L’autre jour on se disait que le S&P500 était dans un range hyper-serré et que le jour où ça allait sortir dans un sens ou dans l’autre ça allait être violent – enfin, c’est surtout moi qui me disais ça. Hier nous avons eu un début d’excitation et pendant un bref instant on a commencé à croire qu’on avait choisi notre direction. Sauf qu’hier soir on a eu des chiffres trimestriels chez Microsoft qui ont fait que l’on s’est à nouveau demandé s’il ne fallait pas racheter le rallye avant de rater quelque chose. En tous les cas, cette semaine, je me suis plains du manque de choses à dire, mais là hier on était servi.

L’Audio du 26 avril 2023

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Des chiffres, des chiffres et encore des chiffres

Hier, pendant quelques heures, nous avons mis le sujet de la FED, de la prochaine hausse des taux et du fait qu’ils vont pivoter ou pas, de côté et on s’est concentré sur les chiffres du trimestre et l’éventuel retour de la CRISE des banques. Du côté des chiffres du trimestre, il y avait du monde avant l’ouverture et après la clôture américaine. Et clairement, il y avait un AVANT et un APRÈS.

Mais prenons les choses dans l’ordre. Tout d’abord, nous avons eu des boîtes comme 3M, UPS, Mc Donald’s ou encore Pepsi. Des sociétés qui ont le pouvoir de nous donner des indications sur l’économie et les habitudes de consommation. Du coup, ça nous a permis de se projeter dans un monde qui pourrait bien se compliquer un peu du point de vue économique. Oui, on sait tous que si l’inflation semble vaincue (aux yeux de la FED), la hausse de mercredi prochain devrait être la dernière. Mais on sait tous aussi que le coup de frein donné par la FED pourrait mettre l’économie en récession. On n’aime pas trop aborder le sujet, mais dans les chiffres publiés hier après-midi, il y avait largement de quoi se poser des questions.

Encore des chiffres

Chez Pepsi, il n’y avait rien à dire et les investisseurs semblaient plutôt satisfaits du trimestre. C’était cependant la seule satisfaction de la journée. Après, il y a eu Mc Donald’s qui a fait des annonces plutôt bonnes, tout en donnant des prévisions très conservatrices et prudentes pour l’avenir. Le titre terminait légèrement en baisse. Mais bon, Mc Do c’est différent, parce que si ça va mal on vous dira que c’est un mauvais signe pour l’économie et si ça va bien, on vous dira que si les gens vont manger au Mc Do, c’est qu’ils n’ont plus d’argent et que c’est un mauvais signe pour l’économie. Ensuite, il y a eu 3M qui annonce un ralentissement dans tous leurs business de consommation et qu’ils virent 6’000 employés. On peut donc en déduire que l’économie et la consommation n’est pas à son top. D’ailleurs la confiance du consommateur qui a été publiée hier était un poil en-dessous des attentes, ce qui corroborerait les chiffres de 3M. Le titre ne faisait rien. En même temps, vu là où il se trouve, on le voit mal aller plus bas.

Et puis il y avait UPS. Et c’est assez marrant, parce que UPS c’est un titre dont tout le monde se fout le reste de l’année, mais par contre, dès que l’économie est un peu tendue, on se concentre à fond sur le sujet et on essaie d’en tirer des conclusions qui pourraient éventuellement nous permettre d’anticiper quelque chose. Vous l’aurez compris, les chiffres d’UPS étaient immondes, les volumes d’expédition plus faibles que prévu et les prévisions pas terribles. Vous rajoutez à cela le fait que l’on entend dire ici et là que les volumes de fret qui sont expédiés par la route sont en chute libre et vous avez un titre qui se fait déglinguer de près de 10%. C’est bien simple, pendant un moment j’ai cru qu’UPS avait annoncé qu’en fait, ils étaient une banque régionale américaine.

Le retour des banques (et je ne sais pas si c’est une bonne nouvelle)

Oui, parce que LE SUJET de la séance d’hier, c’était quand même le RETOUR DES CRAINTES SUR LE SECTEUR BANCAIRE. Alors moi je dois vous avouer que j’ai été surpris. J’ai été surpris parce que je pensais sincèrement que les actes de nos génies de la finance suisse avaient réglé le problème une fois pour toute. Que l’intégration du Crédit Suisse dans l’UBS pour créer une méga-banque systémique était LA solution que le monde financier mondial attendait pour retrouver sérénité, calme et plénitude. Mais en fait : non – je dois donc vous avouer que je tombe de haut. De très haut. Et heureusement que je ne fais que 1 mètre 71, sinon j’aurais pu me faire mal.

