Ce qu’il faudra retenir de la séance d’hier, c’est qu’encore une fois ; on s’en sort bien. Un peu à l’image de jeudi dernier, lorsque l’on ouvre au fond du bac en se disant que l’on va tous mourir et que finalement on se dit que l’on se retrouve avec deux options. La première étant d’acheter en se disant que ça finira bien par remonter. Un jour. Après la guerre. Et l’autre ; d’acheter en se disant que ça va remonter après la guerre et que si ça dégénère vraiment de toutes façons, on aura bien d’autres soucis que la performance de nos portefeuilles puisque l’on devra trouver des bâtons pour se défendre et trouver une Ford Interceptor pour chasser le pétrole.

L’Audio du 1er mars 2022

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Des sanctions que l’on intègre

Nous sommes donc en train d’intégrer gentiment les sanctions qui vont peser sur la Russie et les conséquences que cela aura à moyen terme. Le Rouble s’est fait démonter, les Américains ont stoppé le trading des titres russes et ne semblent pas près de le redémarrer. Le tracker VanEck sur la Russie ne traite plus et est dorénavant bloqué à moins 31%, mais on commence à accepter la chose. Ce que l’on ne sait pas encore, c’est ce que Poutine nous réserve comme sanctions en retour.

Sachant que la FIFA l’a exclu de la Coupe du Monde au Qatar, que la FIA a viré tous les pilotes et les sponsors russes du monde automobile, que certains pays (comme le Canada) ont interdit la vente de la vodka russe (autant pour ceux qui pensent encore que Trudeau n’est PAS complètement cinglé). Sans oublier bien sûr LA SANCTION QUI FAIT LE PLUS MAL : L’EXCLUSION DE LA RUSSIE DU CONCOURS DE L’EUROVISION, sanction qui pourrait d’ailleurs définitivement faire plier Poutine, puisqu’on imagine assez mal que l’on puisse imaginer une seule seconde être un pays qui ne participe pas au concours de l’Eurovision. Il est probable que guerre ou pas guerre, la Russie ne s’en remette jamais.

Il semble clair qu’avec toutes ces sanctions, Poutine ne va pas rester de marbre et il faudra s’attendre à la réponse du berger à la bergère.

En attendant on s’en sort

Mais en attendant, peu importe, le marché semble avoir encaissé le pire et même la problématique du week-end – à savoir l’hypothèse d’une guerre nucléaire semble avoir été acceptée, soupesée et valorisée. Elle est dorénavant officiellement classifiée comme « bluff », sans compter que le nouveau Messie et stratège géopolitique international ET pilote de scooter, François Hollande, l’a confirmé hier dans Quotidien en expliquant qu’il connaissait bien Vladimir et que sa menace n’était qu’un coup de poker.

Quand on voit tout ce que François Hollande a achevé dans sa carrière, en plus de la livraison de croissants chez Julie Gayet, on ne peut que se sentir rassuré par de telles déclarations et avoir envie racheter le marché pour regarder loin devant, après la guerre.

Repenser les portefeuilles

Néanmoins, même si les gens ont « moins peur », on constate tout de même plein de mouvements en direction des safe heaven, l’or est légèrement en hausse, mais surtout il semblerait que tout le monde ait  l’air de massivement aller se planquer dans le dix ans US qui a vu son rendement s’effondrer de près de 0.2% depuis trois jours à 1.86% ce matin, c’est presque un krach – il est assez intéressant de noter que le 10 ans est passé du chart le plus regardé il y a 15 jours au chart dont plus personne ne parle… jusqu’à hier..

Et puis, depuis deux jours, les intervenants commencent à regarder autre chose et à peser les conséquences de la guerre… Hier tout le monde se jetait sur les titres de la Cyber Securité alors que l’on craint des attaques de la part de la Russie, mais aussi parce que les Anonymous sont en train d’attaquer le gouvernement russe et les sociétés qui s’y rallient … Forte hausse sur des boîtes comme Palo Alto, Zscaler, Crowdstrike ou encore Fortinet. Même chose du côté de l’armement. Il est assez intéressant de voir que personne ne s’est intéressé au secteur de la défense depuis deux semaines.. y compris jeudi dernier – et depuis  deux séances, c’est la folie…  Même si c’est mal d’acheter de la défense et que c’est pas ESG et que même certaines banques interdisent à leurs clients d’acheter ces titres tellement c’est mal… J’imagine que dans certains comités de gestion, on va repenser le concept d’investissement responsable.

