Nous sommes le vendredi 13 mai. Je vous passe toutes les spéculations qui vont aller avec et toutes les superstitions que l’on pourrait y apposer. Surtout pendant cette période catastrophique que nous vivons. Les marchés restent obsédés par l’inflation et la façon de lutter contre. Aujourd’hui, nous savons tous que pour lutter contre l’inflation, il faut monter les taux. C’est une évidence. Sauf que l’on ne sait pas de combien et à quelle vitesse. Tout se fait à tâtons et pendant que la FED tâtonne, la plupart des experts causent, font des théories fumeuses et à la fin on se rend compte, qu’ils n’en savent strictement rien…

L’Audio du 13 mai 2022

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Inflation et taux d’intérêts

Nous venons encore une fois de clôturer une séance qui ne se base que sur des spéculations basées sur la macro-économie et sur la capacité de la FED à maitriser cette période inflationniste qui nous pourrit la vie. On ne va pas se mentir, on sait parfaitement que la question à laquelle nous devons répondre est la suivante :

« La FED (ou les banques centrales) sont-elles capables d’amener l’économie à un « soft-landing » ?

Autrement dit, sont-ils capables de monter les taux suffisamment vite et bien pour freiner l’inflation ou au contraire, vont-ils les monter trop vite et trop fort et détruire la croissance économique pour nous précipiter en récession ? Se poser la question est un truc facile. Y répondre est une autre paire de manches.

Ne rien savoir et spéculer devant un feu de camp

Actuellement, la seule chose que l’on peut faire c’est spéculer et raconter tout et n’importe quoi autour de la huitième bière de l’apéro du jeudi soir. Non, parce que soyons clairs :

Personne n’en sait rien et nous passons notre temps à tergiverser et à sortir des « s’ils font et ça et qu’ensuite ils font ça, peut-être que ça fera ça »… En gros on n’en sait rien et on est juste en train de mettre tout ce qu’on a appris dans des bouquins d’économie sur la table en espérant y voir plus clair. Sauf que ça ne sert à rien, mis à part brasser de l’air et donner du grain à moudre aux journalistes qui vont essayer de produire quelque chose avec toutes ces théories fumeuses.

PPI

Hier nous avons eu le PPI – les Prix à la production – on a l’habitude de dire que le PPI est en amont du CPI. À savoir que si ce dernier ralenti, cela voudra dire que le mois prochain, le CPI va ralentir à son tour – en théorie. Sauf qu’hier le PPI est sorti comme le CPI avant-hier : entre les deux. Entre les deux, c’est-à-dire moins fort que le chiffre du mois dernier, mais plus fort que les attentes des experts en économie qui font des projections tous les mois avec des données à moitié tronquées et souvent fausses en se basant sur des chiffres qui sont des estimations calculées sur bases d’autres chiffres qui proviennent de sondages. Sondages dont on ne sait pas trop d’où ils sortent.
En résumé, on est en train de se demander si les spéculations à moitié fausses des économistes doivent avoir plus de crédit que les chiffres officiels du gouvernement qui sont trois fois sur quatre, corrigés le mois suivant « parce qu’il y avait des erreurs dedans ». Sur base des chiffres d’hier – le PPI à 11% pour le mois d’avril, contre 11.2% pour le mois de mars, mais contre 10.7% attendus par les économistes – provoquait à nouveau une vague d’interrogation multiples :

1. Est-ce que cela veut dire que nous avons atteint un « pic » ?
2. Est-ce qu’à partir de là, la FED va réfléchir dans sa logique de hausse des taux ?
3. Est-ce que cela peut nous faire penser que nous avons atteint le fond du trou sur les marchés ?
4. Est-ce que l’on va avoir un soft-landing ?
5. Est-ce que l’on va avoir un hard-landing ?
6. Est-ce que Powell sait ce qui va se passer maintenant ?
7. Est-ce que Federer peut gagner encore un tournoi du grand-chelem ?
8. Est-ce qu’il fera beau ce week-end ?

