Le Président Trump est LA PIÈCE maîtresse sur l’échiquier mondial, tout comme il est LA PIÈCE maîtresse des États-Unis. Hier matin dans cette même colonne, je revenais sur le fait qu’en moins de 4 jours, il avait montré la puissance de feu américaine, détruit les sites d’enrichissement nucléaires iraniens, pris le contrôle de la guerre et demandé à Israël et à l’Iran de se calmer dans les échanges de missiles. Le tout en haussant la voix et en faisant les « gros yeux ». Et visiblement ça a plutôt bien marché, puisque nous avons un « cessez-le-feu » et dans la foulée, le marché a écouté Trump et parti en direction des records, ce qui est d’ailleurs chose faite sur le Nasdaq.

L’Audio du 25 juin 2025

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Des records et des verres complètement pleins…

Lorsque l’on se plonge dans la presse de ces 24 dernières heures, la presse financière ne tarit pas d’éloges sur la fin des hostilités au Moyen Orient et n’a de cesse d’exprimer le « soulagement » des marchés qui ont – je cite : « décidé de reprendre le chemin de la hausse dans le sillage des signes d’apaisement ». N’est-ce pas formidable ? Non, je dis formidable parce qu’on se croirait dans un film made in Hollywood où le héros vient de désamorcer la bombe 1 seconde avant qu’elle n’explose et le tout avec un cure-dent et un chewing-gum usagé. Mais si l’on réfléchit quelques secondes ; est-ce que les marchés ont vraiment cessé à un moment de « prendre le chemin de la hausse ? ».

Je me souviens qu’au lendemain du 11 juin 2025, les marchés s’étaient réveillés avec la crainte d’une « nouvelle guerre » sur les bras. Nous avions tous ressortis nos statistiques pour savoir s’il fallait acheter avant, pendant ou après la guerre et nous étions tous devenus ou re-devenus experts en armement avec ce petit truc en plus, puisque depuis quelques mois, l’armement est devenu un investissement « responsable ». Le 11 juin au soir, nous avions terminé la séance américaine à 6’022 points sur le S&P500, le 23 juin à l’ouverture nous avons fait un « plus bas » à 5’913. Je vous laisse faire le calcul, mais ça représente 109 points ou 1.97% de baisse. Et ce matin, le Nasdaq 100 est au plus haut de tous les temps et et le S&P500 est à 6’090. En résumé, nous avons baissé de 1.97% au PIRE DE LA GUERRE et là tout de suite, nous sommes déjà 68 points plus haut que le jour des premières hostilités.

Soulagement, soulagement….

Alors je ne sais pas ce que vous en pensez, mais quand je regarde strictement les chiffres, on n’a jamais paniqué, la VIX a fait un point extrême à la hausse à 22.51% – pas l’impression que c’est un signe de panique – et ce matin nous sommes de retour à 17.5%. Je pense que le marché n’a jamais paniqué. Il n’a jamais « cru » au blocus du détroit d’Ormuz et la confirmation de la fin de guerre orchestrée par Trump qui tapera sur les doigts du premier qui osera sortir des clous, semble lui donner raison. Du coup, je ne sais pas si c’est un signe de bonne santé, d’intelligence et de fine stratégie de la part du monde merveilleux de la finance. Je ne sais pas si tout cela fait du sens, mais une chose est sûre, le marché IL VEUT MONTER et ça n’est pas une petite guerre entre deux pays qui se détestent depuis des dizaines d’années et qui vont continuer à se détester encore pendant des dizaines d’années – à moins que l’un de deux trouve le moyen de raser l’autre – qui vont faire trembler le marché qui – VISIBLEMENT – n’a pas suffisamment de mots pour nous dire qu’il n’en a rien à foutre de ce qui se passe au Moyen Orient, tant que Powell baisse les taux un jour.

Si vous voulez des preuves de ce que j’avance, il vous suffira de cliquer sur à peu près tous les résumés boursiers de ce matin et vous verrez que les mots soulagement, détente et « retour à la confiance » se retrouvent toutes les trois lignes, alors que jamais il n’y a eu la moindre panique. En revanche dès que Trump a confirmé le cessez-le-feu, tout le monde s’est immédiatement jeté sur l’ensemble de l’univers des ETF’s sur l’intelligence artificielle et sur le secteur tech en général. Comme si instantanément, les investisseurs avaient décidé que la fin du conflit allait générer croissance, créations d’emplois, baisse de l’inflation et distribution de cash pour tout le monde dans les heures qui vont suivre pour rebooster la confiance et la consommation chez l’Américain standard qui commençait à se demander s’il n’allait pas devoir réduire son régime alimentaire de quelques burgers et de quelques kilos de frites ! Mais heureusement, la paix est descendue sur terre grâce à Trump le Messie et nous pouvons tranquillement reprendre la direction des plus hauts de tous les temps – ce que le Nasdaq a déjà fait, d’ailleurs…

