Historiquement, les marchés des actions étaient le théâtre de la confrontation entre les investisseurs ¨smart¨-hedge funds-et les particuliers–retail-. Les premiers avaient le dessus et performaient mieux, car mieux informés, plus souples, développant une meilleure gestion des risques et utilisant les produits dérivés. Les investisseurs privés, pro-cycliques avaient tendance à suivre les tendances en fin de partie. Les investisseurs institutionnels à long terme avaient atténué la lutte, et fonctionnaient comme arbitres ultimes.

Les choses ont changé ces dernières années en raison de la répression financière, de la large et rapide diffusion de l’information financière et, dernièrement… de la pandémie. D’une part, les grands institutionnels ont été obligés d’investir dans des actifs plus risqués et les Hedge Funds ont sous-performé dans des marchés tendanciellement haussiers. D’autre part, les investisseurs privés ont radicalement changé avec l’arrivée des ¨millennials¨. Les sociétés de courtage ont accompagné cette nouvelle génération, qui remplace les «traders Joe Six-Pack». Les applications pour smartphones-comme RobinHood-offrent désormais d’énormes opportunités de trading et les commissions de courtage se sont effondrées.

L’importance des investisseurs particuliers a doublé en dix ans

Cette génération Y souffre de prix de l’immobilier/loyers élevé et de pression persistante sur les salaires réels, ce qui l’incite à jouer en bourse. Avec la fermeture depuis mi-mars des ligues sportives professionnelles américaines, les paris en ligne se sont en effet effondrés. Avant la Covid-19, il s’agissait d’une source accessoire de gains/revenus faciles pour les millennials. Ces 4 à 5 derniers mois, l’argent distribué par l’État américain a parfois représenté plus que le revenu d’une proportion d’employés américains «déshérités». C’est une autre incitation à la «spéculation boursière».

A partir de T220, les gros joueurs sont restés sur la touche. Pour ces institutionnels, les pics de volatilité les obligent de réduire leurs risques. Ils se sont essentiellement réfugiés dans les fonds monétaires. Les actifs des MMF ont en fait grimpé de 50% en 2020, passant de 3’000 à plus de 4’500 milliards de dollars. Ils avaient agi de la même manière en 2009, au lendemain de la grande crise financière.

Il leur avait fallu quelques trimestres pour réinvestir 1000 milliards des fonds monétaires fin 2009/début 2010 vers les actifs risqués. Par conséquent, les caisses de pension, l’assurance-vie et autres fondations ont à peine participé au rebond des marchés.

Les investisseurs particuliers semblent aussi avoir déjoué les Hedge-Funds. D’autant plus si l’on considère l’engouement de la génération millennials pour les US Tech / FANGS. S’agit-il d’un nouveau paradigme? Il est bien trop tôt pour le dire! On peut notamment se demander si la ferveur boursière des millenials survivra à une correction de Wall Street, une reprise des paris sportifs à grande échelle ou une baisse du soutien en espèces de l’administration américaine?

 

Au-delà de ces questions de long-terme, que peut-on en tirer comme conclusion dans l’immédiat?

  1. La répression financière provoque la mutation du profil des investisseurs (physiques) et de leurs rapports de force
  2. L’irruption des millennials est soutenue par une confluence de facteurs. Ce n’est pas pour autant que cette génération va dicter sa loi boursière, à long terme. Son comportement de plus en plus spéculatif risque d’être son pire ennemi…
  3. … mais le déficit de performance des grands institutionnels au T3 2020 pourrait prolonger la bonne tenue des actifs risqués… et la Fête des jeunes ¨spéculateurs¨

 

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