Ce à quoi, on peut rapidement répondre, dans l’ordre :

En un : Aucune idée et aucun moyen de savoir, ça dépendra du prix des biens et des services, du prix du pétrole et du gaz et de la guerre en Ukraine. En deux : Probablement trop tôt pour le dire, mais rien n’est moins sûr, bien au contraire. En trois : Aucune idée et aucun moyen de savoir, ça dépendra de l’inflation, des taux, des différents discours de la FED et de la couleur de la cravate de Powell au prochain meeting de la FED. En quatre : Aucune idée, peut-être. En cinq : Aucune idée, probablement. En six : Sûrement pas, il a même dit que s’il pouvait retourner dans le passé, il aurait fait autrement, autant dire que le mec il va autant à tâtons que nous. En sept : qu’est-ce que j’en sais ? Ai jamais été foutu de mettre un service dans le carré de service. En huit : probablement qu’il y aura du soleil, avec quelques passages nuageux, avec probablement des averses éparses sur les reliefs et peut-être de la neige, il fera chaud la journée, froid la nuit, humide le matin et sec le soir, le tout avec un temps variable.

En relisant ce que je viens d’écrire, je crois que l’on peut clairement répondre que l’on ne sait ABSOLUMENT pas ce qui va se passer, ni quand cela va se passer et encore moins comment tout cela va se terminer. En théorie, on ferait mieux de la fermer, mais j’ai quand même déjà réussi à écrire deux pages pour NE RIEN DIRE !!!

Et les marchés alors ?

Mon maître à penser, Coluche, disait en son temps : « Quand un mec il en sait aussi peu sur un sujet, il a qu’à fermer sa gueule ». Et c’est assez juste, sauf que depuis quelques années c’est devenu très important d’avoir un avis sur tout et surtout un avis. Si vous arrivez à l’apéro de ce soir et que vous n’avez pas un truc à dire sur ce qui se passe sur les marchés et sur l’effondrement des cryptos, vous aurez l’air ridicule. Ridicule comme si une influenceuse d’Instagram sortait sans maquillage ou sans prothèses mammaires. Et hier le marché a essayé de se faire une idée de ce qui pourrait se passer, sans franchement y arriver.

Pour faire simple, il s’est posé les mêmes questions que j’ai posé un peu plus tôt et comme on n’arrivait pas à y répondre, on n’a rien fait. Globalement, les marchés européens ont terminé en tir groupé dans une baisse comprise entre 0.6 et 1% en se disant que ça n’était pas sûr que la FED arrive mener l’économie à un soft-landing à cause des taux, de l’argent, de la récession et du fait que le consommateur pourrait nous lâcher à tout moment. Et les marchés US ont terminé en ordre dispersé pour les mêmes raisons avec des interprétations différentes. En ce qui me concerne, j’ai surtout l’impression que tout le monde a envie que la semaine se termine. Pas que la suivante sera différente, mais au moins on sait que dès ce soir, 22H, les marchés arrêteront de bouger et que l’on pourra parler d’autre chose. Par exemple de l’effondrement des cryptos qui elles, continuent de traiter pendant le week-end.

En Asie et ailleurs

En gros, on est en train de brasser une quantité d’air assez impressionnante pour gérer des théories sur ce qui pourrait éventuellement se passer sur l’économie et les marchés boursiers alors que l’on ne sait absolument pas ce que va faire la FED – si ce n’est que Powell a confirmé qu’il y aura encore deux hausses de 0.5% et qu’ils sont prêts à faire plus – ou pas – ce qui nous avance énormément dans notre réflexion – Que l’on ne sait absolument pas non plus comment l’économie va réagir et ce que ces multiples hausses de taux vont avoir comme effet sur les matières premières, l’emploi et la consommation. La seule chose qui nous fout un peu les jetons, c’est le fait que – potentiellement – le consommateur pourrait craquer et arrêter de dépenser. Et ça, ça c’est le pire qui pourrait nous arriver. Autant vous dire que si dans les mois qui viennent, le consommateur nous lâche, la question ne sera pas de savoir si l’on va rentrer en Bear Market sur le S&P500 – Bear Market qui commencera officiellement sur le S&P quand il cassera les 3837.25 – mais plutôt : combien de temps le Bear Market va durer. Et pour ça, il faudra revenir aux questions de tout à l’heure.

