Si l’on continue de surfer la vague des bonnes nouvelles, il ne faut jamais oublier que sous les vagues, des fois y a des requins qui se planquent pour bouffer du surfeur. Oui, ça fait un peu cliché, mais lorsque l’on voit ce à quoi le marché se raccroche pour se conférer optimisme et joie de vivre, on a quand même l’air de se cacher derrière un écran de fumée qui nous cacherait ce qui ne va pas. Il est clair que si l’on investit en ne regardant que les choses positives qui nous attendent, c’est bien plus facile. Il est plus simple de planquer la poussière sous le tapis et dire que tout va bien, plutôt que de regarder la « big picture » et de finir la soirée au rhum arrangé pour oublier ensuite.

L’Audio du 4 décembre 2020

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BREXIT, bientôt plus d’épisodes que dans NCIS

Tenez, prenez l’exemple d’hier. Pendant que les marchés européens terminaient légèrement en baisse parce que soudainement on se posait des questions sur l’efficacité réelle du vaccin – ce qui est quand même hyper-drôle, parce que vous et moi, reconnaissons-le, on y connait que dalle en vaccin et en efficacité, mais hier les « experts en finance qui font le marché » se sont quand même posés des questions sur un truc qu’ils ne comprennent absolument pas.. Mais ce n’est pas tout, en Europe on se posait également des questions sur l’aboutissement des négociations sur le BREXIT.

C’est comme le vaccin, encore un truc que personne ne comprend. Je mets au défi qui que ce soit de m’expliquer en 30 secondes ce qui se passe et où on en est au sujet du BREXIT. Soyons sérieux, ça fait 4 ans qu’ils nous gonflent avec leur BREXIT et mis à part les 12 députés européens qui vont encore faire la sieste au parlement de Bruxelles, plus personne n’en a rien à carrer du BREXIT. Et en plus ça fait au moins trois fois que l’on nous vend le truc comme quoi c’est fini et puis en fait non, il faut encore négocier après. C’est même plus chiant qu’un divorce et parfois je me demande s’il ne serait pas plus simple de démonter l’Europe et de passer à autre chose. Donc hier les Européens étaient plutôt dans le rouge à cause des vaccins qui n’arrivent pas assez vite – bien qu’en même temps on n’ait pas très envie de se faire vacciner non plus – et à cause du BREXIT dont tout le monde se fout. Mais aux USA, c’était différent. On surfait sur la vague des bonnes nouvelles.

Super-Vaccin, Super- Président, Super-Chiffres

Alors que les Européens flippaient pour le vaccin, les Américains s’enthousiasmaient sur les dernières données du vaccin de Moderna. Depuis deux jours la société est à fond dans le marketing pour montrer combien leur vaccin est super et combien il garantit l’immunité – par contre on ne sait pas trop si les gens vaccinés vont pouvoir continuer à contaminer les autres ou pas – ce qui pourrait être un vrai problème, mais comme tous les VRAIS PROBLÈMES en ce moment, on préfère garder tout ça sous le tapis pour ne pas déranger – un peu comme les chiffres des hospitalisations qui continuent de grimper sans parler de la contamination qui explose aux States – et cela sans les chiffres de Thanksgiving qui arriveront dans une grosse semaine. Non, hier on préférait quand même se concentrer sur les efforts de marketing de Moderna qui semblent porter leurs fruits, puisque le titre prenait 10% durant la séance, permettant au titre d’afficher une performance de 700% sur l’année 2020. Comme quoi 2020 n’aura pas été pourrie pour tout le monde. On notera au passage qu’il n’y a toujours aucun approval de ce vaccin, mais comme on est vendredi, ils vont bien nous faire un truc à midi.

En plus de l’enthousiasme affiché au sujet du vaccin, surtout que l’on sait qu’Obama, Bush et Clinton ont accepté de se faire vacciner en direct pour « rassurer les Américains » – comme quoi Clinton est vraiment prêt à tout pour être loin d’Hillary – il y avait aussi l’enthousiasme à propos de la publication des « Jobless Claims » – les nouvelle demandes d’allocation chômage pour la semaine. Ces chiffres n’intéressent pas grand monde d’habitude, mais depuis quelques temps, on les regarde attentivement, parce qu’ils donnent une photo hebdomadaire de l’économie. Et hier, les experts qui avaient joué leurs prévisions aux dés, comme d’habitude, s’attendaient à 775’000 nouvelles demandes pour la semaine de Thanksgiving et du Black Friday. Le chiffres est sorti à 712’000 et c’était LA BONNE NOUVELLE qu’il nous fallait pour surfer la vague du Nasdaq qui termine au plus haut de tous les temps. Il semblerait néanmoins que ces chiffres ne veulent pas dire que soudainement l’emploi repart – mais plutôt que les données ont été clairement tronquées parce la semaine n’aura duré que trois jours… Mais hier on se foutait pas mal de ces considérations et comme nous sommes surtout à la recherche de BONNES NOUVELLES, on a choisi de se concentrer sur le fait que les chiffres baissent – et pas de pourquoi ils baissent.

