Il y a des jours comme ça où TOUT VA MAL. Il y a des jours où tout va mal, mais normalement mal et puis des jours où tout va VRAIMENT très mal.

L’Audio du 8 février 2019

Hier c’était une journée comme ça, une journée à la fin de laquelle on se sent comme Rocky quand il vient de se faire tabasser par un grand russe de 2m10 et que son visage ressemble à du steak haché, mais qu’il arrive quand même à appeler Adrian.

Cherche le chien ! Cherche !!!!

On peut chercher des bonnes nouvelles, mais mis à part le fait que la température est en train de remonter et que ce soir c’est le week-end, ce n’était franchement pas facile.

Commençons d’abord par l’Europe.

L’Europe va mal. Des journées comme hier on pourrait même carrément dire « très mal ». Pour être franc, ce n’est pas non plus une surprise, on sentait quand même bien que depuis quelques temps, la photo économique de l’Europe était un peu moins glamour – sans compter que l’entente est tout de même moyenne et que le repas de famille se finit tout de même souvent en s’envoyant les assiettes à la gueule – et surtout que Draghi ressemble de plus en plus à un cocker spaniel déprimé à chaque discours de la BCE.

Mais hier l’impression qu’il y avait de l’eau dans le gaz en Europe, s’est matérialisée un peu plus avec la publication du bulletin économique de la BCE.

Un rapport qui donne envie de prendre la mer

Quand on lit le contenu du rapport en question, on se demande même s’il n’a pas été rédigé aussi négativement pour encourager les migrants à reprendre le bateau dans l’autre sens, tellement c’est moche.

Pour faire simple, 2019 sera pourri en terme de croissance. Si vous avez été déçu par le ralentissement Chinois, dites vous qu’en comparaison, l’Europe est en marche arrière avec le pied coincé sur la pédale d’accélérateur.

Mais s’il ne fallait résumer l’information en une seule phrase, il suffirait de dire que la BCE a réduit la croissance 2019 de 1.9% à 1.3%.

Paf, ça, c’est fait..

Et c’est pas tout

Et encore, si vous lisez les opinions de certains économistes, ils estiment que la BCE est bien trop généreuse. Inutile de vous dire que l’ambiance était au delà de la morosité, même les boîtes de suppositoires au prozac qui circulent sous le manteau dans les salles de trading du Vieux-Continent, ne suffisaient pas à maintenir le moral des troupes.

À ça, vous rajoutez le fait que l’Allemagne a publié des chiffres de la production qui, je cite : « chutaient de manière inattendue pour le quatrième mois consécutif »…

Encore une fois, rien vu venir… what a surprise

Je fais vite une parenthèse, mais je dois dire que J’ADOOOOOORE quand on écrit des trucs comme ça. « Chutait de manière inattendue », non parce que sérieusement, ils attendaient quoi de ces chiffres ??? Que l’Allemagne veuille sortir de l’Europe pour pouvoir monter ses propres taux en Deutsche Mark parce chez eux l’inflation est galopante et que le reste de l’Europe est un boulet et que ça les freine ???

Oui, bon, c’est vrai que le reste de l’Europe est un boulet pour l’Allemagne, mais quand même, qui est surpris que les chiffres de la production industrielle soient en baisse, surtout le lendemain que Daimler ait coupé son dividende parce que je cite : « ça va pas trop bien »…

Le nez au milieu du visage

Nous avons une facilité pour être surpris par des évidences, que des fois je me demande si certains professionnels de la finance sont pourvu de la capacité d’analyse, voire même si ils savent lire, pour certains.

L’Allemagne va mal et c’est toute l’Europe qui s’enrhume. Non, en fait cette phrase, je l’ai écrite juste parce que ça fait joli, mais l’Allemagne va mal et le reste de l’Europe c’est pire. Sans compter qu’hier, l’Angleterre a également réduit ses prévisions de croissance à 1.2% – chose qui n’avait plus été vu depuis la crise des subprimes.

Alors soit, l’Angleterre n’est plus dans l’Europe, mais ça pèse sur le moral quand même.

Le cocker

Là dessus, vous rajoutez le fait que Macron nous fait un caca nerveux parce que Di Maio a rencontré des Gilets Jaunes et qu’il a rappelé son ambassadeur et en l’espace de 24 heures, on a compris que l’Europe, c’était pas rose…

Du côté des publications du trimestre, c’était également pas terrible en Europe avec Publicis qui a perdu 15% après un trimestre au-delà de pourri et la Société Générale qui plongeait de près de 7% après avoir annoncé que la suite serait merdique. Un peu le même discours que l’autre banque que j’ai pas le droit de citer, mais avec un traitement différent par le marché.

À la fin de la journée le DAX se faisait démonter de plus 2.6%, l’Italie suivait de près et la France s’en sortait brillamment avec une baisse de 1.8% seulement.

Moins mal là bas

Aux USA, l’ambiance n’était pas forcément meilleure, même si le résultat final est nettement moins mauvais.

