Né en 2013 d’un partenariat entre Rothschild HDF Investment Solutions et la société de gestion Parus Finance, R Parus Fund est un fonds long-short equity atypique et différenciant, doté d’un horizon d’investissement de long terme. Fidèle à la vocation de la plateforme InRIS de donner accès à des stratégies d’investissement innovantes au format UCITS sans les dénaturer, R Parus Fund met en oeuvre une approche fondamentale du long-short equity.

Marc-Antoine Chatin, Partner chez Parus Finance

Comment définiriez-vous le style de gestion de Parus Finance ?

Marc-Antoine Chatin : Les fondateurs de Parus Finance, Fabrice et Edouard Vecchioli, disposent d’une expérience de la gestion institutionnelle sur plusieurs classes d’actifs. A la fin des années 90, après 15 ans d’expérience dans le monde du crédit, Fabrice a souhaité élargir son expertise au monde des actions, principalement aux sociétés de croissance. Le style de Parus Finance s’est construit en deux ou trois ans, porté par l’ambition de gérer un fonds de long terme. Fort de son indépendance, Parus a pu s’affranchir de contraintes institutionnelles qui bien souvent restreignent les choix des gérants d’actifs. Les équipes de Parus Finance ont souhaité concentrer le processus d’investissement sur des éléments ayant une probabilité de succès élevée, en d’autres termes, des choses simples créant de la valeur sur le long terme. Cela nous a permis de nous démarquer en affichant un “hit ratio”1 de l’ordre de 60 à 70%.

 

Quels sont les éléments importants de votre philosophie de gestion ?

M-A.C. : Notre philosophie très bottom-up2 est fondée sur la valorisation intrinsèque des sociétés, avec une préférence pour les valeurs à forte croissance3. Mais c’est aussi grâce à notre capacité à vendre à découvert un certain type de sociétés que nous nous sommes démarqués. En effet, nous recherchons des entreprises particulièrement sensibles à une baisse d’activité structurelle ou cyclique du fait de la fragilité de leur bilan. Enfin, l’originalité de notre processus réside dans la variation de notre exposition nette au cours des cycles. Ce fonds va en effet être essentiellement acheteur, et donc afficher une exposition maximale aux marchés avec de fortes vues directionnelles pendant 4 à 5 ans, puis réduire progressivement cette exposition en se positionnant à la vente pendant 2 ou 3 ans. En synthèse, sur un cycle actions de 7 à 8 ans, le fonds demeure acheteur 70% du temps, puis neutre sur les 30% restant.

Cette séquence s’explique par le fait que les titres mettent davantage de temps à s’apprécier qu’à se déprécier. Nous raisonnons également en valeur absolue, chaque position devant être rémunératrice au travers du cycle.

 

Vos succès proviennent en grande partie de votre capacité à vendre à découvert. Pourquoi est-ce plus difficile de vendre que d’acheter ?

M-A.C. : La position de vendeur s’avère complexe pour tous les investisseurs à cause de l’asymétrie de gain qu’elle procure. En effet, lorsque que vous achetez une valeur, si le contexte est favorable, vos gains sont de plus en plus importants. Et si vous vous êtes trompés, la position s’autodiminue, donc les pertes deviennent de plus en plus faibles. L’asymétrie en l’espèce est assez positive. Pour les positions vendeuses, c’est l’inverse. En cas de vents contraires, les pertes s’accumulent alors qu’en cas de succès, les gains s’amoindrissent.

Une exception cependant : les sociétés dont le levier financier et le modèle opérationnel fragile les rendent particulièrement sensibles à une baisse d’activité. A cet égard, les compétences sur le crédit de nos gérants aident nécessairement.

 

Quelles stratégies implémentez-vous ?

M-A.C. : Deux stratégies sont à l’oeuvre dans la gestion de R Parus Fund. Nous capitalisons sur les sociétés de croissance à barrière compétitive forte, en les valorisant grâce à la méthode des
Discounted Cash Flow. Nous partons d’un univers comprenant près de 5000 sociétés auquel nous appliquons des filtres liés à leur potentiel de croissance, à des critères de qualité et de liquidité. Cela nous permet de réduire à près de 150 le nombre de valeurs que nous allons considérer. La seconde stratégie est celle du retour à la moyenne cyclique. Il s’agit d’une approche beaucoup plus “value” visant à mettre en perspective la valorisation des sociétés au regard du positionnement sur le cycle. Les filtres utilisés se focalisent notamment sur la qualité de leur bilan.