Un optimisme béat

Et puis des bonnes nouvelles, il y en avait. C’est surtout bien plus facile d’en trouver quand on balaie les mauvaises, et puis soudainement, quand les mauvaises nouvelles sont oubliées, les bonnes paraissent encore meilleures. Hier Boeing a annoncé avoir vendu 75 Boeing 737 MAX à Ryanair pendant le Black Friday. Boeing s’envolait sur la nouvelle et Airbus aussi. Oui, parce que ça veut dire que même si les compagnies volent moins, elles vont quand même profiter des soldes pour acheter des avions pour quand on revolera à cause des vaccins – comme vous le voyez, on va loin dans la réflexion sur les bonnes nouvelles. Et puis le 737 MAX, c’est quand même un avion qui a été « groundé » pendant des mois parce qu’il avait tendance à vouloir atterrir tout seul à grande vitesse et sans sortir le train après 12 minutes de vol – un peu comme si ces avions avaient le vertige. Mais à l’heure actuelle, plus personne ne se préoccupe de ces détails, on a tous juste envie de partir en vacances à plus de 3 kilomètres de la maison. Alors que l’avion vole ou pas, on s’en tape. On est même prêt à aller en vacances en roulant avec l’avion s’il faut, sans jamais décoller. Et puis au niveau des bonnes nouvelles, je vous fais grâce de l’excitation liée au stimulus qui arrive.. cette fois c’est certain, enfin, normalement. Si tout va bien. Peut-être. Si les Républicains et les Démocrates se mettent d’accord.

À la fin de la journée, le S&P500 terminait en baisse de trois fois rien et le reste était en hausse de 0.3% avec le Nasdaq qui terminait au plus haut de tous les temps. Le fait est que ce n’était pas une journée euphorique – mais ce qui est frappant c’est le fait que l’on ne se concentre que sur les bonnes choses et que les marchés refusent de baisser ne serait-ce que de 1%. La question que l’on peut se poser c’est de savoir combien de temps on peut tenir sans signes de vie réels de la part de l’économie…Cette après-midi, il y aura les chiffres des Non Farm Payrolls et le taux de chômage. Cela nous donnera peut-être plus d’indices. On attend 469’000 nouvelles créations d’emplois et un taux de chômage de 6.8%. On peut croire aux miracles, mais si – dans les conditions actuelles – on pulvérise le nombre de jobs créés en novembre, c’est qu’on se fout de nous.

L’Asie

Ce matin l’Asie doute un peu. Wall Street qui ne terminait pas en hausse de 3% et le fait que l’on se pose des questions sur les vaccins et la suite des évènements fait que la motivation n’y est pas. Le Japon est en baisse de 0.3%, la Chine aussi et Hong Kong ne fait rien. Il faut dire qu’hier soir Pfizer a annoncé que finalement ils ne pourraient pas fournir les 100 millions de doses prévues – mais seulement 50 millions – une réduction de 50% – trois fois rien. Du coup on va pouvoir lancer une nouvelle émission de télé qui permettra au vainqueur d’avoir droit au vaccin et de se le faire injecter avec Obama, Clinton et Bush.

Mais du coup cette nouvelle met un peu de tension en Asie. Au passage, on notera que les autorités sanitaires américaines ont annoncé un record journalier au niveau du nombre de décès, puisqu’hier 3157 Américains sont morts du COVID – bon, sûrement pas QUE du COVID, mais c’est une autre discussion. Certains médias parlent d’un hiver catastrophique qui s’annonce aux States – bon, pas les médias financiers. Les médias financiers eux, ils parlent du vaccin qui va être trop chouette et de l’économie qui va remonter à la vitesse des remontées mécaniques en France cet hiver. Le pétrole a réinterprété les déclarations de l’OPEP à sa sauce pour la troisième séance consécutive. Personnellement, je trouve qu’il n’y a plus trop de logique niveau pétrole – mais il se traite à 46.30$ – plus jamais faible, forcément avec cette économie qui a va exploser incessamment sous peu… Enfin, bientôt, normalement. Et puis l’or est à 1844$, pendant que le Bitcoin chatouille les 20’000.

Les nouvelles du jour

Côté news du jour, on brasse toujours de l’air au niveau du stimulus, cette fois c’est dans les mains des Républicains et les USA tout entiers retiennent leur souffle pour savoir s’ils auront leur chèque avant Noël. Bon, en même temps ils l’attendent depuis 6 mois et depuis il a été divisé par deux – il n’y a pas non plus de quoi défaillir. D’ailleurs si ça continue comme ça, le gouvernement américain va probablement proposer une mandarine et deux cacahuètes par personne.

Autrement, il n’y a franchement pas grand-chose à dire ce matin. Certains experts sont prudents sur le marché, marché qu’ils estiment un poil suracheté. En revanche les mêmes experts pensent que l’an prochain sera faramineux en terme de performance et qu’il suffira juste d’acheter et d’encaisser le pognon. Pour faire court, si ça baisse, il faudra racheter sur faiblesse. Sauf que là, ça baisse pas. Pendant ce temps Biden donne des interviews, il va garder Fauci pour lutter contre le COVID et il va demander aux Américains de porter le masque tout le temps pendant 100 jours – on espère juste qu’il ne va pas confiner le pays pendant 100 jours à dater de sa prestation de serment.

Les chiffres du jour

Pour le reste, les chiffres des Non Farm Payrolls seront le point d’orgue du jour et comme aucune autre nouvelle ne peut remettre en question la marche en avant du Bull Market, on peut déjà regarder monter les futures ce matin et anticiper les titres de la presse, je cite : « la bourse en hausse suite à l’optimisme sur les vaccins et la probabilité d’un stimulus qui devient de plus en plus probable, probablement ».

Comme il y a les Non Farm Payrolls, c’est que nous sommes vendredi, cela veut donc dire que dès ce soir nous serons en week-end et qu’après une semaine d’optimisme, cela fera du bien de se reposer un peu, parce qu’il n’y a pas à dire ; l’optimisme, ça épuise. Je vous souhaite une très belle journée et un excellent week-end et on se retrouve lundi matin reposé, frais et dispo pour s’exciter sur les nouvelles neuves sur les vaccins que nous aurons eu pendant le week-end, voire même peut-être à 12h15 aujourd’hui.

Bon week-end et à lundi !

Thomas Veillet

Investir.ch

“A day without sunshine is like, you know, night.”

― Steve Martin