Au cas où vous ne l’auriez pas compris, le centre d’intérêt de la séance d’hier se situait principalement dans la publication des chiffres de Nvidia qui ont eu lieu APRÈS la clôture. La journée n’était donc pas censée générer un « monstre » intérêt. Sans compter qu’en plus ON SAVAIT QUE NVIDIA allait publier de SUPERBES CHIFFRES et donc dans le doute on a acheté la tech pour être prêts au feu d’artifice. Alors oui, on a bien essayé de nous distraire avec le Kremlin qui tirait sur des avions en live ou avec d’autres chiffres trimestriels tous pourris, mais ça n’a pas suffi. Nous sommes restés concentrés sur Nvidia et comme on savait qu’on aurait raison, c’était quand même plus facile.
L’Audio du 24 août 2023
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À tout seigneur tout honneur
Nous allons donc commencer par LA NOUVELLE QUE L’ON ATTENDAIT depuis une semaine : la publication des chiffres trimestriels de Nvidia. Il faut donc retenir que depuis trois-quatre ans, on nous prend la tête pour trouver des acronymes pour parler des leaders de la tech que sont Apple, Google, Microsoft, Amazon et Meta, mais aujourd’hui nous sommes passés à la vitesse supérieure et nous avons NVIDIA. Le reste n’intéresse (presque) plus personne. Lorsque l’on prend le temps de lire les opinions sur Nvidia, on a presque l’impression qu’investir ailleurs est une perte de temps. C’est all-in et puis c’est tout. La star des semiconducteurs est en train de défier les lois de l’investissement et de la gravité.
À ce stade, il y a deux solutions : soit on décortique les chiffres un par un pour montrer que c’était meilleur que les attentes dans absolument tous les secteurs et que les prévisions sont meilleures que toutes les prévisions les meilleures pour – non seulement les prochains mois – mais aussi l’année prochaine et qu’en plus, la boîte annonce un rachat d’actions pour 25 milliards de dollars. Ou alors je peux simplement vous dire que Nvidia a pulvérisé les attentes et que je ne suis pas loin de penser qu’on n’a jamais un « pulvérisage » des attentes avec une telle intensité. Même dans les paroles du management on ne trouve pas la moindre tentative de calmer le jeu et la moindre modestie. Non, c’est du délire, tout simplement. Alors après on peut dire que ça ne va pas durer, que les multiples sont intenables et qu’à un certain moment, les arbres ne peuvent pas monter au ciel, mais pour l’instant Nvidia est en train de réinventer l’analyse financière en plus du reste puisque pour une fois, les analystes avaient tout vu juste – ils n’étaient juste « pas assez optimistes pour l’avenir ».
Hier soir après la clôture et après les publications, Nvidia se traitait en hausse de 6.5% à 502$. Les traders qui ont chargé le bateau depuis trois jours sur des calls 500 échéance vendredi, ne sont pas encore partis à Vegas pour dépenser leurs gains. Va falloir encore confirmer ces deux prochains jours, mais pour être franc ; qui pense encore que Nvidia peut baisser ? Ce truc est devenu le Messie de l’investissement et je suis encore étonné qu’ils n’ont pas encore commencé à faire marcher des paralytiques, multiplier les pains et transformer le silicium en vin.
Deux salles deux ambiances
Pendant que c’était champagne, petits fours et cotillons chez Nvidia et que tout le monde s’arrosait de Moët Chandon à la clôture, il faut tout de même reconnaître qu’il y avait d’autres nouvelles qui inquiétaient un peu et qui montraient que le consommateur était en train de ralentir la machine à billet et que cette « calmitude » à venir commençait à se faire sentir sur les chiffres de certaines sociétés dans la vente de détail. Alors je ne sais pas, peut-être que le ralentissement des ventes de détail est dû au fait que les consommateurs n’achètent plus que des cartes graphiques de chez Nvidia, mais en attendant, après les bains de sang que l’on a connu chez Macy’s, Dick’s Sporting Goods, Nordstrom et Kohl’s avant-hier, le massacre continuait avec Foot Locker qui se faisait démonter hier pendant la séance.
En effet, si l’on en croit la communication de la société, ils ont plongé dans les chiffres rouges et le consommateur est devenu extrêmement regardant sur les prix. Aussi fou que cela puisse paraître, il semblerait que les gens en aient un peu marre (ou qu’ils n’aient tout simplement plus les moyens) de payer 500$ une paire de Nike qui a coûté 12 dollars à la fabrication sous le fallacieux prétexte que la paire en question est « rare » et que la couleur a été choisie pas un sombre rappeur dont vous n’avez jamais entendu parlé si vous avez plus de 22 ans. Foot Locker avait déjà fait un « profit warning » le trimestre dernier et les intervenants s’attendaient à des résultats merdiques, mais visiblement pas à ce point. Le titre a plongé de 36% et se retrouve au même niveau qu’en 2010. En février, le titre valait 47$, hier soir, il valait 16$. Ils auraient peut-être dû envisager de se recycler dans les cartes graphiques pour l’intelligence artificielle, puisque visiblement, c’est le remède à tous nos problèmes.
