À chaque fois que Powell fait ses témoignages devant les politiciens américains, il y a deux témoignages à 24 heures d’intervalle devant deux commissions. Autant vous dire qu’à chaque fois, les deux témoignages sont similaires. À quelques mots près. Et pourtant, on est capable de réagir de deux manières différentes sur les marchés. En ce moment, nous sommes tellement en mode « tout va tellement bien et en plus il y a Nvidia qui monte », que la moindre phrase peut être comprise comme LA VISION de l’année et déclencher un nouveau rallye. C’est ce qui s’est passé hier. Le S&P est au plus haut de tous les temps, tout comme le CAC, le DAX, le SOX et Nvidia…
L’Audio du 8 mars 2024
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Powell Bis
Ce matin on va donc essayer de faire très simple : Powell en a remis une couche et si l’on en croit les médias spécialisés, la conclusion de son témoignage, dans laquelle le patron de la FED déclare que les taux PEUVENT et VONT baisser en 2024, aura mis tout le monde d’accord. Maintenant on ne se pose plus de question et on sait que la FED a décidé de presser sur le bouton de la baisse, il n’a pas précisé quand et combien de fois ils baisseront, mais je crois qu’à ce stade ; on s’en fout complètement.
Le plus important, pour le marché, c’est qu’il a ENFIN obtenu la confirmation que son plan prévisionnel qui a été mis en place le 1er novembre, fonctionne comme prévu. Alors oui, la FED ne va pas baisser les taux en mars, mais comme elle va les baisser en juin – (juin qui semble la date la plus probable dorénavant), ça devrait bien se passer. On a eu raison sur toute la ligne ! Les 25% de hausse du récent rallye sont donc parfaitement justifié et plus rien ne peut arrêter la hausse, ni les taux, ni les valorisations, ni l’attraction terrestre.
Toujours plus haut
On ne va donc pas perdre de temps, c’est vendredi et tout le monde a envie de partir en week-end. Surtout moi. Il faudra donc retenir que la plus grosse info de la nuit c’est Powell qui a murmuré à l’oreille des marchés pour le rassurer et lui dire ce qu’il voulait entendre. Dans la foulée, on a repris les même et on a recommencé. Nvidia aura récupéré tous les lauriers de la séance – un peu comme si à chaque fois que les taux baisseront plus tard dans l’année, le roi des semiconducteurs va voir ses revenus multipliés par 10. Et d’ailleurs, il va falloir que ces multiplications se produisent rapidement, parce qu’à voir à la vitesse à laquelle ce truc monte, les valorisations sont en train de devenir complètement débiles – même si, oui, je sais, il ne faut pas dire du mal de Nvidia parce qu’en 2024, c’est péché.
Enfin, toujours est-il que le titre a clôturé à 926$ et qu’il prenait encore 2% de plus after close. À l’heure actuelle, Nvidia s’échange à 946$, est en hausse de 91% depuis le début de l’année et devrait doubler Apple – en termes de capitalisation boursière – dès que le titre franchira les 1’040$ (en partant du principe qu’Apple ne montera plus jamais et ne baissera plus non plus). Et pendant que Nvidia pulvérise les records de vitesse et d’altitude, le SOX est en montée verticale et le volume sur les options du le secteur des semiconducteurs sont en train d’exploser dans tous les sens. Même si Broadcom et Marvell ont publié des chiffres qui étaient en demi-teinte hier soir after close – les quelques pourcent de baisse ne vont pas suffire à effacer la performance stellaire accumulée par le secteur. Broadcom est en hausse de 71% depuis le 1er novembre et Marvell, de 85%.
Ailleurs aussi
Du côté de la BCE qui se réunissait hier, c’est également la fête au village. La cheffe du village – Christine Lagarde a réaffirmé son intention de maintenir les taux là où ils sont et indiqué qu’elle aimerait voir l’inflation baisser un peu avant d’aller plus loin. Un peu le même type de discours que celui de Powell. Sans surprise. Ce que le marché a aimé, c’est surtout qu’elle a laissé entendre que l’inflation était un peu moins agressive, tout en baissant ses prévisions d’inflation pour 2025. L’évolution des prix est ramenée de 2,7% à 2,3% sur un an pour 2024 et de 2,7% à 2,6% hors alimentation et énergie. Et selon ce qu’ils ont pu lire dans la panse de brebis farcie, l’inflation reviendrait à 2% en 2025 et à 1,9% un an plus tard (2,1% et 2% hors éléments volatils).
