La saison européenne de football vient de se terminer et après les résultats sportifs, l’heure des résultats financiers va suivre dans les prochains mois. L’année 2017/2018 ayant été marquée par les 10 ans de la création du Fair Play Financier (FFP), c’est l’occasion pour nous de faire un état des lieux, au travers du rapport financier de l’UEFA, de l’évolution du football et de ses caractéristiques financières1 .

Les clubs européens vivent depuis une dizaine d’année une petite révolution. Alors qu’ils étaient auparavant des clubs en mains locales, des étrangers deviennent progressivement les actionnaires majoritaires des grands clubs européens. En Angleterre ce ne sont pas moins de 13 clubs sur 20 qui sont détenus par des propriétaires étrangers.

Ces investisseurs sont majoritairement des Européens mais les détenteurs asiatiques prennent de plus en plus de place au sein de ces grands championnats. Les règles de détention sont différentes entre les pays mais certains pays (dont l’Espagne, l’Angleterre ou la Suisse) ont mis en place des contraintes financières pour les nouveaux propriétaires afin de respecter plus facilement les règles du FFP.

Sur les 10 premières années d’application des règles du Fair Play Financier, les clubs européens ont vu leurs revenus progresser en moyenne de 6.6% par an pour atteindre une valeur totale de plus de 20 milliards d’EUR. Cette tendance est continue pour l’ensemble des pays de la zone. L’Angleterre est le pays le plus dynamique et représente aujourd’hui près de 27% du total des revenus contre 22% 10 ans auparavant. La différence entre les 10 premiers pays et les autres tend à s’accroître, le poids des petits étant passé de 18% à 12%.


Avec une croissance de près d’un milliard d’EUR par an le football est un secteur en forte croissance. La croissance est principalement soutenue par les droits TV qui ont augmenté de 113% sur les 10 dernières années et les droits UEFA de 228%.

Les droits TV représentent en 2017 37% du total des revenus des clubs, les revenus de l’UEFA 10%, les sponsors 23%, les entrées seulement 15%. Mais ces chiffres varient fortement d’un pays à l’autre. Les droits TV représentent ainsi 54% des revenus des clubs anglais contre 5% pour les clubs russes.

Un des critères les plus intéressants pour comprendre la solidité financière des clubs est le pourcentage des revenus qui sont alloués aux salaires. Avec un chiffre légèrement supérieur à 60%, le football consacre un pourcentage largement supérieur à ce qui se pratique dans les autres industries. Ce chiffre est en décroissance depuis 10 ans, permettant ainsi une plus grande solidité financière. Depuis 2012 la croissance des salaires est inférieure à celle des revenus ce qui permet cette nette amélioration.

Cette tendance se constate également au niveau des profits et pertes reportés par les clubs. L’année 2017 a été la première année de profits depuis l’introduction du FFP avec un bénéfice final de 615 millions d’EUR, soit plus de 2.3 milliards d’amélioration depuis 2011, pire année financière.

Ces résultats sont le fait d’une amélioration continue des marges opérationnelles des clubs qui ne comptent plus forcément sur les transferts pour équilibrer leurs comptes. Les clubs anglais sont les « entreprises » les plus bénéciaires ces dernières années. L’intégration des transferts péjore néamoins ce résultat puisque le championnat anglais dépense bien plus qu’il ne reçoit en transfert. C’est évidemment l’inverse pour les petits championnats comme le Portugal ou la Suisse qui, malgré des pertes opérationnelles, générent des profits finaux grace aux bénéfices résultant des transferts. Malgré un soutien populaire considérable, la Grèce ou la Turquie présentent des résultats extrêmement négatifs.

Marges opérationnelles et nettes des ligues

Ce sont évidemment les championnats anglais et espagnol et leurs grands clubs qui génèrent ces chiffres en forte progression. Les choses sont plus hétérogènes dans des championnats comme l’Italie ou la France où près de la moitié des clubs présentent des chiffres rouges.

En terme de bilan la situation s’améliore également même si globalement seulement 19% des clubs européens font état de leur stade comme un actif.

 

Au niveau des passifs, la dette se réduit peu à peu pour atteindre en moyenne 34% des revenus en 2017. Beaucoup de pays européens voudraient avoir une dette étatique avec un tel pourcentage de leur PIB!

Finalement de tout ceci résulte une valeur (actifs moins dettes) en forte progression à 7.7 milliards d’EUR. Une valeur qui a été multipliée par 4 en 10 ans, signe d’une gestion saine des clubs.

Le football est devenu avec les nouvelles règles du Fair Play Financier un secteur en pleine croissance avec des chiffres économiques sains. Mais seuls 21 clubs des principaux championnats sont listés sur une bourse, ce qui limite la possibilité aux investisseurs de pouvoir profiter de cette croissance. Cette tendance est même à la baisse puisque que certains clubs se sont délistés dans les dernières années.

Les résultats boursiers sont très disparates et ne dépendent que peu des performances sportives. Les principaux facteurs de mouvement sont les accords commerciaux de ces entreprises ou encore la gestion des stades. Il est donc difficile de profiter facilement de cette dynamique financière positive à moins d’accepter que cet investissement soit fortement aléatoire et sans génération de dividende. La question sera de savoir si cette tendance se poursuivra pour atteindre un type de championnats ressemblant aux grandes ligues américaines où même les fonds de pension investissent dans ces franchises.