Entre vendredi dernier où nous étions prêts à nous ouvrir les veines avec le CDS de la Deutsche Bank et hier où le retour d’Ermotti était plus ou moins autant acclamé que si Federer revenait pour gagner Wimbledon juste une dernière fois, on aurait pu croire qu’il s’est passé 8 mois et que l’économie et le tissu bancaire s’étaient profondément restructurés. Mais en fait pas du tout. Il s’est passé cinq jours et encore, il y avait deux jours de week-end dessus. Peu importe, alors que mardi soir à la clôture on se demandait si la crise bancaire était terminée, visiblement hier matin avec le retour de l’enfant prodige à la tête de l’UBS nous avons eu notre réponse.
L’Audio du 30 mars 2023
La CRISE DES BANQUES EST FINIE – Ermotti est là
La réponse est donc très claire : QUELLE CRISE DES BANQUES ??? Il semblerait que tout soit oublié et que tout ait été oublié en moins de temps qu’il ne faut pour dire « CDS » trois fois de suite. On ne sait pas trop comment, probablement qu’il y a un mélange d’interventionnisme massif des banques centrales, puisqu’il ne se passe pas 20 minutes sans qu’un banquier central vienne dire dans les médias que « les banques sont solides et résilientes et que rien ne peut nous arriver ». Surtout depuis que lesdites banques centrales ont réinventé le crédit bon marché comme si le potage de chauve-souris était devenu une partie indissociable des Happy Meals de chez MaDonald’s.
En tous les cas, entre les déclarations des uns et des autres qui disent que plus rien ne peut arriver aux banques et qu’à la limite c’est le meilleur secteur du MONDE pour investir et qu’à côté, l’intelligence artificielle, c’est « has been » ET le retour d’Ermotti à la tête de la nouvelle méga-fusion made in Switzerland, on avait presque l’impression qu’il ne s’était rien passé. Que la SVB ça n’était rien si ce n’est de l’incompétence en termes de management et que les « bank runs » qui ont suivi ne sont que de la mauvaise communication. Mais que l’on se rassure, comme dorénavant : TOUT VA BIEN, nous devrions voir arriver les premiers upgrades sur le secteur qui seront tout aussi explosifs que si c’était sur Tesla. D’ailleurs, si ça se trouve, UBS va aussi fabriquer des voitures électriques et en plus, guérir le cancer.
L’enfant prodigue
Et puis alors, ce qu’il faut surtout retenir, c’est le retour d’Ermotti. Alors je ne le connais pas perso et je n’ai pas non plus souvenir que lors de ses 10 dernières années à la tête de l’UBS il ait régulièrement marché sur l’eau et multiplié les pains, mais l’annonce de son retour aura agi sur le marché comme si l’on venait d’apprendre que le gars descendait de la planète Krypton et que s’il voulait il pouvait stopper le train Berne-Zurich avec une seule main. Mais là il est en costard et il ne veut pas se salir et y a pas de cabine téléphonique à proximité pour passer son slip par-dessus le pantalon.
En résumé, et à voir comment le marché prend les choses, il ne fallait pas mettre Ermotti à la tête de la nouvelle UBS – mais plutôt à la tête de toutes les banques du monde et d’en faire « LE CEO SUPRÊME DES BANQUES DU MONDE ». Non parce que faire reprendre près de 4% à l’UBS alors qu’en même temps on nous apprenait que l’UBS ET le Crédit Suisse se retrouvaient À NOUVEAU dans une histoire d’évasion fiscale avec les USA – même si on sait que c’est de nouveau un coup monté des autorités US pour récupérer le business via le Delaware – il fallait quand même le faire. Alors soit, nous ne sommes que des « Moldus » et Ermotti semble avoir passé beaucoup de temps à Poudlard, mais que son retour soit acclamé à ce point, cela restera un mystère pour moi. En tous les cas on ne va pas se plaindre puisqu’il semble qu’officiellement la crise des banques soit terminée et qu’une bonne partie de la hausse d’hier soit attribuée à cela. Il est tout de même assez satisfaisant de voir qu’à la fin, quoi qu’il arrive, c’est toujours les banques qui gagnent.
