L’heure des justifications et des explications. Le pire dans des journées comme hier ça n’est pas d’en parler, mais c’est surtout d’expliquer pourquoi on n’a rien fait et pourquoi lorsque l’on regarde les mouvements des indices, on retourne rapidement dans l’agenda pour voir si hier n’était pas un jour férié. Mais à priori ; non. Alors oui, c’était l’anniversaire de Frank Ribéry et toute la langue française retenait son souffle, c’était aussi l’anniversaire du décès du Général Guisan, mais rien que ne justifiait de fermer les places boursières.

L’Audio du 8 avril 2021

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Minutes papillon

Donc du coup on s’est posé des questions. En général, ça n’est jamais bon quand on se pose des questions sur les marchés financiers parce qu’il suffit qu’il y en ait un qui dise n’importe quoi et on se prend une claque droit derrière. Mais heureusement, hier c’était différent. C’était différent parce que ce n’était pas pareil et qu’on a surtout pris le temps d’attendre les Minutes du FOMC Meeting qui sont sorties hier soir. Enfin, pendant qu’en Europe on passait notre journée à se demander si le confinement c’était bon ou pas bon pour l’économie et que l’on était visiblement incapable de trouver une réponse. C’est en tous les cas l’impression que ça donne quand on regarde les indices boursiers hier :

  • DAX termine en baisse de 0.24% – ça ne voit même pas sur le Chart.
  • CAC40 recule de 0.01%, ça se situe plus dans le domaine de l’homéopathie
  • L’Italie perd 0.08% et rate le permis de tuer de 0.01%
  • Il n’y a que la Suisse qui se démarquait avec une chute vertigineuse du SMI de l’ordre de 0.49% – presque un krach boursier.

Mais pendant que les Européens regardaient la montre pour savoir quand ils pourraient rentrer à la maison sans louper le couvre-feu, les Américains attendaient les Minutes du FOMC Meeting. Alors les Minutes du FOMC Meeting, c’est le compte rendu écrit et détaillé de tout ce qui s’est dit durant les deux jours de la réunion de la FED qui a eu lieu en mars. Généralement il se trouve qu’étonnement les Minutes rappellent exactement le communiqué de presse qui avait été fait le soir de la fin de la réunion – mais allez savoir pourquoi, il y a toujours des gens qui pensent que « l’on ne sait jamais » et il se pourrait qu’il y ait un de membres de la FED que l’on a exfiltré en Afghanistan depuis, qui pourrait avoir pété les plombs et hurlé : « Il faut monter les taux tout de suite, l’inflation est galopante et les USA sont le prochain Venezuela »…

Tout cru

Pourtant rien de tel hier. Ou alors on a passé les mots qui dérangent au tipp-ex pour que tout soit parfaitement lisse et imparable aux yeux des gentils investisseurs qui sont là pour faire monter les indices et reluire l’économie américaine dans le monde entier et au-delà. Je serai même tenté de dire « rien de neuf sous le soleil de Washingon ». Pour faire simple :

  • L’inflation n’est pas un problème et les gars ils en ont littéralement rien à taper.
  • Le recovery n’est pas encore complet, mais la FED est confiante
  • Les taux ne monteront pas tant que l’emploi n’aura pas retrouvé son niveau d’avant pandémie, ce qui nous laisse encore une marge de manœuvre assez conséquente.
  • Bref, tout va bien et c’est plus ou moins le même scénario que Powell nous vend depuis 6 semaines ; LA FED VA CONTINUER à être super-arrangeante histoire que l’économie se reprenne super-vite et qu’on soit tous super-content et que Biden puisse super-augmenter les impôts rapidement.

Du coup, comme les chiffres sont sortis à deux heures de la clôture hier soir, il n’y avait pas non plus de quoi s’exciter dans tous les sens et de se taper la tête contre les murs vu le non-event que furent ces Minutes. On a quand même pris le temps d’écouter deux-trois génies de la finance qui nous ont tartiné leur analyse sur CNBC. Mais à la fin, il fallait bien reconnaître que l’on n’était pas plus avancé qu’avant la publication et que ça aurait été limite bien plus intéressant qu’Elon Musk prenne le temps de nous publier un tweet sur la commercialisation des lance-flammes dans le Dakota du Nord. Mais malgré l’ennui qui nous prenait à la gorge, on a quand même réussi à finir au plus haut de tous les temps sur le S&P500 – ben oui, fallait quand même pas qu’on soit venu pour rien.

Et alors ?

