Pour être franc avec vous, je pourrais reprendre pratiquement la même chronique que celle d’hier et je ne serais pas loin de la vérité. On attend toujours les annonces de la FED, mais ça n’est pas nouveau. On savait qu’ils viendraient parler mercredi soir et pas avant, mais comme les bourses sont ouvertes tous les jours, on a quand même dû venir au bureau pour faire « comme si ». Sauf qu’aujourd’hui le gouvernement genevois a réinventé le télétravail et on va quand même laisser passer une journée de plus en faisant des selfies devant AirForce One à Cointrin en attendant la FED ce soir.

L’Audio du 16 juin 2021

Télécharger le podcast (.mp3)

Des indices en ordre dispersé

Hier l’Europe a terminé en hausse. Si l’on en croit les commentaires et les avis éclairés, il semblerait que les investisseurs sont emballés par le fait que les banques centrales locales ne cessent de revoir les perspectives de croissances de chaque pays du continent européen à la hausse, jour après jour. Lundi c’était la banque de France qui était toute émoustillée par l’explosion économique potentielle qui nous attend une fois que tout sera rouvert et hier c’était la Suisse qui pense que nous allons avoir une croissance de folie dans les mois à venir. Bon, une folie tout « suisse », ce qui relativise quand même un peu les choses.

Toujours est-il qu’hier nous avons terminé au plus haut de tous les temps sur le DAX et sur le SMI – et si le CAC n’avait pas eu Vivendi en son sein dans les années 2000, l’indice français y serait aussi. On notera que l’Eurostoxx a terminé sa huitième séance de hausse consécutive, ce qui n’était plus arrivé depuis un moment et le SMI en est à sa onzième. On dirait que plus rien ne peut l’arrêter. Le tout avec une volatilité qui semble vouloir retourner à des niveaux pré-pandémie. Aux USA on a terminé en baisse de 0.2% sur les indices normaux et de 0.7% sur le Nasdaq. On ne peut pas dire que ça soit surprenant, puisque tout le monde serre les fesses en attendant la FED et que, comme hier et comme avant-hier, tout le monde se demande ce qu’ils vont bien pouvoir dire et s’ils vont vraiment annoncer un tapering dans les mois qui suivent. Tapering qui ne manquerait pas de paver la voie à une future hausse des taux. C’est en tous les cas ce que va penser le marché et tous les experts qui le peuple jour après jour.

Quoi qu’il en soit, on attend

Peu importe ce qu’il s’est passé hier, on peut nettement qualifier cette journée de « cosmétique ». Nous avons passé notre temps à meubler les minutes qui nous séparent du discours de Powell et on l’on ne peut pas dire que la séance restera parmi les plus passionnantes de ces 20 dernières années. Clairement pas. On s’est bien sûr à nouveau excité sur les titres de nos amis de Wallstreetbets, AMC a encore terminé en hausse et les hedge funds ont encore perdu un maximum de fric. On continue à se chauffer sur les prochaines victimes potentielles alors que tout le monde passe ses journées à repérer le prochain short-squeeze, mère de tous les short-squeezes. Pendant que l’on s’excite sur le sujet, tout le monde y va de son plan de bataille post-meeting de la FED, même si l’équation à douze inconnues semble impossible à résoudre sans l’aide de Powell et puis tout le monde parle des crypto-monnaies et de leur avenir. Mais comme c’est pas un tweet d’Elon Musk, tout le monde s’en fout.

À propos d’Elon Musk, il y a Michael Burry qui est de retour. Pour ceux qui ont oublié, Michael Burry c’est le gars qui avait prévu la crise des Subprimes, qui avait acheté du GameStop AVANT que le nom Wallstreetbets soit devenu populaire et c’est le gars qui est short sur Tesla depuis des mois et qui pense que ça va à 100$. Il avait pris un break de quelques semaines et avait fermé son compte Twitter. Un peu comme Elon Musk avait dit qu’il ferait il y a quelques mois. Sauf que Burry a tenu 10 semaines, alors que Musk a tenu trois heures. Après il a vu qu’il pouvait manipuler le marché des cryptos et il a recommencé. Tout ça pour dire que Michael Burry a déclaré que nous étions dans la plus grosse bulle de l’histoire des marchés financiers. Et ça n’est pas peu dire.

