La nouvelle la plus importante, c’est que les indices américains battent des records. Le Nasdaq est au plus haut de tous les temps, le S&P500 aussi – même s’il faut regarder le chart à la loupe pour identifier le break-out – et puis le Dow Jones est repassé au-dessus des 35'000 et on se sent tout de suite mieux quand on sait ça. Pour le reste, c’est bonnes nouvelles sur bonnes nouvelles et rien ni personne ne semble capable de dire quand est-ce que tout cela va s’arrêter. Ou même si ça s’arrêtera un jour. L’économie va trop bien, les chiffres sont trop bons. Même les chiffres du COVID font un carton. Et comme d’habitude ; tout le monde s’en fout.

L’Audio du 6 août 2021

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Économie au top

S’il y a une chose qui rassure le marché, c’est que les économies sont au top. La crise économique due au COVID est terminée, la reprise est là et tout va tellement trop bien que ça en devient gênant. Plus personne n’a de doute sur le fait que la croissance est en train de faire un carton et qu’en plus de faire un carton, elle ne met même pas en danger la technique magique des taux bas, des rachats obligataires et des avalanches de stimulus. Pas de danger, puisque tout est sous contrôle et que Powell maîtrise tellement bien le tout que l’on en est presque à se demander si ce type n’est pas devin ou quelque chose comme ça.

Si on avait encore le moindre doute hier, les chiffres des Jobless Claims ont facilement levé ce doute qui obscurcissait notre vision et nos convictions. Après plusieurs semaines de déceptions – déceptions que l’on a à peine remarqué sur la performance des indices, puisqu’il y avait TOUJOURS une MEILLEURE nouvelle pour compenser, les chiffres des Jobless Claims ont enfin réussi un strike. Il faut savoir que pour CE CHIFFRE économique en particulier, un strike correspond à un chiffre meilleur ou égal aux attentes. Dans ce cas-là, le chiffre pour être meilleur, il doit être plus faible puisque c’est des demandes d’indemnités chômage dont on parle. Et puis, en plus il doit être mieux que le chiffre de la semaine dernière. Hier tout était réuni. Après une série de 4 semaines déprimantes sur ce chiffre, les choses revenaient à la normale et on était soulagés. Du coup, les chiffres pourris de la veille sur le chiffre ADP n’intéressaient plus personne et on se prenait même à croire que les chiffres des Non Farm Payrolls prévus cette après-midi ne seront qu’une promenade sur la plage au coucher du soleil.

Et en plus Goldman Sachs confirme

Et comme si ça ne suffisait pas, hier Goldman Sachs a révisé à la hausse son objectif pour le S&P500. À les écouter, lorsque l’on voit les chiffres trimestriels, la qualité de ces derniers que l’on peut associer à des chiffres économiques fantastiques et explosifs, il n’y a pas de doute à avoir, pas de question à se poser. À Noël, le S&P500 sera à 4700, c’est une certitude. Tout comme le Bitcoin sera à 100’000$. C’est effarant comme tout devient plus simple lorsque l’on a des certitudes dans le monde de la finance. Et hier, entre les chiffres fabuleux des Jobless Claims et ce nouvel objectif de Goldman Sachs ; comment douter ? Comment ne pas vendre les bijoux de la grand-mère et l’écuelle du chien et en investir les bénéfices sur des calls out of the money sur le S&P500. Des calls qui vont vous apporter richesse et bénéfices faciles pour les années à venir.

Donc si l’on résume la chose : TOUT SE PASSE BIEN… Les plans de soutien mis en place portent leurs fruits, les chiffres économiques et trimestriels sont tous plus ou moins parfait et si l’on ne monte pas sur la nouvelle aujourd’hui, nous sommes montés en anticipation AVANT. Grosso-modo, il n’y a rien à dire et seule la perspective de l’argent facile qui coule à flots sur nos comptes de trading est un peu difficile à gérer. Oui, la question reste quand même : mais qu’est-ce que l’on va faire de tout ce fric ??? Vous en conviendrez que ce n’est pas facile d’y répondre et que c’est le stress que tout nouveau multimillionnaire doit connaître.

