L’Asie, par ricochet, est de plus en plus concernée.

L’arme monétaire, financière, l’extraterritorialité du droit américain et l’hégémonie technologique permettent aux États-Unis de maintenir leur hégémonie. D’autres administrations, Démocrates, les ont aussi utilisés, plus ou moins, afin de poursuivre la doctrine d’endiguement ¨containment¨ de leurs principaux rivaux. Pour Trump, le concept de rivalité s’est enrichi et doit s’entendre dans son sens le plus large, militaire, économique, technologique, monétaire, etc. Le Canada (le Mexique) a pu le constater dans le cadre de la renégociation des accords commerciaux nord-américains. L’Arabie Saoudite et la Turquie aussi, dans une moindre mesure. Les innombrables polémiques liées au financement de l’OTAN sont de la même veine. Le tour de l’Europe pourrait bien venir, avec l’Allemagne en point de mire.

Plus étonnamment, le continent asiatique, objet de tous les espoirs et convoitises, participe à la ¨fête¨ du Donald. En effet, la stratégie de pivot stratégique des intérêts américains vers l’Asie (qui s’était accélérée avec Obama) laisse place au repli stratégique. Le Japon est notamment dans le viseur. La Corée du Sud aussi. Il ne suffit plus d’être un allié docile pour éviter les foudres de l’unilatéralisme Trumpien. Au cours des dernières années, Séoul n’a cessé de confirmer son allégeance à Washington. Elle a accepté un accord commercial bilatéral clairement à son désavantage. Elle s’est conformée à la stratégie erratique de Trump face à Pyongyang, autorisé sans broncher une augmentation de 8% pour 2019 du coût de la protection militaire américaine pour le maintien d’environ 30’000 soldats sur son sol. Que Nenni! La semaine dernière, l’administration américaine a présenté sa «nouvelle» facture 2020, en multipliant le montant par 5! Cela exaspère tellement les sud-coréens que Séoul a annoncé des pourparlers de sécurité avec… la Chine pour discuter de la stabilité régionale.

La politique de l’administration Trump est source d’instabilité. Elle empoisonne le climat des affaires de toute la région. Les relations entre la Séoul et Tokyo se sont dégradées l’été dernier. Ce n’est pas une bonne nouvelle pour les conglomérats sud-coréens qui dépendent de la haute technologie (composants électroniques) du Japon. La situation à Taiwan est très complexe et à peine plus positive. Le président taïwanais, Tsai Ing-wen, résiste fermement à Xi. Donald Trump n’a pas respecté les usages en félicitant Tsai directement après son élection, menaçant ainsi de reconsidérer la politique d’une seule Chine. La trêve, qui dure depuis plusieurs décennies dans le détroit de Taiwan, est précaire. Taïwan se trouve aussi entre le marteau et l’enclume au niveau business, car très dépendante de la Chine et des États-Unis. Par exemple, Taiwan dispose d’un avantage technologique confortable dans le domaine hautement stratégique des semi-conducteurs haut de gamme. Incidemment, TSMC est le fabricant principal de Huawei …

La loi sur les droits de l’homme et la démocratie de Hong Kong, qui vient d’être adoptée par le Sénat américain, a logiquement été ratifiée par Trump (le Congrès l’aurait déjugé s’il avait essayé…). Cela ne facilitera pas ses négociations commerciales. On suivra tout ceci de très près, car l’ancienne colonie britannique n’a jamais été aussi proche de l’insurrection/ de la guerre civile depuis la rétrocession de 1997. La susceptibilité de Pékin est à fleur de peau. On le constate, premièrement, avec l’annonce du comité permanent selon laquelle le Congrès populaire national de Chine – et non les tribunaux de Hong Kong – possède, seul, le pouvoir de statuer sur la constitutionnalité de la législation de Hong Kong. Deuxièmement, le parti communiste vient de dénoncer les intimidations contre les candidats du gouvernement lors des élections des conseils de district de Hong Kong.

Pékin va probablement jouer le pourrissement tant que Shanghai et Shenzhen ne seront pas en mesure de rivaliser avec Hongkong comme hub financier. Une stratégie du temps long pourrait s’articuler autour d’une modification de l’équilibre démographique de l’île (afflux de chinois continentaux) et de convertibilité du Yuan. Les communistes en auront-ils vraiment le temps ?

Progression du vote pro-démocratie à Hongkong

En conclusion

  • Trump déstabilise (aussi) l’équilibre régional asiatique. Un accord commercial – dit de phase 1, donc a minima – ne résoudra rien.
  • Xi affronte de multiples et importantes pressions, qui vont se poursuivre à moyen terme.
  • La prospérité économique de la Grande Chine et la bonne tenue de ses marchés ces prochains trimestres sont incertaines.
  • On restera prudent et sélectif, pour le moment, en investissant dans cette région.

 

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