Il aura fallu 33 ans pour voir ça. Lorsque j’ai mis les pieds pour la première fois de ma vie dans une banque pour faire autre chose que récupérer une chouette en bois ou un renard en peluche, les bourses mondiales étaient en train de se faire défoncer parce que les ordinateurs avaient pris le pouvoir et aussi parce que Reagan était stupide. Puis, j’ai vécu des années insipides où rien ne se passait et où personne n’investissait en bourse parce la crise immobilière était passée par là. Ensuite il y a eu la crise asiatique, puis la crise russe. Puis l’ère de la bulle internet est arrivée et pendant un bref instant j’ai cru que J’AVAIS tout compris, mais en fait ; NON. Ensuite il y a eu le 11 septembre, puis tout le monde s’est dit qu’on ne s’en remettrait JAMAIS, mais en fait on s’en est remis et le Moyen Orient n’est pas devenu un grand parking. Ensuite les banquiers ont inventé le SUBPRIME, là encore on pensait que l’on ne s’en remettrait pas et Bernanke a inventé le QE et le sauvetage par les banques centrales. Lors de la crise grecque en 2011, la fin était proche, mais on a survécu. À l’arrivée de Trump, on s’est dit que tout était foutu, mais finalement on s’en est sorti. Par contre, jamais, mais alors jamais je n’aurais pensé qu’il faudrait que l’on nous invente un virus à base de chauve-souris et de pangolin et que les banques centrales se déguisent en pompiers pour que j’assiste benoîtement au meilleur trimestre jamais affiché par le Dow Jones depuis 1987.

L’Audio du 1er juillet 2020

Télécharger le podcast (.mp3)

Encore du positivisme exacerbé

Rien ne sert d’y aller par quatre chemin, les nouvelles que l’on a pu lire, voir et vivre hier n’étaient pas forcément extraordinaires. Powell a dit que si la pandémie n’était pas contenue, ça ne serait pas simple. Lors d’un discours préparé d’avance, Powell a estimé que la production et l’emploi restaient bien en deçà de leurs niveaux d’avant la pandémie (ce qui n’est pas une monstre surprise) et a averti que les perspectives économiques étaient « extrêmement incertaines ».

Le patron de la FED a même ajouté : « Qu’une reprise complète est peu probable tant que les gens ne seront pas convaincus qu’il est sûr de se réengager dans un large éventail d’activités ». Puis, comme si ça n’était pas suffisant, il a ajouté: « L’avenir dépendra aussi des mesures politiques prises à tous les niveaux du gouvernement pour apporter un soulagement et soutenir la reprise aussi longtemps que nécessaire. »

Berset way of life

Le Président de la FED américaine a donc pris des allures d’Alain Berset et pendant que le Conseil Fédéral se félicitait d’avoir autant d’influence au travers de la planète, on aurait presque pu s’angoisser à l’écoute de ces paroles. Parce que, reconnaissons-le, dans une période « normale », un tel discours aurait provoqué une vague de panique générale et les intervenants auraient piétiné tout ce qui se présentait sur leur passage afin de tout vendre et d’envisager enfin d’immigrer en Ardèche pour aller élever des chèvres et faire pousser le fromage qui va avec.

Sauf que nous sommes dans une période incroyable et inouïe, une période où ce qui était possible avant est toujours possible, mais en mieux. En mieux parce que les instances gouvernementales et les banques centrales ont décidé de faire tout ce qui était en leur pouvoir pour sauver le monde et transformer une pandémie en un bull market sans précédent. De faire passer une récession catastrophique pour une occasion inouïe d’investir dans une économie qui n’est qu’au début de son explosion. Et de faire comprendra aux investisseurs que tant que l’on pourra injecter, soutenir et injecter encore, les marchés ne pourront plus jamais baisser et que le moindre investisseur qui tentera de vendre sera immédiatement mené au peloton d’exécution et abattu sans autre forme de procès.

Jerome qui ?

Alors que l’on aurait bêtement pu penser que les mots de Powell auraient pu mettre la pression sur les marchés. Alors que stupidement nous aurions pu imaginer pendant un bref instant que le fait que les chiffres de la contamination au COVID19 qui ne cessent de prendre l’ascenseur pouvaient faire peur au marché, les intervenants se sont tout simplement concentrés sur une seule et unique chose : les chiffres économiques qui étaient moins pires que le mois précédent.

Alors que la veille nous nous évanouissions de bonheur parce que les futures ventes de maisons qui n’étaient pas encore finalisées étaient meilleures que le mois dernier en plein confinement – ce qui est tout bonnement une surprise phénoménale – voici qu’hier nous tombions en pamoisons parce que la confiance du consommateur passait du fond du trou à des niveaux nettement au-dessus des attentes des analystes les plus fous. Inutile de chercher à comprendre la tessiture interne des chiffres en question, la seule chose que les traders voulaient savoir, c’est qu’ils étaient nettement au-dessus des attentes et qu’à partir de là, nous pouvions commencer à danser tout nu sur la table et faire monter encore un peu le Dow Jones pour qu’il affiche sa meilleure performance depuis 1987 et qu’il me fasse comprendre que mes cheveux blancs ne sont pas dû uniquement au fait que je suis vieux, mais aussi au fait que jamais je ne serai capable de comprendre ce marché qui est tout de même plus débile qu’autre chose.