Le retour de la tech, parce que c’est trop cool
Mais soyons honnêtes, les banques n’étaient pas les seules stars de la journée et le couronnement d’Ermotti en tant que roi de la Suisse, champion des CEO et héros qui devrait rendre sa « fierté » à la Suisse (j’invente rien, c’est le journal Investir, les échos qui a écrit ça, ils ont dit : « Sergio Ermotti, un dirigeant sans complexe pour rendre sa fierté à la finance suisse », à cinq minutes près, ils renommait le Cervin pour l’appeler Mont Ermotti !!!). Il faudra retenir aussi que la tech a fait un retour flamboyant. Mardi on n’était pas super-à l’aise avec la tech parce que les taux ne baisseraient pas en 2023 – vu que la crise des banques ne ralentirait pas l’économie assez fort pour faire baisser l’inflation et exploser la récession – et hier matin c’était déjà plus pareil.
C’était plus pareil, parce que c’était différent et que Micron avait sorti des chiffres IMMONDES, mais qu’ils n’avaient pas été assez cons pour sortir des chiffres IMMONDES et ne pas trouver la petite phrase qui allait bien avec et qui allait tout changer. En effet, avant-hier ils ont bien annoncé une perte de 2 milliards ET un effondrement de leurs marges, mais ils n’ont pas été stupide au point d’oublier de dire « nous sommes très optimistes pour 2025, surtout optimistes sur la croissance des ventes liées à l’intelligence artificielle ». AAAAAHHHHHHHH, ils ont dit le mot « MAGIQUE ». Non, parce que vous savez que depuis 4 mois, il est écrit dans tous les bons livres sur la finance, que : « toute société qui citera le terme « intelligence artificielle » dans n’importe lequel de ses communiqués de presse, devra immédiatement, et cela sans la moindre hésitation, être considérée comme la prochaine société capable de concurrencer Microsoft, Apple et Google, le tout en réglant le problème de la fain dans le monde et de la guerre en Ukraine en même temps ». Mais je m’égare, parce que vous le savez – bien sûr. Donc Micron va faire un carton dans l’IA et à partir de là, c’est bullish pour la tech, pour l’économie et peut-être même un peu pour Sergio Ermotti et les banques du monde entier.

Les semi-conducteurs en folie
Du coup, Micron a explosé de plus de 7%, Infineon aussi parce qu’ils ont aussi fait des commentaires positifs, Intel vit sa meilleure vie depuis trois mois et dans l’ensemble du secteur des semi-conducteurs, pas une seule société était en baisse hier, pendant que l’indice de référence : le SOX tentait sa Xième cassure à la hausse. Il y a deux jours on avait peur que les taux qui ne baisseraient pas cette année puisse faire du mal à Microsoft et Apple et hier soir c’était la fête au village pour toute la tech et de façon quasiment unanime.
Les indices ont bien sûr cartonné à la hausse. Le S&P500 repasse au-dessus des 4’000 et semble vouloir quitter la pente savonneuse qui est la sienne, le CAC40 réclame les 7’200 points, le Nasdaq efface sa configuration de double-top en clôturant à une encablure des 12’900 et le SMI a pris quasiment 500 points depuis que le Crédit Suisse a été bouffé par l’UBS. Et tout ça à cause d’Ermotti et de la triplette magique qui pilote tout ça depuis Berne. On a peut-être beaucoup critiqué la FINMA, la BNS et le Conseil Fédéral – enfin, pas moi, mais les autres – mais depuis qu’ils sont intervenus c’est la fête au village et si ça se trouve, ils ont sauvé le monde et évité une crise bancaire mondiale. Comme disent les Américain « God Bless Switzerland, God Bless le secret bancaire du Delaware et God Bless Sergio Ermotti.
L’Asie et les quarante voleurs
Ce matin l’Asie est unanimement dans le rouge. Après le carton d’Alibaba hier, on revenait un peu à la raison et les déclarations de Xi Jinping en second, Monsieur Li, n’ont pas encouragé les indices à partir plus haut. Pourtant, il a dit que les conditions économiques chinoises se sont améliorées en mars et que cela devrait aider à la consolidation du recovery qui est en cours. Alors je ne comprends pas vraiment ce qu’il veut dire par-là, mais comme je n’ai pas acheté la dernière édition du dernier lexique d’interprétation du langage politique, j’ai quelques lacunes. En revanche, je sais une chose : c’est que dans son discours, Li n’a pas ajouté que le recovery, c’est grâce à l’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE. Ça aurait tout changé !
