Difficile de trouver des arguments pour pouvoir justifier chaque jour que l’on a encore envie d’acheter et d’acheter encore. Les indices sont au plus haut de tous les temps – même la Suisse est au plus haut de tous les temps – oui, bon, c’est vrai, pas exactement puisque les plus hauts c’est 11263 et que vendredi dernier nous n’étions qu’à 11262. Mais on va dire que pour un point, ça compte pas. Et puis si le Crédit Suisse s’était pas pris une claque depuis deux semaines, on y serait, au plus haut de tous les temps.

L’Audio du 19 avril 2021

Télécharger le podcast (.mp3)

Euphoriques

Quoi qu’il en soit, aux States c’est record sur record pour tous les indices. Que ce soit value ou tech ou croissance, peu importe comme on veut les appeler. On est prêt à acheter tout et n’importe quoi et on ne regarde même plus ce que vaut ou ce que ça pourrait valoir. On est simplement à la recherche du prochain titre qui va faire 400% en deux jours. Oui parce que la bonne vieille performance de grand-papa qui faisait du 5% les années normales et du 7% les bonnes années, c’est du passé, du « has been ». Nous, nous sommes dans un siècle révolutionnaire. Après quelques balbutiements pendant les 20 premières années, nous avons trouvé LA SOLUTION pour que les marchés montent tout le temps :

Une bonne pandémie !

Après, les gouvernements vous jettent de l’argent à la figure pour que vous le dépensiez pour relancer l’économie qui est à risque à cause de la pandémie, les Banques Centrales vous mettent les taux à zéro pour que vous puissiez emprunter pour dépenser et pour soutenir cette bonne vieille économie et puis si ça ne suffit pas, les mêmes banques centrales vont injecter de l’argent dans le marché pour l’empêcher de baisser et ce, par tous les moyens. Et à la fin, ben ça monte. Même que là ça n’arrête plus de monter, mais en plus :

On a la confiance !!!

Oui, on n’a plus peur de rien, parce que le soutien des gouvernements, des banques centrales des taux à zéro et des vaccins magiques, que peut-on demander de plus ? On sait que ça ne baissera plus jamais et qu’il suffit d’acheter plus ou moins n’importe quoi pour que ça monte. On le voit sur l’indice de la volatilité, nous sommes revenus sur des niveaux qui correspondent à des niveaux de pré-covid – comme s’il ne s’était rien passé entre deux. Et puis en plus les chiffres économiques sont avec nous :

Retour de l’emploi – on l’a vu avec les récents Jobless Claims et les Non Farm Payrolls du mois dernier – je n’ose même pas imaginer ce qu’ils vont nous sortir début mai. Et en plus les CPI montre une inflation contenue – comme l’avait prévu Powell. Powell qui est d’ailleurs en train de se transformer en « coach » d’investissement avec un soupçon d’hypnose par-dessus. Le Monsieur vient bientôt deux fois par semaine dans les médias pour répéter les mêmes choses encore et encore. On dirait qu’il est en train de mettre un mantra au point et il pense que si on nous le répète assez souvent, on va s’en convaincre et le S&P sera à 5’000 pour Noël. Son mantra pourrait se présenter comme ça :

  • L’inflation revient, mais on la contient, l’emploi est de retour c’est une évidence, le chemin sera long, mais les taux bas resteront !

Je vous promets, vous répétez cette phrase 800 fois par jour et vous aurez envie d’emprunter de l’argent pour investir. Dans 10 ans comme aujourd’hui, on appellera ça : La méthode Powell et le S&P500 sera à 30’000. Au moins.

Bref, tout ça pour vous dire que les marchés sont au plus haut de tous les temps – en Occident – que le chemin est encore long en Asie et que le COVID n’est plus un problème, il suffit juste d’attendre que ça passe et en attendant, autant anticiper, acheter le marché faire un max de pognon pour pouvoir dépenser un maximum dès que l’on sera autorisé à ressortir pour de bon. En tous les cas, j’ai passé le week-end à lire de la littérature médiatique financière et je peux vous dire que la dernière fois que j’ai vu les médias aussi optimistes et enthousiastes sur à peu près tout et n’importe quoi, Federer venait de remporter Wimbledon. Et l’autre fois c’était en mars 2000.

