On dit : « en mai, fait ce qu’il te plaît ». Bon, déjà pour l’instant, le mois de mai, il ressemble plus au mois de septembre qu’au mois de mai mais en plus, les marchés financiers sont bloqués au milieu de nulle part en attendant de trouver la solution pour sortir de ce range. Et en attendant de trouver la solution, il faut aussi trouver de quoi s’occuper parce que les journées deviennent de plus en plus longues, alors que l’on parle toujours et encore des mêmes sujets. L'inflation, la récession, le plafond de la dette et la crise des banques qui n’est pas terminée. Heureusement, en mai il y a trois semaines sur quatre qui contient un pont.

L’Audio du 15 mai 2023

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Ascension

Non, mais vous vous rendez compte qu’il n’y a tellement plus rien à dire, que j’en suis réduit à parler des ponts du mois de mai pour grapiller quelques lignes dans cette chronique. En plus c’est lundi et mis à part le fait qu’Emmanuel Macron a encore une fois décidé de livrer tout ce qu’il lui reste comme armement à l’Ukraine et que, dans la foulée, il veut encore prendre des sanctions contre la Russie – les mêmes sanctions qui marchent super-bien depusi le début de la guerre – il n’y a pas vraiment grand-chose à dire.

Alors oui, ce matin la Chine a décidé de ne rien faire au niveau des taux et les Américains ont décidé de rallumer les négociations sur le plafond de la dette et de se voir demain. Normalement. C’est tout ce qu’il y a à dire. Du coup, on s’occupe sur d’autres sujets ; l’arrivée de la nouvelle CEO de Twitter – Linda Yaccarino – qui a l’air de ne pas du tout être quelqu’un de controversé et qui, je suis sûr, va sûrement calmer le jeu chez Twitter. On parle aussi (et encore) du plafond de la dette et de ce qu’il faut faire en attendant que la situation se règle – la solution serait de faire de l’investissement long terme et d’attendre que les choses se calment ou fasse défaut. Le gros avantage, c’est que si vous faites de l’investissement long terme et que les USA font défaut et que le marché perd 20% – vous pourrez toujours moyenner et déclarer que vous investissez pour 20 ans à tous vos amis et que du coup, les mouvements à court terme vous en touchent une sans faire bouger l’autre.

Les banques en crise

Il est évident que si cette stratégie fonctionne si vous n’avez pas besoin de votre capital dans les 5 prochaines années, parce qu’il est bien clair que personne n’est capable de nous dire quand est-ce que le défaut de la dette sera derrière nous (s’il a lieu), je crois que les Argentins attendent toujours que ça passe. Pendant que l’on tire des plans sur la comète afin d’écrire des articles de 8 pages sur la dette US et concluant « qu’on verra bien parce qu’on n’en sait rien et que les probabilités sont diverses et variées », il y a toujours les banques régionales qui sont en grande difficulté.

Le sujet devient réellement passionnant. Passionnant, parce que depuis le début du mois de mars la crédibilité des banques est passée de médiocre à « pas grand-chose » et que, pendant ce temps, l’ensemble des CEO’s du secteur qui N’ONT RIEN VU VENIR AU SUJET DE LADITE CRISE DES BANQUES, sont venus nous dire qu’ils étaient nos amis et que le pire était derrière nous, alors qu’ils n’en ont STRICTEMENT aucune idée. La semaine dernière on a vu que tout le monde était en train de se retirer ses fonds de la PacWest et que personne ne veut la racheter, donc ça devrait continuer encore jusqu’à plus soif et que, pendant que les banques partent en sucette tour à tour, on a droit aux jérémiades de Jamie Dimon qui vient supplier les autorités d’interdire les « shorts » sur les banques parce que c’est trop dur à cause de l’argent et que ça fait mal à son plan d’épargne retraite. C’est marrant comme on l’a pas entendu quand c’est les autres industries qui se font défoncer par les shorts. Pendant ce temps, sa banque ne faisait que prêter les titres de ses clients pour que les Hedge Funds puissent shorter encore un peu plus. Et pendant que Dimon vient pleurer à la télé, il y a d’autres banques qui viennent proposer les noms des 10 banques régionales les plus solides et « qui ne devraient pas disparaître » (j’adore le terme utilisé : « qui ne devrait pas disparaître », on sent tout de suite qu’on y croit à fond et que la conviction est à son top).

Et on fait quoi en attendant ?

En résumé, on n’en sait rien au sujet du plafond de la dette, on n’en sait rien au niveau de l’avenir de la crise des banques, on ne sait pas trop si on peut compter sur l’inflation pour continuer à baisser et on ne sait pas si la récession est dans le domaine du possible. Que les USA fassent défaut ou pas. Du coup, il nous reste quoi ? Eh bien il reste la dernière semaine de publications du trimestre. La dernière vraie semaine. Il y aura d’ailleurs pas mal de grand-magasins qui vont publier et ça nous donnera une idée de l’état psychologique du consommateur. Bon, après, les plus gros publieront jeudi et comme jeudi c’est férié de par chez nous, ça risque de nous faire une belle jambe.