Il faut tout de même reconnaître qu’ils sont super-forts ; ils ne savent pas ce qui va se passer dans l’économie la semaine prochaine et ils agissent systématiquement avec un temps de retard, mais ils peuvent déjà nous dire où et comment sera l’inflation dans 18 mois. Tout ça pour dire que le CAC termine au plus haut de tous les temps, que les 8’000 ont cédé et que Novo Nordisk a littéralement explosé de 8%, parce que son nouveau médicament contre l’obésité et ENCORE meilleur que le précédent. On n’est plus très loin de la pilule miracle qui vous fait perdre 30 kilos dans la nuit. On ne va donc pas dire que le marché est en pleine euphorie, parce que dire ça aussi c’est pêché, mais disons que je ne sais ce qu’il prend comme produit dopant – mais que les gars qui font le Tour de France cet été, sont super-intéressés.
L’autre bout du monde
Ce matin l’Asie suit le mouvement. Le PIB révisé des Japonais laisse espérer qu’ils vont éviter la récession, le Nikkei est légèrement en hausse. Hong Kong poursuit son rebond de la veille avec une nouvelle hausse de 1.4% et la Chine ne fait rien, comme si les investisseurs avaient peur de faire quoi que ce soit qui soit rapporté au gouvernement. Le pétrole est à 79.58$, l’or est à 2’164$ et le Bitcoin se traite à 66’000$ alors qu’il semblerait que de plus en plus d’investisseurs remplacent l’or par du Bitcoin dans leurs portefeuilles.
Cette nuit, il y a eu le discours de l’état de l’Union par Joe Biden. En dehors du contenu, dont tout le monde se fout, parce que ce ne sont que des déclarations politiques et des propositions qui potentiellement, ne verront jamais le jour, les observateurs se sont surtout concentrés sur l’état de santé du Président, afin de voir s’il semblait capable de tenir le choc d’une campagne électorale longue et compliquée. Le camp des Démocrates est désormais rassuré, personne ne sait trop ce qu’ils lui ont fait comme injection, mais il avait l’air au top de sa forme et rien à voir avec le vieux monsieur qui n’arrivait plus à marcher que l’on a vu récemment. Peut-être qu’ils ont plusieurs Joe Biden à disposition, mais quoi qu’il en soit, celui qui était là hier, c’est le moins mauvais de tous. Il a mis en avant son bilan économique historique, son intention de taxer les rachats d’actions et de pulvériser Donald Trump.
Et après…
Pour conclure cette semaine, nous allons donc nous concentrer sur les chiffres de l’emploi. Hier les Jobless Claims ont été publié en ligne avec les attentes. Et ce matin le marché « attend un marché du travail ralenti mais toujours sain ». Je ne sais pas trop ce que ça veut dire, mais on dirait plus un bilan médical qu’autre chose. Toujours est-il que si les chiffres sont à nouveau trop forts, comme les derniers mois, ça pourrait tout foutre par terre par rapport aux espoirs de baisses des taux. Mais ça ne fera pas baisser les marchés. Rien ne fera baisser les marchés. Si les chiffres sont forts, ça voudra dire que l’économie cartonne et donc, ça va monter. Et si les chiffres sont faibles, ça va monter parce que ça ouvrira la porte à la première baisse des taux. On peut donc retourner se coucher tranquillement, ce soir on sera plus haut et Nvidia pourra aller chercher les 1’000$ et rattraper Apple sur une jambe.
Les attentes pour les NFP’s sont donc de 198’000 créations d’emplois et un taux de chômage qui reste à 3.7%. Et mis à part l’emploi US, il y aura la production industrielle en Allemagne et le PPI. Pour le moment, les futures sont plus ou moins inchangés et ce soir c’est le week-end.
Passez une excellente journée, un très bon week-end et à lundi ! Que la force soit avec vous.
Thomas Veillet
Investir.ch
“I’ve seen a lot more go to zero than infinity.” James Chanos