il n’est pas cassé le cul, il a repris le même discours que la dernière fois, il n’a pas changé un mot, juste la date en haut du fichier word.

Mais par contre, toutes les stars de la stratégie économique, tous les visionnaires de la politique de la BCE et toutes les Madame Irma de la finance ont tous un avis sur ce qu’il va dire d’ici juin ou juillet ou août ou je-ne-sais-pas-quand, pour annoncer la fin du QE. J’ai passé 22 secondes a lire toutes ces théories d’anticipation basées sur du vent et du marc de café et je me suis rendu compte que c’était à peu près aussi intéressant que le mode d’emploi de mon aspirateur, j’ai donc cessé de lire, mais j’en ai quand même retenu que tout le monde a un avis mais que personne n’est sûr de rien et à la fin c’est l’Allemagne qui gagne.

Bref, l’Europe a terminé en hausse. Et puis les USA aussi parce que les chiffres du trimestre, ils étaient trop bons et que le 10 ans il est repassé sous les 3% et que Facebook c’est trop cool comme boîte, d’ailleurs tout ceux qui ont « annulé leur profil en guise de protestation » sont revenus dessus et ont publié de nouvelles photos de vacances privées seulement pour leurs 814 amis mais que « bien sûr » personne d’autre ne pourra voir. En plus de Facebook, on notera les chiffres canons d’AMD, de Ford et surtout de Chipolte, qui a pulvérisé les attentes et bondissait de 24% alors que la plupart des analystes galopaient derrière pour augmenter leurs estimations de bénéfices futurs, qui sont quand même plus facile à calculer « après » qu’avant…

Et puis on est soulagé aussi de voir que l’Américain moyen n’est pas gêné de retourner manger dans un restaurant qui aura surtout été connu pour ses problème de bactérie e.coli ces derniers mois, plutôt que pour sa troisième étoile au guide Michelin. On a les restos qu’on mérite.

Et puis au-delà des chiffres canons du trimestre annoncés hier, je ne vous dis même pas ceux qui ont été annoncé APRÈS la clôture.

Le dollar se renforce puisque ce matin l’Euro/Dollar est à 1.21 et des poussières. Le support des 1.22 a donc cédé et la logique voudrait que l’on aille directement à 1.1940. Comme le dollar est fort, l’or est faible. Oui, parce que depuis quelques jours, on est revenu à la bonne vieille théorie de la corrélation ÉVIDENTE entre l’or et le dollar. Ce matin le métal jaune est à 1317$. Le pétrole hésite. L’interprétation des nouvelles n’est pas facile alors on hésite. On ne sait pas encore si le fait que l’Iran s’énerve est bon ou pas pour le baril, alors en attendant on est juste sous les 68$.

Le Bitcoin n’a pas bougé de plus de 1’000$ depuis 48 heures et on est inquiet pour son état de santé. Là tout de suite, il vaut environ 9’200$ à 500$ près.

L’Asie est en hausse un peu partout suite à la hausse de Wall Street hier soir, mais aussi suite au fait que les deux patrons des deux Corées se sont serré la main au milieu des mines et des barbelés de la zone démilitarisée. La poignée de main a été longue et chaleureuse en signe de détente. On se sent tout de suite bien plus décontracté avec toute ces pétales de roses qui pleuvent sur les deux Corées, oublié le nucléaire, oublié la dictature et oublié les exécutions sommaires au missile sol-sol ou au canon anti-char. Kim Jong Un Dos Tres est un type bien qui sera sûrement invité à la désalpes en Gruyère l’an prochain et il devrait même être le président d’honneur de l’Unicef en 2019 et candidat au prix Nobel de la Paix cet automne.

La Chine est en baisse, mais qui se préoccupe encore de la Chine quand le reste va trop bien ?

Côté nouvelles du jour, on va faire simple ; hier soir après la clôture, il y a eu les publications du trimestre de Microsoft, Amazon et Intel. Les trois ont publié des chiffres stratosphériques (surtout Amazon), les trois explosaient au « hors bourse » après la clôture (surtout Amazon).

Pas besoin de vous faire un dessin pour vous expliquer que l’interprétation que nous faisions des chiffres du trimestre ces derniers jours a drastiquement changé depuis hier. Si la logique est respectée, Amazon devrait ouvrir au plus haut de tous les temps et comme d’habitude, c’est le Cloud qui tire les chiffres à la hausse. Visiblement, les FAANG’s ne sont pas morts, Microsoft non plus et les Semi-conducteurs ont montré – entre AMD hier et Intel aujourd’hui, qu’il ne faudrait pas les enterrer trop vite.

Dans les autres nouvelles qui interpellent, on notera que Trump a amené la Coupe du Monde de Football à un nouveau niveau de politique internationale, puisqu’il a déclaré (sur Twitter) que les pays qui ne supporteraient pas la candidature des USA (conjointe avec le Canada et le Mexique) pour l’organisation de la Coupe du Monde en 2026 – s’exposeraient à des sanctions économiques et politiques.

Vive le sport. Il paraît que l’important c’est de participer.

L’autre candidat à l’organisation c’est le Maroc, mais ça ne paraît pas bien emmanché sans compter que des voix s’élèvent parce que les droits de l’homme ne seraient pas respectés de manière exemplaire au Maroc.

Oui, c’est vrai. Surtout qu’en Russie – ou se jouera la Coupe du monde dans six semaines – les droits de l’homme sont inscrit dans la constitution et gravés dans la pierre de la Place Rouge et qu’au Qatar, où la Coupe du Monde ira en 2022, on sait tous que les droits de l’homme sont une priorité. Reste à définir ce qu’est un homme. Quand aux droits de la femme, on n’a pas le droit d’en parler… ça n’a rien à voir avec la finance, mais je crois que sur ce dossier on se fout un tout petit peu de notre gueule…

Pour le moment les futures sont inchangés. On attend le GDP en Angleterre et le GDP aux USA. Puis toujours une avalanche de chiffres trimestriels, même si ça sera plus calme aujourd’hui, parce que c’est vendredi et qu’il n’y aura pas grand-chose « après clôture ».

Autrement, grande nouvelle, nous sommes vendredi, ce soir c’est le week-end, on va pouvoir parler d’autre chose et si ça se trouve le 10 ans va rester sous les 3%, ce qui devrait nous soulager et nous permettre d’apprécier comme il se doit le barbecue du week-end.

Profitez-bien et on se retrouve lundi, comme d’habitude. On va commencer le mois de mai, on va parler du « Sell in May and go away », mais avant toutes choses, on va parler des ponts et du premier mai qui est à moitié fermé.

Bref. À lundi.

Thomas Veillet
Investir.ch

« The difference between stupidity and genius is that genius has its limits. »
Albert Einstein