Nous sommes donc de retour aux affaires et la dinde semble derrière nous depuis bien longtemps déjà. La Chine fait partie des nouvelles préoccupations du moment. Il semblerait, en effet, que l’on peut enfermer « légalement » un être humain pendant un moment, en lui faisant croire qu’en s’enfermant chez lui, il va sauver le monde. Cependant, ça ne dure qu’un temps et les Chinois ont donc passé la date de péremption depuis quelques jours. Le fait de voir des manifestations en Chine et le fait d’imaginer qu’il y aurait moins d’iPhones pour Noël, aura donc créé une couche nuageuse persistante sur le moral des investisseurs. Ça, c’était hier.
L’Audio du 29 novembre 2022
Le retour du stimulus
C’était hier, parce que ce matin les Chinois ont déjà annoncé un stimulus économique qui a quasiment instantanément effacé les craintes d’hier. Hong Kong reprend près de 4% !!! sur la nouvelle et la Chine grimpe de plus de 1.5%. Du coup, les commentaires d’hier qui exprimaient leurs craintes par rapport aux manifestations se sont tus dans la seconde où le gouvernement a caché la poussière sous le tapis en agitant des Yuans à foison. Donc, ce matin tout repart à la hausse, les futures sont en hausse, l’Asie est en forte hausse et même le pétrole monte à plus de 78$, parce que l’on s’autorise à penser – dans les pages du Wall Street Journal – que l’OPEP pourrait couper sa production afin de palier à la réduction de la demande du côté chinois.
Sauf qu’hier, on pensait l’inverse. Hier c’était les émeutes, le ralentissement en Chine et l’explosion des cas COVID parce que l’immunité collective n’existe pas dans la région. Tiens… « Immunité collective »… ça faisait un moment qu’on ne nous l’avait plus faite celle-là. J’ai peur que les anciens experts en COVID qui sont devenus experts en histoire de l’Ukraine et de la Russie risquent de devoir se re-former en COVID chinois pour avoir des trucs à dire. Mais là n’est pas le sujet. Hier nous parlions donc émeutes et révolution, ce qui projeté le marché en direction du Sud, avec une mention toute spéciale pour Apple qui ne sait plus quoi attendre de sa production d’iPhones, à cause des protestations dans son usine de chez Foxconn, sans compter qu’hier, Elon Musk a officiellement déclaré la guerre à Apple, parce qu’ils sont méchants avec lui, qu’ils ne veulent plus faire de la pub chez Twitter et qu’en plus, l’Apple Store, c’est trop cher.
Elon part en guerre
Le CEO de Starlink, de Tesla et Twitter a donc fait des déclarations fracassantes sur Twitter, se demandant si Apple n’était pas tout simplement contre la liberté d’expression et que si cela continuait comme ça, il allait fabriquer son propre smartphone pour contrer l’hégémonie du logo à la pomme. L’homme le plus riche du monde est donc en train de s’en prendre à la plus grosse capitalisation américaine du monde. Je me demande d’ailleurs s’il ne serait pas plus simple de mettre Musk et Cook sur un ring et de les laisser s’expliquer à coups de poings, ça nous ferait gagner du temps, de l’argent, économiser de l’encre et surtout, économiser des heures à taper sur un clavier pour raconter leurs épuisantes conneries et autres querelles.
Pendant que le sommet de la pyramide alimentaire du capitalisme s’écharpe sur les réseaux sociaux et que la Chine devient le centre du monde de la finance, les gens de la FED étaient un peu jaloux qu’on ne parle pas d’eux. Du coup, Bullard, Williams et Brainard se sont tous pointés dans les médias avec des bonnes « punchlines » qui avaient été bien travaillées par leurs services de communication. Je suis d’ailleurs en train de chercher sur le net comment je peux trouver le nouveau t-shirt de la FED avec la citation de James Bullard qui dit que :
« Nous allons garder les taux AU-DESSUS de 5% jusqu’en 2024. Au moins ».
Oui, il a dit ça. Alors que tout le monde se prépare à un changement radical lors du FOMC Meeting du 13-14 décembre, avec un ton MOINS belliqueux et une hausse des taux MOINS forte, voici que Bullard nous balance à nouveau un seau d’eau glacée sur la tête en annonçant que (selon lui), il va falloir – non seulement – taper fort sur l’inflation, mais en plus il va falloir taper fort et LONGTEMPS, histoire de lui faire comprendre qui est le « BOSS ». Et puis, en plus de Bullard qui a clairement démontré qui était le premier faucon de la cour de récré, il y a eu Williams, de la FED de New York, qui a estimé que la hausse des taux et l’inflation allaient probablement faire monter le taux de chômage à 5%. Visiblement, ils ont un truc avec le chiffre 5. Du coup, après ces deux annonces, le discours de Brainard qui expliquait pacifiquement que la FED faisait ce qu’elle pouvait et que personne n’a le vaccin idéal pour lutter contre l’inflation – (tiens, ça me rappelle quelque chose ça aussi) – passait complètement inaperçu.
La Chine, l’inflation et la FED
Cette première séance post-Thanksgiving aura donc été axée sur les futures éventuelles décisions de la FED à venir et sur l’avenir de la Chine. Avenir qui semble clairement divisé entre révolution et stimulus économique. Les « experts » en tout ça, estiment que le gouvernement va répliquer de façon très diplomatique face aux manifestants, sachant qu’ils n’ont aucun intérêt à que cela parte en sucette et remette en cause l’éventuel redressement économique de la Chine. On ne se réjouit pas forcément de voir la diplomatie chinoise à l’œuvre, sachant que le scalpel est souvent très proche du lance-flamme dans les étagères de la répression. Une erreur d’interprétation est si vite arrivée.
