Le dernier épisode de la série à succès Game of Thrones a, semble-t-il, quelque peu déçu les spectateurs. Mais les aficionados d’intrigues géopolitiques et de suspense auront trouvé de quoi se consoler avec le redémarrage en fanfare de la saga phare de l’année dernière: la guerre commerciale!

Olivier de Berranger, CIO, La Financière de l’Echiquier

Alors que les investisseurs avaient «acheté» la détente entre les Etats-Unis et la Chine, et qu’un accord commercial entre les deux superpuissances semblait proche, Donald Trump a fait vaciller ce bel optimisme. Dans un tweet publié dimanche dernier, le Président américain a menacé de porter de 10 à 25% les taxes douanières sur 200 milliards de dollars de produits chinois importés. Il a ensuite ajouté que 325 milliards de dollars de produits supplémentaires pourraient également être taxés à 25% dans un second temps. En cause, un apparent revirement de la Chine dans les discussions commerciales entre les deux pays. Pékin aurait en effet renvoyé à Washington une version amendée et édulcorée du projet d’accord commercial, en retirant notamment tout engagement à légiférer contre le transfert forcé de technologie, le vol de propriété intellectuelle, l’accès aux marchés financiers ou encore la manipulation de la devise – tous les points cruciaux sur lesquels portaient les négociations depuis plusieurs mois.

Après avoir fait planer le doute sur leur venue, les autorités chinoises ont finalement décidé de se rendre malgré tout à Washington jeudi et vendredi, tout en précisant qu’elles ne feraient pas de concessions. Mercredi, à l’occasion d’un rassemblement électoral en Floride, Donald Trump a réitéré ses menaces, tout en accusant la Chine d’avoir «brisé l’accord». Dans le même temps, le ministère chinois du commerce a indiqué que des contre-mesures seraient adoptées en cas de relèvement des tarifs douaniers américains. S’en est suivi, jeudi, une série de déclarations soufflant le chaud et le froid: Donald Trump a expliqué que lui avait été présentée une «excellente alternative» au projet d’accord et qu’il s’entretiendrait probablement sous peu avec son homologue Xi Jinping, avant d’annoncer qu’un travail en vue de la taxation de 325 milliards de dollars supplémentaires d’importations chinoises avait été entamé.

Finalement, vendredi, l’administration américaine a officiellement porté de 10 à 25% les droits de douane sur 200 milliards de dollars de produits chinois. Les autorités chinoises ont déclaré qu’elles allaient prendre des mesures de représailles. Les discussions, qui se sont poursuivies sans aboutir à aucun accord, reprendront à une date indéterminée. Au cours du week-end, Donald Trump a réitéré ses menaces, appelant la Chine à tout faire pour parvenir à un accord, expliquant que la situation serait «bien pire» après 2020 (après son éventuelle réélection). Plus laconiquement, par la voix du porte-parole de son ministère du commerce, la Chine s’est contentée de dire qu’elle «ne capitulera pas face à la pression».

Dans ce dossier, le risque paraît aujourd’hui asymétrique. Le scénario d’un accord entre les deux parties était en effet intégré dans les cours, et malgré la baisse des marchés la semaine dernière, on observe une certaine complaisance vis-à-vis de la situation. Or, le risque de voir les discussions s’enliser et la perspective d’un deal s’éloigner n’est pas nul. Dans un cas extrême, la situation pourrait même entraîner un regain de craintes sur la croissance mondiale, l’amélioration des perspectives pour le 2e semestre reposant en partie sur l’accalmie des sujets géopolitiques. Alors que les marchés évoluent sur des niveaux élevés après l’important rallye de début d’année, il nous semble opportun d’agir avec prudence et méfiance. Nous avons ainsi significativement couvert nos portefeuilles, notamment au sein des fonds d’allocation et diversifiés.