Une nouvelle semaine qui commence après trois semaines de folie sur les marchés ! 9.6% de hausse sur le S&P500, le Nasdaq qui laisse des gaps partout, la technologie qui devient un placement de père de famille et le monde merveilleux de la finance est en train d’expliquer aux banquiers centraux qu’il est temps de commencer à baisser les taux. Et le plus tôt sera le mieux. Pour le moment, les banquiers centraux ne sont pas encore convaincus – mais personne ne les écoute parce que c’est pas le moment – parce qu’on évite quand même d’écouter des trucs trop négatifs. Alors on continue de se rouler dans le caviar en comptant les jours jusqu’à la première baisse (des taux).

L’Audio du 20 novembre 2023

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Début de semaine avec réflexion sur le passé

Avec deux jours de week-end, on a eu un peu le temps de penser à ce qui s’est passé et a l’impossibilité de faire baisser le marché (même s’il n’y a pas que de bonnes nouvelles). Cet était de fait en a laissé plus d’un bien songeur devant ses écrans. Gary Shilling fait partie de ceux-là. Gary est un vétéran des marchés qui est économiste, qui est connu pour avoir correctement prévu le krach des subprimes de 2008. Ce week-end il a réussi à prédire que Réserve fédérale battrait l’inflation et commencerait à réduire les taux d’intérêt l’année prochaine. Jusque-là, il n’y a rien de nouveau, mais en plus de son commentaire sur les conséquences des agissements de la FED, il estime – contrairement à la plupart de ses collègues – que le fait de couper les taux ne suffira pas à empêcher la récession.

Et c’est là que c’est intéressant. Comprenez bien que je ne pense pas que Shilling soit meilleur que les autres sous prétexte qu’il avait vu venir la crise des subprimes, Roubini aussi et ça ne l’a pas empêché d’être complètement faux sur toutes ses prévisions depuis. Mais le point que soulève Gary Shilling est intéressant dans le sens où – à l’heure actuelle – le marché a pricé :

– La fin du cycle de hausse des taux
– La baisse des taux aux USA AVANT la fin du premier semestre 2024
– Les chiffres trimestriels de NVIDIA qui sortiront mardi soir, 250% au-dessus des attentes (au moins).

Et si on avait oublié un truc

Mais pour le moment, personne n’a prévu de récession en 2024 – et si PAR LE PLUS GRAND DES HASARDS, on se serait gouré, que la FED et Goldman Sachs nous aurait menti – le facteur récession risque de faire bobo aux portefeuilles surchargés de technologie qui sont les nôtres en ce moment. C’est en tous les cas ce que pense Monsieur Shilling qui estime que lorsque l’on prendra conscience que nous roulons à 240 km/h face au mur ET que l’on réalisera que même avec un harnais 5 points, un casque et une trentaine d’airbags dans la voiture, ça ne suffira pas à nous éviter une mort brutale dans d’atroces souffrances qui nous donnera un avant-goût de la vie des sardines APRÈS avoir été mises en boîtes, le S&P500 pourrait bien perdre 30% et aller trainer son spleen en direction des 2’900.

Oui, je sais. Ça n’est pas le genre de truc que vous avez envie de lire pour commencer la semaine, alors que jusque-là, les marchés ne faisaient que monter et se nourrissaient exclusivement de bonnes nouvelles, tout en bottant en touche les mauvaises… Mais il faut tout de même prendre conscience que pour le moment nous sommes surmotivés en nous disant qu’il se pourrait que la FED ait trouvé la formule magique pour dompter l’économie tel un pur-sang capturé dans les grandes plaines du Dakota pendant la chasse aux bisons. En revanche, si soudainement on se rendait compte que les prévisions des membres de la FED et de Madame Yellen s’avéraient être de même trempe d’un gadget chinois : de la camelote ! Le réveil et la prise de conscience risque d’être un poil compliqué ces prochains mois et à ce moment, on se souviendra des paroles de Monsieur Gary Shilling qui disait encore hier :

« Il est probable qu’une récession se profile à l’horizon, si elle n’est pas déjà en cours – personne ne sonne l’alarme. Si l’on considère les principaux indicateurs qui annoncent de manière fiable les récessions, il est assez difficile d’y échapper si l’on considère cette combinaison de facteurs »

INFLATION IS DEAD (mais c’est quand même vachement cher)

Pourtant les choses ne sont pas aussi simples qu’il n’y a paraît. Oui, le CPI est en baisse. Et cela, plus que prévu. Mais il ne faut pas non plus négliger le fait que le pétrole s’est également violemment replié durant le mois d’octobre. D’ailleurs il faudra noter que l’impact de la BAISSE DU PÉTROLE sur le CPI est toujours plus impressionnant quand il baisse que quand il monte. J’ignore pourquoi, mais disons que pour l’instant, ça arrange bien tout le monde. Surtout les marchés boursiers et surtout le camp des bulls qui sont littéralement en train de piétiner les bears.

