Biotechs Covid, des sociétés éphémères?

Les biotechs, qui ont découvert les vaccins Covid ARN Messager, vont-elles disparaître à la fin de la pandémie ou sont-elles voués à un avenir prometteur?

Un analyste de Morningstar estime que le marché des vaccins Covid se situera à $72 milliards en 2021, $65 milliards en 2022 et chutera à $8 milliards en 2023. Il faudra donc utiliser cette nouvelle technologie pour d’autres applications. Dans l’immédiat, la poursuite de la pandémie nécessitera probablement l’injection d’une 3^ème dose pour les déjà-vaccinés cet automne et potentiellement 50% de la population mondiale doit encore se faire vacciner. L’OMS estime que la pandémie se prolongera au-delà de 2022. Des pays comme la Nouvelle-Zélande et l’Australie ne comptent pas ouvrir leurs frontières aux touristes avant fin 2022, au mieux.

Depuis octobre 2020, les performances boursières de Moderna et de BioNTech sont exceptionnelles grâce à des vaccins très efficaces et les premiers à avoir été validés par les autorités sanitaires. Le parcours boursier de CureVac est plus difficile avec un vaccin qui ne dépasse pas un taux d’efficacité de 50%. Novavax a un positionnement différent, en étant pleinement intégré dans le programme de solidarité Covax de l’OMS. Novavax utilise un tout nouveau procédé, comme celui de Sanofi qui est en train de développer un vaccin, avec GlaxoSmithKline, basé sur les protéines recombinantes. Ce procédé est déjà utilisé pour les vaccins actuels contre l’hépatite ou la coqueluche. Le vaccin Novavax protégerait jusqu’à 100% et serait très efficace contre les variants.

Aujourd’hui, les vaccins validés par les autorités sanitaires sont ceux de Pfizer/BioNTech, Moderna, Janssen, Astrazeneca, The Gamaleya National Center (Sputnik V/Russie), Sinopharm (Chine), Sinovac (Chine), CanSinoBIO (Chine) et Serum Institute of India. Les vaccins de Novavax et de Sanofi devraient être validés au 4^ème trimestre 2021.

Les résultats des biotechs liés aux vaccins Covid sont évidemment très bons. Pour le 2T21, Moderna a publié des ventes de $4.35 milliards et un profit de $2.8 milliards; le groupe prévoit des revenus de $20 milliards en 2021. En 2021, Moderna va produire entre 800 millions et 1 milliard de doses, et entre 2 et 3 milliards en 2022. Pour son CEO, Stéphane Bancel, l’histoire ne va pas s’arrêter au Covid-19. Moderna, comme BioNTech, seront des disrupteurs dans le marché des vaccins. Pfizer/BioNTech vont produire 3 milliards de doses en 2021. Les deux biotechs viennent de renégocier les ventes de nouvelles doses avec une majoration de 25%.

Le futur? Il est prometteur avec le développement de nouveaux vaccins, toujours basé sur la technologie ARN messager

Les domaines d’application toucheront les cancers, le sida, le virus Zika transmis par les moustiques (dengue, tigre), le virus de Chikungunya, le paludisme, l’herpès, Ebola, l’hépatite B, le virus Epstein-Barr (mononucléose), la grippe saisonnière (les vaccins traditionnels ont un taux d’efficacité entre 40% et 60%), les virus respiratoires, les maladies auto-immunes et d’autres maladies génétiques rares. Plusieurs sociétés travaillent les vaccins à particule, soit un seul vaccin qui puisse protéger durablement contre plusieurs virus d’une même famille. Novavax a un pipeline orienté vers les grippes saisonnières (Influenza), les virus provoquant des troubles respiratoires comme MERS, SARS, RSV, et Ebola. Moderna débute les essais cliniques sur l’homme contre le virus du sida. Ils nous apporteront une réponse immunitaire. Mais en attaquant le virus du sida, on attaque l’Himalaya puissance 10, car le virus du sida mute excessivement vite, expliquant que les sociétés pharmaceutiques et les biotechs n’ont jamais réussi à trouver un vaccin en 40 ans de recherche.

Les avantages des vaccins reposant sur l’ARN messager sont la simplicité et la rapidité à produire, sa grande capacité d’ajustement et une réponse immunitaire élevée, donc pas besoin de rajouter des adjuvants comme pour les vaccins dits traditionnels. L’ARN réduit les effets secondaires.

Cependant, il y a un point négatif, soulevé par les anti-vax: le manque de recul, notamment sur la tolérance à long terme (5-10 ans); mais cette plateforme vaccinale ARN n’est pas nouvelle, puisque les études scientifiques datent d’une dizaine d’années déjà.

Moderna va construire une usine de production et un centre de recherche au Canada. En attendant, Moderna a des partenariats avec Lonza, Catalent, Laboratorios Rovi, Sanofi, Samsung Biologics et Thermo Fisher Scientific. Sanofi vient d’annoncer l’acquisition de Translate Bio pour $3.2 milliards, un spécialiste américain dans l’ARN messager.

Ces nouvelles sociétés doivent encore relever quelques défis: 1) la découverte rapide de vaccins ARN messager a été possible grâce aux milliards donnés par les Etats, US, UK et Europe principalement. Dans le futur, ces sociétés biotechs vont devoir faire appel aux actionnaires et/ou utiliser leurs trésors de guerre et 2) Moderna, BioNTech et les autres ont bénéficié de procédures d’acceptation accélérées de la part des autorités sanitaires. Les prochains vaccins vont devoir suivre une procédure normale (6-12 mois). Donc, tout ne sera pas aussi facile qu’avec le Covid.

Il est difficile de valoriser ces nouveaux producteurs de vaccins, car à 2-3 ans il risque d’y avoir un trou d’air avec, on l’espère, la fin de la pandémie. Mais à 4-5 ans, les perspectives paraissent très prometteuses. Avec une vision à moyen-long terme, on est acheteur de Moderna et de BioNTech, en acceptant la volatilité et quelques déceptions potentielles temporaires, ainsi que Novavax qui va produire un vaccin très prometteur également.