Pendant quelques heures les marchés semblaient avoir enfin retrouvé une sorte de calme. On se contente de peu, mais après ce que l’on vient de vivre depuis 3 semaines, lorsque l’Europe finit en hausse de 2% et que le Dow Jones et le S&P500 bougent de moins de 1%, on a l’impression de pouvoir enfin respirer normalement. Cependant, il ne faut pas s’emballer, le marché reste tendu comme un string et peut nous faire n’importe quoi n’importe quand. Hier soir il faut tout de même noter que si l’on fait le bilan, on commence à apprécier les plans de sauvetage économiques lancés aux 4 coins de la planète et on dirait presque que l’on a cessé de prendre ça comme une justification pour tout vendre.

L’Audio du 20 mars 2020

 

Télécharger le podcast (.mp3)

Ne nous emballons pas

Il ne faut pas non plus s’emballer, nous ne sommes de loin pas sortis de l’auberge qui est fond du trou tout au fond des bois. On ne va pas non plus partir en live parce que nous avons vécu une journée à peu près normale après une douzaine de séances type « grand huit ». Mais il faut dire que ça fait du bien, même si en regardant les flux de liquidités, on voit bien que le marché reste un champ de bataille qui s’en est pris plein la gueule depuis trop longtemps et qui tente de retrouver un semblant de vie normale. La plupart des gros ETF’s ou des gros fonds ont vécu des sorties de capitaux massives et on se demande à quel moment on va vraiment réussir à inverser la tendance.

Le jeu du moment est d’essayer de prédire à quel instant les investisseurs vont décider que le « pire » sera dans les prix et qu’il sera une bonne idée de revenir dedans à nouveau. Pas simple à prédire, surtout quand on regarde les nouvelles et les réseaux sociaux, puisque nous sommes en mode anxiogène version « hardcore ». On n’ose presque plus regarder les infos tellement ça fout la trouille et que c’est angoissant, mais en même temps, on ne voudrait pas rater LA bonne nouvelle, s’il y en a une. En tous les cas, on commence à se dire que le marché a une bonne chance de trouver un fond à ce KRACH, bien avant que les confinements se terminent et bien avant que le Coronavirus soit vaincu. Le marché a toujours joué un rôle «d’indicateur avancé » et il ne devrait pas y faire exception cette fois.

Point d’inflexion, oui mais lequel ?

Ce que tout le monde cherche, c’est le signal. Le signal qui nous dira peut-être que « c’est maintenant » qu’il faut y aller parce que le pire n’est pas loin d’être atteint et que les pays qui sont en avance sur l’épidémie montrent qu’ils atteignent le pic de contagion – comme la Chine l’a fait – et comme l’Italie ne semble plus très loin de faire. Pour ce qui est de la Suisse, on en est encore loin, puisque nos autorités hésitent à prendre des mesures fermes et définitives et continuent de demander poliment aux gens d’être raisonnables. Ce qui ne fonctionne visiblement pas, puisque c’est la catastrophe au Tessin et qu’à voir le nombre de gens qui se baladent en ville comme si ce confinement était un mois de vacances payées par les employeurs qui donne l’occasion d’aller faire des barbecues au bord du lac, on n’est visiblement pas au bout du tunnel, enfin pas tant que l’on n’aura pas fait comprendre aux cons le concept du confinement total.

La Suisse ne sera donc sûrement pas observée comme point d’inflexion, puisqu’on sera vraisemblablement le dernier pays qui sera encore en quarantaine quand les autres en seront sortis – parce qu’on est trop forts en Suisse, plus que les autres – mais bon, la n’est pas la question, disons plus simplement qu’hier les bourses mondiales se demandaient soudainement si « quelque part par-là », il ne serait pas intéressant de se poser la question des valorisations et se dire qu’en partant du principe qu’on n’allait pas tous mourir – il serait peut-être bon de penser à faire un peu de shopping. La ligne de support reste encore très ténue, mais disons que l’impact des mauvaises nouvelles semble un peu moins violent – hier la Californie a annoncé son confinement total et les marchés n’ont pas bronchés. La même chose il y a dix jours et on se faisait hara-kiri sur le floor du New York Stock Exchange à Wall Street. Bon, en même temps là on peut plus, ils ont mis le floor en quarantaine pour cause de COVID19.

On se pose des questions

Alors on se pose des questions. En appréciant le calme relatif de la séance d’hier on pouvait presqu’entendre les cerveaux de certains qui se disaient : « Should I stay or Should I go now ? ». La cicatrisation n’a même pas encore commencé que l’on peut sentir les chasseurs d’opportunités qui tournent autour des bourses mondiales. Pourtant ce n’est pas gagné. Loin de là. On peut encore se faire une belle série de mauvaises nouvelles avant de voir le vrai fond. L’hésitation reste bien présente et le doute reste le « maître mot ». Hier soir les Républicains ont proposé un plan de soutien au peuple américain qui pourrait représenter plus de 1 trillion de dollars et des paiements individuels de 1200$ par personne. Cash. Ce genre de nouvelle est généralement mal prise ces derniers temps, puisque c’est censé représenter un mouvement de panique de la part des gouvernements, mais pour la première fois, après une brève hésitation à la baisse, les futures sont repartis à la hausse, on est peut-être pas encore aussi calme que ça. Mais on essaie de progresser.