Les marchés ont donc tous terminé en baisse en se disant que c’était « pas grave » parce qu’ensuite il y aurait le rallye de la fin de l’année et que ça allait bien se passer, mais que l’on ne pouvait pas transpercer la moyenne mobile des 200 jours aussi facilement que ça, du premier coup. Il était donc temps de souffler un peu et d’emmagasiner un peu d’énergie pour repartir à l’assaut des sommets pour bien finir l’année. Surtout que cette période est également propice aux grandes annonces de la part de tous les grands experts de la finance MONDIALE qui se sont tous donnés la main pour annoncer leurs attentes pour l’années prochaine. C’est normal, c’est la saison et c’est plus simple de faire des « outlook » en décembre, plutôt qu’en mars.
Outlook
Le plus dur, dans les prévisions économiques et boursières, c’est pas pour ceux qui les font, c’est surtout pour ceux qui les écoutent. Non parce que si vous ne regardez que celles qui sont sorties depuis trois-quatre jours, il y a vraiment à boire et à manger. Ça n’est donc pas simple de choisir un camp. Tenez, rien du côté bullish, il y a Tom Lee qui pense que l’on va exploser de 10% d’ici la fin de l’année. Mais du côté bearish, il y a la Deutsche Bank qui estime que l’on n’a pas assez tenu compte de la récession qui va nous arriver en pleine figure dans les mois à venir et, qu’à partir de là – là où nous sommes actuellement – le marché pourrait chuter de 25% en 2023. Après, je vous passe les commentaires des uns et des autres avec des objectifs aux antipodes les uns des autres justement.
Mais ce que je trouve absolument passionnant dans les prévisions qui nous tombent actuellement sur la figure, c’est que les gars sont capables de nous annoncer que le marché va perdre 25% en 2023 ET qu’ensuite, la FED va baisser les taux de 200 basis points en 2024 pour lutter contre la récession. Les mecs sont incapables de nous dire ce que va faire le marché demain, ou même dans une heure, mais ils sont déjà en train de faire des prévisions à 2 ans basées sur des chiffres que l’on ne connaît pas encore. C’est un peu comme si la météo, à la télé, après le journal, nous faisait des prévisions météorologiques pour juin 2029, histoire que l’on sache si on doit anticiper et prendre un parapluie pour laisser demain dans la voiture, juste au cas où… Histoire de pas se faire choper par un orage de dans 7 ans.
Les nouvelles du jour
Nous n’aurons donc pas perdu de temps pour se remettre dans le thème de l’inflation et de la lutte contre ladite inflation. La concentration est à son comble avec la publication du CPI de ce matin en Allemagne. Un peu comme si cette annonce allait changer la face du monde et nous donner toutes les réponses pour notre stratégie d’investissement prévue jusqu’en avril 2024. C’est surtout que cela nous permettra de patienter jusqu’aux chiffres de l’emploi US qui arriveront vendredi. Autrement, il faudra retenir que l’on commence à parler de la grève des cheminots aux USA. La SNCF locale a lancé un préavis de grève en pleine période de Noël et Biden est en train de paniquer. Une grève généralisée de ce style aurait le pouvoir de planter l’économie en quelques jours. Un évènement dont on pourrait largement se passer. Le Président a demandé au Congrès de faire ce qu’il faut pour trouver des solutions. Que le Congrès dispose…
Notons aussi que Madame Lagarde a déclaré que la BCE n’en n’avait pas fini avec la hausse des taux. Que BlockFi (c’est un lender dans la crypto) s’est mis en faillite après l’affaire FTX qui continue de faire couler du sang et de l’encre, alors que SBF est toujours en liberté. Si Madoff avait su comment faire, il aurait fait comme lui pour ne pas finir en taule. Il y a aussi Mark Mobius qui pense que le Bitcoin va à 10’000$ – Mark Mobius qui a un taux de réussite dans ses prévisions qui est à peu près aussi proche que celui de Roubini – une fois tous les 20 ans. Et puis, pour terminer, il faudra aussi noter l’EXCELLENTE PRÉDICTION de Jim Cramer, la star de CNBC, qui estime que si les NFP’s de vendredi sont trop forts, cela pourrait pousser la FED à devenir plus agressive dans son cycle de hausse des taux. Il paraît aussi qu’il travaille sur un rapport scientifique qui prouve que si tu tombes du 40ème étage d’un immeuble, quand tu touches terre, tu as mal.
Chiffres du jour
Côté chiffres du jour, il y aura le GDP en Suisse, le CPI en Allemagne, les sondages européens concernant la confiance du consommateur et celle des entreprises. Et puis ensuite, aux États-Unis, nous aurons la confiance du consommateur et les chiffres de l’immobilier qui sont aussi une crainte de ce qui pourrait nous tomber dessus, mais pour le moment on veut croire qu’un reversement de tendance est encore possible. Pour le moment tout le monde il est content du nouveau stimulus chinois qui semble être le remède à tous les problèmes de la Chine – durant les 12 prochaines minutes en tous les cas – et puis les futures sont en hausse de 0.34%, pendant que le pétrole frise les 79$ suite aux rumeurs de fermage de robinet qui circulent.
Il me reste à vous souhaiter une très belle journée et je vous rappelle que si vous êtes désœuvrés mercredi soir et que vous voulez « essayer » de vous cultiver, n’oubliez pas de nous retrouver Marco Rastaldi et moi, pour un webinaire sur les semiconducteurs en direct sur le site de Swissquote. Ça sera mercredi soir à 18h00 et si vous voulez vous inscrire, c’est là-dessous et c’est gratuit :
Excellente journée à tous et à demain !
Thomas Veillet
Investir.ch
« Life is really simple, but we insist on making it complicated. » -Confucius