Magnifique journée de hausse sur tous les marchés du monde, avec un prix spécial du jury pour l’Europe. Mais est-ce ça que l’on appelle vivre dans un monde de contes de fées ?

L’Audio du 19 Juin 2019

Sentiment négatif

Selon le tout dernier sondage de Bank of America, jamais depuis 2009 les investisseurs et autres « Fund Managers » n’ont été si « Bearishs » sur le marché. 10 ans que l’on n’avait plus eu aussi peur que ça se casse la gueule.
Je n’ai malheureusement pas trouvé la date exacte à laquelle le sondage a été fait en 2009, mais je ne suis pas loin de penser que ça avait dû être autour du mois de février, quand nous étions à 666 sur le S&P500, soit 2300 points plus bas qu’aujourd’hui.

L’esprit contrariant

Alors que faire de ce chiffre ? Le prendre comme un fait et avoir peur ? Ou le prendre à l’envers et jouer l’effet contrariant ? Pour être sincère, j’aurais tendance à ne pas faire comme tout le monde, juste pour rester éloigné de la foule.
Et puis je n’ai jamais été trop convaincu de la théorie des « krachs annoncés ». Je trouve que c’est très surfait et que ça ne marche pas toujours très bien. Pour ne pas dire jamais.

En tous les cas, la journée d’hier aura drastiquement tranché avec le sondage précité.

Enthousiasme sur tous les fronts

Encore une fois, nous nous sommes reconcentrés sur les sujets de base : la Trade War, les taux et….les taux.

Côté Trade War, c’était encore une fois chez Twitter qu’il fallait chercher la news. Le Président Trump a donc annoncé qu’il avait « eu une bonne conversation avec Xi Jinping » et qu’ils allaient se voir à Osaka dans 10 jours. Non sans ajouter que leurs « teams respectifs » allaient bosser en amont de ce meeting. Autant dire que le ton décontracté et encourageant a immédiatement injecté une bouffée d’optimisme dans les marchés. Restait plus que les taux.

Ce soir c’est ton soir Jerome

Dans l’engouement de la journée d’hier, avec l’optimisme exacerbé qui flottait dans l’air, soudainement on se sentait pousser des ailes. Alors oui, on sait que le meeting de la FED ne prend fin que ce soir, mais après tout, soyons fous ! On va partir sur le principe que la FED ne va pas décevoir en ne faisant rien. Au pire, ils ne baisseront pas les taux ce soir, mais exprimeront concrètement leur intention de le faire en juillet, ce qui revient presque au même.

Ce soir il va donc falloir confirmer. Monsieur Powell, on compte sur vous, parce qu’hier on a déjà pris un crédit sur l’argent que l’on devait éventuellement peut-être toucher ce soir. C’est un peu prendre une avance sur salaire alors que l’entreprise est en plein plan de licenciement. C’est gonflé.

Draghi veut reprendre la main

Mais ça n’était pas tout ! Non contents d’être soudainement optimistes, sur la Trade War, d’être confiant sur le fait que la FED ne va pas nous faire un enfant dans le dos – même si on peut raisonnablement se poser la question de savoir si c’est bien malin de baisser les taux alors que, potentiellement Trump pourrait mettre fin à cette Trade War dans 10 jours – mais c’est une autre histoire et nous serions déjà un pont trop loin.

Donc, non contents de tout cet enthousiasme, Draghi s’y est également mis, puisque le patron de la BCE – en direct de sa retraite portugaise où il prospecte pour sa prochaine retraite tout en envisageant une éventuelle défiscalisation – le banquier centraliste a déclaré que la BCE « avait encore de la place pour baisser les taux ET soutenir l’économie ». Il n’a rien fait. Il a juste dit que si il voulait, il pourrait.
Et tout a explosé.

Du vert, partout du vert

Pour faire simple nous étions en hausse partout et sur tout. Les USA terminent à 1% des records historiques, le Dow Jones n’avait jamais vécu un aussi bon mois depuis….1955 et le Nasdaq depuis l’an 2000. En Europe on était au bord de l’orgasme boursier et tout allait bien dans le meilleur des mondes.