Et pourtant il y a un mais…

Et pourtant, il y a un MAIS. Tout pourrait ne pas être aussi rose que l’on pense et il se pourrait que, peut-être, tout cela ne se termine pas avec un mariage et beaucoup d’enfants. Oui, parce qu’au milieu de cette forêt de bonnes nouvelles et de soutiens de toutes parts, il y a tout de même deux-trois trucs qui pourraient commencer à coincer. Alors soit, pour l’instant on s’en contrefout parce que tout le reste va trop bien et que les chiffres sont trop bons et que le S&P500 va à 4700 dans 5 mois et que le Bitcoin va à 100’000 dans 5 mois aussi. Mais certaines voix s’élèvent pour dire que ça serait quand même pas mal que l’on ne laisse pas l’économie s’emballer comme un hippopotame au galop et que l’on commence à la freiner un poil avant que les niveaux de l’inflation rejoignent ceux que la politique vénézuélienne a réussi à obtenir récemment.

Il y a des membres de la FED qui le réclame déjà, mais depuis hier il y a également un politicien qui s’y met. Le Sénateur Joe Manchin a envoyé une lettre à Jerome Powell pour l’encourager à rapidement cesser ses rachats obligataires avant que l’économie et la croissance soient hors de contrôle. On ne sait pas ce que Powell a fait de la lettre et on sait aussi que lorsque les politiciens de carrière se lancent dans l’économie, ça n’apporte rien de bon. Heureusement que nos politiciens genevois se contentent de paralyser la ville avec des stratégies de mobilité douce révolutionnaires qui vous donnent envie de quitter le canton et de plus jamais y revenir. Mais toujours est-il que l’on sent que la peur de l’inflation-qui-ne-serait-pas-si-transitoire-que-ça, commence à peser sur un peu tout le monde et ce matin plusieurs médias financiers américains mettent en garde Powell contre le fait de trop attendre avant d’agir, précisant que ceux qui l’on fait par le passé, n’en sont pas sorti grandis.

Mais que l’on se rassure, pour le moment, ces mises en garde ont à peu près autant d’effet sur les marchés que la chloroquine sur le COVID.

À propos de COVID ; on retiendra aussi que les chiffres des contaminations, des infections, des hospitalisations et autres réjouissances liées à cette pandémie, ne cessent d’augmenter. En Floride c’est la catastrophe et au Texas c’est pas mal non plus. Une responsable politique a même carrément estimé qu’à ce stade, ceux qui n’étaient pas vaccinés étaient responsables et complices de ce qui se passe et que bref, le COVID c’est la merde again et le variant Delta, c’est pire. Mais c’est pas grave, parce que nous savons tous que le COVID et ses variants ne fait plus aucun effet aux marchés financiers. Marchés financiers qui savent qu’à la fin on va venir les soutenir à coup de stimulus ou à coup de taux négatifs. Nous, dans la finance, tout le monde n’est pas vacciné, mais on est immunisé depuis longtemps contre les effets du COVID.

C’est calme en Asie

Ce matin ça n’est pas l’euphorie en Asie, mais c’est plutôt calme. Le Nikkei est très, très légèrement en hausse et les deux autres indices sont très, très légèrement en baisse. Les Chinois ne s’en sont pas pris à leurs multinationales depuis 72 heures et il y a même des groupes d’influence américains qui sont en train de supplier Biden pour qu’il recommence à nouer un dialogue constructif avec Pékin, plutôt que de fournir des armes à Taïwan. Méthode qui, je le rappelle, n’est pas super-efficace pour créer des bonnes relations avec la Chine.

Côté or, comme d’habitude, il ne se passe rien qui vaille la peine d’être cité. Le métal jaune est en baisse de 10$ et se traite à 1803$. Je dois vous avouer que lorsque l’on parle de l’or, je peine à cacher mon excitation et ma lutte contre l’endormissement immédiat prend une dimension supérieure. Du côté du pétrole, c’est autre chose. Ce qui est marrant avec le pétrole c’est que depuis une semaine il se fait démonter à coup de 2 dollars par jour. Lundi dernier, nous étions au bord des 76$ et on se demandait à quel moment on allait casser la résistance et ce matin on ne peut que constater les dégâts avec un baril sous les 70$. Mais là où ça devient PASSIONNANT, c’est quand on voit que les « experts » en finance et autres gourous des marchés « estiment » que la baisse du pétrole est principalement due au fait que les craintes d’un ralentissement économique dû au COVID se font craindre de plus en plus intensément.