Donc hier on est revenu sur le sujet. D’abord parce que les chiffres de l’UBS n’étaient les plus sexy de leur histoire – bien qu’il soit à peu près impossible d’interpréter quoi que ce soit dans les chiffres d’une banque – déjà dans une situation normale, mais en plus quand elle est en train d’absorber une autre banque et qu’on ne sait pas trop ce qu’il y a dedans. Mais pour être franc, le problème d’hier ça n’était pas l’UBS. C’était plutôt la First Republic. Je vous en ai touché deux mots dans la chronique d’hier. Les chiffres étaient immondes, on ne sait pas trop quand ils renoueront avec les chiffres noirs (pour autant que cela se produise un jour), mais ce qui a le plus choqué Wall Street hier, c’était la fuite des capitaux. Les 100 milliards de retraits qui ont foutu le camp ont immédiatement jeté l’opprobre sur tout le secteur, mais sur First Republic en particulier. Le titre a perdu 50% hier soir et l’ETF des banques américaines plongeait de plus de 4%. Faisant du même coup ressurgir le spectre d’une autre faillite bancaire à la SVB, c’était comme jeter du sel sur des blessures récentes et non-cicatrisées.

Les ours ont tenté leur chance

Nous ne sommes bien sûr pas tout à fait dans la même situation qu’en mars. Nous n’avons pas encore vu Madame Yellen à la télé en train de paniquer sur le sujet et Powell n’a pas encore annoncé de mesures de soutien. Mais disons que l’on n’a pas trop aimé la perspective de ramener le sujet sur la table. Surtout qu’au moindre problème, on peut imaginer que les clients qui avaient encore un tout petit peu confiance, pourraient bien craquer définitivement et aller s’acheter de l’or ou planquer leur fric chez JP Morgan ou Bank of America, puisque c’est les seules banques qui ne font pas peur. Pour le moment.

Donc, pendant un bref instant hier, on a eu l’impression que l’on pouvait avoir un nouveau vent de panique sur le secteur et les marchés ont tremblé. Bon, que l’on se rassure, tout semble déjà rentré dans l’ordre puisque malgré la baisse générale des indices américains hier – le S&P reculait de 1.58%, le Dow Jones de 1.02% et le Nasdaq chutait de près de 2% – ce matin les futures sont déjà en hausse et tout ça grâce à Microsoft qui est venu nous sauver la mise. Juste au moment parfait avec le timing parfait. Un des titres qui a pratiquement fait monter le marché à lui tout seul depuis le premier janvier est encore là pour prouver que tout ce qu’il a fait monter, était parfaitement justifié.

À l’autre bout du monde

Ce matin en Asie, le Nikkei est en baisse de 1%, le Hang Seng est en hausse de 0.58% et la Chine recule de 0.31%. Mais si l’on regarde un peu à l’intérieur des marchés, on se rendra compte que c’est la tech qui est recherchée et le reste qui est sous pression. On s’inquiète un peu de l’état de l’économie, mais globalement, il semblerait que le cas problématique des banques soit déjà pratiquement réglé, nous sommes déjà passé au miracle technologique qui va sauver le monde dans la prochaine décennie. Oui, bon d’accord, j’exagère un peu. Alors disons : le miracle technologique va nous sauver la journée et nous redonner espoir de voir le S&P casser un jour la résistance mythique des 4’200 et entrer ENFIN dans un nouveau BULL MARKET.

Du côté de l’or on est à 2’004$ – avec le retour des craintes sur le secteur bancaire, on aurait pu s’attendre à mieux. Le pétrole est à 77.50$. Le baril est en train de tester la moyenne mobile des 50 jours et semble être en train de chercher un point bas avant d’attaquer sa prochaine jambe haussière. Il y a un gap à combler juste en-dessous et une exagération en direction des 75$ à la baisse pourrait être une occasion en or de sauter dans le train. Le Bitcoin, quant à lui, se traite à 28’350$.

