J’aurais aussi pu commencer par une autre phrase mythique qui dit : « J’y vais mais j’ai peur ». Depuis que j’écris des chroniques boursières – et ça commence à dater, puisque le 7 février prochain, je fêterai mes 15 ans et près de 4'000 chroniques, je me suis toujours efforcé d’être BULL. Être bull est un état d’esprit. J’ai toujours préféré être long que short et j’ai toujours préféré être optimiste pour l’avenir plutôt que prendre le choix de la déprime et d’envisager le pire. Et puis je me suis toujours dit que tendanciellement, l’humain s’en sortira toujours, peu importe la crise. Que si l’on envisage la fin du monde, il n’y pas de raison de « faire de l’investissement ». Bref, être bull c’est un art de vivre et c’est aussi espérer que l’avenir sera forcément meilleur. Et c’est sûrement pour ça qu’aujourd’hui, il n’est pas facile d’y croire encore et d’être à fond dans la hausse perpétuelle alors que la pandémie explose dans tous les coins et qu’inévitablement, il y aura des conséquences. Je me retrouve devant un dilemme énorme ; un dilemme qui est le suivant : sachant que je suis persuadé que l’on va s’en sortir et que le vaccin devrait calmer le jeu, faut-il parier sur le fait que le marché a déjà tout anticipé tellement il est fort et il est simplement la représentation de ce que sera l’économie dans le future, auquel cas il suffit juste d’acheter et d’attendre que le S&P500 monte à 4'400 – comme JP Morgan vient de l’annoncer – et se dire que l’économie réelle va simplement rattraper le train dans les mois qui viennent, ou alors est-ce qu’il faut avoir peur de ce délire boursier dans lequel nous sommes en pariant sur le fait que l’on  va FORCÉMENT s’en prendre une un de ces quatre et qu’il faut donc se préparer, parce que là franchement, on vole au vapeurs d’essence. Non, je vous le dis franchement et honnêtement, là tout de suite j’ai l’impression d’être Wile E. Coyote qui continue de courir alors qu’il a bien dépassé le bord de la falaise depuis longtemps, mais qu’il ne tombera pas tant qu’il ne regarde pas en bas. Et pourtant, malgré les nouvelles pourries, malgré les graphiques qui font se demander si finalement les arbres ne montent pas au ciel, le marché refuse résolument de baisser. J’en arrive à me demander si je ne suis pas complètement idiot et que je rate un truc – auquel cas je vais me lancer dans la politique parce qu’à voir le nombre de conneries qu’ils nous sortent ces jours, être complètement stupide semble être la condition sine qua non pour réussir dans ce milieu.

L’Audio du 11 décembre 2020

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Jamais fatigué

Comme nous sommes vendredi j’ai pensé qu’il serait de bon aloi de vous épargner les chiffres du COVID et le fait que rien n’est sous contrôle et que tout semble partir en vrille. Surtout aux USA, mais visiblement, étant donné les mesures drastiques et souvent complètement débiles prises par la France ou la Suisse. Entre la réduction du couvre-feu en France que même que lorsqu’ils occupaient Paris pendant la guerre, les Allemands n’auraient pas osé – surtout que ça va VRAIMENT TOUT CHANGER… puisque pendant ce temps on peut toujours s’entasser dans le métro parisien parce que LÀ on ne se contamine pas. Sans compter les idées de génie du Conseil Fédéral qui décide soudainement de prendre la main sur les cantons et venir pénaliser – comme par hasard – les cantons romands. On peut quand même s’imaginer que la pandémie est loin d’être sous contrôle et ils ne donnent pas l’impression que l’arrivée du vaccin les rassure. Ou alors ils sont vraiment complètement cons, mais je peine malgré tout à y croire.

Donc, pour résumer, la FDA a approuvé le vaccin. La contamination, les chiffres, les lits d’hôpitaux sont tous en de partir en vrille et il n’y a rien de moins sûr quant au fait d’avoir une chance de ressortir et de reprendre une vie normale avant septembre prochain. Septembre prochain où l’on va nous reconfiner pour éviter une épidémie classique de grippe parce que dorénavant nos politiques préfèreront quand même nous interdire de mourir. À côté de tout cela, les chiffres économiques sont immondes – et ça c’est la version polie – et on peut largement imaginer que ce n’est que le début. Hier les Jobless Claims américains qui étaient attendus à 725’000 sont sortis à 853’000, démontrant clairement que la tendance est à la hausse et que « l’amélioration de la semaine dernière » était uniquement due à Thanksgiving. D’ailleurs on savait parfaitement que cela allait se produire, mais hier les médias ont quand même réussi à écrire cette explication comme s’ils venaient de découvrir l’eau à moitié tiède et qu’en plus cette dernière mouille autant que l’eau froide.

S’améliorer, mais comment

Les chiffres économiques sont donc pourris et ça ne va pas s’améliorer de sitôt, vaccin ou pas vaccin. Si l’on regarde simplement le cas des restaurants – il semblerait que rien qu’à Genève et selon les médias locaux, 30% d’entre eux sont déjà en faillite et avec les éventuelles futures décision de nos 7 génies à Berne, ça pourrait être pire. Et puis si l’on parle de notre voisin français, c’est encore pire – étant fermés jusqu’en janvier par le gouvernement royaliste de Macron, on ne sait même pas combien d’entre eux vont rouvrir. Si l’on applique cela au monde entier, cela aurait-il vraiment aucune influence sur l’économie ? Je peine à y croire. Mais une chose est certaine, le marché lui, pense que ça n’aura pas ou plus aucune incidence. Hier, entre les chiffres de la pandémie, les chiffres économiques et le stimulus qui a été encore une fois repoussé par ces clowns du Sénat, la pire sanction que l’on a pu avoir sur les bourses mondiales ; c’est de ne pas monter.