Ce matin l’Asie est en plein délire. Le Japon et Hong Kong sont en hausse de plus de 2%, la Chine monte de 0.6% et la Corée du Nord est confinée à cause du COVID. Il semblerait que la forte hausse de ces dernières heures se base principalement sur le fait que l’inflation AURAIT fait son PIC et que Powell s’est montré volontaire dans ses intentions de lutter contre, même si l’on sait que certaines pilules anti-inflation vont faire mal. Pendant ce temps, le pétrole remonte à presque 108$ – ce qui va sûrement aider l’inflation – l’or a cassé la moyenne mobile des 200 jours à la baisse et se dirige vers le dernier support psychologique des 1800$ et les cryptos tentent un rebond alors que tout le monde est en train de baisser les bras sur le thème, que le Luna et le Terra sont dans le viseur des investisseurs embarquant avec eux toute les rumeurs possibles et imaginables sur le Bitcoin. Le Bitcoin qui se reprend ce matin et traite à nouveau au-dessus des 30’000$. Mais on sent bien que le maelstrom liée à l’effondrement du Terra et du Luna on fait du mal à la confiance, sans compter le nombre d’utilisateurs qui ont été ruinés en l’espace des quelques jours, eux qui pensaient se faire un rendement de 20% « presque sans risque ».

Les nouvelles du jour

En ce qui concerne les nouvelles du jour, je ne vous cacherai pas que l’on parle de l’inflation, des taux et de la réaction des banques centrales, surtout après les derniers commentaires de Powell. Powell qui dit qu’il aurait bien aimé pouvoir voyager dans le temps pour savoir ce qu’il sait aujourd’hui. Ce qui démontre bien la clarté et toute la maîtrise dans laquelle se trouve la FED. On parle aussi de Twitter, puisque deux « top managers » viennent de donner leur sac à a perspective de voir Musk aux commandes. D’ailleurs le titre se traite 9 milliards en dessous du prix d’achat du patron de Tesla alors que pas mal d’experts pensent que « c’est trop cher ». C’est les mêmes experts qui tergiversent depuis deux mois sur le taux et l’inflation. Autrement on notera que les derniers Bulls sur Zoom sont en train de jeter l’éponge. Alors que la star des meetings sur le Web durant la pandémie vient de se faire massacrer depuis l’automne dernier, passant de 400$ à 85$, un analyste américain qui était super-bullish à 300$, vient d’abandonner et de considérer que l’objectif est plutôt autour des 90$ – pas sûr que le confinement en Corée du Nord remonte le moral des investisseurs sur Zoom.

On aborde aussi le sujet des voitures électriques qui étaient fortement recherchées hier dans la foulée des chiffres de Rivian qui confirmait que son business plan était en marche, tout le secteur en bénéficiait. Il y avait aussi un retour de la spéculation sur GameStop et AMC, les stars de Wallstreetbets étaient de retour et GameStop a été stoppée plusieurs fois à la hausse pour « excès » de volatilité. Aucune raison fondamentale, mais quand les marchés deviennent dingues, il se passe forcément des trucs de dingues. Niveau géopolitique, on ne parle presque plus de la guerre en Ukraine et le marché semble être passé à autre chose. Il faudra néanmoins prendre note du fait que la Finlande est en train de mettre la pression pour intégrer l’OTAN au plus vite. La demande pourrait être faite dans les jours qui viennent. La Russie considère que cette intégration serait une menace pour sa souveraineté et parle de mesure de rétorsion « au cas où cela se produirait ». On se réjouit de voir la Russie envahir la Finlande. On aurait bien besoin de ça. Il faudra juste espérer que la Russie soit aussi incompétente qu’elle l’avait été pendant la guerre 39-45 – mais c’était en hiver..

Côté chiffres

Pour ce qui est des chiffres économiques, nous aurons le CPI en France et en Espagne. En France, il n’y a presque pas d’inflation, puisque le gouvernement fait absolument tout juste et que les instances gouvernementales qui publient les chiffres font ce qu’il faut pour ne pas fâcher le Président. L’inflation en Espagne, le marché s’en moque et puis nous aurons les chiffres de la confiance du consommateur version Université du Michigan. Ces deniers ne veulent rien dire – comme d’habitude – mais comme cela touche à la confiance du consommateur, tout peut arriver. Pour ce qui est des chiffres du trimestre, on arrive au bout du très gros, ce vendredi devrait donc être calme niveau publications.

Pour le moment les futures sont en hausse de près de 1% – comme si l’on voulait nous donner l’impression que tous les shorts qui ont flingué le marché cette semaine, veulent se couvrir pour partir en week-end en rachetant le marché et utiliser les profits pour aller acheter du Bitcoin.

En ce qui me concerne, je vais aller me coucher et me réveiller dimanche soir. Ça me fera du bien. Passez un très beau vendredi, un excellent week-end et on se retrouve lundi matin pour trouver une nouvelle question à laquelle on n’aura PAS LA RÉPONSE !!!

À lundi !!!

Thomas Veillet
Investir.ch

« You don’t always need a plan. Sometimes you just need balls”

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