Tout d’abord, nous sommes vendredi. Et le vendredi, tout est permis. Je vais donc me permettre de faire assez simple ce matin et dire franchement ce que je pense. Et puis ensuite, comme c’est l’anniversaire du Krach de 1987, je vais me jeter à couvert, juste au cas où le hasard ferait bien les choses pour une fois.

L’Audio du 19 octobre 2018

Donc voilà. Globalement je suis de nature plutôt « Bullish ». J’ai toujours préféré les marchés qui montent que les marchés qui baissent. Ce n’est pas par conviction ou par certitude que ça ne peut QUE monter et que je suis convaincu que les arbres finiront pas monter au ciel, NON !

Bull ? Pourquoi ?

Non, si je suis je suis « bullish », c’est que « tendanciellement », le marché monte. Pas besoin d’avoir fait de hautes études pour s’en rendre compte. Lors de mon premier jour travail dans une banque, en 1987, le Dow Jones valait autour de 2500 points. Hier soir, nous avons terminé à 25400. En 31 ans, le marché a été multiplié par 10.

Et encore, je ne parle que du Dow Jones. Et au travers de ces 31 ans, nous avons eu le krach de 1987, les crises de 96-97. La bulle internet, le 11 septembre, la crise des supbrimes, sans parler de la « crise grecque »… Mais le marché a été multiplié par 10.

Alors je veux bien écouter, les Roubini’s, les Faber’s, les Bannister’s, les Edward’s et les autres oiseaux de mauvaise augure, mais si l’on me dit que dans 25 ans, le marché sera 10x plus haut et que c’est plus ou moins probable à 85%, çe me suffit amplement pour me faire tatouer un taureau sur l’épaule, plutôt qu’un ours.

Tout ça pout vous dire que je suis plutôt d’obédience bovine que plantigrade.

Pour ceux qui me lisent depuis bientôt 13 ans, vous l’aurez compris.

J’aime pas

Autant vous dire que je ne suis pas friand de ces périodes que nous vivons, comme ces jours, où le marché se fait démonter un jour sur deux et que l’autre jour sur deux, on a Roubini qui descend du ciel sur un chariot couvert de roses tiré par deux ours, pour venir nous annoncer que la fin du monde est proche et que l’on va tous mourir dans d’atroces souffrances.

Mais cependant, il faut aussi savoir admettre qu’un marché ne peut pas monter directement au ciel sans s’arrêter. On l’a vécu en 2000 et nous avons été assez stupides pour acheter n’importe quoi à n’importe quel prix, pour autant que l’on y ait collé un « dot-com » à la fin. Moi en premier.

Ces périodes, comme celle qui dure depuis bientôt deux semaines, ne sont que moyennement drôles à vivre. C’est un peu comme quand vous lâchez un chien dans un troupeau de moutons. Si le chien n’est pas entraîné ; dans les minutes qui suivent vous aurez des moutons qui courent dans tous les sens et votre troupeau ne ressemblera plus à rien.

Les moutons, aujourd’hui, c’est nous.

Bêêêêêêh !!!

À la moindre « alerte » ou « déclaration » qui n’irait pas dans le sens d’un « bull market aveugle » ; une hausse des taux confirmée ou non, un signe d’inflation évident ou pas, un journaliste égorgé ou pas, une guerre économique qui s’intensifie ou pas ; le marché part dans tous les sens comme s’il avait enfin compris quelle direction il devait prendre pour les siècles à venir – amen.

Sauf que non.

Encore une fois, merci à la médiasphère et au facteur moutonnier, puisque nous avons cette capacité à paniquer un jour parce que « les taux vont monter » et partir en hurlant et en courant dans tous les sens comme si on nous annonçait l’arrivée imminente d’un tsunami sur le lac de Genève – ou le lac Léman – dépend où vous êtes nés.

