Revue hebdomadaire des principaux facteurs influençant les marchés financiers.

Nicolas Blanc, Responsable de l’Allocation chez Ellipsis AM

La confiance traverse l’Atlantique

Alors que la volatilité réalisée sur les marchés action ainsi que les spreads de crédit des instruments de couverture atteignent des niveaux historiquement bas, les opérateurs de marché restent sur leurs gardes et maintiennent un niveau de vigilance élevé en ce qui concerne l’évolution du marché des changes. Le spectre de l’été 2015 reste dans les mémoires, la décision des autorités chinoises de dévaluer le yuan ayant été le catalyseur de la violente correction des actifs risqués jusqu’au printemps 2016. A ce stade, la situation ne nous parait pas comparable.

Si l’on s’attarde en particulier sur la parité euro/dollar, on constate que depuis plusieurs mois la relation entre le taux de change et le différentiel de taux d’intérêt réel entre les deux économies ne fonctionne plus. Du fait du décalage de cycle entre les politiques monétaires de la Fed et de la BCE, de nombreux stratégistes envisageaient en début d’année une parité à 1 entre les deux devises, un scénario qui semble s’éloigner de jour en jour et qui justifie en grande partie les craintes des marchés. Pour autant, cette vision monétariste est loin d’être aberrante. En effet, la Fed continue d’avancer progressivement dans son resserrement monétaire, le début de la réduction de la taille de son bilan devant intervenir d’ici la fin de l’année. De son coté, la BCE reste vague quant aux mesures qu’elle va mettre en place à la fin de son programme de rachats début 2018 et continue de garder toutes les options ouvertes. L’écart maximum du niveau d’accommodation entre les deux banques centrales n’ayant pas encore été atteint, ceci devrait justifier une dépréciation de l’euro.

Faut il pour autant s’inquiéter de la situation actuelle? Nous ne le pensons pas. A 1,18 l’euro est loin d’être surévalué par rapport au dollar, au contraire la devise unique continue d’être sous- évaluée d’environ 2% par rapport à sa parité de pouvoir d’achat. Certes, l’euro s’est apprécié de plus de 12% depuis les points bas du début d’année, mais il faut garder en tête que le taux de change moyen entre l’euro et l’USD a plutôt oscillé autour de 1,10 en 2015 et 2016.

Au final, l’évolution récente de la parité euro/dollar est la résultante de la dynamique de flux entre les deux économies. Après un second trimestre particulièrement robuste sur le plan de l’activité économique et suite à l’apaisement des craintes entourant l’élection présidentielle en France, la confiance vis-à-vis de la zone Euro semble être revenue. A l’inverse, les USA continuent de décevoir en ce qui concerne la reprise de l’inflation, les salaires en particulier peinent à décoller significativement. Sur le plan économique, l’enlisement des discussions concernant l’abrogation de l’Obamacare devrait provoquer des retards quant à l’implémentation de l’ambitieuse réforme fiscale attendue par les marchés. Le FMI par exemple a déjà commencé à réviser à la baisse ses prévisions de croissance pour 2017 et 2018. En outre, les prochaines négociations du plafond de la dette pourraient faire ressurgir des inquiétudes quant à un nouvel épisode de shutdown aux US. Enfin, la mise en place d’un grand jury par le procureur spécial Mueller concernant les relations présumées de l’entourage de Trump avec la Russie pourrait indiquer que des inculpations sont possibles. L’image de marque du Président Trump en prendrait un nouveau coup. Mis bout à bout, on comprend aisément le regain de confiance de la zone Euro vis- à-vis des Etats-Unis et l’appréciation de la devise unique qui en découle