La note macro de Nicolas Blanc, Responsable de l’Allocation chez Ellipsis AM.

Rarement le contexte d’investissement aura été autant soumis aux actes d’une seule personne. A quelques mois des élections de mi-mandat, Donald Trump fait tout pour soigner l’image populiste à laquelle il doit son succès politique, laissant son administration corriger ensuite le tir. Il est possible que le président ait bien évalué sa marge de manoeuvre et qu’il obtienne des concessions de la part de ses partenaires avec finalement une amélioration du cadre des échanges commerciaux.

Mais son double langage pourrait avoir des effets non voulus: −que sa base électorale réalise que sa politique leur est plutôt défavorable ou −que la Chine se froisse et réplique brutalement. Difficile dans ce cas d’anticiper la réaction d’un président qui cultive justement son imprévisibilité.

Libor 3 mois : fausse alerte

Avec la hausse du taux objectif de la Fed, il est logique que tous les taux courts américains remontent. Mais le taux Libor 3 mois, qui est représentatif des conditions obtenues par les banques sur le marché monétaire (prêts non garantis à 3 mois) monte beaucoup plus vite que le mouvement orchestré par la banque centrale. Ainsi, on observe un écartement de 35bps entre le Libor et le taux des OIS (anticipation des Fed Funds sur les trois prochains mois).

Dans l’histoire récente, cela s’est produit lors des crises, avec la défiance dans la solvabilité du secteur bancaire. Ici, cette explication doit être écartée, car les banques sont largement capitalisées, ce qu’atteste le niveau serré de leur CDS (contrats d’assurance contre le défaut). Il s’agit plutôt d’un phénomène lié aux flux: la hausse de l’offre (T-bills et Commercial papers) dans un contexte de régulation des fonds monétaires qui limite les dettes privées.

Il reste que la hausse du Libor pourrait avoir des conséquences au niveau macroéconomique. L’effet direct sur les intérêts payés par les entreprises et les ménages serait de quelques dizaines de Mds, ce qui, à l’échelle de ces secteurs est faible et en partie compensé par des gains pour les créditeurs financiers et non-financiers. Un impact sur les taux longs pourrait être plus significatif. Mais le phénomène ne s’est pas propagé sur le long-terme, l’écart entre les taux de swaps longs et les T-Bonds n’ayant pas été affecté.

Italie : convergence populiste ?

Les discussions pour la formation du nouveau gouvernement italien entre la Liga et le M5S, les deux grands gagnants du scrutin, ont achoppé sur les demandes de M5S concernant le poste de premier ministre et l’exclusion de FI, une trahison à laquelle la Liga serait réticente, à ce stade. Sur la plateforme politique, un accord était possible, qui inclurait une hausse des prestations de chômage, des baisses d’impôt, un retour sur la réforme des retraites et une politique migratoire plus dure. En revanche, le revenu universel de M5S serait remisé.

Les marchés ont pu être rassurés par le fait que la Liga n’envisage pas de dépassement significatif des règles budgétaires européennes. Ceci pourrait expliquer le mouvement surprenant des taux souverains, qui, alors qu’une alliance populiste se dessinait, ont très fortement baissé. Comme nous l’avons déjà signalé, la configuration d’excédent de la balance courante et d’importante détention de la dette publique par les ménages contribue également à la stabilité du marché souverain italien. Les pourparlers vont reprendre la semaine prochaine.