Hier on était surtout venu pour écouter la FED et se rassurer sur la suite des évènements. Je crois qu’après le speech de Monsieur Powell, il n’y avait pas forcément de quoi être rassuré. Surtout si nous avions acheté le marché en novembre en prenant le pari de voir baisser les taux en mars 2024. Pour l’instant ça n’en prend pas le chemin. Mais on ne panique pas, parce que si l’on accepte de lire les petits caractères tout en bas du contrat, on peut encore se raccrocher à l’espoir de voir baisser les taux en mars. Comme disait l’autre : « toi et moi, on ne peut pas vraiment tout miser sur la baisse des taux, alors vas-y : fonce ! On ne sait jamais, sur un malentendu, ça peut marcher. »
L’Audio du 1er février 2024
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On récapitule
Donc hier il a fallu digérer les chiffres du trimestre de Microsoft, Google et tutti quanti. Grosso modo, on s’en n’est pas trop mal sorti. Bon, Google s’est pris plus de 7% dans les dents, mais Microsoft et AMD ont limité la casse en s’accrochant comme des beaux diables au principe salvateur de l’intelligence artificielle. Et puis il a fallu s’occuper des chiffres du jour. On a eu droit à Boeing qui a publié une perte massive sur le trimestre. Mais comme ils n’ont pas mentionné leur intention de se reconvertir dans la fabrication des bus scolaires, le marché a considéré que c’était un « bonne nouvelle », même s’ils n’ont publié aucune guidance et qu’ils volent en IFR et que le pilote est aveugle, on a eu l’impression que le marché s’est dit « bah, après 23% de baisse sur le trimestre et la plupart des 737 qui volent à vide parce que plus personne n’ose monter dedans, ça peut difficilement être pire ». Le titre a repris plus de 5%.
Et puis, dans les « bonnes surprises » qui donnaient envie d’être resté au lit à regarder Gulli plutôt que de se lever pour regarder CNBC, on notera que la New York Community Bancorp a publié ses chiffres du trimestre. Alors la New York Community Bancorp ne vous dira probablement rien étant donné que la dernière fois qu’on en a parlé, c’était quand ils ont racheté les restes de Silicon Valley Bank après le « bank run » du printemps dernier. Alors rassurez-vous, on ne va pas reparler du Crédit Suisse et la bonne nouvelle c’est que l’on NE PEUT plus en parler, puisqu’il n’existe plus. Mais toujours est-il qu’hier, la New York Community Bancorp nous en a fait une bonne.
La crise des subprimes 2, le retour de la vengeance du serpent à plumes
Hier, New York Community Bancorp a publié des chiffres catastrophiques. Ils ont fait un « writedown » sur leurs portefeuilles d’immobilier commercial qui commence à leur coûter la peau des fesses et le reste. Alors on ne va pas revenir en détails sur le sujet, mais disons que bien des immeubles qui ont été achetés très cher il y 5-6 ans sont en train de se revendre très bon marché parce que les taux d’occupation sont en chute libre. Si vous voulez en savoir plus, je vous recommande de taper « AON building Los Angeles » et vous verrez comment un truc qui s’est vendu près de 100 millions il n’y a pas si longtemps, vient de se revendre à plus ou moins la moitié du prix.
En gros, le problème de l’immobilier commercial commence à se faire sentir et New York Community Bancorp a provisionné un demi-milliard de dollar pour les taules à venir. Dans la foulée, ils ont coupé leur dividende de 70% et le titre s’est fait défenestrer et terminait en baisse de 38%. Sans oublier que le secteur des banques régionales a pris le même train durant la séance d’hier. D’ailleurs ça ne sont pas que les banques régionales US qui commencent à sentir le vent du boulet, puisque dans foulée, il y a aussi une banque japonaise – l’Aozora Bank – qui vient de se prendre le même type de claque sur l’immobilier commercial américain. Je n’ai pas envie de peindre le diable sur la muraille avec un oiseau de mauvais augure, mais disons que ça ressemble quand même fortement au début de la crise des subprimes. Il ne manquerait plus que l’on apprenne que le Crédit Suisse avait vendu des produits leveragés adossés à de la dette sur l’immobilier commercial. Ah mais non, c’est vrai, ils ne sont plus là !!! Ouf, la BNS est sauvée, elle n’aura pas à intervenir avec le Conseil Fédéral et les forces d’intervention rapide de la FINMA. Bref, c’est la merde sur les banques régionales et c’est la merde sur le secteur de l’immobilier commercial. Mais ça, on savait que ça allait venir.
Et puis il y a eu Powell
Mais bon, mis à part ces menus détails, il ne fallait pas oublier qu’hier soir c’était la soirée « Baisse des taux en mars » qui battait son plein à la FED. Powell est arrivé en fin de journée pour nous expliquer leur vision de la suite. Je vous préviens, si vous avez lu cette chronique jusque-là pour m’entendre dire que la FED va baisser les taux en mars, vous allez le regretter. Donc. Powell a laissé entendre que l’économie allait de mieux en mieux et avait fait preuve d’une belle résilience ces derniers temps. En revanche, il a aussi laissé entendre que la baisse des taux n’était pas encore prévue à l’agenda, bien qu’il n’ait pas NON PLUS COMPLÈTEMENT EXCLU la possibilité.
