L’économie indienne fait face à une grave crise sanitaire. Alors que certains capitaux étrangers fuient le pays, le marché des actions gardent des atouts indéniables.

Par Charles-Henry Monchau, CFA, CMT, CAIA – CIO de FlowBank

 

Charles-Henry MoncheauLe variant indien

L’Inde est submergée par la nouvelle vague de coronavirus. Les cas ont triplé par rapport au mois dernier, touchant plus de 400’000 personnes le week-end dernier. Les hôpitaux souffrent notamment d’une pénurie d’oxygène. On dénombre environ 4’000 décès quotidiens, soit un taux de mortalité de 1,1%.

La situation en termes de vaccination est compliquée. En Inde, seuls 2,6% de la population ont reçu les deux vaccins, tandis que 9,8% ont reçu le premier. Un confinement national est probablement nécessaire, car le virus continue de se propager dans les États clés, ceux qui produisent deux tiers du PIB. Des analyses démontrent que chaque mois de confinement en Inde entraîne une perte de 100 à 200 points de base du PIB.

La Reserve Bank of India (RBI) finance certains des plans de d’approvisionnement alimentaire du gouvernement, ainsi que les prêts aux petites et moyennes entreprises. Les secteurs les plus touchés par le confinement sont l’industrie manufacturière, l’approvisionnement en électricité, gaz et eau, les services dans la construction et le commerce, les hôtels et les transports.

Les banques pourraient en revanche sortir «gagnantes» de cette situation, car l’augmentation des prêts accordés aux PME jusqu’en octobre 2021 pourrait doper leurs résultats financiers. En outre, avant que le nouveau variant du Covid ne fasse son apparition, l’économie de l’Inde bénéficiait d’une remarquable reprise en «V». Le FMI prévoyait une croissance supérieure à 12%.

Les investisseurs domestiques volent au secours des actions indiennes

Les marchés d’actions souffrent de cette crise, tout en se montrant plutôt résiliant. Ainsi, l’ETF iShares India 50 (INDY) a baissé de 7% depuis la mi-mars, un recul plus ou moins comparable à celui de l’ETF iShares MSCI Emerging Markets ($EEM) sur la même période.

Par contre, on observe une fuite de certains capitaux étrangers qui craignent une péjoration de la crise sanitaire et ses impacts sur l’économie. A contrario, les investisseurs domestiques semblent avoir adopté une démarche plutôt opportuniste en accumulant des positions sur les quatre plus grandes sociétés informatiques mais surtout en privilégiant les petites et moyennes capitalisations. Comme le montre le graphique ci-dessous, il existe depuis quelques semaines une certaine dichotomie entre la performance du S&P BSE Small Cap Index – qui enregistre de nouveaux plus hauts – et celle du S&P BSE Index.

small cap indiennes

Des statistiques montrent que les investisseurs institutionnels locaux ont été acheteurs nets d’actions indiennes au cours des deux derniers mois, injectant pour l’équivalent de 1,5 milliard de dollars dans le marché (dont la taille est d’environ 2,8 trillions de dollar). Ces achats ont donc contrebalancé les flux vendeurs des investisseurs internationaux.

investisseur domestique

marché des actions indiennes

De solides perspectives pour les prêts immobiliers en Inde

Les nouvelles réglementations concernant les pratiques en matière de prêts immobiliers de même que les subventions et bonifications de taux d’intérêt accordées par le gouvernement ont contribué à donner une certaine impulsion au secteur des prêts immobiliers en Inde.

En outre, la résurgence du virus et les probables confinements à venir incitent les particuliers à accéder à la propriété par le biais des prêts hypothécaires. Certains tablent sur une croissance de 15 à 18% de l’activité de prêt immobilier en Inde dans les années à venir.

Les sociétés de prêts hypothécaires cotées en bourse ont signalé une augmentation de 30% de leurs bénéfices par rapport à la même période l’année dernière. Nomura a déclaré cette semaine que le segment des prêts hypothécaires pourrait être le plus résilient pendant cette crise sanitaire. Les taux hypothécaires sont revenus à des niveaux parmi les plus bas depuis 2008 (6,7%) alors que la demande de logements est en hausse, encouragée par des prix de l’immobilier qui restent très abordables.

Forte reprise des introductions en bourse

IPOs indiennes
Source : EY

Les bourses indiennes se classent actuellement au neuvième rang mondial en termes de nombre d’introductions en bourse depuis le début de l’année. Au premier trimestre 2021, 17 sociétés sont entrées en cotation contre une seule à la même période l’année dernière.

2021 va-t-il être l’année d’un retournement de tendance en terme du nombre et des montants d’introductions en bourse? Comme le montre le graphique, le marché des IPO est en recul depuis 2017.

Au 1er trimestre de cette année, les 17 introductions en bourse en Inde ont eu lieu principalement dans les secteurs des produits de consommation, du commerce de détail, de l’industrie et des transports et ont permis de lever 2,57 milliards de dollars, soit une hausse de 82% par rapport à l’année dernière. Attention toutefois, près de la moitié du montant levé en bourse provient de seulement deux sociétés – Indian Railway Finance Corp et Brookfield India Real Estate Trust.

Il y a actuellement plus de 20 sociétés en attente d’introduction en bourse alors qu’au moins 30 sociétés financées par du capital-risque espèrent également devenir cotées lors du second semestre 2021. Il y a donc bon espoir que le marché des IPO en Inde retrouve son dynamisme d’antan. La SEBI (la SEC indienne) semble y être favorable puisqu’elle vient d’assouplir les normes d’exigences minimales pour les «start-ups» qui souhaitent accéder à des fonds publics. Ces mesures pourraient bénéficier aux «licornes» (startups évaluées à plus d’un milliard de dollars), dont certaines sont présentées dans le graphique suivant :

Unicorns

Conclusion

Malgré la sévérité de la crise sanitaire, les perspectives pour les marchés des actions indiennes restent robustes. Les introductions en bourse connaissent une embellie, l’accès au logement se démocratise et le secteur des technologies de l’information reste solide. Alors que certains investisseurs étrangers ont préféré réduire leur exposition aux actions indiennes, les investisseurs locaux saisissent les opportunités, notamment sur les valeurs bancaires et les petites et moyennes capitalisations.

 

Rendez-vous sur www.flowbank.com