Les négociations commerciales sino-américaines et le Brexit semblent avoir entamé leur dernière ligne droite.

Olivier de Berranger, CIO, La Financière de l’Echiquier

Mettons un instant de côté l’antagonisme entre l’assouplissement des banques centrales et une macroéconomie morose qui a prévalu au premier trimestre pour nous intéresser à l’un des grands spectres de 2018: la (géo)politique. Les négociations commerciales sino-américaines et le Brexit, les deux principaux dossiers, semblent avoir entamé leur dernière ligne droite. Mais les potentiels rebondissements sont encore trop nombreux pour que l’on ne reste pas vigilants.

La semaine a été riche sur le front de la « guerre commerciale ». Dimanche dernier, la Chine a annoncé la prolongation du moratoire sur de nouvelles taxes touchant les automobiles et pièces détachées américaines, qui devait expirer le 1er avril. Un signe de bonne volonté en amont de la reprise des négociations, à Washington cette fois-ci, dont la rencontre, jeudi, entre le vice-Premier ministre chinois Liu He et Donald Trump, a été le point d’orgue. A l’issue de l’entretien, le Président américain a estimé que les Etats-Unis et la Chine étaient très proches d’un accord et que celui-ci pourrait être conclu d’ici à quatre semaines, évoquant «quelque chose de monumental». Un message très positif, qui n’empêche pas de rester méfiants. D. Trump a en effet prévenu qu’un échec des négociations pourrait signifier la fin des tractations, et son représentant au commerce Robert Lighthizer a précisé que plusieurs «problèmes majeurs» restaient à résoudre. Le risque semble à présent légèrement asymétrique sur ce dossier, avec des marchés qui ont intégré une issue positive de ces négociations et pourraient donc être pris à contre-pied en cas de revirement.

Côté Brexit, aucune des neuf options alternatives présentées aux parlementaires lors de la séance de lundi dernier n’a obtenu de majorité. Theresa May a donc changé, une nouvelle fois, de stratégie. Elle a ainsi tendu la main à son adversaire travailliste Jeremy Corbyn, en demandant un report court de l’article 50 (au 22 mai) et en appelant à une union transpartisane, afin de pouvoir présenter une solution lors du sommet européen du 10 avril. Il ne s’agit pas de modifier le projet d’accord conclu avec l’UE en novembre mais de redéfinir la déclaration politique qui l’accompagne. Cette main tendue par la Première ministre a rapidement été saisie par le leader du Labour, sans que les discussions aient, pour l’heure, abouti. Cette tentative de compromis entre le gouvernement et l’opposition est vue d’un très bon œil à Bruxelles. Le président du Conseil européen, Donald Tusk, a ainsi émis l’idée d’un report flexible de la date du Brexit, pouvant aller jusqu’à 12 mois. Cette option permettrait au Royaume-Uni de quitter l’UE dès la ratification de l’accord par le Parlement. L’accord unanime des dirigeants européens devra néanmoins être obtenu. Le risque pour les marchés semble en tout cas un peu plus équilibré que dans le dossier de la guerre commerciale. Certes, un hard Brexit créerait un choc sur les marchés, européens notamment, britannique en tête, mais les scénarios potentiels sont tellement nombreux et flous qu’une issue positive n’est pas non plus totalement intégrée dans les prix.

Dans un cas comme dans l’autre, si le risque de retournement de situation de dernière minute n’est pas à exclure, une issue se rapproche. Une conclusion positive serait une bonne nouvelle pour les marchés mais pas nécessairement un catalyseur suffisamment puissant pour porter une nouvelle vague de hausse. Quoi qu’il en soit, cela offrirait davantage de visibilité aux investisseurs et leur permettrait de se reconcentrer sur les fondamentaux économiques, au moment où les entreprises s’apprêtent à publier leurs résultats du premier trimestre.