Ce qu’il y a de bien dans la finance c’est qu’on ne s’arrête jamais. Même quand tu penses que t’as touché au but, y a toujours un truc qui te reviens en pleine figure et qui t’emmène au bout du suspense.

L’Audio du 15 octobre 2019

INCERTITUDE

Pour faire simple, hier les marchés ressemblaient à une plaque de beurre que l’on aurait laissé sur le tableau de bord d’une voiture noire en plein soleil sur un parking en plein été : mou, coulant et fondant. J’aurais aussi voulu placer « incertain », mais je ne suis pas convaincu que cela soit un qualificatif valable pour un paquet de beurre fondu.

En tous les cas, l’incertitude est un état descriptif convaincant pour les marchés d’hier. Il faut dire que l’on a une confiance toute relative dans ce qu’il se dit sur Twitter et sur CNBC, surtout si c’est Trump qui le dit.

Une poignée de main n’est pas une signature

En tous les cas, l’annonce du Président Trump comme quoi la « première étape du Trade Deal » était dans la poche aura fait long feu, on ne se sera pas excité longtemps. À peine le soufflé de l’annonce retombé, les premiers doutes ont commencé à arriver sur les téléscripteurs et les pigeons voyageurs délivraient des interrogations qui provenaient surtout de la rédaction du service de presse de Bloomberg.

Pour faire simple, il y a des journalistes qui ont émis des doutes sur la qualité et la véracité véridique de l’annonce de Trump. En effet, il semblerait que l’on s’autorise à penser dans les milieux autorisés que les Chinois ne sont pas 100% contents de la soi-disant première étape du Trade Deal, ils auraient quand même voulu que les Américains s’engagent à NE PAS AUGMENTER les tarifs en décembre. Et il semblerait que peut-être éventuellement – c’est même pas sûr – que Trump ne s’engage à rien dans cette première étape. C’est bien ce qui me semblait au premier abord, mais les Chinois s’en sont rendus compte et du coup ; rien n’est simple et l’incertitude nous tombe dessus comme un immeuble de 30 étages qui s’effondre par grand vent.

Le Chinois vont pinailler avant de signer

Selon différents rapports secrets et confidentiels, mais rien d’officiel, les négociateurs Chinois voudraient négocier encore avant de signer le deal final dans 4 semaines lors d’un sommet au Chili. Trump a, pour sa part, martelé le fait que les Chinois allaient acheter pour 50 milliards de produits agricoles américains, mais les détracteurs, qui sont mieux informés que vous et moi, estiment que c’est que du vent. Les Chinois étant spécialistes pour ne pas tenir ce genre de promesses.

Pour faire simple, la bonne nouvelle du Trade Deal à l’air de décevoir tout le monde est de nous mettre dans une incertitude terrifiante, pire que quand il n’y avait pas de deal.

Journée molle et à moitié fermée

En résumé, à la place de faire la fête les places de bourse mondiales se sont comportées comme la plaque de beurre citée plus tôt dans cette chronique. Les USA ont terminé légèrement en baisse alors que la moitié des intervenants étaient restés à la maison pour fêter l’arrivée de Christophe Colomb aux USA et marquer le début de la dépossession des terres des indiens d’Amérique (ça c’est juste pour la polémique) et en Europe ont terminait encore un peu plus dans le rouge, puisqu’en plus de l’incertitude du Trade Deal, on avait aussi l’incertitude du fameux et de l’inimitable BREXIT – parce que OUI, nous ne sommes pas encore vendredi, ce n’est pas signé, ce n’est accepté et ce n’est pas validé par les 27 pays qui croient encore à l’Europe et TOUT PEUT ENCORE ARRIVER.

Vous l’aurez compris, l’incertitude reste de mise et les traders, les gérants, les investisseurs, les professionnels de la finance, les passionnés d’économie, les gourous des krachs boursiers et les prédicateurs financiers N’AIMENT pas l’incertitude.

En Asie : pareil

Ce matin, dans une débauche TOTALE d’originalité absolue, l’Asie « merdouille » de la même manière que l’Occident et pour les mêmes raisons. La Chine et Hong Kong sont légèrement en baisse, Hong Kong qui ne tient pas ombrage des dernières remarques de Xi Jinping qui a utilisé des mots pour décrire la manière avec laquelle il allait écraser la rébellion qui laissaient à penser que les cafards étaient nettement mieux considérés que les manifestants de Hong Kong dans les yeux du numéro un chinois.