Il est donc plus que probable – comme le mentionne la presse financière américaine – que nous devions patienter jusqu’à la résolution de la crise de la dette pour pouvoir y voir plus clair et retrouver un marché qui donne un peu plus envie que cette espèce de coma où la seule chose qui nous intéresse c’est les cours de Tesla et tout chiffre qui serait capable de nous donner un indice sur l’avenir des taux et de l’inflation. À ce propos, je suis tombé sur une liste des « prévisions des taux US » suite aux chiffres du CPI de la semaine dernière et je trouve absolument génial de voir qu’il y a des mecs qui sont assis dans leur bureau et qui – en lisant les chiffres du CPI (chiffres qui sont justes une fois sur deux et corrigés par le gouvernement 9 fois sur 10), arrivent à nous dire ce que va faire la FED d’ici DÉCEMBRE 2024 !!! On ne sait même pas ce que va faire la FED d’ici juin, on ne sait même pas si la dette US existera encore le 14 juin et quelles en seront les conséquences exactes et il y a un gars dans son bureau, quelque part à Wall Street, qui en train de lancer des fléchettes contre un mur et de jouer aux osselets avec l’autre main pour nous dire ce qu’il va se passer sur les taux durant les 18 prochains mois. Soit on est complétement con de donner du crédit à ces mecs, soit leurs employeurs sont totalement débiles de les payer pour ça. Ou les deux.

Tout ça pour vous dire que nous sommes bloqués dans un univers parallèle et que j’ai le sentiment de me retrouver sur le siège arrière de la voiture de mes parents quand on partait en vacances dans le Sud, qu’il y avait 8 heures de route et que le smartphone n’existait pas : j’avais le fort sentiment que ça allait être très long et très chiant.

Pour le reste

En Asie, ce matin la Chine est en baisse de 1%, probablement parce que les autorités ne montrent pas l’intention de fournir le moindre soutien monétaire à l’économie, malgré le fait que la croissance post-rebond-post-COVID semble aussi dynamique et passionnante que le dernier roman dilaté de Bruno Le Maire. Hong Kong ne fait rien et le Japon est au plus haut depuis plus de 18 mois, enfin une bonne nouvelle.

Le pétrole est de retour sous les 70$ parce que tout le monde se méfie d’un éventuel ralentissement économique. Ralentissement qui pourrait prendre la forme d’un baisse des chiffres de l’immobilier qui sortiront cette semaine aux USA ou d’un effondrement de la confiance du consommateur via les chiffres éponymes de vendredi ou les chiffres trimestriels des retailers. L’or es à 2018$, mais tout le monde l’a à l’œil au cas où les USA font défaut, parce qu’il paraît que c’est une valeur refuge et que, sur un coup de panique, on pourrait se sentir rassuré avec une table de salon construite uniquement en lingots d’or. Le Bitcoin est à 27’227$.

Nouvelles du jour

Du côté des nouvelles du jour, on parle donc des nouveaux chars d’assaut léger que Manu va envoyer en Ukraine. Du soutien affiché à l’Ukraine par la France qui considère que le pays est définitivement dans l’Europe et du fait que la France ne veut pas envoyer d’avions de chasse à l’Ukraine, parce que visiblement c’est un peu prématuré et aussi parce qu’ils n’ont personne pour les piloter et il paraît que ça prend un peu de temps pour former un pilote de chasse. On voit vraiment que les compétences des politiques sont en forte hausse ces dernières années. En Turquie les deux candidats sont au coude à coude. Erdogan n’a bientôt plus d’autre choix que faire discrètement exécuter son opposant, comme d’habitude et ça devrait bien se passer.

Autrement, le Barron’s se demande si ça ne serait pas un bon moment pour faire l’IPO de Space X – cela rapporterait des milliards à Musk et ça lui éviterait de continuer à vendre ses titres Telsa. Tesla qui est en pleine dépression, puisque depuis le top de la mi-février, le titre est en baisse de 23%. Côté chiffres économiques, nous aurons le PPI en Suisse, la production industrielle en Europe et plein de Présidents de la FED qui parlerons pour chauffer le terrain à Powell qui est agendé pour la fin de la semaine. On ne sait jamais s’ils savaient des trucs que l’on ne sait pas ou qu’ils disaient ce qu’ils comptent faire avec les taux pour les 48 prochains mois.

Pour le moment, les futures sont inchangés à l’image d’un marché qui se demande si cela vaut bien la peine d’ouvrir cette semaine. En ce qui me concerne, je vous retrouve demain pour parler de la prochaine réunion sur le plafond de la dette US qui ne fera pas plus avancer le schmilblick, mais qui donnera l’impression que les clowns de Washington bossent vraiment dessus ! Passez une très belle journée, un très bon début de semaine et à demain !

Thomas Veillet
Investir.ch

« If there is a possibility of several things going wrong the one that will cause the most damage will be the one to go wrong. » – Murphy’s Law