Alors que le quatrième trimestre de cette année extraordinaire approche à grands pas, nous estimons que certains des risques auxquels les investisseurs obligataires ont été confrontés au premier trimestre referont surface avant la fin 2021.

Par Mark Holman, CEO, TwentyFour AM, Vontobel

 

VONTOBEL - Mark Holman, PDG de TwentyFour Asset ManagementSelon nous, le retour à des rendements des bons du Trésor plus élevés et ses retombées sur les marchés financiers représentent le principal risque. En résumé, les rendements à 10 ans ont démarré l’année à 90 pb, avant de remonter très rapidement et manière relativement désordonnée, à 1,70% à la fin du premier trimestre. A ce moment-là, cette évolution avait été déclenchée par la puissante reprise économique qui se profilait à l’horizon, notamment aux Etats-Unis, accompagnant le retour à la normale sous l’effet de la progression des campagnes de vaccination. Par ailleurs, les démocrates avaient réussi à prendre le contrôle de la Chambre des représentants et du Sénat, ce qui augurait une augmentation significative des émissions de bons du Trésor. Enfin, les participants au marché s’attendaient à ce que l’inflation s’envole dans les mois suivants sous l’effet de problématiques transitoires et des effets de base.

Comme vous pouvez le voir dans le graphique ci-dessous, la hausse des rendements des bons du Trésor a contraint les investisseurs obligataires à se reporter sur des émissions nettement moins bien notées afin d’obtenir des rendements suffisants pour contrer cette tendance. Bien évidemment, il existait d’autres moyens de protéger les portefeuilles contre la hausse des rendements, par exemple par l’intermédiaire de couvertures ou d’un net raccourcissement de la duration.

2021.09.21.Vontobel Total return obligataire

Les prix des bons du Trésor ont rebondi au deuxième trimestre, provoquant la baisse des rendements à 10 ans à 1,12%, ce qui est remarquable compte tenu des statistiques d’inflation que les investisseurs ont dû digérer à ce moment-là. Ce rebond a été (à juste titre) mis au crédit du positionnement technique. En effet, les investisseurs ont été nombreux à prendre des positions courtes sur l’extrémité longue de la courbe, que ce soit directement ou par l’intermédiaire de paris sur la pentification privilégiant la détention d’obligations à court terme au détriment de titres à long terme.

Toutefois, ces dernières semaines, les rendements des bons du Trésor sont lentement repartis à la hausse avec beaucoup moins de résistance compte tenu de la nette diminution du nombre de positions courtes. Les chiffres de l’emploi non agricole aux Etats-Unis, publiés vendredi, donnent une bonne indication de la dynamique. Au début de l’été, un tel écart entre le nombre d’emplois créés (235.000) et les prévisions (733.000) aurait certainement déclenché un autre vague de liquidations forcées des positions vendeuses («short squeeze»). Mais vendredi, l’attention des participants au marché était également concentrée sur le salaire horaire moyen, ressorti en hausse de 4,3% en glissement annuel. Nous y avons vu là un bon indicateur d’un positionnement plus équilibré sur le marché des bons du Trésor américain, l’un des pans du marché obligataire les plus surveillés et les plus imprévisibles.

Alors pourquoi pensons-nous que les risques du premier trimestre devraient refaire surface au quatrième trimestre? Premièrement, comme indiqué, les facteurs techniques sont désormais plus équilibrés et propices à une évolution haussière des rendements des bons du Trésor, ce qui n’était pas le cas au deuxième trimestre. Deuxièmement, au fil des mois, l’économie se rapproche des objectifs de la Fed, permettant ainsi à cette dernière d’amorcer l’inévitable réduction de ses achats d’actifs («tapering») qui sera vraisemblablement annoncée lors de la réunion du comité de politique monétaire du 3 novembre. Troisièmement, les responsables de la Fed ont élargi la définition de «transitoire». Nous en saurons plus sur la nature durable du regain d’inflation actuel au cours du trimestre prochain.

Enfin, et comme au premier trimestre, les emprunts du Trésor vont sans doute repartir à la hausse lorsque le Congrès relèvera le plafond de la dette et qu’il faudra financer les nouvelles mesures de relance budgétaire.

Bien que nous n’attendions pas le même genre d’évolution qu’au premier trimestre, une version «bêta plus faible» pourrait en être une bonne description. Par exemple, si les rendements des bons du Trésor à dix ans clôturent l’année dans une fourchette comprise entre 1,50% et 1,75% (notre scénario de base), les investisseurs chercheront probablement à s’en protéger comme ils l’avaient fait au premier trimestre.