À l’heure actuelle, le Japon recule de 0.8%, le Hang Seng baisse de 0.6% et la Chine abandonne 0.24%. Du côté du pétrole, ça revient un poil également et le baril se traite à 72.76$, l’or est à 1976$ – totalement délaissé parce que la crise des banques, c’est fini et le Bitcoin est à 28’500$, malgré que la crise de Binance n’est pas encore finie. Il faut dire que selon les chiffres, plus d’un milliard auraient été retiré de chez Binance depuis l’annonce de l’attaque de la CFTC, mais le plus étrange reste encore que 850 millions de dollars ont été retiré AVANT l’annonce de la CFTC. Et je peux vous jurer que c’est pas moi.
Les nouvelles
Au chapitre de : « non la finance n’a pas de problèmes mentaux », on notera qu’hier le titre de SVB a repris sa cotation avec une volatilité qui laisserait pantois un type sous coke depuis 35 ans, puisque le titre a traité au plus bas à 1 cents et au plus haut dessus des 1$. Soit, depuis la dernière cotation avant cela, le titre a perdu 99.5%, mais hier à un certain moment nous étions en hausse de 12’000% selon comment on se place. Et comme dirait Yvan ; #onvit uneépoqueformidable. Chez Disney on a commencé les vagues de licenciement. Apparemment, Mickey et Minnie vont conserver leur job, mais en revanche le patron de la division « Marvel » s’est fait virer par le CEO lui-même, vu qu’ils se sont pris de bec. Moi j’aurais pas osé virer le patron des Avengers.
Autrement, il y a Musk et Wozniak (fondateur d’Apple) qui ont signé une lettre ouverte pour encourager le monde à stopper le développement de l’intelligence artificielle, cette dernière étant « trop dangereuse » à leurs goûts. Le risque de compétition entre l’IA et l’humain est devenu trop grand. Oui, Musk et Wozniak ont tous les deux revu Terminator. Et puis après les négatifs de ces derniers jours, il y a Ed Yardeni qui estime que le S&P500 peut « facilement » monter jusqu’à 4’600. Et dans un autre registre, les analystes de chez Wedbush estiment que Tesla peut monter de 13% cette année encore, parce qu’ils vont faire un carton sur les ventes. Surtout en Chine. Il n’y avait qu’à voir les chiffres de BYD hier pour tirer les conséquences.
Côté chiffres – grosse journée
Grosse journée macro en ce 30 mars 2023. Vu que l’on a réglé la CRISE DES BANQUES (apparemment et grâce à Ermotti), nous allons pouvoir nous concentrer à nouveau sur notre sujet préféré : L’INFLATION ! Dès ce matin nous aurons droit à l’inflation en Allemagne et ensuite, il y aura le PCE aux USA. On ne va pas tirer de plans sur la comète, mais les experts en banques régionales et en retraits massifs vont sûrement changer de casquette et revenir sur le sujet. En Allemagne, on attend 7.3% en baisse de 1% et sur le PCE américain – le chiffre préféré de la FED est attendu à 4.3%. Il y aura aussi les Jobless Claims et le GDP aux USA, ainsi que la confiance du consommateur et le business sentiment en Europe, tout comme le KOF en Suisse.
Pour le moment, les futures sont en baisse de 0.04% et en ce qui me concerne, je vais aller dans la forêt pour récupérer de l’argile et construire une statue de Sergio Ermotti à mains nues, afin de pouvoir lui faire des offrandes. Si je retrouve le chemin de la sortie des bois, je vous retrouve demain – ici-même – pour une nouvelle chronique matinale ! Passez une très belle journée !
Thomas Veillet
Investir.ch
“I saw a study that said speaking in front of a crowd is considered the number one fear of the average person. Number two was death. This means to the average person, if you have to be at a funeral, you would rather be in the casket than doing the eulogy.”
—Jerry Seinfeld