La note macro de Nicolas Blanc, Responsable de l’Allocation chez Ellipsis AM.

La BCE a voulu couper court aux spéculations sur l’évolution de son programme d’assouplissement en publiant un communiqué quasiment identique aux précédents. Pour enfoncer le clou, Mario Draghi a repris les propos qu’il avait tenus à la précédente conférence de presse pour démontrer qu’il n’avait jamais suggéré que le Conseil allait annoncer la fin définitive du programme d’achat, qui reste donc sans limite fixe et dépendant de l’évolution de l’inflation.

Malgré ces efforts, l’impact de marché de la réunion a été nettement hawkish, avec une hausse des taux longs et de l’euro/dollar. Sur le dossier des changes, il a vertement critiqué les propos du secrétaire du Trésor américain – qui s’était réjoui à Davos de la baisse du dollar – en indiquant que celui-ci sortait du cadre négocié pour éviter la guerre des changes (agreed terms of reference). La crainte exprimée par la BCE est qu’une forme de dévaluation larvée des US n’entraine un resserrement non voulu des conditions financières en zone euro, l’obligeant alors à revoir sa stratégie monétaire.

Une manière subtile d’exprimer que la BCE pourrait agir, en cas de guerre des changes, non pas uniquement au travers de son programme d’achat mais par d’autres moyens (directement sur le marché des changes?). Et c’est peut-être là la cause de la hausse observée des taux, le niveau du dollar n’étant plus perçu comme un facteur contraignant le maintien du programme d’achat, ce qui diminue mécaniquement la pression acheteuse sur les taux. On notera que Donald Trump a immédiatement contredit son secrétaire au Trésor en affirmant qu’il souhaitait un dollar «finalement fort», inversant une grande partie des impacts de marché de la réunion de la BCE.

Il faudra attendre mars pour avoir plus de visibilité sur la stratégie de sortie du QE, avec, alors, la confirmation ou non de l’accélération de la conjoncture.

Eurozone: Harder, better, faster, stronger

La reprise en zone euro semble avoir rompu les contraintes qui l’avaient bridée pendant si longtemps. La publication, cette semaine, du PMI Composite à 58,6 (un niveau déjà enregistré seulement lors des expansions de 1999-2000 et de 2006) marque encore une accélération, le mois précédent s’établissant à 58,1 et surprend à nouveau le consensus à la hausse, les attentes étant à 57,9.

Les embauches apparaissent à leur niveau le plus élevé depuis 17 ans, ce qui devrait soutenir la consommation et permet donc de prolonger la tendance positive. L’enquête a relevé un rattrapage des services par rapport à l’activité manufacturière, qui s’est légèrement tassée, tandis que les directeurs d’achat interrogés indiquaient l’émergence de pressions sur les prix. Si on compare cet indicateur avancé aux niveaux auxquels la croissance s’est effectivement établie, on voit qu’il a montré une assez grande fiabilité dans les dernières années. Il apparait donc justifié de lui faire confiance, et de considérer que la conjoncture accélère encore en ce début d’année, à un niveau instantané (pour le premier mois du T1 2018) approchant les 4%, inimaginable il y a encore un an.

De manière également très inhabituelle, c’est la zone euro qui tire à la hausse les révisions de la croissance mondiale. Comme indiqué ci-dessus, cette accélération ne justifie pas, pour le moment,
d’inflexion significative dans la politique monétaire, ce qui maintient les conditions extrêmement favorables dont bénéficient les actifs risqués.