Tout ne va pas bien, mais on s’en fout et on va pas se battre pour ça

Cependant au milieu de cette douce euphorie estivale, on ne va pas se mentir, ça ne va pas si bien que ça – d’un point de vue strictement économique – on a toujours des craintes inflationnistes liées aux droits de douane – oui parce qu’aussi fout que ça puisse paraître ; absolument rien n’est réglé à ce sujet et la fin du premier moratoire est attendu pour le 9 juillet. Et puis on sent que l’emploi se resserre aux USA, que la confiance s’effrite – hier encore le Consumer Confidence est sorti nettement en-dessous des attentes, mais pas de chance pour lui, il est sorti en même temps que le cessez-le-feu et ne pouvait donc pas rivaliser. Donc non, tout ne va pas bien et je pourrais encore lister tout ce qui ne va pas pendant encore trois pages, mais cela n’apporterait strictement rien puisque le marché ne voit que les bonnes nouvelles et ne cherche qu’à acheter les idées de Trump tout en ignorant les signaux d’alerte. On ne peut pas « pisser contre le vent, sinon on aura les chaussures mouillées » – c’est un peu comme ça que l’on peut résumer le sentiment : on sait que ça ne va pas forcément super-super, mais rater la révolution technologique serait bien pire en termes d’investissements.

Donc hier Trump a confirmé la fin de la guerre, il a très clairement expliqué aux deux parties belligérantes que le premier qui mettrait un coup de canif dans le contrat serait privé de dessert et les marchés sont « montés de soulagement ». L’Allemagne et l’Italie ont pris 1.6%, la France 1% et même la Suisse reprenait 1.13% comme si elle était intrinsèquement liée à ce conflit Moyen Oriental. On se serait presque cru le lendemain de la libération de Paris en 1944 – sauf que là c’était :

« Wall Street ! Wall Street outragé ! Wall Street brisé ! Wall Street martyrisé ! Mais Wall Street libéré ! »

Décidément, le mot « libération » est très utilisé en ce moment. Mais peu importe, ce qu’il faut retenir c’est que rien ne nous empêchera de monter, jusqu’à que quelque chose se passe et que l’on prenne conscience que nous ne sommes pas dans une série Netflix et que ça ne se finit pas systématiquement toujours bien

Powell à la barre (du tribunal)

Et pendant que Trump gérait le monde à coup de messages sur les réseaux sociaux, son meilleur ennemi, Jerome Powell est monté à Capitol Hill pour témoigner devant le Congrès… Témoigner devant le Congrès avec les dernières remarques de Trump qui l’avait encore qualifié la veille de “très bête et borné” sur les réseaux. Mais il en fallait plus pour déstabiliser Powell. Il est resté stoïque et il a joué la carte du banquier central zen. Il ignore le bruit politique et affirme que la Fed aurait déjà baissé les taux si Trump ne l’avait pas dégainé ses tarifs douaniers le 2 avril. Traduction : c’est pas l’inflation naturelle qui gêne, c’est celle que Trump fabrique lui-même.

Il a expliqué qu’en regardant les données passées, on pourrait même justifier deux, voire plusieurs baisses de taux. Mais voilà : tous les économistes sérieux s’attendent à une hausse de l’inflation dans les mois qui viennent, justement à cause des tarifs. Donc, prudence.
Résultat : pas de baisse en juillet a priori. Septembre reste le premier créneau crédible. Powell refuse de s’engager sur une date. Il attend les chiffres, surtout ceux sur l’inflation et l’emploi. Malgré les dissonances que l’on entend venir au sein même de la FED il est resté ferme et droit dans ses bottes. Le patron n’a pas EXCLU une baisse en juillet, mais sans chiffres concrets, il ne fera rien. Certains au sein de la Fed, comme Bowman ou Waller commencent à pousser pour une baisse dès juillet si l’inflation flanche ou que le marché de l’emploi craque. Mais ils sont encore minoritaires. Et le marché y croit à peine : moins de 20% de chances pour juillet, contre 87% pour septembre. Powell reste patient. Il dit recevoir, en off, le soutien discret de nombreux élus. Et il rappelle que dans une situation complexe, il vaut mieux réfléchir deux fois avant d’agir. Et ce mercredi, bis repetita : il passera devant le Sénat. Pour ceux qui n’ont toujours pas compris que Powell ne baissera pas les taux tant que l’inflation est sérieusement sous contrôle – et là, l’inflation elle joue au ballon dans la cour de récré à avec les droits de douanes et n’a pas l’air de vouloir rentrer en classe tout de suite.