 

Quelles sont vos principales réussites ?

M-A.C. : Sur la partie acheteuse, nous avons été capable de déceler des valeurs de croissance bien avant les autres, à l’instar de titres tels que Apple, Facebook ou bien encore Tesla Motors. Toutefois, c’est également sur la partie vendeuse que Parus a construit sa réputation, notamment via notre gestion lors de la crise de 2007-2008 au cours de laquelle nous avons enregistré une performance positive. La stratégie a ainsi enregistré une progression de 35% sur l’année 2007 alors que le marché s’appréciait de 7%, elle a cédé 8% en 2008 et s’est appréciée de 49% en 2009.
Nous avons également su détecter l’intérêt de positions à la vente sur le secteur de l’énergie et minier en 2014 et 2015. Donc globalement, ce sont ces capacités à identifier des sociétés de croissance3 et à naviguer dans le cycle qui nous différencie, même si le timing de la partie cyclique reste complexe à optimiser et que le prix à payer pour notre approche de long terme est de faire face à des périodes de sous-performance, comme ce fut le cas en 2016.

 

Quels sont les principaux thèmes d’investissement de ces derniers mois ?

M-A.C. : Concernant les zones de forte croissance, trois marchés nous intéressent plus particulièrement en ce moment : le cloud, l’intelligence artificielle et le digital media. Nous suivons depuis longtemps le secteur du digital et sommes actuellement investis dans quatre sociétés : Google et Facebook respectivement depuis 2005 et 2012, et plus récemment Criteo (2015) et Adobe (2017). Même si certaines sociétés sont déjà bien connues des investisseurs, les opportunités demeurent. Facebook, par exemple, traite sur les mêmes multiples de résultats que L’Oréal, malgré un taux de croissance organique du chiffre d’affaires de près de 40%, contre seulement 5% pour L’Oréal. De même, Google affiche une décote sur cette dernière, en dépit d’un taux de croissance de l’ordre de 20%.

Plus récent que le digital media, le marché du cloud affiche un potentiel et des ramifications également sous-estimés par le marché. Nous imaginons un monde où six sociétés, à savoir Amazon, Microsoft, Google, Alibaba, Tencent et Baidu devraient détenir une grande majorité des “fermes” de serveurs dans le monde. Les barrières à l’entrée liées à la taille et à l’innovation rendent excessivement difficile toute introduction de nouveaux acteurs sur le segment ; un phénomène communément appelé de “winner takes all”. Cet avantage à la taille est amplifié par l’utilisation de l’intelligence artificielle, domaine dans lequel la capacité d’innovation reste un critère très différenciant.

Ce marché d’ailleurs est en pleine explosion et son potentiel est tel que l’on peut parler de “révolution industrielle”. Nous sommes investis dans Nvidia, le leader mondial des cartes graphiques qui bénéficie à plein de l’explosion du “machine learning” ou apprentissage automatique, permettant aux machines d’apprendre des informations qui leur sont présentées et de s’autoprogrammer. Nous nous intéressons également au secteur des véhicules électriques, via des sociétés telles que Tesla, mais cela ne représente qu’une faible part du portefeuille. Même si le secteur connaît un essor gigantesque, l’intensité capitalistique des business plans dans ce domaine rend l’investissement beaucoup plus incertain.

Sur la partie “short” de notre portefeuille, nous avons sensiblement renforcé nos positions sur le segment de la grande distribution, distribution spécialisée et les grands magasins, trois sous-segments de la “vente au détail” particulièrement affectée par la distribution en ligne. Si nous sommes “short” depuis un certain temps déjàsur des sociétés américaines comme Macy’s, Target, Kohl et Bed Bath & Beyond, nous avons récemment introduit une ligne vendeuse sur le titre Tesco ainsi que sur les centres commerciaux aux Etats-Unis. Par ailleurs, nous avons pris des positions vendeuses plus cycliques sur les secteurs des cartes de crédit aux Etats-Unis et du crédit automobile à la suite d’une détérioration des taux de défaut observables dans les données que nous analysons.

 

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1- Hit ratio : Taux de succès.
2- Bottom-Up : Approche basée sur l’analyse fondamentale des sociétés visant à identifier les opportunités d’investissement.
3- Société de croissance : Société dont le volume d’activité et les résultats financiers affichent de manière pérenne une forte croissance.