Moins c’est pire, plus ça monte

On ne va donc pas se prendre la tête, il suffit de comprendre que le marché a besoin d’optimisme et de se rendre compte qu’aujourd’hui est moins pire qu’hier et qu’accessoirement, il est toujours capable de ne pas regarder les chiffres qui dérangent et de se concentrer uniquement sur ce qui est beau et motivant, laissant de côté des chiffres comme les données de l’activité dans la région de Chicago qui laissaient entendre que l’économie régionale était toujours en contraction et que l’euphorie n’était pas forcément le premier mot qui venait à l’esprit lorsque l’on analysait tout cela. Mais peu importe, actuellement les investisseurs sont assez sélectifs et ne veulent pas perdre de temps avec des données déprimantes alors qu’il est tellement simple de s’emballer sur des trucs qui sont vachement plus motivants.

Ce matin le Japon est en baisse et semble tout de même se demander quand est-ce que tout ce cirque va cesser, la Chine monte gentiment et Hong Kong est fermé parce que la Chine l’a décidé. Non, je rigole, c’est parce que c’est « Special Administrative Region Establishment Day » – comme quoi même les administrations peuvent avoir leur jour férié. Du côté du pétrole, il est à 39.71$ et semble toujours prêt à aller chercher les 40$, mais timidement. Par contre, LA NOUVELLE du jour c’est que l’or est au plus haut depuis 8 ans et semble ENFIN parti pour aller chercher les fantasmagoriques 2’000$. Bon, pour le moment nous sommes seulement à 1801$, mais le fait d’être ENFIN sorti de ce « range » dans lequel on se traîne depuis des mois, laisse penser que finalement nous pourrions aller explorer des terres inconnues.

Nouvelles du jour

En ce qui concerne les nouvelles du jour, il n’y a franchement pas grand-chose à dire. Alors oui, Fauci pense que le nombre de cas de COVID aux USA pourrait attendre les 100’000 par jour, mais visiblement il n’a pas vu les chiffres de la confiance du consommateur et les chiffres des Pending Homes Sales qui montrent quand même que tout va bien et que tout va aller mieux. On apprend aussi que le nombre de deals, type fusions-acquisitions n’a jamais été aussi bas. Ce qui est tout de même monstre surprenant après 3 mois de confinement. C’est vous dire si les nouvelles sont maigres ce matin si l’on n’arrive à trouver que ce genre d’infos en première page du FT. À côté de cela, on notera que la Chine implémente petit à petit sa loi martiale à Hong Kong et que l’on n’entend plus Trump sur le sujet, il faut dire qu’il est en train de se faire massacrer dans les sondages par Biden et que ça doit être nettement plus préoccupant pour lui.

Et puis, alors que Fauci pense que le Covid peut largement dégénérer aux States, il semblerait qu’en Chine, un nouveau virus porcin vient d’apparaître. On n’est pas encore complètement au clair au niveau marketing, pour le moment il s’appelle “G4 EA H1N1,” et il semblerait qu’il pourrait éventuellement peut-être se transmettre à l’homme, mais qu’il n’a pas encore muté suffisamment pour ce faire. Quoi qu’il en soit, il va encore falloir bosser sur la « comm », parce qu’il faut reconnaître que “G4 EA H1N1,” c’est moyennement vendeur par rapport à COVID19. Pour le reste il n’y a pas grand-chose à dire, si ce n’est que Tesla a touché son plus haut historique malgré le mail d’Elon Musk qui dit que ça ne sera pas facile de faire du bénéfice ce trimestre. Visiblement on n’en n’a vraiment plus rien à foutre des mauvaises nouvelles.

Chiffres économiques

En ce qui concerne les chiffres économiques, nous aurons droit à plein de PMI un peu partout sous toutes ses formes et puis, en toute fin de journée, ça sera l’heure des minutes du dernier FOMC Meeting. Pour le moment les futures sont en baisse de 0.27%, mais vu la motivation du moment, on va dire que ça devrait s’améliorer d’ici l’ouverture de New York.

Pour le reste, on commence à s’échauffer pour les chiffres des NFP de demain et je n’ose même pas imaginer ce qui va se passer si l’on dépasse les 3 millions de nouvelles créations d’emploi, le marché pourrait bien s’envoler au plus haut de tous les temps, puisqu’apparemment, il n’y a que l’espoir qui compte.

D’ici-là, il ne me reste qu’à vous souhaiter une excellente journée et on se retrouve demain pour de nouvelles aventures !!!

Thomas Veillet

Investir.ch

« Life has no limitations, except the ones you make »

 

Les Brown