Aux States on a pris note du fait que l’Europe était au bord du gouffre et se préparait à faire un grand pas en avant et on l’a moyennement bien pris. Il faut dire que deux fois par année les USA prennent conscience du fait que l’Europe existe.

En 2019, la première fois c’était hier et la prochaine ne devrait pas se reproduire avant la fin du mois de septembre, quand l’Italie annoncera qu’elle quitte l’Europe après exprimé sa volonté de construire un mur de séparation avec la France qui partira de San Remo et remontera directement à Aoste.

Y a de la route à faire

Puis ensuite les Ricains se sont concentrés sur les négociations avec la Chine qui pourraient être plus compliquées et plus longues que prévues. Il faut dire qu’hier, Kudlow – le type qui explique l’économie à Trump tous les jours – Kudlow a annoncé que les négociations avaient encore « pas mal de route à faire avant d’aboutir »… Le marché n’a pas aimé.

Il y a dix jours Wilbur Ross, le Secrétaire du commerce avait dit qu’elles étaient à kilomètres d’aboutir, le marché n’en a eu strictement rien à foutre et 10 jours plus tard on nous qu’il y a encore de la route à faire, mais sans donner d’information sur le kilométrage et le marché n’aime pas.

On voit bien que le marché a le même déficit d’attention que les politiciens qui siègent au parlement européen.

Pour faire bon poids, bonne mesure dans l’ambiance d’hier, Trump a également exclu de rencontrer Xi-Jinping avant la « deadline » du premier mars, donc valait mieux vendre.

Accroche toi au pinceau, j’enlève l’échelle

Et puis on est vachement embêtés, parce que le marché est monté jusque-là pour trois raisons :

1) les négociations qui se passaient bien et qui se finiraient forcément bien
2) Powell qui est un type trop cool qui va soutenir l’économie
3) La saison des résultats qui se passe bien et qui démontre que tout va bien chez Trump au Pays des Merveilles

Mais quand tu supprimes les négociations, parce que tout d’un coup on est dans le désert et que le GPS n’arrive plus à capter le satellite, qu’on se rend compte que Powell a tout de même à peu près tout dit et qu’il est peu probable qu’il baisse les taux et qu’il verse 2’000$ de prime à chaque américain à la fin du mois et que la saison des résultats est presque finie, on se demande quand même à quoi on va se raccrocher si on nous retire l’échelle maintenant…

Bref, les USA baissaient et vivaient leur première vraie séance de baisse de 2019.

Tchip, tchip.. mais en secret

Au passage on notera que Twitter a publié ses chiffres hier. Le site de micro-blogging a annoncé un profit, mais pas de bol pour eux, ils ont aussi annoncé une baisse des utilisateurs et que d’ailleurs, au fait, ils ne publieraient plus ces chiffres à l’avenir. Ils ont copié Apple, mais ils ne sont pas Apple et le titre s’est pris 10% dans l’oiseau bleu.

Pour le reste, ce matin le Nikkei se prend 2% dans les gencives en sympathie avec le reste du monde, la Chine est toujours en train de se bourrer d’alcool et de boulettes de cochon à la vapeur pour fêter la nouvelle année et l’or ne fait rien, pendant que le pétrole a de la peine à l’allumage et revient sur les 52$.

Les restes de la veille

Pour les nouvelles du jour, il y a eu tellement d’informations à digérer hier, que ce matin on est encore en train de manger les restes et ce ne sont pas les histoires de cul de Jeff Bezos qui se serait fait hacker par un journal concurrent du Washington Post qui va changer la face du monde.

Nous allons continuer l’analyse angoissante de l’Europe qui ralentit – Ô surprise – des négociations chinoises qui n’aboutissent pas assez vite et du fait que l’heure de gloire de Powell se fane quelque peu et à moins qu’il invente une cure contre le cancer dans la semaine, ça ne sera pas simple.

Côté chiffres économiques nous aurons le chômage en Suisse, le Trade Balance en Allemagne qui sera … devinez quoi ??? … tout pourri, et puis en France nous aurons les « non-farm payrolls » durant lesquels on apprendra que ça va pas top et qu’il vaut mieux aller bosser en Italie. Et puis, pour les chiffres du trimestre, ça se vide lentement, en plus nous sommes vendredi, il n’y a donc plus grand-chose à attendre de ce côté-là.

Pour le moment les futures sont en baisse de 0.5% et ça donne déjà une bonne idée de l’ambiance à venir. C’est peut-être l’occasion de monter skier plus tôt.

Excellent week-end à tous et on se retrouve lundi pour la suite des aventures de l’économie européenne…

À lundi !

Et puis, j’ai oublié de vous dire, mais merci pour l’avalanche d’emails d’hier pour me souhaiter un « bon anniversaire de 13 ans de chroniques boursières »… !!!

Thomas Veillet
Investir.ch

“Stupidity isn’t punishable by death. If it was, there would be a hell of a population drop.”
― Laurell K. Hamilton