L'analyse d'un expert des manomètres de l'économie mondiale: Nicolas Blanc, Responsable de l’Allocation chez Ellipsis AM.

Les mesures annoncées par Donald Trump contre la Chine ont généré une hausse sensible de l’aversion au risque sur les marchés. A ce stade, effectivement, leurs conséquences sont délicates à évaluer: -au-delà du tapage initial, il reste à examiner les mesures effectives, -la réaction de la Chine, qui pourrait avoir intérêt à l’apaisement, est aujourd’hui une inconnue.

Le choix de la confrontation directe et médiatisée ne répond qu’à des objectifs d’affichage politique, ce qui n’est pas pour rassurer. Dans les faits, ces mesures (comme une large partie de sa réforme fiscale) devraient profiter à un petit nombre d’entreprises, au détriment des consommateurs américains, qui verront les prix augmenter, alors que les salaires stagnent. Au voisinage du plein emploi, l’effet sur le chômage sera négligeable.

Powell: la voie du milieu

Le premier FOM de Jerome Powell n’a pas introduit de nouveautés dans la position de la Fed. Au contraire, il est apparu assez lisse dans la conférence de presse, évitant autant que possible de se prononcer sur la politique de Donald Trump. Les décisions annoncées ont été largement conformes aux attentes. On pourra retenir qu’en dépit de la hausse de la trajectoire attendue des taux (+0,2% pour 2019 et +0,3% pour 2020, par rapport aux anticipations de décembre), le FOMC voit l’inflation dépasser l’objectif ces années là (de 0,1%), ce qui correspond donc à un rythme dovish de resserrement (le marché des taux a d’ailleurs réagi plutôt positivement, avec une baisse de 5bp du 10 ans). La Fed reste donc favorable à une certaine surchauffe et voit d’ailleurs l’économie croître au-delà de son potentiel pour les trois ans à venir.

Europe: le ralentissement se confirme

Les indicateurs avancés européens poursuivent leur descente des niveaux stratosphériques du début d’année (ils anticipaient alors une croissance bien supérieure à 3%). Plusieurs facteurs peuvent avoir pesé sur le moral: -la perspective d’une guerre commerciale, -la hausse de l’euro, -des facteurs climatiques défavorables. On voit que sur chacun de ces points, rien n’est définitif. Il reste que le pic d’activité est probablement derrière nous, ce qui est une situation peu appréciée sur les marchés.

Brexit: accord sur la période de transition

Les négociateurs du Brexit se sont donnés presque deux années supplémentaires, un strict minimum en regard de l’ampleur de la tâche. Pour éviter un arrêt brutal en mars 2019, le UK a accédé à la plupart des demandes européennes. L’autorité de la CJE, les droits des ressortissants sont maintenus, ainsi que les quotas de pêche. Le UK a obtenu le droit de négocier des accords commerciaux mais ils ne peuvent entrer en vigueur (avant 2021) que si l’UE y consent, ce qui sera une gêne dans les discussions. Le point le plus délicat, la situation de l’Irlande du Nord, reste en suspens, l’UE ayant accepté de traiter les deux sujets en parallèle.

Sur les services financiers, le système de l’équivalence semble se profiler, un mécanisme qui laisserait à la City l’accès à l’Europe, si elle se soumet à la règlementation du continent. L’accord, qui reste à finaliser cette année, pour une ratification à intervenir avant mars 2019, est une issue favorable pour les marchés. Il souligne, en revanche, la faiblesse de la position britannique.