Même si plus ça va plus on se rapproche d’un truc qui fait penser que Benny Hill et Kermit la Grenouille étaient quand même des types sérieux à l’époque, il faut reconnaître que ça reste tout de même super-intéressant d’observer les marchés boursiers en ces temps troublés. Hier, que vous soyez Européen ou Américain, la perception des informations liées à la crise du COVID n’était de loin pas la même. Après près de 4 mois de crise, on est content de voir qu’en fonction de là où tu vis, ta compréhension de la crise est complètement différente et puis ça fait plaisir de voir que – des fois – l’Europe a son libre arbitre, même si ça ne dure jamais longtemps. Et puis il y Navarro – pas le commissaire – mais il est presque aussi drôle à la fin.

L’Audio du 23 juin 2020

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Ça va, ça vient

Commençons tout d’abord par la fabuleuse journée de bourse que nous avons eue hier et le fait que l’on ait dû gérer les annonces de l’OMS en fonction de là où l’on vivait. Alors tout d’abord, l’OMS c’est l’organisation mondiale de la santé, c’est un truc qui dépend de l’ONU, donc un truc dont les Américains se méfient. Enfin, surtout leur Président. Mais les Américains ont tendance à faire un peu comme le Président il dit, tout con-con qu’il puisse être, il reste le Président. C’est important pour la compréhension de la suite.

Donc, l’OMS a annoncé ce week-end que l’on avait recensé 183’000 cas de Coronavirus ces derniers jours. Bien que le nombre de morts n’augmente uniquement dans des pays comme l’Inde, l’Organisation Mondiale de la Santé estime que la pandémie est loin de s’arrêter et, qu’au contraire, elle accélère. Cette nouvelle a donc jeté un coup de froid sur les marchés européens qui  passaient une sale journée. Même si, 183’000 personnes ça ne représente « que » la ville de Bâle ou de Reims dans le grand Est finalement. Il faut donc quand même relativiser, mais on sentait le stress en Europe, le CAC40 refusait de casser les 5’000 à la hausse pour la cinquième fois en 5 séances et le DAX terminait en baisse de 0.5% en se demandant qui était le débile qui avait bien voulu laisser entrer Wirecard dans le Dax. La fraude à la mode en Allemagne étant encore une fois en baisse de 44% et s’approchant d’un fort support dans la zone de zéro.

Make America Great Again

En gros, journée déprimante en Europe. On voit que le COVID n’en finit pas et on entendait même parler de pays qui pourraient retourner en confinement, alors qu’une seconde vague semble se profiler en Corée du Sud. J’imagine qu’à ce moment très précis, on commence à se demander si c’était vraiment « smart » d’aller manifester dans tous les sens ces dernières semaines – l’avenir nous le dira. Mais pendant que l’Europe déprimait et s’angoissait au sujet du COVID avec les mêmes nouvelles et la même ambiance, les traders américains trouvaient moyen de finir en hausse et d’acheter le marché. Oui, parce que pendant qu’en Europe on se voyait déjà de retour en confinement et que j’en profitait pour aller acheter des packs de 800 rouleaux de PQ vendus en duo-pack avec des pâtes Barilla, les Américains affichaient un optimisme exacerbé, se montrant confiant sur le fait que l’économie va, JE CITE : « rapidement récupérer de cette crise du Coronavirus » – il fallait le dire vite, parce que pour le moment ce n’est pas super-frappant, mais l’optimisme était de mise et cela semblait suffire amplement. Les chiffres de l’immobilier publiés hier étaient horribles et CNN laissaient entendre que plus de 4 millions de ménages n’ont pas payé leurs charges hypothécaires le mois dernier. Mais peu importe LE MARCHÉ, dans sa grande mansuétude continuait sa marche en avant en estimant que « lorsque l’on sera sorti de tout cela, les gens ressortiront acheter des maisons dans tous les coins et que ça va bien se passer ».

Oh Happy Day

Oui, sauf dans le Sud, pare ce que le taux de contamination COVID dans la région, on ne sait pas trop qui va pouvoir encore acheter des maisons dans la région. Mais bon, en même temps on s’en fout, le Sud c’est l’électorat de Trump, alors s’ils sont tous sous respirateurs au mois de novembre, ça fera de la place pour Biden. Je suggère que Poutine se présente aux élections américaines, ça mettra un peu d’ambiance dans la maison de retraite.

Bref, toujours est-il que les Américains sont plus forts que tout le monde et que lorsque l’on te dit que c’est en train de partir gentiment en vrille, on te répond avec un joli doigt d’honneur en te disant que « c’est pas grave parce que les banques centrales sont nos amies et qu’à la fin c’est quand même les bulls qui gagnent et que même s’il faut attendre 2 ans que la VRAIE économie reparte à la hausse, la FED nous soutiendra » – et on peut même ajouter : « AMEN », parce que même si on n’est pas croyant, il va commencer à y croire si l’on veut s’en sortir.

Enfin, tout ça pour dire qu’hier on aura quand même vécu deux journées différentes entre l’Europe et les USA, alors que l’on réagissait sur les mêmes nouvelles. C’est juste l’interprétation qui faisait la différence. Mais n’oublions jamais qu’en Europe une mauvaise nouvelle est une mauvaise nouvelle, voir une très mauvaise nouvelle. Alors qu’aux USA, la patrie de Tony Stark et de Captain America, une mauvaise nouvelle est une question d’interprétation et que tant que la FED est avec nous, y a de l’espoir.