Alors que le lendemain, on va tous se précipiter dans le marché comme des bœufs sous prétexte que les chiffres d’une boîte américaine du fin fond la Californie étaient meilleurs que prévu, ce qui justifie du même coup la croissance mondiale, la pérennité des dividendes de la TOTALITÉ des compagnies côtées dans le S&P et aussi le fait que le pétrole ira à 400$ ou à n’importe quel niveau que le dernier idiot de service invité sur CNBC aura décidé de citer après l’avoir joué aux fléchettes.

Same player shoot again

Tout ça pour vous dire qu’hier nous nous sommes encore fait une journée « au secours on va tous mourir », parce que, je cite : « les intervenants étaient inquiets au sujet de la hausse des taux et de la croissance globale ».

Un peu comme ils l’était il y a 4 jours, mais pas il y a trois jours, puisqu’il y a trois jours on était trop chaud-bouillants parce que je-ne-sais-plus-qui avait publié un bon trimestre et que du coup la TOTALITÉ des membres du Nasdaq et du Russell 2000 et du CAC40 allaient faire de même. Sans parler du DAX et du SMI.

Alors quand je regarde le marché au travers du prisme immédiat de mes chroniques matinales, quand je me lève à 4h30 du matin pour relire la presse, analyser mes graphiques et regarder des vidéos de chatons sur Facebook, je me dis que parfois, on a quand même tendance à se comporter un peu comme un animal de bassecour qui vient d’être décapité. Une capacité à tenir toutes les théories et leurs contraires en l’espace de 24 à 48 heures.

Et encore, 24 à 48 heures, c’est quand on parle de long terme.

La fin est proche

Et pendant ces périodes où la fin du monde s’approche, où l’on se dit que l’on va stocker du riz, des pâtes, des six packs d’Evian et construire un abri sous-terrain au fond du terrain de jeu en bas de l’immeuble, plus personne (ou presque) n’est capable de prendre du recul et de jeter son iPhone afin de consulter son portefeuille une fois par mois et pas 12 fois par minutes – pour voir si entre deux si personne n’a lancé un take-over sur Nestlé, Roche et Novartis EN MÊME TEMPS !!!

Nous avons la tête dans le guidon alors qu’il suffirait d’éteindre les écrans, d’arrêter d’écouter le troupeau de débiles qui défile sur CNBC – puisqu’ils n’en savent pas plus que vous – et revenir dans trois semaines, quand ça sera plus calme.

Parce ne vous y trompez pas nous sommes en train de faire exactement la même chose qu’en février : le marché va dans tous les sens, pour les mêmes raisons et dans 15 jours quand Trump aura gagné les mid-terms et qu’il annoncera qu’il négocie avec la Chine, on ne saura plus quoi faire pour « acheter » le marché et on aura oublié les journées à 25% de volatilité et les poules qui courent dans toues les sens parce qu’elles ont aperçu un renard de l’autre côté de la clôture…

Pour être franc, je ne sais pas ce qui va se passer dans 15 jours, mais si j’ai appris une chose au cours de ces 31 dernières années – en plus du fait que personne sortira vainqueur du grand jeu de la vie et qu’on va tous y passer à la fin ; c’est que ce genre de moments sont temporaires et que pendant ces instants de panique ou de semi-panique, on n’arrive plus a réfléchir clairement – c’est aussi pour ça que le marché devient encore plus débile que le reste de l’année.

Bref, on a baissé

Tout ça pour vous dire qu’hier les marchés ont baissé parce que nous avions des craintes sur la croissance mondiale et sur la hausse des taux.

Tout comme il y a 4 jours, pas comme il y a trois jours. On n’a pas aimé que la Chine baisse de 2% pourtant elle a perdu 28% depuis le début de l’année déjà, vous croyez sincèrement que ce sont les 2% d’hier qui vont changer la donne ?

On a aussi appris que Philip Morris a publié de bons chiffres, que Novartis a racheté Endocyte pour 50% plus cher et que la Banque of the Ozarks a complètement foiré son trimestre et perdait 17% hier soir after close.

Mais sérieusement, vous allez démonter votre portefeuille et partir ouvrir un maison d’hôtes en Provence parce que la Banque of Ozarks a raté son trimestre ???