Oui, c’est exactement ça en fait. Nous sommes dans le marché du nouveau monde. Un marché qui digère les mauvaises nouvelles en NE BAISSANT PAS et monte fortement sur les bonnes et puis pour être franc, hier Biden aurait pu se faire passer dessus par un bus, Powell aurait pu annoncer une hausse des taux surprise de 4% et l’idiot du village qui sert de Premier Ministre en France aurait pu réduire le couvre-feu ; le marché n’aurait pas baissé parce qu’AirBNB est arrivée en bourse et que ça va tout, mais alors absolument TOUT CHANGER. On ne va pas présenter la société, mais disons qu’elle a pris 112.8% par rapport à son prix d’émission et vaut dorénavant près de 90 milliards de capitalisation boursière, ce qui équivaut plus ou moins à la valeur cumulée de Booking.com et d’Expedia. Après les IPO’s délirante de Door Dash et de C3.ai, on pourrait presque se demander si l’on n’est pas un tout petit peu dans l’euphorie. Mais non, on ne se le demande pas parce que le vaccin arrive et que les vaccins de Moderna, de Pfizer/BioNTech et d’Astra Zeneca, vont régler le problème du COVID, de la faim dans le monde, des chiffres économiques pourris, des gouvernements surendettés, recréer le plein emploi et rendre les politiciens honnêtes et intelligents – bien que sur ce dernier point, le taux d’efficacité soit très bas.

Bref, ça ne baisse pas

Bref, ça ne baisse pas. Et quand ça ne baisse pas, c’est que ça va finir par monter et qu’il ne faut jamais aller contre la tendance, ni contre les Banque Centrales (on a encore vu la BCE ressortir le chéquier hier pour augmenter son plan de rachat) – il va donc bien falloir admettre que le marché est très calme et serein dans la hausse. On dirait « qu’il sait », qu’il sait tout et qu’il sait où on va, comme un ado de 13 ans. On ne va donc pas s’inquiéter, la plupart des stratèges sont convaincus que l’on va encore monter de 20% l’an prochain et vu leur taux de réussite ces dernières années, il n’y a vraiment pas de raison de douter.

Graphique du DAX – Source : Tradingview.com

Ce matin le Japon est en baisse, tout comme la Chine. 0.4% pour le Nikkei et 0.8% pour la Chine. Dans le camp opposé, Hong Kong et Séoul sont en légère hausse. Il semblerait, si l’on en croit les médias locaux, que le marché hésite parce qu’il n’aime pas le fait que les chiffres du COVID avancent et que les USA viennent d’annoncer leur seconde journée à plus de 3’000 morts – par contre, ce qui devient visiblement très intéressant, c’est que l’on ne meurt plus d’autre chose aux USA. Ni ici d’ailleurs. Pendant ce temps, l’or et le pétrole ont leur vie propre et très franchement, tant qu’ils ne font pas une IPO ensemble on dira que ça n’intéresse plus personne.

Les nouvelles du jour

Dans les nouvelles du jour, on parle donc de l’élargissement du plan de sauvetage de la BCE dont, visiblement, tout le monde se fout. Cette nouvelle à l’air d’intéresser le marché presque autant qu’une mauvaise nouvelle économique. Et puis il y a donc un « panel » d’experts –des vrais experts, pas des mecs formés sur Faceook – qui ont donné le feu vert pour la distribution du vaccin de Pfizer/BioNTech – ce qui ouvre donc la voie de l’approval définitif par la FDA – enfin, si j’ai bien compris. Un chose est sûre, on est à bout touchant, pas comme le Stimulus. Mais là aussi, le marché à l’air de se foutre de l’annonce comme de sa première cravate ou de son premier stop-loss. Autrement le patron de Ferrari prend sa retraite et Boris Johnson prévient que l’on se rapproche d’une situation de No Deal côté BREXIT – on va surement en reparler dans les marchés ce matin, mais comme personne ne comprend rien à cette histoire, il faudra se contenter d’écouter ceux qui savent et de les suivre, reste juste à trouver qui c’est.

En dehors de l’IPO de AirBNB, on notera que Disney a touché les plus hauts de tous les temps après avoir annoncé plus des 85 millions de membres sur Disney + et qu’ils pensaient atteindre les 245 millions d’ici 2024. Et puis Jeffries a downgradé Tesla – ils ont osé. Il y a une BANQUE D’AFFAIRE QUI A OSE DOWNGRADER TESLA ET NE PAS LUI METTRE UN PRICE TARGET À 2’000 DOLLARS. C’est une honte et je suggère qu’on leur retire leur droit d’exercer. Ceci est un crime de lèse-majesté, tout comme dire du mal d’Elon Musk.

Les chiffres du jour

Côté chiffres, nous aurons le Stability Report de la Banque d’Angleterre, le CPI en Allemagne et les chiffres de la confiance du consommateur version Université du Michigan. Pour le moment les futures ne font rien et on attend une annonce « surprise » de la FDA au sujet des vaccins ou de Jean Castex qui pourrait annoncer que le couvre-feu serait raccourci à 16h30 afin que les gens ne se retrouvent pas pour le goûter et que le partage des BN’s n’augmente pas la contamination.

En ce qui me concerne – autre annonce surprise : je pars en week-end et j’espère que vous aussi. On se revoit lundi et ici-même en espérant que le calme latent du moment ne soit pas l’annonce de la tempête à venir.

Thomas Veillet

Investir.ch

“It’s like learning to ride a unicorn. You never forget.”

― Eoin Colfer, Artemis Fowl