Et puis il y a Navarro

Mais ce n’est pas tout. Comme globalement on a connu des périodes plus marrantes, le gouvernement américain a décidé de mettre l’ambiance et de nous faire rire. Pour ce faire ils ont été chercher un type qui s’appelle Peter Navarro. Peter Kent Navarro est un économiste et auteur américain. Il fait partie de l’administration Trump. C’est l’assistant du président, directeur de la politique commerciale et manufacturière et coordinateur politique de la loi sur la production de défense nationale. C’est tout un titre. Mais en fait, Peter Navarro a un rêve caché, il voulait faire du stand-up. Alors hier quand un journaliste lui a demandé si le Trade Deal avec la Chine était définitivement foutu, il a répondu «OUI ». Parce que sur le moment, ça semblait très drôle.

Alors effectivement, les marchés ont adoré la touche d’humour et se sont rétamés instantanément de 400 points sur le Dow Jones. Lorsque Navarro, qui n’a aucun lien de parenté avec le commissaire éponyme joué par Roger Hanin sur TF1 entre 1989 et 2005, s’est rendu compte qu’il avait dit – potentiellement – une grosse connerie, il a immédiatement pagayé en arrière pour retirer ses paroles et faire remonter le marché, encouragé par un « tweet » de Trump qui a probablement prévu de lui péter les dents plus tard dans la soirée.

Nous sommes donc en 2020, on essaie de sortir d’une pandémie et les politiciens semblent se concerter pour nous aider à nous y enfoncer un peu plus. En tous les cas, la campagne électorale de Trump est bien lancée et s’il en sort Président, ça sera probablement que Biden sera décédé avant. Mais on ne pourra pas dire qu’il ne nous a pas amusé dans les derniers mois de sa présidence. Dans les 3 premières années et demie aussi d’ailleurs.

Mais aujourd’hui tout va bien..

Mais peu importe les déclarations de Peter Navarro, peu importe le fait qu’il y a sûrement une once de vérité dans tout cela, ce matin les bourses asiatiques et le pétrole sont en forme. Le baril est passé au-dessus des 40$ et semble s’ouvrir un boulevard pour les 10 prochains pourcent et l’ensemble de l’Asie est dans le vert. L’éventuelle nouvelle vague de COVID en Corée du Sud : on s’en fout. L’éventuelle nouvelle vague de COVID en Chine ; on s’en fout. L’éventuel échec du Trade Deal ; on s’en tape cordialement. Oh, vous savez, tant que les banques centrales sont prêtes à devenir actionnaire d’à peu près tout le S&P500, le Nikkei et que les Chinois sont prêts à condamner les vendeurs à la prison à vie, il n’y a pas non plus de raisons que ça baisse.

SI jamais vous cherchez une raison pour la hausse de l’Asie ce matin, il faut chercher du côté de la tech américaine. Oui, parce qu’au milieu de toute cette polémique surfaite liée au COVID19, il faut tout de même noter que le Nasdaq a terminé en hausse pour la 6ème fois consécutive et qu’en PLUS, nous sommes au plus haut de tous les temps et que vu le prix d’Amazon et la fortune de Jeff Bezos, cet été il devrait pouvoir passer ses vacances en Suisse, il devrait avoir les moyens.

Nouvelles du jour

Pour ce qui et des nouvelles du jour, c’est déjà l’été et c’est très calme. Les USA sont en train de verrouiller l’immigration et ça va être de moins en moins simple d’aller là-bas. Trump estime que c’est nécessaire pour protéger l’emploi qu’il reste aux USA. Pendant ce temps on parle du BREXIT du fait que les deux parties devraient se bouger les fesses pour trouver un accord rapidement, parce que là tout de suite, tout le monde en a marre. Même les Japonais encouragent les Britanniques à boucler le dossier pour une sombre histoire d’exportations agricoles.

Autrement Apple cesse officiellement d’utiliser les puces de chez Intel, ce n’est pas nouveau, mais c’est maintenant. Et puis tout le monde estime que le fait que Trump ait complétement foiré sa gestion de la crise COVID, pourrait lui coûter les élections. Et puis Gilead va tester son Remdesivir sous forme d’inhalation, parce qu’apparemment cela fonctionne mieux. On est impatient de la version en suppositoire. Mais autrement, et pour être franc, on a le sentiment que l’ouverture « plus forte » à laquelle nous pourrions assister ce matin, est principalement « drivée » par le fait que Navarro ait retiré ses propos comme quoi le Trade Deal avec la Chine était foutu.

ET C’EST LÀ que l’on se rend compte que l’on vit vraiment dans une époque boursière formidable (n’est-ce pas Yvan ?) – il y a un type que l’on ne connaissait pas hier soir, qui dit une connerie monumentale qui pourrait faire baisser les marchés, mais le fait qu’il REVIENNE DESSUS, fait que les marchés montent plus haut… C’est l’art de faire monter la bourse avec du vent puisqu’en fait strictement rien n’a changé depuis hier, sauf que l’on sait que Trump a du talent pour s’entourer d’incompétents. Mais en même temps, ça n’est pas une surprise.

Chiffres économiques. Pourquoi faire ?

Pour ce mardi, nous aurons un paquet de chiffres économiques sous forme de PMI un peu partout dans le monde et avec la version PMI manufacturier et/ou des services. Il y aura aussi les nouvelles ventes de maisons aux States, mais disons que vu qu’actuellement on sait que tout est pourri, il ne faut pas non plus s’attendre à que l’on donne trop de crédit à tout ça.

Pour le moment les futures sont en hausse parce qu’on ne baissera plus jamais que c’est presque devenu officiel. Il me reste donc à vous souhaiter une belle journée et on se revoit demain à la même heure et au même endroit avec la même passion et la même envie de voir monter la bourse encore et encore.

À demain !

Thomas Veillet

Investir.ch

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