Si l’on regarde les indices asiatiques ce matin, on peut se demander si nous ne sommes pas l’emmerdement maximum encore aujourd’hui. Les trois indices semblent dans une léthargie peu commune et on pourrait peut-être proposer de fermer les places boursières pendant une semaine. Comme ça on attendrait le début de la saison des trimestriels et on aurait au moins des trucs à dire au lieu de brasser de l’air en se repassant des vieux communiqués de presse de la FED et des cassettes VHS de Powell. Le Nikkei recule à peine et la Chine monte à peine. Du coup, les deux s’annulent.

Ce n’est pas mieux du côté de l’or et du pétrole, puisqu’aucun des deux ne bougent et que je peine à trouver des synonymes pour dire qu’ils sont immobiles, qu’ils ne foutent rien et que tout le monde s’en fout. Pendant ce temps, le Bitcoin a baissé hier et ceci est une révolution. Paraît qu’il a eu peur de la résistance des 60’000$. En tous les cas, les gars qui font de la recherche sur le sujet chez Coindesk, ils ont bossé comme des fous par qu’ils ont annoncé hier que : « la participation des investisseurs dans le Bitcoin a grimpé en flèche au premier trimestre de 2021, la majeure partie de la croissance provenant des petits investisseurs » – des visionnaires les types, on n’aurait jamais soupçonné un truc pareil.

Pour le reste, c’est mince, c’est très mince

Vu qu’il n’y pas des masses de choses à dire, on s’éclate avec les IPO’s à venir. Hier on parlait de Coinbase, puisque leurs revenus ont grimpé de plus de 800% au premier trimestre. Du coup y a un analyste de chez Davidson (rien à voir avec les motos)qui a réitéré sa note d’achat sur la société et a augmenté son objectif de cours de 125% à 440 dollars. Auparavant il avait un objectif à 195$. Précisons encore que Coinbase n’est pas encore cotée en bourse et que ça sera fait le 14 avril. Les stars de la finance sont donc passés à un autre niveau ; ils ne se contentent plus de fixer des objectifs UNE FOIS QUE c’est en bourse, NON ! Maintenant on anticipe même la mise en bourse. D’ici quelques années on devrait avoir des prices target sur des boîtes qui n’existent pas encore, basés uniquement sur le business plan, tellement ils sont forts. Je ne sais pas comment ils font pour ne pas s’ennuyer en ayant un tel niveau de compétence. À leur place je viserais les chiffres qui vont sortir lors du prochain Powerball.

Dans le reste des nouvelles du jour, le FMI propose une taxe de solidarité COVID sur les biens de ceux qui ont le plus profité de la période. On se dit que si la planète avait pris autant de mesure et de plans de sauvetage contre la faim que contre le COVID, ça serait réglé depuis bien longtemps et pas que la faim. Je crois que le COVID a clairement un responsable marketing plus balèze que le reste des maladies et des problèmes qui peuplent ce bas monde. Pendant ce temps Biden propose d’augmenter les impôts sur les multinationales, mais partout dans le monde. Visiblement, après avoir donné de la main droite, il est en train de reprendre de la main gauche et faudra pas s’étonner quand il se fera shooter par un camion en traversant la route. Autrement le patron de JP Morgan, Jamie Dimon pense que l’explosion du recovery actuel pourrait durer jusqu’en 2023 et Madame Brainard qui est gouverneur de la FED, pense que l’économie va « mieux », mais qu’on est encore loin de la sortie du tunnel.

En tous les cas, y a un truc qui fait plaisir, c’est qu’il y a quand même un paquet de gens qui savent exactement où on en est et où on va. Et à voir toutes ces connaissances et ces puits de science pas suffisamment exploités, on se dit que l’avenir ne peut être que rose et peuplé de Bisounours.

Chiffres économiques

Aujourd’hui, il y aura les Factory Orders en Allemagne, un communiqué de presse de la BCE qui ne devrait rien apporter de plus que ce que l’on sait déjà. Cette après-midi il y aura Powell qui parlera et les chiffres des Jobless Claims. Pour le moment les futures sont en hausse de près d’un demi-pourcent et tout va bien. Sauf que l’on ne serait pas contre un peu d’action – surtout quand on voit la tronche de déprimé que nous fait l’indice de la volatilité qui semble être en train de sombrer dans le même type de coma dans lequel se trouve l’or.

En ce qui me concerne, je vous retrouve demain à la même heure et au même endroit en espérant pouvoir vous parler d’autres chose que la météo pourrie du week-end.

À demain.

Thomas Veillet

Investir.ch

“I’m sorry, if you were right, I’d agree with you.”

– Robin Williams