Hier soir les marchés américains ont réussi à combattre le signe indien et terminaient presque dans le vert. Sauf le Nasdaq qui souffre encore avec la nouvelle lubie du gouvernement US qui limite les exportations de semi-conducteurs en direction de la Chine pour des raisons militaires. Le contraire nous aurait étonné. En Europe on continue de se faire démonter – toujours dans la mouvance « Jackson Hole, c’était pas bien » - et ce matin tout le monde est sur les dents en attendant les chiffres de l’emploi. Pour une fois on espère presque que ça sera mauvais, parce que si c’est aussi fort que le mois dernier, nous devrions pouvoir expérimenter le saut en parachute. Sans parachute.

L’Audio du 2septembre 2022

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Vendredi dernier pèse toujours

L’ambiance négative mise en place depuis vendredi dernier ne semble pas vouloir se dissiper. Cela peut paraître incroyable pour un milieu qui a habituellement une mémoire à court terme qui se rapproche plus de la vitesse de la lumière que d’autre chose. Pourtant, depuis le discours de Jerome Powell qui nous a dit d’aller nous faire voir avec notre récession et que lui il avait mieux à faire avec l’inflation, rien n’a plus été pareil. En France, par exemple, le CAC40 a perdu près de 5.5% en alignant 6 séances de baisse consécutives. Les USA ont réussi à inverser la tendance hier soir, mais au prix d’hésitations assez spectaculaires. Sans compter que tous les experts en fin du monde sont de retour et sont en train de s’approprier les médias pour tous annoncer des corrections toutes les plus impressionnantes les unes que les autres.

Avant-hier, il y avait déjà eu Grantham, mais depuis hier ça s’intensifie avec plusieurs banques d’affaires qui disent que l’on va aller retester les « points bas » du mois de juin quoi qu’il arrive. Il y en a qui pense que l’on va aller plus bas pour faire de nouveaux plus bas, tout en sachant raison garder et puis vous avez les stars de la finance qui ne font pas les choses à moitié et qui viennent annoncer un bain de sang dans les règles. C’est le cas de l’auteur de « Rich Dad, poor Dad », Robert Kiyosaki, qui pense que nous sommes au bord de l’effondrement boursier – oui, vous avez bien lu : effondrement boursier – mais le point rassurant c’est qu’il a également dit que ça serait un bon point pour racheter et commencer à « devenir riche ». Il a aussi ajouté : achetez mon livre. Et puis il y Michael Burry.

Comme au cinéma

Alors lui, ce qu’il y a de bien, c’est que depuis qu’il a été joué par Christian Bale dans « the Big Short », tout le monde sait qu’il est autiste et parfois on a tendance à le prendre un peu moins au sérieux (à tort). Néanmoins, il vient toujours avec des arguments assez intéressants. La dernière fois qu’il avait parlé cet été, c’était pour annoncer qu’il liquidait tout son portefeuille actions alors que tout le monde était en train d’acheter des t-shirts « le Bull Market est de retour ». Mais là il est inquiet du taux d’endettement de l’Américain moyen – l’Américain moyen qui ne pourra plus compter sur les banques centrales ces prochaines années, contrairement au passé. Il pense que nous sommes dans une phase de KRACH et que le pire est à venir.

Il estime que tous les rebonds ne sont que des pièges à cons et que le S&P500 peut encore largement baissé de…53% avant de trouver un fond. Pour lui l’objectif déclaré sur l’indice est de 1900. Pas l’année, le nombre de points. Alors on ne sait pas s’il aura raison. Pour le moment et depuis la crise des subprimes, il a n’a pas toujours été juste, mais il faut quand même savoir et imaginer que certains l’écoutent quand même. Nous voici donc dans une période de la baisse où tout le monde vient nous dire que ça va être la merde, comme tout le monde nous disait que le paradis était à bout touchant il y a trois semaines. La plupart des stars viennent nous mettre en garde, comme ça quoi qu’il arrive ils pourront toujours dire en levant les bras : « ah, moi je vous l’avais dit !!! ». D’ailleurs je suis presque inquiet parce que Monsieur Roubini n’est pas encore arrivé pour nous dire que l’on allait à 333 sur le S&P500 et qu’il s’attend à une correction de 89%. Il viendra sûrement lundi quand les chiffres de l’emploi seront sortis à 150’000 au-dessus des 318’000 attendus et que tout le monde va paniquer en pensant que Powell va monter les taux directement à 6% le 21 septembre. Histoire de calmer l’inflation.

L’emploi et le gars qui s’accroche au pinceau

Oui, parce que nous sommes le premier vendredi du mois et que le premier vendredi du mois on nous annonce les chiffres de l’emploi. Les non-farm payrolls américains sont attendus à 318’000 pour le mois d’août. Habituellement, c’est un chiffre important. Mais depuis Jackson Hole, il l’est encore plus. Encore plus parce que si c’est trop fort on va imaginer que la hausse des taux de Powell va être de plus en plus forte et de plus en plus violente et si c’est trop faible, on va se dire que la récession, on va se la prendre en pleine gueule et que, comme la FED s’en tape, on est mal barré. Il est donc difficile de se sentir détendu et relaxé à quelques heures de cette annonce qui pourrait précipiter les marchés dans une zone dans laquelle on n’a pas envie de se trouver : à savoir, sous les 3900 sur le S&P500. Certains commentateurs boursiers, dont je fais partie, pensent que ça pourrait nous valoir un vendredi un peu similaire à vendredi de la semaine dernière.