L’Asie

Ce matin les Japonais sont en congé (en plus du confinement) et le Nikkei ne fait donc rien. Par contre l’ensemble du reste de l’Asie est fortement en hausse, Hong Kong et la Corée entre autres. La Chine reste calme avec une hausse d’un demi-pourcent.

Le pétrole est en mode rebond depuis deux jours. Après avoir frisé les 20$ il n’y a pas si longtemps, le baril remonte et se payait 27$ très tôt ce matin. Ce qui montre bien que la volatilité des marchés continue d’afficher une forme resplendissante. Le VIX se balade toujours autour des 72% et le VDAX est à 76%. Pour ceux qui pensent que le fond du trou n’est pas si loin, commencez à envisager des ventes de puts – des occasions comme ça ne se présentent pas toutes les semaines – et pour ceux qui ne comprennent pas ce que c’est une vente de puts – je donne des cours moyennant de tarifs d’avocat. Petit détour par l’or qui se traite à 1485$ et qui ne comprend pas pourquoi personne ne l’aime dans cet environnement pourri.

Nouvelles du jour

Même si l’on a vécu une journée de calme, il n’est pas facile de trouver des nouvelles qui ne sont pas liées à ce virus de merde. On notera tout de même que Trump semble d’accord de soutenir des plans de « bailout » pour les compagnies aériennes, même si l’on sait tous qu’il soutiendra à peu près tout ce qui lui donnera une chance d’être réélu – et même si la n’est plus le sujet, ça va se compliquer sérieusement pour lui et pour les USA – parce qu’avoir vécu 4 ans avec un débile et élire par défaut un autre débile qui peine à comprendre le concept de l’eau tiède, les Américains ne méritaient peut-être pas ça. L’avantage c’est que nous on a Parmelin, et vu le niveau, ces deux-là, ils devraient se comprendre, pour autant que Parmelin ait enfin réussi à commander au McDo en anglais.

Ceci mis à part on parle toujours beaucoup des ETF’s et des ventes massives qui commence à poser problème et qui commence sérieusement à devenir inquiétant. Comme d’habitude, il nous aura fallu en arriver là pour comprendre que laisser des monstres tels que BlackRock et Vanguard prendre la totalité du marché ou presque aurait forcément des conséquences. Il est intéressant de noter que l’on se dit qu’à la fin de chaque krach ou correction massive, on a besoin d’une faillite monumentale. Alors peut-être que cette fois, ça sera l’implosion d’un énorme ETF qui sera le signal. Ou alors la faillite d’une pétrolière.

Chloroquine et les cons du jour 

Pour prouver que malgré l’épidémie et malgré la soi-disant solidarité dont tout le monde est censé faire preuve, le capitalisme est toujours bien vivant. Rising Pharmaceuticals, une société basée dans le New Jersey et qui produit la Chloroquine – un anti-malaria qui est supposé aider dans le traitement du Coronavirus, aurait délibérément doublé les prix de vente de son médicament au mois de janvier alors que la crise frappait la Chine. Ce qui veut dire deux choses : 1) ils savaient déjà que leur médicament avait un potentiel dans la lutte contre le Coronavirus et 2) il serait intéressant que le CEO de la boîte se fasse cracher dessus par une centaine de patients positifs au COVID19, ça devrait le détendre pour le pricing de son médicament.

Autrement Elon Musk a finalement fermé ses usines après s’être accroché au volant plus longtemps que de raison et surtout après avoir mis en doute la gravité du virus avec des « tweets » dont il a le secret. Et puis les crypto-monnaies sont en plein délire aussi, puisqu’après s’être fait massacré ces deniers jours, le Bitcoin a repris 16% hier. On retiendra aussi que Verizon a constaté une hausse de 20% du trafic sur le net et que NetFlix a réduit les débits de son streaming vers l’Europe pour éviter la saturation. Manquerait plus que NetFlix saute et ça deviendrait vraiment compliqué sans les tutos de Walking Dead.

On va terminer cette chronique en vous recommandant encore une fois de rester chez vous et d’appliquer les consignes que l’on vous balance 22 fois par heure à la télé et à la radio. Ça ne fait pas plaisir, mais ça permettra au moins de raccourcir cette situation de confinement à terme. Et que si vous préférez penser que vous êtes invincible et que tout ça ne s’adresse pas à vous, ben désolé, vous n’êtes pas invincible, vous êtes juste con.

Passez tout de même un excellent week-end, normalement ça devrait être assez calme et au moins on sait que les bourses ne bougeront pas. Moi je vous retrouve lundi sans faute pour essayer de trouver des choses intelligentes à raconter, ce qui promet de ne pas être simple.

À lundi.

Thomas Veillet

Investir.ch

 

“If you’re going through hell, keep going.”

Winston Churchill