Ça allait tellement bien, qu’on a même préféré ignorer le fait que Trump a mal pris les annonces de Draghi et estiment que les Européens veulent profiter des USA. Autant vous dire que même si l’on règle le cas de la Chine dans les 10 jours, les prochains sur la liste, c’est les Européens. Mais pour l’instant, on s’en fout et l’Europe terminait en hausse de 2%. Stimulus théorique oblige.

Du vent

Loin de moi l’envie de gâcher la fête, surtout que visiblement les caisses de champagne sont déjà bien entamées, mais il faudra tout de même noter que toute la hausse d’hier ne s’est faits que sur des mots, des espoirs et des anticipations théoriques. À un certain moment, il va quand même falloir passer à la pratique, parce que c’est bien beau les discours d’anticipation, mais ça ne va pas faire bouillir la marmite, ni faire pousser du caviar sur les arbres.

Ce soir, il va donc falloir délivrer, sinon on va nous reprendre le jouet qu’on nous a filé hier et ça serait bien que dans 10 jours Trump nous fasse un scénario hollywoodien type « « Happy End », ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants, histoire de passer à autre chose, parce que sinon les gens qui ont répondu au sondage de Bank of America vont finir par avoir raison.

Pétrole & Gold en folie

Autrement, alors qu’hier je trouvais dommage que le pétrole ne remonte pas, ce dernier a finalement craqué et est reparti à la hausse. Ce matin le baril vaut 54$ et c’est pour les mêmes raisons ; il semblerait que les traders aient apprécié le tweet de Trump. L’or ne s’arrête plus de monter et d’être une valeur refuge. Le métal s’échange à 1347$.

Et pour compléter ce tableau parfait qui ressemble presque à une prise massive de LSD ou à une série américaine, on retiendra que ce matin l’Asie est en hausse un peu partout. Plus timidement en Chine, mais le reste s’envole dans tous les sens, victimes de la même maladie que dans le reste du monde hier : l’optimisme-euphorique.

Trade War Made in Europe

Dans les nouvelles du jour, on reparle beaucoup de ce soir, mais on parle aussi des remarques de Trump sur Draghi et sur le fait que les prochains, c’est l’Europe. Je dois dire comme l’Europe veut couper la Bourse Suisse aux investisseurs européens parce qu’on ne fait pas ce qu’ils veulent, je me réjouis presque de voir ce que Trump va leur mettre dans les dents. Il y a comme un air de revanche.

On aborde aussi le sujet du Libra, la nouvelle crypto de Facebook qui est cette fois « officielle », le nom fait un peu penser à la révolution dans un pays d’Amérique Latine, mais si tous les membres de Facebook s’y mettent – entre deux selfies en string sur la plage – Zuckerberg pourrait bien devenir un banquier central plus important que Draghi et Powell dans le même corps.

Finalement ça décolle

Alors qu’hier on pleurait pour Boeing, ils ont finalement signé un gros contrat au Bourget. Et sur des 737 max en plus. Un contrat de 24 milliards qui tombe à point. Et puis Renault et Nissan semblent enfin proche de trouver un accord sur leurs désaccords. Ce n’est pas encore gagné, mais la presse de ce matin fait état de « bonnes avancées ».

On retiendra également que Boris Johnson est bientôt Premier Ministre en Angleterre et on se dit que si même lui y arrive, tout est possible, même trouver un accord pour le BREXIT.

Minus zéro

Au niveau des taux, le 10 ans français est passé en rendement négatif. Tout va bien. Les rendements s’effondrent, l’or monte, l’économie ne peut plus avancer sans soutien des banques centrales, mais les bourses montent sur des théories hypothétiques. Ce monde est formidable. Sans compter que Trump a lancé hier soir sa campagne pour sa réélection et qu’il va gagner.

La bonne nouvelle c’est que cette chronique s’arrête-là, puisque je n’ai même pas besoin de vous dire ce que nous attendons de ce soir. Passez une très belle journée et rappelez-vous de la phrase du jour à répéter en boucle :

« Jerome, ON COMPTE SUR TOI !”

Thomas Veillet
Investir.ch
« Dieu vous a donné un cerveau. Faites de votre mieux avec. »
Clint Eastwood