Et puis y a le pétrole

Et puis il y a une grosse pression vendeuse sur les pétrolières qui subissent indirectement les sanctions contre la Russie sur leurs opérations là-bas. BP a vendu sa participation dans Rosneft et pris une perte comptable de 25 milliards.., et tout le reste est sous pression alors que les Américains se demandent comment ils pourraient prendre des sanctions contre le pétrole russe, tout en sachant que si on les interdit de vendre du pétrole, le cours du baril va encore monter et ça va moyennement arranger Biden et sa lutte contre l’inflation… C’est un peu compliqué de jouer à qui perd gagne, surtout à quelques heures du discours sur l’état de l’Union.

Côté FED, là aussi on se pose des questions et on se demande si Powell ne va pas calmer ses ardeurs et que, soudainement la hausse des taux pourrait ne pas être si violente que prévue, histoire ne pas jeter encore un peu plus d’huile sur le feu. Bref. En résumé, ça ne baisse pas autant que l’on aurait pensé que ça aurait pu baisser. On ne va pas se mentir ; les charts ont une sale gueule et ne respirent pas la santé. On n’avait plus connu un début d’année aussi pourri depuis plus de dix ans et on se serait bien passé de la guerre en Ukraine après deux ans de COVID, mais force est de constater que si l’on cumule tout ce que l’on a pris dans la tronche depuis 30 mois, on peut s’estimer heureux de n’être qu’en baisse de 12% sur le Nasdaq ces deux derniers mois.

L’Asie

Ce matin en Asie on est même carrément en hausse. Le Nikkei remonte de 1.2%, Hong Kong est flat et la Chine remonte de 0.5%, juste avant d’envahir Taïwan. Les futures sont légèrement en hausse et on se dit que si on nous avait dit ça il y a 48 heures, on n’y aurait pas cru. Mais visiblement, si l’on dit que souvent femme varie, dans le cas présent c’est plutôt « souvent investisseur varie et les algos aussi ».

Le pétrole poursuit toujours sur sa lancée, l’or est donc légèrement en-dessus des 1900$ et les cryptos explosent parce que soudainement tout le monde est en train de se convaincre que les Russes vont utiliser ça comme porte de sortie et pour faire tourner leur économie. Le Bitcoin est en hausse de 14% et se traite à 43’400$ et l’Ether prend 12% à 2900$. Comme quoi c’est pas perdu pour tout le monde. On retiendra au passage que Binance a refusé de geler les assets des clients russes, malgré les requêtes de l’Ukraine. Comme quoi, il y a quand même deux poids deux mesures, si le Conseil Fédéral ne gèle pas les assets russes dans les banques suisses, on hurle au viol, par contre si c’est Binance qui refuse, tout le monde semble trouver ça normal.

Nouvelles du jour

Dans les nouvelles du jour, on ne parle pratiquement que de la Russie, de l’Ukraine, des combats sur le terrain et des sanctions. Mais il faut tout de même retenir que le COVID fait son retour dans la presse. D’un côté, on a les masques qui tombent aux USA, mais en même temps les contaminations augmentent à Hong Kong. Probablement parce qu’ils n’ont pas encore compris que la guerre en Ukraine était censée faire totalement disparaître le virus. Et puis il faut aussi souligner que les tests démontrent que le vaccin de Pfizer pour les enfants de 5 à 11 ans est efficace à 12% pour lutter contre Omicron. À ce stade d’efficacité, autant leur filer un paquet de Sugus et une Chupa Chups, ça devrait marcher tout aussi bien.

Côté chiffres économiques, il y aura le PMI en Allemagne et en Angleterre, puis Lagarde qui parlera. Ce soir aux USA, il y aura la publication de l’ISM Manufacturier et le discours de l’état de l’Union de Biden qui va se faire un plaisir d’utiliser l’Ukraine pour justifier son bilan plus que mitigé.  Pour le moment les futures sont en hausse, tout pointe en direction d’une ouverture dans le vert et – pour le moment – la panique semble s’éloigner, sauf pour les oligarches russes qui sont tous en train de bouger leurs yachts pour éviter de se les faire saisir par les Américains.

Il me reste à vous souhaiter une belle journée et on se retrouve demain au même endroit, comme d’habitude.

Thomas Veillet

Investir.ch

« However the world pretends to divide itself, there are only two divisions in the world today – human beings and Germans. » (Russians nowadays)

Rudyard Kipling, 1915