Après avoir passé toute mon après-midi à faire de l’hyperventilation dans un sac en papier, Trump a finalement décidé de trouver les mots pour rassurer le marché. Le Président qui murmure à l’oreille des marchés et des traders a laissé entendre qu’il allait mettre en place des mesures extraordinaires pour soutenir les marchés durant la crise du Coronavirus. On n’a pas trop de détails sur ce qu’il va faire exactement, mais on peut imaginer qu’il va taper dans le fiscal, kidnapper les enfants de Powell pour le forcer à baisser les taux, organiser des expéditions punitives chez tous les investisseurs qui voudront « shorter » le marché et placer des snipers sur les toits des banques afin d’abattre tout analyste qui oserait faire un commentaire négatif.

L’Audio du 11 mars 2020

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Le plus grand et le plus long grand-huit du monde

Aujourd’hui, la question n’est pas tant de savoir ce que les gouvernements vont faire, mais plutôt QUAND est-ce qu’ils vont le faire. Parce qu’à voir le comportement des marchés, on est carrément convaincus que l’on ne s’en sortira pas tout seul. Les intervenants ont perdu toute notion de la réalité et la violence des mouvements depuis plus de deux semaines pousse à se demander s’il y a vraiment des gens derrière les réactions des bourses mondiales ou est-ce que c’est juste des super-ordinateurs qui se rejouent « Wargames » version 2020. En tous les cas si vous avez passé (comme moi) la journée à observer le comportement des indices mondiaux et que vous êtes parvenus à le faire sans vomir, c’est que vous pouvez devenir pilote de chasse et que les brusques changement d’altitude et de direction ne vous font pas peur.

La journée avait pourtant commencé de manière presque euphorique, avec la plupart des indices européens dans le vert foncé – tout le monde était encouragé par deux chose :

  • Le fait qu’après des grosses baisses comme celles de lundi les marchés remontent TOUJOURS – les statistiques ont parlé
  • Trump avait déjà commencé son coaching sur l’aspect fiscal

Pourtant plus on s’approchait de l’ouverture de New York, plus l’Europe se montrait faible et démotivée. Puis quelques heures avant l’ouverture américaine les futures sont repartis de plus belle à New York – à un certain moment ils étaient même en hausse de près de 5% et la confiance revenait. C’était l’heure de la seconde vague – c’est un peu la descente verticale du grand-huit après 3 minutes de montée. En quelques minutes les marchés passaient d’hyper-bull à panique baissière. Selon CNBC les espoirs des stimulus diminuaient. Non parce que ce que vous ne savez pas, c’est qu’il y a un baromètre placé dans une pièce secrète quelque part à New York – un baromètre qui donne le niveau d’espoir des investisseurs.

Même joueur joue encore

Bref, en l’espace de quelques minutes, nous passions de 5% de hausse à légèrement négatif. Je crois même qu’on pouvait retenir son souffle durant la baisse tellement ça a été vite. Ce qui est assez drôle, c’est que ça a plus ou moins coïncidé avec la clôture des marchés européens. Comme d’habitude, serais-je tenté de dire. L’Europe terminait donc au fond de la tasse avec l’envie de fermer les marchés pour deux semaines et de s’enfermer dans une pièce sans fenêtre pour le lire la biographique de Jerome Kerviel et le recueil de poèmes de Bernie Madoff.

À partir de 17h30 heure de Paris, les Américains ont commencé à confier leurs âmes à Donald Trump qui devenait dorénavant le nouveau Messie des marchés financiers. Après tout, c’était lui qui nous avait amené jusque-là, le Coronavirus a probablement été développé par la CIA pour discréditer les Chinois, c’est donc à lui de nous en sortir. À 22h la bourse américaine terminait en hausse de près de 5%. Une hausse de 5% mais avec la tête qui reste tout de même bourrée de questions :

  • Est-ce qu’on a vu les plus bas ?
  • Si oui, est-ce que l’on va remonter direct ou est-ce que ça va prendre des mois ?
  • Si non, c’est où les plus bas ?
  • Est-ce que le soutien des gouvernements ET des banques centrales va suffire ?
  • Est-ce que les taux négatifs et les injections monétaires sont des bonnes choses pour l’économie ?
  • Est-ce que Roger Federer va regagner un jour un grand tournoi ?
  • Est-ce que Macron a le droit de rendre visite à Brigitte malgré que les EMS ne veulent plus que l’on vienne voir les résidents ?

Enfin que des trucs importants. Et que des questions pour lesquelles on peut répondre « peut-être » – sauf la question sur les injections monétaires et les taux négatifs, là on peut clairement dire qu’à force de manipuler le marché et l’économie, les bourses mondiales vont finir par aller dans le mur. Un peu comme l’abus de chirurgie esthétique peut donner lieu à des aberrations comme les frères Bogdanov.

