La campagne présidentielle américaine est un véritable western: injures, surnoms, duels fratricides, tous les coups sont permis. Dans un climat de tensions communautaires inédit, au cœur d’une crise économique jamais vue depuis un siècle, les maux américains resurgissent dans une Amérique qui peut rapidement basculer dans la violence.
A quelques semaines d’une élection présidentielle qui semble très indécise, les Etats-Unis font face à une crise majeure. Les tensions s’accumulent dans un pays qui fait face à deux maux en capacité d’influencer les résultats du scrutin de début novembre: la pauvreté et la criminalité. Des maux qui pourraient même conduire à des tensions sociales jamais vues dans le pays.
Un programme alimentaire qui explose
La crise sanitaire a durement frappé les Etats-Unis au printemps. Contrairement à l’Europe, le filet social aux Etats-Unis est quasiment inexistant, les nouveaux chômeurs se sont retrouvés presque instantanément sans argent. La seule aide proposée par l’Etat américain est le programme SNAP (Supplemental Nutrition Assistance Program), soit un programme d’aide alimentaire.
Le nombre de bénéficiaires et la proportion de la population de ce programme alimentaire sont en constante augmentation depuis 40 ans. La crise a évidemment poussé un grand nombre de ménages vers cette aide. Ils sont en avril 2020 près de 45 millions d’individus qui dépendent d’une aide pour manger.
La première puissance économique du monde voit donc 14% de sa population se retrouver à devoir aller dans une banque alimentaire quelques jours après le début de la crise économique du mois de mars. La disparité au sein du pays est assez importante. Certains états ont vu le nombre de bénéficiaires du SNAP augmenter de plus de 50% en un mois.
Un pays violent et communautarisé
L’année 2020 est également marquée par des tensions sociales importantes au sein du pays. Le mouvement «Black Lives Matter» en est un des symboles. Les agressions se multiplient dans un pays communautarisé qui peut ressembler à une poudrière tant le nombre d’armes en circulation est important. Elles sont estimées à 357 millions en 2015 par le Washington Post soit plus d’une arme par habitant. Le lobby des armes (NRA – National Rifle Association) est un groupe de pression puissant qui pèse lors d’une élection présidentielle avec ses 4 millions d’adhérents.
Avec 89% des habitants possédant une arme à feu, on comprend également que les tensions ethniques peuvent rapidement devenir sanglantes.
Malgré cela le pays n’est pas le plus violent au monde. L’Amérique du Sud et les Caraïbes le devancent largement dans ce classement cauchemardesque.
Source : Variées Ingraham, Christopher (5 October 2015). « There are now more guns than people in the United States ». The Washington Post. ISSN 0190-8286. Retrieved 5 October2015., Serbia – South Eastern Europe: Weapons Possession Per 100 Inhabitants », Wikipedia.
Le taux de crime violent a baissé entre 1990 et 2010. Les efforts menés par la police dans les banlieues chaudes des grandes villes américaines ont été bénéfiques. On se souvient par exemple du programme de tolérance zéro à New York. Ce programme avait réduit les homicides de 65% en 7 ans.
Malheureusement depuis quelques années, les blessés ou tués par armes à feu sont à nouveau en augmentation.
En 2019 ce sont près de 30’000 personnes qui ont été blessées (volontairement ou non) par armes à feu, et près de 15’000 morts sont à déplorer. Les enfants et adolescents sont de plus en plus touchés.
Finalement les tueries de masse sont en augmentation. Elles dépassent le chiffre de 400 en 2019. Ces massacres endeuillent en moyenne le pays chaque jour de l’année.
Un pays fracturé
Les Etats-Unis sont un pays fracturé. Les communautés s’opposent de plus en plus. Elles s’identifient plus par leurs différences (couleur de peau, origines) que par ce qui les réunit (appartenance au même pays, valeurs de liberté).
Les origines ethniques sont aux Etats-Unis un marqueur politique, d’où leurs importances lors de la prochaine élection. Ils sont facteur d’équilibre dans le pays, ou de déséquilibre si les autorités politiques ne sont plus en adéquation avec la population. De nombreux pays ont connu des renversements de régime, notamment au Moyen Orient, lorsque les origines, les langues ou les religions évoluaient sur le territoire.
Les Etats-Unis vivent toujours dans un western. L’élection du mois de novembre pourrait être un remake du film de Sergio Leone «Le bon, la brute et le truand». Il pourrait être renommé dans l’environnement actuel en «Le président, le pauvre et le criminel», ou comment un président peut réussir à rassembler des électeurs dans un pays où la violence réaugmente et où la faim peut ressurgir au gré d’une crise.
Source : Census Bureau, FBI, Gun Violence Archive, SNAP, FMI, Wikipedia, XO Investments