MAIS, parce qu’il y a toujours un MAIS. Il ne faudra pas non plus négliger le fait que nous sommes en train de nous rendre gentiment compte que l’inflation ralenti – oui – mais qu’elle est toujours relativement élevée et que lors de ces deux ans de hausse de l’inflation – le prix de la consommation a littéralement explosé et même si la hausse des prix ralenti considérablement depuis quelques mois, les prix EUX-MÊMES sont bien plus haut qu’il y a deux ans. Ne prenons rien que le jus d’orange… Personnellement, je m’en fiche – je n’en bois pas, mais en revanche, lorsque l’on regarde – depuis mars 2020, le prix de la boisson vitaminée a pris 350%. Et je ne vous parle même pas des œufs, de la viande, du café ou du cacao.

Cette sensation s’appelle…

Ces hausses de prix massives sont réelles en comparaison du CPI qui n’est qu’un calcul alambiqué inventé par le gouvernement et qui est corrigé, maquillé et décoré pour que cela fasse plaisir aux investisseurs. Mais la réalité reste que, MÊME si l’inflation ne progresse plus aussi fortement qu’avant – aujourd’hui vous payez tout de même votre jus d’orange 350% plus cher qu’il y a trois ans ! Et on nous apprend même que vu la hausse des prix du sucre (200% depuis mars 2020), les fabricants de soda sucrés – qui ont un nom qui se termine par COLA à la fin – pourraient augmenter les prix d’un minimum de 7% afin que leurs marges ne soient pas impactées. Il est vrai que c’est mieux que leurs marges ne soient pas impactées, tant que c’est le consommateur qui en prend plein la figure.

Enfin, quoi qu’il en soit – ce début de semaine est toujours sur la crête de la vague et les surfeurs du Bull Market sont convaincus qu’elle ne redescendra jamais sur le sable. En ce début de semaine nous aurons de quoi nous occuper, puisqu’il y aura les Minutes du dernier FOMC Meeting – Minutes qui sortiront un peu plus tôt que prévu, parce que jeudi ça sera Thanksgiving et qu’il faudra buter la dinde – semaine se terminera donc mercredi après-midi aux USA. En Europe on fera comme si ça servait à quelque chose de venir au bureau, mais on va surtout brasser de l’air à la placer de manger la dinde. Toujours est-il que les Minutes nous confirmerons sûrement que les banquiers centraux ne sont pas encore 100% convaincus que la hausse des taux est terminée et que l’inflation est définitivement vaincue – comme ils se tuent à nous le dire depuis des semaines – mais nous on s’en foutra parce que l’on sait que l’inflation est morte – c’est le CPI qui l’a dit – et que les taux baisseront dans 6 mois, MAXIMUM.

Le roi NVIDIA

Autre sujet du début de la semaine, la publication des chiffres de Nvidia qui sont prévus également mardi soir après la clôture. Personne ne doute du fait qu’ils vont pulvériser les attentes et que la croissance des bénéfices se calcule en milliards de pourcent et que les prévisions sont impossibles à chiffrer tellement elles sont fantastiques. Nvidia devrait donc briller de 1’000 feux – un peu comme la fusée SpaceX l’autre jour. Espérons simplement que ça ne se termine pas comme la fusée SpaceX. Parce que sinon, ça voudrait dire que l’on a un peu trop anticipé de bonnes choses depuis le 28 octobre.

Oui, parce que si le S&P500 a pris 9.6% en 3 semaines, Nvidia frise les 30% de hausse. On peut donc largement dire (je crois), que l’on a anticipé d’excellents résultats. Autant dire que les attentes de mardi soir seront élevées et que la déception sera interdite. Même la moindre déception sera interdite. Imaginez que le management de Nvidia vienne nous dire que les ventes ont été impactées par les interdictions des exportations de « chips » pour l’IA à destination de la Chine. Ou alors qu’ils vont faire une augmentation de capital pour financer la nouvelle génération des T-1000, ou alors qu’ils changent leur nom pour « Skynet ». Je plaisante, je plaisante, mais ce que je veux dire, c’est qu’au vu des performances récentes ; aucune erreur ne sera tolérée. Il ne nous reste plus qu’à souhaiter que les Minutes soient plutôt mystérieuses et optimistes et que Nvidia ne nous fasse pas faux bon, sinon la dinde risque d’avoir le goût d’un cordon bleu pas frais de chez Findus.

