Le vote du parlement britannique à propos du Brexit - qui aurait dû avoir lieu le 11 décembre et a été reporté - pourrait largement impacter certaines start up établies sur le sol anglais.

J’ai eu l’occasion de discuter avec Andrius Biceika, Head of Business Development chez Revolut lors de sa venue à Genève vendredi dernier pour participer à une conférence organisée par la Swiss Financial Analysts Association.

Plutôt que de parler pour la énième fois de combien ils sont cool chez Revolut et de leur nouvelle carte en métal noir, j’ai tenté d’aborder un sujet complètement différent, à savoir comment une start up en pleine croissance s’était préparée aux différents scénarios de Brexit. La fintech ne disposant actuellement que d’une licence de type e-money au Royaume-Uni se devait d’envisager l’impact d’un Brexit dur sur la continuité de ses activités.[ndlr: quelques jours après la parution de cet article, Revolut a annoncé avoir obtenu une licence bancaire européenne]

En fait, dès que les résultats du référendum du 23 juin 2016 ont été connus et que le Royaume-Uni s’était engagé sur la voie du divorce avec l’Union Européenne, différentes pistes ont été explorées afin que la société soit en mesure de faire face à toutes les éventualités. Difficile d’obtenir des détails ou même la confirmation d’éléments glanés dans la presse car Revolut a complètement verrouillé sa communication dès que l’on désire aborder d’autres sujets que les couleurs de leurs cartes. L’argument avancé par le responsable du Business Development étant qu’il ne fallait pas donner d’idées à leurs concurrents ou dévoiler inopinément certains choix stratégiques. Une position compréhensible pour certains aspects mais la société devrait envisager un storytelling à même de répondre aux questions concernant sa stratégie de développement.

Une stratégie internationale cohérente

La rencontre – fort amicale, je tiens à le préciser – permit néanmoins de mettre en avant certains éléments fort intéressants. Revolut dispose actuellement de 3 entités principales: un siège au Royaume-Uni, un bureau dédié au support client en Pologne et un centre de développement en Russie. Des implantations de plus petite taille se font en fonction des besoins lorsqu’il est nécessaire de se rapprocher géographiquement d’un marché, avec par exemple l’annonce fin novembre de l’ouverture de 2 bureaux en Belgique, ou encore une implantation aux Etats-Unis, où la société espère obtenir une licence bancaire (il lui en faudra une par Etat). Sont également cités dans la presse le Canada, le Japon, l’Australie ou encore Singapour et Hong Kong. Le bureau lithuanien s’est occupé quant à lui de l’obtention de la licence bancaire auprès du régulateur national et celle-ci sera valable pour l’ensemble du marché Européen grâce au mécanisme de passporting mais nécessitera néanmoins d’introduire des demandes au niveau de chaque pays. Les marchés prioritaires seront le Royaume-Uni, la France et la Pologne.

La demande de licence auprès des autorités de Vilnius a d’ailleurs été la première stratégie envisagée par la fintech face aux risques liés au Brexit. De plus, l’obtention de la licence permettra de proposer d’autres services, plus proches de ceux d’une banque traditionnelle, mais également de garantir les dépôts des clients au travers du système de garantie que l’UE a mis en place. Plus récemment, en septembre de cette année, le Financial Times a révélé que Revolut avait introduit une demande de licence de type e-money auprès des autorités luxembourgeoises. La société ne souhaite pas détailler cet élément de sa stratégie d’expansion ni donc confirmer que ce serait une sécurité supplémentaire au niveau du marché européen dans le cas où l’obtention de la licence bancaire lithuanienne prenait du retard sur le calendrier prévu. Andrius Biceika précise néanmoins qu’il s’agira de 2 types d’autorisations différentes puisque la licence e-money ne permet pas de proposer l’ensemble des services que permet une licence bancaire mais sera complémentaire puisqu’elle permet un accès aisé aux crypto devises.

Nous n’en saurons hélas pas plus sur ce sujet, ni sur l’éventuel attrait de Malte qui se positionne comme place de choix en Europe pour les acteurs de la blockchain et des crypto assets. Le responsable du Business Development reconnait cependant que la start up – qui a connu un succès croissant depuis son lancement – a effectivement été approchée par plusieurs pays européens désireux de lui vanter les avantages d’une implantation sur leur sol.

Attirer les meilleurs talents

De ce point de vue, un Brexit à caractère relativement contraignant pourrait être une magnifique opportunité pour certains pays de l’UE de récupérer une partie du business et des compétences actuellement hébergés à Londres. Car à côté de possibles restrictions sur l’accès au marché européen, les sociétés établies au UK doivent également envisager de futurs freins à l’embauche de personnel international hautement qualifié.

Même si la récente enquête «The State of European Tech» place toujours Londres comme premier hub fintech en Europe, une de ses grandes forces réside dans sa facilité à séduire les talents étrangers qui représentent actuellement 44% des travailleurs du secteur. Même si Revolut, auréolée de son statut de licorne, continue d’attirer de nombreux talents à Londres, Andrius Biceika note qu’un développeur est finalement en mesure de travailler depuis n’importe quelle localisation.