En résumé ; la FED a conservé les taux là où ils étaient pour la quatrième fois consécutive et a déclaré vouloir obtenir PLUS DE CERTITUDES sur le fait que l’inflation va baisser à 2% avant de couper dans le gras. Pour faire simple ; la bonne nouvelle c’est qu’il semble à priori exclu de voir monter les taux encore plus haut – mais que la mauvaise nouvelle soit que pour que les taux baisse en mars : il faudra un miracle. Ou alors il faudra magouiller les chiffres du CPI – ce qui n’est pas complètement exclu non plus. En conclusion, si nous restons objectifs, il est peu probable que l’on puisse ramener le CPI en direction des 2% de « manière évidente » dans les 40 jours qu’il nous reste avant le prochain FOMC Meeting, mais il y a quand même pas loin de 45% des experts qui croient que c’est encore possible. En même temps, si ces gars venaient à renoncer à leurs convictions, ça voudrait aussi dire que la hausse de ces trois derniers mois était à peu près aussi crédible que quand Bruno Le Maire parle d’économie.
Bref, hier les marchés ont passé un sale quart d’heure aux USA et l’Europe reste plutôt accrochée au plus haut de tous les temps après les chiffres explosifs de la croissance en Allemagne et en France – qui prouvent encore une fois que cette daube d’Union Européenne ne sert à rien.
L’Asie
Ce matin l’Asie va dans tous les sens après avoir été mis devant le fait accompli que la FED ne baissera pas les taux tout de suite et que des taux élevés pourraient rester parmi nous encore un moment. Le Japon est en baisse de 1%, Hong Kong remonte de 1.3% et la Chine ne fait rien.
Le pétrole est à 76.14$ alors que Biden semble avoir complètement oublié le fait qu’il est censé mettre en place sa VENGEANCE contre les rebelles Houthis. Il est vrai qu’à voir les vidéos d’hier il était plus occupé à faire le malin avec Captain America devant les caméras, qu’à mettre au point une réplique militaire contre l’Iran. L’or est à 2062$ et le Bitcoin est à 42’000$, ça s’en va et ça revient.
Les nouvelles du jour
Du côté des nouvelles du jour, on parle toujours du « bonus » de 56 milliards de Musk qui doit occuper la moitié des avocats du pays. On décortique en détail le discours de Powell et la conclusion générale, c’est qu’une baisse des taux en mars ; « ça va pas être simple » – sauf si Harry Potter existe vraiment. Et puis pour le reste, on partage nos activités en tergiversant sur les chiffres de ce soir. En effet, on attend de voir si Apple est capable de mettre fin à sa série de trimestres qui ont vu décliner leurs revenus. On se demande si Amazon a continué sa transformation pour devenir plus efficient dans sa gestion et améliorer sa croissance et puis, finalement, on est en train de se faire un film en se disant que peut-être le business de la publicité on-line que Google a perdu, c’est Meta qui l’a récupéré. On peut toujours rêver.
Pendant ce temps, Zuckerberg était devant le Sénat (ou le Congrès, j’en sais et je m’en fous un peu), il était devant les « sages » du gouvernement pour dire qu’il était « VRAIMENT » désolé ne pas avoir mieux protéger les enfants sur les réseaux sociaux. T’as raison, une fois que tu t’es excusé, c’est tout bon, c’est du passé. Bon, les réseaux sociaux c’est toujours la merde et on a peut-être plus de raisons de s’inquiéter des réseaux sociaux que d’une 234ème version de la nouvelle mutation du COVID. Tout ça pour dire que ce soir on aura les chiffres de c’t’équipe et que ça devrait nous occuper jusqu’au Non-Farm Payrolls de demain. On notera encore les bons chiffres de Qualcomm qui se sont enthousiasmés sur la thématique de l’Intelligence Artificielle, mais ça ne fait plus vraiment recette. En tous les cas, pas durant les publications des chiffres du trimestre. Le titre ne faisait rien. On aurait dit Microsoft.
Les chiffres du jour
En ce qui concerne la macro, on a déjà eu droit aux chiffres non-officiels du PMI chinois qui étaient meilleurs que les chiffres officiels. Alors que le gouvernement annonçait une contraction de l’économie via SES chiffres, le Caixin PMI montrait une expansion. Reste donc plus qu’à choisir notre camp. Pour le reste, il y aura les PMI’s Manufacturiers en France, en Allemagne et en Europe. Il y aura aussi le chômage en Europe, le CPI en Europe et Madame Lagarde qui parlera. Aux USA on aura les Jobless Claims comme tous les jeudis et ça nous chauffera pour les NFP’s de demain.
Pour le moment, les futures sont en hausse de 0.2% parce que nous sommes rassurés sur le fait que la FED va baisser les taux – un jour – mais on ne sait pas exactement quand – mais au moins ils vont les baisser et puis on se dit que ça devrait bien se passer du côté des « autres Magnificent Seven ». En théorie. Parce qu’en théorie, tout se passe toujours très bien. En théorie même les Boeing 737 volent sans problème et en théorie Musk toucherait l’argent qu’on lui doit et il ne devrait plus se battre pour être l’homme le plus riche du monde.
Passez une excellente journée et on se voit demain pour conclure cette semaine passionnante en espérant que les chiffres des NFP’s vont nous apporter une baisse des taux en mars, puis 5 autres baisses consécutives dans la foulée.
Elle est pas belle la vie ? Allez, à demain !
Thomas Veillet
Investir.ch
“Do, or do not. There is no try.” —Yoda