En tous les cas, la moindre « mauvaise interprétation » des chiffres de tout à l’heure, pourrait faire très mal. Et je vous avoue que je ne vois ce qu’il faudrait comme chiffre pour que le marché « le prenne bien ». Trop peu c’est la récession, trop tout court, c’est la hausse des taux massives pour les siècles à venir. Le seul espoir c’est que ça sorte pile-poil dans les attentes. On peut rêver et se dire qu’une fois par siècle, les économistes pourraient avoir raison dans leurs prédictions.

Et puis il y a la Chine

Alors que nous sommes en train de nous dépatouiller avec des mauvaises nouvelles qui nous arrivent de tous les côtés. Entre guerre, précarité, problèmes d’approvisionnement, tensions géopolitiques et crises énergétiques, on ne sait plus où donner de la tête. D’ailleurs tout le monde devient expert en économie d’énergie, ça devient presque pesant. On se croirait revenu dans la crise COVID, mais en pire. D’ailleurs j’en arrive à me dire qu’il faut absolument se casser des réseaux sociaux pour pouvoir avoir une vie à peu près sereine. Mais en plus de tout cela, depuis quelques jours, nous avons un truc de plus à remettre dans la liste de ce qui va mal, c’est la Chine qui reconfine.

Alors bon, ils reconfinent Chengdu et probablement que vous ne saviez même pas que ça existait jusqu’à hier, mais toujours est-il que la stratégie anti-COVID du COVID parti communiste chinois fonctionne à plein régime. Un pigeon contaminé, un chien qui tousse, hop, on confine 40 millions de personnes et ont les vaccines pour la 9ème fois avec un vaccin qui a été bricolé à base de potage de pangolin et les économies mondiales tremblent à nouveau. Tout le monde est en train de se dire que le COVID est de retour et que la croissance chinoise est au plus mal. Et on n’a pas forcément tort. Pas forcément en ce qui concerne le COVID, mais plutôt la croissance. Le nouveau confinement n’était pas la seule nouvelle économique négative en provenance de Chine. L’indice PMI a reculé à 49.5 en août, contre 50.4 en juillet, passant sous la barre des 50 points. Ce qui sépare la contraction de l’expansion… je crois qu’il n’y a pas besoin de vous faire un dessin. Mais l’économie chinoise est au plus mal…

Ce matin l’indice chinois est tout de même dans le vert. Légèrement. Mais Hong Kong recule de 0.6% et le Nikkei ne fait rien parce qu’ils attendent les chiffres de l’emploi aux USA ; même s’ils seront fermés depuis longtemps à l’heure de la publication. Pour le reste, le Bitcoin est à 20’000$ et joue à la classe d’actifs la moins volatile. Il nous avait habitué à mieux. L’or est 1710$, pendant que le pétrole est à 88.50$.

Pour le reste

En ce qui concerne la journée qui nous attend, on ne va pas se mentir. Personne ne va faire les grandes manœuvres avant 14h30. D’ailleurs les futures sont inchangés, l’Asie ne fait pas grand-chose, les matières premières sont calmes et les cryptos, dans le coma. On va dire que l’on devrait y voir plus clair tout à l’heure et qu’en attendant, le marché a décidé de ne rien faire et l’actualité, de ne rien produire de bien intéressant. On notera tout de même que la crise énergétique et les coupures d’électricités à venir cet hiver commencent à faire flipper l’Europe. On notera aussi que l’on commence un peu à s’interroger sur le pourquoi du comment des sanctions contre la Russie, si c’est pour que les comptes russes débordent de cash et que nous, en Europe on regarde nos économies s’effondrer brutalement, pendant que les Politiciens brassent de l’air pour nous expliquer à quelle heure il faudra faire tourner le lave-linge et qu’il faudra dîner à 18h se coucher à 19h pour économiser l’électricité.

Ce matin on a également appris que le Chairman de Lukoil qui était hospitalisé a décidé de prendre l’air à sa fenêtre et qu’il a oublié qu’il était au 19ème étage. Encore un Russe important qui a eu un « accident ». Côté chiffres économiques, il y aura le chômage en Suisse, le Trade balance en Allemagne, mais tout le monde attendra 14h30, bien sûr. Par contre j’ai une excellente nouvelle. SI les chiffres sont mauvais ce soir et que le marché se fait défoncer, en revanche, lundi il ne baissera pas aux USA. C’est une certitude. Il ne baissera pas parce que c’est Labor Day lundi prochain et que tout sera fermé aux States.

Passez une très belle journée, un excellent week-end et à lundi !!!

Thomas Veillet
Investir.ch

“Let them hate. Just make sure they spell your name right.”

Harvey Specter