Je vous passe les détails, mais il cite le délire sur les cryptos, sur les MEMES stocks, sans compter Tesla qu’il hait cordialement. Alors vous me direz que ça n’est qu’une voix de plus qui raconte tout et n’importe quoi. Et c’est vrai. Sauf que Michael Burry a eu souvent raison. Très souvent. Et tout le monde ne peut pas en dire autant. Burry a répété à maintes reprises aux investisseurs qu’ils étaient trop gourmands, qu’ils spéculaient de manière effrénée, qu’ils prenaient trop de risques et qu’ils recherchaient des rendements irréalistes. Il a même sorti un nouveau hashtag : #FlyingPigs360 – probablement en référence au vieil adage boursier qui dit que les Bulls gagnent de l’argent, que les Bears gagnent de l’argent et que les cochons finissent à la boucherie. Toujours est-il que si l’on est objectif 5 minutes – chose que nous n’avons plus été depuis des mois, on ne peut pas dire qu’il ait complètement tort.

En Asie

Ce matin l’Asie se pare d’un beau rouge entre 0.4% de baisse et 0.7%. Là aussi on s’inquiète de voir le moindre signe de « hawkishness » de la part de la FED. Je rappelle pour mémoire que lorsque l’on dit que la FED devient « hawkish », c’est aussi pour dire qu’elle tente de freiner la croissance économique. Par opposition à Dovish. La peur du moment, c’est que la FED tourne la veste ce soir, parce que trop de pressions inflationnistes dans tous les coins. Si l’on a encore le moindre doute sur le sujet, sur le sujet que l’inflation est en train de frapper à nos portes avec un bélier qu’utilise généralement le SWAT ou le RAID pour pénétrer dans un appartement rempli de trafiquants de drogue. Il suffit de regarder la dernière étude qui a été publiée sur l’endroit du marché où il y a « le plus de monde ». Cet endroit ça n’est pas les cryptos, ça n’est pas la techno, ça n’est pas les titres de Wallstreetbets, c’est juste les matières premières. Et en général, ça ne se finit jamais bien, quand les investisseurs classiques commencent à bourrer la caisse sur de trucs comme le bois, l’acajou, le cuivre ou pire, l’uranium et la panse de brebis farcie ou le jus d’orange. Tout ça pour vous dire que l’Asie a peur de voir se poser un faucon sur l’épaule de Powell.

Source : Investir.ch

Autrement le pétrole s’envole de record en record alors que les chiffres et les projections de la demande ne cessent de montrer un retour d’intérêt sur l’or noir, sur les titres pétroliers et sur la consommation de tout ce qui touche aux hydrocarbures. Soudainement on ne parle plus trop d’ESG et d’ISR, mais c’est une autre histoire, parce qu’à la fin les marchés c’est Greed is Good et puis c’est tout. Ce matin le baril est à 72.73$, pendant que l’or se demande toujours s’il doit servir à quelque chose contre l’inflation ou pas. Le métal jaune est à 1859$ et le Bitcoin est à40’000 surfant toujours sur le tweet de Musk.

Nouvelles du jour

Dans les nouvelles du jour, on ne parle que de la FED, du sommet Poutine/Biden et de ce qu’il faut en attendre – c’est-à-dire pas grand-chose, si ce n’est l’endroit exact de la ligne rouge qu’il ne faudra pas dépasser – et puis à Genève on parle surtout du fait que l’on ne pourra pas circuler, mais en même temps ce n’est pas que le reste de l’année on peut. Sauf que là, ça sera pire.

Nous allons donc entamer cette journée en ne faisant pas grand-chose et nous la terminerons en sachant enfin où l’on va et pourquoi on y va. En tous les cas, où nous allons aller jusqu’à jeudi après-midi, moment très précis où le monde merveilleux de la finance aura oublié qu’il y a eu un meeting de la FED cette semaine et que l’on pourra à nouveau parler d’autre chose. Peut-être même qu’Elon Musk se fendra d’un tweet pour mettre de l’ambiance.

Les chiffres du jour

Côté chiffres du jour, il y a des chiffres en Angleterre et en Chine, mais pour être honnête, la seule et unique chose qui va compter aujourd’hui, c’est la FED. À moins que Poutine mette un coup de boule à Biden, ce qui pimenterait inévitablement notre journée un peu trop calme.

Passez une bonne journée et on se retrouve demain pour voir partout les mêmes photos d’AirForce One, mais au décollage cette fois.

Thomas Veillet

Investir.ch

“Hitler wanted to destroy Russia- everyone needs to remember how that ended”

Vladimir Putin