Revue hebdomadaire des principaux facteurs influençant les marchés financiers.

Nicolas Blanc, Responsable de l’Allocation chez Ellipsis AM

Goldilocks, édition 2018

Le conte des trois ours, qui a servi de métaphore pour l’environnement d’investissement ces dernières années, a fortement varié dans son dénouement. Si les versions actuelles sont plutôt clémentes pour l’héroïne fautive, elle se casse le cou en s’enfuyant dans les versions anciennes, terrifiée par les trois ours. Or, sur les marchés également, le dénouement approche inexorablement: il ne fait pas de doute que le contexte particulièrement favorable de 2017 – croissance au dessus du potentiel et politique monétaire globalement expansionniste – ne pourra se maintenir longtemps. Deux questions demeurent cependant ouvertes: qu’est-ce que «longtemps» ? Et à quoi ressemblera la suite ?

Sur la première, il nous semble que le momentum visible en cette fin d’année (activité synchronisée, reprise de l’investissement productif) permet d’être assez confiant sur une croissance toujours solide en 2018. Sur l’inflation, les comportements ayant conduit à la situation actuelle (la relation entre chômage et salaires, la formation des prix du pétrole) seront lents à évoluer et la probabilité d’une flambée de l’inflation apparait donc limitée.

Sur la seconde question, on peut tabler – avec, bien sûr, l’information dont on dispose aujourd’hui – sur un atterrissage assez doux, là encore, en raison de la réaction mesurée de l’inflation ainsi que du contrôle prudentiel du secteur financier. Pour autant, il faudra bien finir par encaisser une baisse de la croissance d’au-moins un point et un retour à des taux réels positifs, deux éléments qui pèseront certainement sur la rentabilité des actifs mais pas nécessairement dès l’année prochaine.

 

La Fed suit son bonhomme de chemin

La Fed a procédé, comme elle l’avait clairement laissé entendre au préalable, à une hausse de 25bp de ses taux directeurs. De fait, rien dans la série des chiffres économiques publiés avant le FOMC n’était de nature à réviser négativement ses projections macroéconomiques. Au contraire, la Fed a accru nettement ses estimations de croissance, pour un total de 0,8 points sur la période 2017-2020, dont 0,4 pour 2018. Sur la même période, le taux de chômage est désormais attendu 0,2 points plus bas, une situation évidemment de plein-emploi. Avec une hausse de l’emploi désormais contrainte, la Fed attribue le gain de croissance en 2018 à un effet de productivité devant résulter de la reprise observée de l’investissement des entreprises.

En revanche, Janet Yellen a réitéré son opinion que les effets à attendre de la réforme fiscale seront limités. En dépit de cet optimisme sur l’activité, les prévisions d’inflation restent inchangées, ainsi que la séquence attendue des hausses de taux (sauf en 2020, où elles ont été rehaussées). De même, les éléments tendanciels – croissance et chômage à long-terme – restent à 1,8% et 4,6%, respectivement. La Fed s’autorise donc à maintenir le même cap et à offrir des conditions financières accommodantes à l’économie, considérant que des forces dépressives pèsent toujours sur l’inflation et que le retour de la courbe de Phillips n’est pas à craindre dans l’immédiat. Le marché a d’ailleurs accueilli cette décision de «hausse dovish» avec une baisse des taux longs. Les plans déjà annoncés pour la réduction du bilan sont maintenus, de sorte que le rythme va bien passer à 20Mds/mois (maximum) au T1 2018. On notera que deux membres dovish se sont opposés à la décision mais ils seront remplacés l’année prochaine au sein du FOMC. Avec la prise de fonction de J. Powell en début d’année, aucune inflexion significative n’est à craindre.