Au passage on notera encore les chiffres tous pourris de Peloton qui continue de pédaler dans la semoule. La société de vélo d’appartements et de sport en streaming a encore foiré son trimestre et perdait ENCORE 22% à 5$. C’est encore une valeur qui doit se dire que c’était quand mieux pendant le COVID et qui doit espérer que l’on reconfine tout le monde à partir du 15 septembre pour lutter contre ce fameux NOUVEAU VIRUS qui progresse à toute vitesse mais que l’on ne peut pas détecter (selon BMF TV) – comme quoi on est vraiment fort, parce que savoir qu’un virus progresse sans que l’on puisse le détecter, c’est que l’on est vraiment intelligent. Ou alors c’est grâce à l’IA. Bref, Peloton s’est fait démolir. Peloton qui valait 169$ en janvier 2021 se traite à 5$. La courbe du graphique ressemble furieusement à la trajectoire de l’avion de Prigozhin.
Et maintenant, on spécule sur quoi ?
Ce matin en Asie c’est la fête au village et les titres de semiconducteurs sont en hausse GRÂCE à la bénédiction de « Saint Nvidia ». Le Japon est en hausse de 0.42%, Hong Kong avance de 1.8% et la Chine progresse de 0.47%. Je ne sais pas si vous vous rendez compte, mais les chiffres d’une boîte de semiconducteurs américains ont plus d’influence sur la hausse du marché chinois qu’une baisse des taux annoncée par la banque centrale chinoise. Le pétrole continue de s’effriter et se traite à 78.60$, l’or est à 1949$ et le Bitcoin s’échange à 26’500$.
Pour le moment, les intervenants sont à fond sur la digestion d’hier et sur l’anticipation de demain. Quand tu lis le moindre article sur le développement personnel, on te dit que la première chose à faire, c’est de « vivre l’instant présent » et que si tu passes ton temps à penser à hier et à demain, tu augmentes ton stress et tu perds du temps dans ta vie. Du coup, je ne sais pas ce que je dois penser des marchés boursiers, mais là tout de suite, une fois qu’on y verra plus clair après Jackson Hole, je crois qu’il va falloir envisager une retraite pour méditer et se recentrer sur nous-mêmes. Peut-être même faire du yoga dans une pièce surchauffée et devenir végan.
Jackson et Hole
Quoi qu’il en soit, maintenant que nous avons officiellement mis la période des publications trimestrielles derrière nous, on va pouvoir se concentrer sur « ce que va dire Powell » demain soir. Alors je vous rassure tout de suite, personne n’en sait rien. Tout ce que l’on peut faire, c’est jeter des suggestions en l’air et essayer de rattraper la bonne, histoire de pouvoir dire : « je vous l’avais dit ». Mais pour le reste, ça se rapproche plus du loto ou de l’Euromillions que de la vraie réflexion inspirée des théories de « sciences économiques ». Ce que l’on sait, c’est que Powell veut une inflation sous les 2% et que tant que l’emploi est fort et que les salaires prennent l’ascenseur à cette vitesse, il ne va pas lâcher le morceau sur les taux, mais on espère juste qu’il ne va pas remettre en cause la pause dans laquelle nous sommes.
Si vous avez peur qu’il nous refasse un communiqué du type de celui de l’an dernier qui avait déclenché un cycle de vente pendant trois mois, il semblerait que « statistiquement » vous n’avez rien à craindre puisqu’il est très rare que les discours de Jackson Hole fassent baisser les marchés et comme l’an dernier nous avons suffisamment cotisé, il est peu probable que ça se reproduise. C’est un peu comme quand il y a une catastrophe aérienne, il faut vite se précipiter pour reprendre l’avion parce que la probabilité que deux avions se crashent en quelques jours est relativement faible. La théorie ne s’applique pas aux membres du groupe Wagner, bien sûr.
Tout ça pour vous dire qu’aujourd’hui on va parler des chiffres de Nvidia d’hier et du discours de Powell de demain. Ça tombe bien, parce que mis à part le crash de Prigozhin, les chiffres de Nividia et le symposium de Jackson Hole, on ne parle pas de grand-chose d’autre. Il me reste donc à vous souhaiter une excellente journée et un très bon week-end, parce que moi, demain, je ne serai pas là.
À lundi, donc…
Thomas Veillet
Investir.ch
« I do believe in self-help. »
Clint Eastwood