Le Japon est le seul marché qui monte de 1.7% pour la bonne et simple raison qu’ils étaient fermés et qu’ils ont raté la hausse de la fin de semaine et qu’il fallait bien « rattraper le retard ». Pendant ce temps, l’or ne fait rien et le pétrole rebaisse un peu puisqu’il était monté à cause de la croissance mondiale qu’allait générer ce Trade Deal 1.0 – du coup, s’il y a des doutes sur la validité ou la véracité de ce Trade Deal, la croissance est immédiatement remise en question… donc le pétrole baisse. Trop facile la logique de la finance mondiale.

Les nouvelles du jour

Dans les nouvelles du jour, on parle beaucoup de l’affaire Turquie-Syrie-Kurdes et Trump. Le Président Américain semble être sur le point de bombarder la Turquie de sanctions économiques afin d’empêcher le dégénéré qui est au pouvoir d’aller raser la région du Nord de la Syrie. Erdogan qui couine à qui veut l’entendre qu’il est membre de l’OTAN et qui tout le monde devrait l’aimer et le supporter… Sans compter que l’on ne sait plus trop ce qui se passe avec les membres de Daesh qui courent dans tous les sens depuis le début de l’histoire. Mais que l’on ne s’inquiète pas trop, l’arrivée de la saison des résultats sur les marchés financiers devrait rapidement noyer le poisson. En attendant, Trump vient de stopper les négociations avec la Turquie et monte les tarifs sur l’acier de 50%.

Au chapitre BREXIT, alors que tout semblait sur le point d’être réglé cette semaine, depuis hier tout à l’air de se compliquer et soudainement, ça n’est plus « dans la poche ». On est vraiment content de pouvoir conserver cette histoire jusqu’au bout du suspense, sinon on ne sait vraiment pas comment nous ferions pour remplir les pages 3 et 4 du FT chaque matin. Le seul souhait que j’aimerais émettre, c’est que le dernier épisode soit mieux fini que celui de Game of Thrones.

Mais encore

Ce soir nous aurons le lancement officiel des chiffres trimestriels, il y aura ceux de JP Morgan, de Citigroup et de Goldman Sachs. Ces trois-là sont attendus au tournant, sachant que l’on s’attend au pire, vu que le secteur ressemble plus au centre-ville d’Alep qu’à la Bahnhofstrasse à Zurich. Et puis Bill Gross l’ex-roi du marché obligataire recommande la méfiance à cause de la croissance molle dans laquelle nous sommes. Il recommande aux investisseurs de privilégier les actions qui paient des dividendes au détriment des investissements avec des rendements négatifs. Tu m’étonnes.

Pendant ce temps Facebook émet des doutes par rapport à la Libra – le maître des réseaux sociaux est de moins en moins convaincu que sa crypto monnaie verra le jour en 2020, sans compter que les défections des « partenaires » de Facebook dans cette histoire, sont nombreuses. Le dernier en date à avoir quitté le navire est Booking.com. Au chapitre du Trade Deal, Mnuchin prévient que s’il n’y a pas de Deal en place, les tarifs monteront.

Je vais vous dire ; on n’a pas fini d’en parler de cette histoire à la con. Dernière nouvelle d’importance : si vous vous demandez ce qu’aurait été un bon investissement cette année, ce n’était pas dans la Biotechnologie, ni dans l’intelligence artificielle, non ! Il suffisait d’acheter du porc. Le porc est en hausse de 70% depuis le début l’année. Ça devrait au moins faire baisser le cholestérol.

Chiffres économiques

En ce qui concerne les chiffres du jour, mis à part les bancaires qui publieront, il y aura le PPI en Suisse, le CPI en France le ZEW en Allemagne et Europe. Puis le patron de la Banque d’Angleterre parlera – on peut raisonnablement estimer qu’il va ENCORE nous dire que tant qu’il n’y a pas de BREXIT, il ne fera rien. Carney a probablement le meilleur salaire du milieu pour ne pas foutre grand-chose.

Aux USA il y aura aussi le New York Empire State Manufacturing Index.

Ce matin les futures sont en hausse de 0.25% et pour être franc, on ne sait plus quoi faire, ni quoi penser. On aimerait bien savoir si ce deal c’est du lard ou du cochon, mais au prix du porc, on se pose des questions.

Passez une belle journée. Ayez une pensée pour Goldman Sachs si leurs chiffres sont décevants, ils n’ont pas l’habitude. Que la force soit avec vous et on se retrouve demain pour meubler 4 pages de chronique sans trop savoir où on va.

Thomas Veillet

Investir.ch

« Y’a de plus en plus de cons chaque année. Mais cette année, j’ai l’impression que les cons de l’année prochaine sont déjà là. »

Patrick Timsit