B comme Bilan

À la fin de la journée, les Ricains terminaient en forte hausse, alors que l’Europe restait au plus bas et au fond du trou. On pourrait imaginer que l’Europe va rattraper son retard ce matin, mais comme les futures US sont déjà en baisse de 3% – on peut déjà prévoir que l’on n’est pas encore descendu du wagonnet et que l’on devrait repartir pour un tour de « Space Mountain » la tête à l’envers et avec des huîtres pas fraîches dans le ventre. Ce qui devrait d’ailleurs nous permettre de répondre à la première question que l’on se posait plus haut : Est-ce que l’on a vu les plus bas ? en disant sans se tromper que ce n’est pas vraiment certain.

En tous les cas les gourous de la finance qui se bousculent sur les plateau télé, les réseaux sociaux et les chaînes médicales, ne laissent aucun doute sur le sujet : on est bloqué sur un ring avec Tyson Fury et tant qu’on n’a pas réussi à le mettre KO, va falloir encaisser les coups. Le Coronavirus reste un des sujets d’actualité. Pardon, reste LE SUJET d’actualité et toutes les théories sont dans la nature. Ça va mieux en Chine, mais selon les experts en courbe de progression, on a encore rien vu en Europe, ni aux USA. L’Italie est toujours en quarantaine et le déguisement à la mode pour Halloween sera clairement le masque de protection – si on arrive jusque-là.

Le pétrole va mieux

Du côté pétrole ça va (un peu) mieux. Actuellement le baril se traite à près de 35$ et depuis que les Saoudiens et les Russes se parlent à nouveau, on a un peu d’espoir. L’or est à 1663$ et ce matin l’Asie est dans le rouge, à l’image des futures. Hier nous sommes montés sur du vent et des « expectatives », ce matin on aimerait quand même voir un peu de concret. Le concret a été mis en doute par des politiciens américains qui estiment que les propositions fiscales de Trump ne tiennent que péniblement debout et dans le concret on attend aussi de voir ce que Lagarde va faire avec la BCE, mais ça c’est jeudi.

Et puis entre vous et moi, quand on voit la gueule de la BCE et l’état de l’économie locale, on se demande bien ce qu’ils vont pouvoir faire. Non, parce que mis à part envoyer par la poste un chèque de 10’000 Euros à chaque européen avec l’obligation de le dépenser dans les 15 jours ou sinon il transmettra le Coronavirus, on voit assez mal quelles sont les solutions qui s’offrent à Lagarde – au-delà des incantations et des prières collectives.

Nouvelles du jour

Dans les nouvelles du jour, on retiendra que Biden a mis la pâtée à Sanders dans les primaires du Michigan et que Sanders a annulé un meeting politique à cause du Coronavirus – il faut dire qu’il fait clairement partie des victimes potentielles. Le nombre de personnes contaminées aux USA vient de passer la barre de 1000 personnes et le gouverneur de l’Etat de Washington vient d’interdire les rassemblements de plus de 250 personnes – mieux que la Suisse carrément. Par contre ailleurs, ils peuvent continuer les matchs de NBA avec 80’000 fans.

Autrement, l’UBS estime que l’on a vu le pire en terme d’épidémie de Coronavirus. On est donc content de savoir que dans certaines banques, en plus d’être des demi-dieux de la finance, ils maîtrisent le côté épidémiologique. Ce matin l’Australie plonge de 3% et s’il y a une certitude à laquelle nous pouvons nous raccrocher ; c’est que la période « volatile » n’est pas encore derrière nous, même si le pire de l’épidémie est passé. Pendant ce temps les Chinois s’opposent au fait que l’on puisse appeler ce virus le Wuhan Coronavirus, parce que selon eux il pourrait ne pas provenir de Chine. Ça semblait pourtant clair vu qu’ils sont les seuls à manger du pangolin ou à se faire des infusions de chauve-souris. À moins que ce soit encore un coup de la CIA.

Chiffres économiques – c’est quoi ça ?

Dans l’hypothèse où ça intéresse encore quelqu’un, il y aura le PPI en Italie. Je suis à peu près certain que c’est LE chiffre que tout le monde attend. Mais ce n’est pas tout, il y aura aussi la production industrielle et manufacturière en Angleterre, sans oublier le Trade Balance. Puis aux USA, ça sera le CPI et le fait que les futures sont déjà en train de se faire défoncer ce matin.

On retiendra aussi que l’on est à 113’000 personnes infectées et 4’000 morts, dans la foulée, le festival de Coachella a aussi été repoussé – pourtant entre ce qu’ils prennent et où ça se déroule, on se demande bien comment un virus pourrait y survivre. Tout ça pour vous dire que l’on n’est pas encore sorti de l’Auberge, qui au fond d’un trou au fond d’un bois…

Passez une très belle journée, dans 10 jour c’est le printemps et la chaleur va lui faire la peau au Coronavirus qui ne vient pas de Chine. On se retrouve demain, si vous le voulez bien.

Thomas Veillet

Investir.ch

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