Nouvelles du front

Pour ce qui est du reste des nouvelles, on retiendra la fronde « Chat GPT », puisque le patron et fondateur, Sam Altman, a été viré avec effet immédiat de son job par le board lui-même qui s’est fendu du communiqué suivant :

« Le départ de Monsieur Altman fait suite à une procédure d’examen délibératif par le conseil, qui a conclu qu’il n’avait pas toujours été franc dans ses communications avec le conseil, faisant entrave à sa capacité à remplir ses responsabilités »

Aux dernières nouvelles, les gros actionnaires de Chat GPT, des fonds d’investissements comme Sequoia ne sont pas du tout contents du départ d’Altman, puisqu’en plus cela a entrainé toute une série de démission du top management. La nouvelle affaire DALLAS de Wall Street est lancée. Si j’osais, je dirais que le licenciement de Sam Altman est le fait d’une intelligence supérieure qui est en train de prendre le pouvoir sur l’humain avant de déclencher une guerre nucléaire qui aura pour but de nous détruire. Ensuite, il y a un robot qui va venir du futur avec un corps de bodybuilder… Oui, je suis resté bloqué dans les années 80.

Il faudra aussi parler d’Elon Musk qui a eu le tort de ne pas dire ce qu’il fallait, ni faire ce qu’il fallait, ni choisir le bon camp dans la crise israélo-palestinienne et qui est en train de se faire laminer par la presse américaine. On entend même parler du board de Tesla qui remue dans les brancards. Des voix s’élèvent pour souhaiter son départ, on lui reproche à peu près tout ce qu’il a fait depuis que quelqu’un a déclaré qu’il était antisémite. Personnellement, je ne suis pas là pour juger – surtout que c’est un sujet qui peut vous coûter très cher – mais il faudra surveiller Tesla et tout l’empire de Musk si cela venait à s’amplifier plus que de raison. On notera aussi le rebond du pétrole qui vaut tout de même 76$ depuis que l’on s’autorise à penser dans les milieux autorisés que les Saoudiens pourraient réduire encore un peu plus la taille de l’ouverture du robinet. Et on sait que les Russes vont suivre comme un seul homme. On signalera encore au passage que le Barron’s attend à une récession l’an prochain et qu’ils utilisent le taux des impayés de cartes de crédit pour se justifier… Les chiffres sont effarants, mais là on est un peu plus occupé par la joie de voir la fin du cycle de hausse des taux, il faut comprendre.

Du côté de l’Asie

Ce matin, l’Asie est légèrement en hausse, la banque centrale chinoise a laissé les taux inchangés et bien que la décision semble avoir fourni peu d’indications aux marchés, la PBOC a également injecté environ 80 milliards de yuans de liquidités sur les marchés. Cependant, les actions chinoises ont été soutenues par un rebond des valeurs immobilières, après que les régulateurs chinois aient promis d’apporter un soutien politique plus important au secteur de l’immobilier en difficulté. Actuellement Hong Kong grimpe de 1.5% et la Chine de 0.5%, pendant quelques instant le Nikkei a touché un nouveau plus haut depuis 30 ans. Mais pour le moment, comme les futures américains sont légèrement en baisse en ce début de semaine de Thanksgiving, on ne se mouille pas non plus. Et puis y a Nvidia demain.

Le pétrole est à 76.50$, l’or est à 1984$ et le Bitcoin est à 37’200$. La semaine commence donc en douceur et elle va se terminer par une orgie de dinde et un gros ralentissement en ce qui concerne les volumes du marché, puisqu’il va falloir trouver des pulls moches à porter dès le milieu de la semaine.

En ce qui me concerne, je vous souhaite une excellente journée et un très bon début de semaine, et je vous retrouve demain, ici-même pour la dernière chronique avant les chiffres stratosphérique de Nvidia. Ou pas.

À demain et que votre petit-déjeuner sans gluten à base de pain bio vous remplisse jusqu’à midi. Au moins.

Thomas Veillet
Investir.ch

“The two most important days in your life are the day you are born and the day you find out why.” —Mark Twain