Si l’on résume donc la journée d’hier, on peut dire que l’on a baissé pour les mêmes foutues raisons pour lesquelles nous avons baissé depuis 10 jours et que si l’on rebondit ce matin, c’est pour les mêmes raisons idiotes qui nous ont fait « rebondir » il y a trois jours.

Et qu’est-ce qu’on fait maintenant ?

Je serais donc assez tenté de vous dire : « Cassez-vous en vacances ! » – ça tombe bien, C’EST LES VACANCES ! Alors, allez prendre l’air ailleurs, changez-vous les idées et faites autre chose que de regarder votre iPhone et les cours de la bourse toutes les 12 secondes, ça ne va rien changer dans l’immédiat en revanche, dans trois mois c’est moins sûr.

Dans les nouvelles du jour, vous allez voir comme ça nous change la vie : Trump pense qu’il semble que Khashoggi est mort – c’est clair que sans la tête et sans les doigts, ça va marcher beaucoup moins bien. De plus un des suspects qui bossait pour le gouvernement dans cette affaire, serait mort dans un accident de voiture en rentrant au pays. Pas de bol quand même.

Autrement, il semblerait que les investisseurs soient nerveux au sujet de la dette italienne et du budget du même pays. Surprenant, ça c’est de la nouvelle de toute dernière bourre et on voit bien que l’on est à fond techniquement. Pendant ce temps, le FT parle de l’inquiétude qui grandit en France parce que « les talents » quittent le pays. Quand on voit le gouvernement de clowns que Macron met en place, sans parler de l’enfer fiscal local, on se demande bien pourquoi.

Lapalissade

Grosse nouvelle de la journée : le CEO de Goldman Sachs déclare que la grande majorité du « sell-off » de ce mois et la faute du trading électronique et de ces – excusez-moi du terme – de ces putains d’algos. D’ailleurs à ce propos, je vous refais la promesse : le prochain krach, ça viendra d’ici. Il ne faudra donc pas revenir la gueule enfarinée en disant : « ah ben on l’avait pas vu venir celui-là… »

Et pour terminer, ce matin la Chine a publié un GDP en-dessous des attentes. On attendait 6.6% et il est sorti à 6.5%. On sent un net ralentissement de la croissance du côté de la Chine et il est vrai qu’à ce rythme-là, si les Allemands se motivent, ils devraient pouvoir rattraper le taux de croissance de la Chine d’ici environ 825 ans. Malgré la « mauvaise nouvelle », la Chine est en hausse de 0.65%, alors que le Japon recule de 1.2% pour les mêmes raisons que les USA hier…

La peur de la croissance qui ralentit, les taux qui montent et le réchauffement climatique.

Non, je déconne pour le réchauffement climatique.

Côté chiffres économiques, nous n’aurons rien et pour les publications du trimestre nous aurons Manpower, Schlumberger et Volvo. Ou pour parler plus simplement : rien non plus ou pas grand-chose.

Investissement factoriel

Ceci mis à part, je suis ravi de vous annoncer qu’au cours des 2 prochaines semaines nous publierons une série de 7 articles rédigés par Invesco et dédiés à l’investissement factoriel.

Si vous êtes comme moi et que ça ne vous parle pas trop, ces articles sont faits pour vous aider à mieux comprendre cette nouvelle approche de l’investissement qui se situe entre la gestion active et passive. Et pour tous ceux qui seront intéressés, il y aura même une conférence sur le sujet le 28 novembre. Il vous suffit de scroller et bonne lecture.

Et en attendant, bonnes vacances et à lundi – oui, parce que malgré le fait que ce marché est totalement débile, je vais quand même rester fidèle au poste. Aussi parce les machines (le trading électronique) ne prend pas de vacances, lui…

Bon week-end, bon vendredi et essayez d’éteindre votre smartphone pendant 2 heures, ça ne peut pas vous faire de mal.

Thomas Veillet
Investir.ch

“Only buy something that you’d be perfectly happy to hold if the market shut down for 10 years.”
– Warren Buffett