Nouvelles du jour

Dans les nouvelles du jour, la première chose qu’il faut retenir, c’est les chiffres canons de Microsoft. Le moteur de la croissance du géant de Seattle (le CLOUD) est de retour et l’ensemble de ce qui a été publié était au-dessus des attentes. Vous rajoutez à cela les commentaires rassurants-motivants et encourageants de la part du CFO lors de la conférence de presse et vous aurez un titre qui se traite en hausse de près de 10% after close. L’ouverture devrait se faire au-dessus des plus haut du mois d’août dernier et la porte est clairement ouverte pour aller chercher les plus hauts de tous les temps. On notera que Microsoft a beaucoup parlé d’intelligence artificielle et ils estiment que c’est ce que va générer la croissance et les revenus dans le futur, déclaration qui a forcément aidé Nvidia, comme d’habitude. Chez Google, les chiffres étaient moins impressionnants, mais ils étaient également meilleurs que les attentes, le titre prenait 1.5% after close, mais c’est surtout le nouveau programme de rachat d’actions à hauteur de 70 milliards qui vaut la peine d’être noté. Dans les autres publications, on retiendra que c’était correct chez Visa et chez Texas Instruments.

Les deux titres étaient en hausse after close et l’on peut se demander si les chiffres sont VRAIMENT BONS, on est-ce que les attentes étaient vraiment tellement basses, que faire pire aurait été compliqué. Non, parce qu’il faut tout de même se souvenir que si les chiffres sont « meilleurs par rapport aux attentes », sur une année et dans l’absolu, c’est clairement plus faible, mais on ne va pas chipoter pour ça, First Republic n’est pas (encore) en faillite après tout. La vie est belle et les oiseaux chantent. Dans le reste des nouvelles, on parle de Biden qui se présente à sa propre succession. Je ne sais pas si cela vaut la peine d’être commenté. Le gars est limite grabataire, c’est devenu une marionnette pilotée par un staff qui ne bosse que pour lui et on ne sait pas s’il sait vraiment encore ce qu’il fait. Mais on trouve que c’est une bonne idée de réélire un type qui aura 86 ans à la fin de son mandat. Il y a pas loin de 400 millions d’Américains sur Terre, il n’y a pas d’autre solution que de mettre à la Maison Blanche un gars qui ne sait plus où est la droite de sa gauche et qui cherche à déclencher une guerre avant de quitter le pouvoir ? Je me demande. Mis à part cette nouvelle pathétique qui ne surprend personne, il faut aussi retenir que le plafond de la dette n’a toujours pas trouvé de solution… Et hier, Madame Yellen a fait un discours qui montre qu’elle commence quand même légèrement à paniquer.

La Secrétaire du Trésor a déclaré qu’un défaut de paiement de la part des USA serait catastrophique pour l’économie, entraînant un chômage de masse, des défauts de paiement et une hausse des taux d’intérêt « à perpétuité »… À perpétuité, c’est vraiment le genre de mot qu’on a envie d’entendre en ce moment. Donc ça commence à devenir chaud du côté de la dette et la seule chose qui préoccupe Washington c’est : qui sera l’adversaire de Biden ??? Moi je vous le dis, je me réjouis de ces prochaines semaines, on risque de bien rigoler !

Chiffres du jour

Côté chiffres économiques il y aura le climat de consommation en Allemagne, la confiance du consommateur en France – ainsi que les ventes de casseroles – casseroles qui sont fortement recherchées au marché noir depuis que l’empereur de Macronie a mis des restrictions de déplacement pour le bon peuple qui sort avec une casserole à la main. Il y aura aussi le ZEW en Suisse, les nouvelles hypothèques aux USA, les durables goods, les inventaires pétroliers et plein de membres de la BCE qui tentent de se faire entendre avant la réunion de la semaine prochaine, mais personne ne les écoute de toutes façons.

Pour les chiffres du trimestre ce matin nous aurons Roche et Lonza en Suisse, Dassault, Michelin, Orange et Danone en France, Puma en Allemagne et aux USA il y aura Boeing, ADP et General Dynamics avant l’ouverture. Puis ce soir after close nous aurons Meta, histoire de voir si « Zuck » va encore virer du monde pour garantir son train de vie.

Actuellement les futures sont en hausse de 0.5% – merci à Microsoft. En ce qui me concerne, je vous souhaite une excellente journée et comme d’habitude, on se voit demain à la même heure et au même endroit !

À demain !

Thomas Veillet
Investir.ch

“The best way to predict the future is to invent it.”

– Alan Kay