Il donc absolument hilarant de voir que d’un côté les marchés actions se foutent totalement de ce qui se passe au niveau du COVID, que demain on peut nous reconfiner, nous obliger à porter des gants en caoutchouc et des préservatifs sur la tête pour empêcher la contamination par les cheveux, les marchés ne baisseront plus jamais POUR ça. Mais en revanche, de l’autre côté, rien qu’à l’idée que l’on ne puisse à nouveau plus voyager et que l’on n’aille plus faire le plein du V8 à la pompe ; le baril s’effondre et on envisage à nouveau de stocker des pâtes et du PQ pour l’automne. Comme quoi on n’est pas tous logés à la même enseigne. Côté cryptos, le Bitcoin pave toujours la marche en direction des 100’000 en repassant au-dessus des 40’000 et tout le reste monte aussi. Les Cryptos c’est devenu facile de nouveau.

Nouvelles du jour

Dans les nouvelles du jour on parle beaucoup des trimestriels, de GoPro qui a surpris à la hausse, tout comme Comcast. De Robinhood qui a plongé de 30% après sa hausse de 50%, tout ça parce que les investisseurs originels ont décidé de prendre leurs profits sur 100 millions d’actions et que l’on s’autorise à penser que ça pourrait peser sur le cours de l’action. Qualcomm a surenchéri pour acheter Veoneer qui était déjà sous compromis de vente avec Magna International, mais à un prix bien plus bas.

Au chapitre du COVID, Wells Fargo, BlackRock et Amazon repoussent le retour en présentiel au bureau à l’année prochaine. Moderna pense que son vaccin est encore efficace à 93% six mois après la seconde dose. Ce qui n’est pas le cas de Pfizer. Va commencer à falloir choisir attentivement sinon autant s’injecter de la vodka ou du gin. Et puis l’Europe veut vacciner les ados pour couper l’herbe sous le pied du virus.

Pour ce qui est des voitures électriques, le Messie de la Maison Blanche veut que d’ici 2030, 50% des voitures aux USA soient 100% électriques. On se réjouit déjà de voir comment ils vont les charger et comment on va faire pour les batteries. Bon, d’ici 2030, Biden sera mort donc il s’en fout. Mais il a quand même réussi à se fâcher avec Elon Musk, parce que dans sa volonté de mettre les voitures électriques en avant, il a privilégié les grandes marques américaines et a oublié Telsa. Paraît que Musk et son égo surdimensionné font la gueule tous les deux. Et puis, il faut saluer la hausse d’Exxon hier. Les investisseurs sont revenus dessus suite à une « bonne nouvelle » super-excitante : Exxon prévoit d’être neutre en termes d’émission carbone d’ici 2050. Les investisseurs ont salué la nouvelle. La nouvelle de dans 30 ans. Nous qui sommes la génération qui a inventé le « high frequency trading », on SALUE un truc qui va se passer dans TRENTE ANS… Je lève mon cocktail Xanax-Champagne à Exxon et au monde merveilleux de l’investissement.

Chiffres du jour

Pour ce qui est des chiffres du jour, inutile de vous dire que c’est les Non Farm Payrolls qui seront à l’honneur. Le reste, je crois que l’on peut dire que l’on s’en tape cordialement. Le marché et ses experts s’attend à 870’000 créations d’emplois et un taux de chômage à 5.7%. Si les chiffres et les attentes sont corrélés comme avec les chiffres de l’ADP, on devrait taper les 450’000 à la place des 870’000… ce qui pourrait être rigolo pour boucler la semaine. Pour le moment les futures sont en baisse de 0.06% – mais que l’on se rassure, on sait tous qu’à la fin c’est les Bulls qui gagnent et que les records vont tomber dans cette merveilleuse économie qui va tellement bien.

Il me reste à vous souhaiter une très belle journée de pluie, un bon week-end frisquet et je vous retrouve pour les Saintes Glace lundi matin.

À lundi !

Thomas Veillet

Investir.ch

“There are two kinds of people in the world those with guns and those that dig. You dig…”