Bitcoin a glissé sur la dernière marche de l’escalier

Mais le SUJET du week-end c’est le Bitcoin qui s’est pété la gueule. En effet, la crypto-monnaie a fait comme Biden quand il monte dans Air Force One, il a raté une marche et s’est fait le genou et le poignet gauche. Pour ceux qui traitent les cryptos comme des fous et ce, même le dimanche – oui parce que ça aussi c’est la beauté des crypto-monnaies, ça ne s’arrête jamais et on pourra traiter tout le temps sans jamais se reposer sans jamais prendre de vacances. Bref, ceux qui était là dimanche matin auront eu la joie de voir le Bitcoin passer de 61’000$ samedi à minuit à 51’500$ dimanche à 5h du matin.

Je rappelle que le Bitcoin avait tapé les 65’000 la semaine dernière parce que l’action magique de Coinbase était venue en bourse. Et depuis la crypto-monnaie s’était effritée avant de vivre un magnifique sell-off de quelques heures. Mais rassurez-vous, vaillants investisseurs fondamentaux, le Bitcoin n’est pas mort puisque ce matin on assiste au retour du preux chevalier, puisque la crypto-monnaie est déjà de retour sur les 57’000$ – et on sait déjà que c’était l’opportunité d’une vie, puisque le Bitcoin va à un million.

Les raisons de la baisse de ce week-end sont diverses et variées et peu claires. On parle de :

  • Démontage de positions optionnelles
  • Menaces d’enquêtes pour blanchiment d’argent de la part du gouvernement américain
  • Menaces de réglementations des cryptos du côté du Trésor US
  • Panne d’électricité générale dans une région de Chine qui fait que ça devenait soudain plus cher de « miner » du Bitcoin et que le « hash rate » s’est répercuté sur le Bitcoin.

Je n’ai absolument aucune idée de ce que la dernière phrase puisse bien vouloir dire, mais je peux vous dire que soudainement je me sens intégré dans la cryptosphère, que ça fait trop du bien et que je suis trop content.

Bref, le Bitcoin s’est pété la figure, mais c’est pas grave parce que c’était juste une opportunité d’achat. Enfin, si j’ai bien tout compris. De toute façon, ce qu’il faut retenir c’est que nous vivons une époque formidable et que ça ne s’arrêtera plus jamais de monter.

Ce matin

L’Asie est en hausse, le Japon progresse de 0.3%, alors que Biden a parlé avec le Premier Ministre Japonais pour lui assurer la livraison des vaccins Pfizer, Hong Kong est en hausse de 0.8% et la Chine reprend enfin du poil de la bête avec une hausse de 1.3%. Depuis le temps qu’elle était dans le coma, on commençait à avoir des doutes.

Côté or, ça remonte gentiment, sans faire de bruit. Mais il est déjà à 1777$ et on en reparlera au-dessus des 1800$ avant de crier au retour de l’enfant prodigue. Pendant ce temps le pétrole marque une pause dans son rebond et se traite à 63$.

Pour le reste

Dans les nouvelles de ce matin, c’est le désert de Gobi. En tête de liste on a le FT qui estime que 5’400 milliards ont été économisé durant la pandémie et que dès que l’on va pouvoir ressortir, ça va claquer du pognon dans tous les coins. Déjà sur les terrasses en Suisse ce matin. Autrement CNBC fait état de rumeurs comme quoi Jack Ma serait poussé vers la sortie chez Ant – rumeurs démenties par Ant et puis le truc que l’on retrouve le plus dans les journaux, c’est le fait que 12 clubs européens veulent faire leur propre compétition entre eux et que Macron n’est pas d’accord que les clubs français y participent. Quand dans les nouvelles financières on vient vous parler des problèmes de riches des grands clubs européens, vous savez déjà qu’il n’y a rien à dire et que l’on a meilleur temps de trouver une terrasse ouverte pour midi et d’aller acheter des sous-vêtements Odlo pour aller sur la même terrasse.

Chiffres économiques

Aujourd’hui, il n’y aura pas de chiffres économiques, par contre on continue avec les chiffres du trimestre et on monte en puissance. En ce lundi nous aurons : Coca-Cola, IBM et United. Pour le moment les futures sont en baisse de 0.12% et le Dogecoin remonte de 30%. Bienvenue dans un monde euphorique où rien ne peut nous arriver et on se retrouve demain à la même heure et au même endroit.

Thomas Veillet

Investir.ch

“Marriage is like mushrooms: we notice too late if they are good or bad.”

– Woody Allen