En Asie, on suit…

Ce mercredi matin, les marchés asiatiques ont poursuivi leur rebond, dans le sillage du rally de Wall Street. Je ne vous apprendrais rien en vous disant que le cessez-le-feu négocié par les États-Unis entre Israël et l’Iran a nettement allégé l’ambiance sur les marchés. Hong Kong grimpe de 0,7 %, le KOSPI sud-coréen de 0,3 %, et même les indices chinois, longtemps à la traîne, s’affichent dans le vert. Mais l’enthousiasme reste mesuré : Trump a beau clamer la paix, il a déjà commencé à critiquer les deux camps pour avoir, selon lui, « rompu les engagements » à peine signés. Bref, trêve fragile, euphorie sous surveillance quand même. Le Japon, lui, reste sur la retenue : la BoJ s’interroge encore sur la suite, coincée entre l’inflation qui s’invite et la menace des tarifs américains. En résumé : les marchés veulent croire à une accalmie géopolitique… mais on commence à se dire qu’il va falloir tout de même revenir sur le sujet des tarifs douaniers. Parce qu’ils sont toujours là, en embuscade.

Du côté du pétrole, inutile de vous dire qu’il est en chute libre. Le baril est à 65.30$ après avoir touché les 78$ il y a moins de 48 heures. Je dois vous avouer une chose, c’est que je me réjouis de voir quel prix moyen sur le baril ils vont utiliser pour calculer le CPI le mois prochain. Ça promet d’être épique. Techniquement, c’est le baril qui avait tiré l’inflation à la baisse le mois dernier et on se demande légitimement ce qui va se passer ce mois… Pendant ce temps, l’or est à 3’340$, le Bitcoin repart comme un boulet de canon à la hausse et se traite à 106’000$ et même le rendement du 10 ans est en baisse à 4.30% – Ce Donald Trump est un véritable magicien de l’économie et un dieu des relations politiques mondiales.

Du côté des nouvelles du jour

Du côté de la fin de la guerre, on apprend aussi ce matin que selon les services secrets américains, certaines « pièces maîtresses » des sites d’enrichissement d’uranium en Iran n’ont pas été détruites. Le boulot aurait donc été fait à moitié, on se réjouit du prochain « tweet », comme d’habitude. Autrement, Fedex a sorti des chiffres meilleurs que les attentes, mais leur guidance était pourrie encore une fois. Le titre était en baisse de 6% after close. Chez Apple on parle de l’acquisition possible de Perplexity – intelligence artificielle qui pourrait lui permettre de combler son retard dans le secteur. Carnival a bondi de près de 7 % après avoir publié des résultats trimestriels meilleurs que prévu, et surtout relevé ses prévisions pour l’année. Le carnet de commandes pour 2026 est blindé — et à des prix historiquement élevés. Hier, Coinbase a bondi de 12 %, Un emballement dû à la régulation qui, pour une fois, fait figure de bonne nouvelle. Un broker américain a relevé son objectif à 421$ contre 301 auparavant, saluant le “flot de news positives” autour de l’entreprise et de son environnement. En tête : le vote du Sénat américain en faveur du Genius Act, une loi visant à encadrer les stablecoins — un point stratégique pour Coinbase. Quand la régulation donne de la visibilité, le marché applaudit. Et quand le marché applaudit, Coinbase explose. Et puis, Uber a également pris 7.5% parce que eux aussi ils ont lancé leur service de robotaxis avec Waymo et à Atlanta.

En dehors de la fin de la guerre et du fait que Trump est le Messie, on a largement abordé le fait que le S&P 500 flirte avec ses records. Tout le monde se félicite : les tarifs douaniers de Trump ont été partiellement suspendus – jusqu’à quand, on ne sait pas. L’inflation reste sous contrôle (à peine sous les 3 %) – jusqu’à quand, on ne sait pas non plus, le pétrole redescend et la Fed garde la porte entrouverte pour baisser les taux. Bref, les marchés affichent un grand sourire. On ne peut pas le nier. Mais ce sourire reste un peu crispé.

Réflexion du matin

Un peu crispé parce que si l’on regarde un peu à l’intérieur du marché, on se rend compte que la performance est tenue à bout de bras par la tech. On le sait, Nvidia, Meta, Microsoft et Netflix font le boulot, pendant que la majorité des autres secteurs… piétinent. En fait, beaucoup de secteurs sont en baisse cette année, notamment le retail (dépendant de la Chine et donc des tarifs), les transports (FedEx est en chute libre, -20 %), et les small caps (S&P 600 en baisse de 5 %). Sans compter qu’à l’intérieur du Russell 2000, D’après les dernières estimations, environ 485 sociétés — soit près de 25 % de l’indice — sont aujourd’hui classées comme zombie companies. Ce qui signifie qu’elles ne dégagent pas suffisamment de bénéfices pour couvrir leurs frais d’intérêt, vivant quasiment à crédit. Un autre indicateur plus large indique que près de 38 % des sociétés du Russell 2000 sont non rentables.

Ce qui veut dire que la hausse des géants de la tech masque une réalité plus douloureuse :

• Les marges se font grignoter.
• Les prix montent, mais pas assez pour compenser les coûts.
• Et la demande semble faiblir, doucement mais sûrement.

Résultat : les analystes commencent à sabrer leurs estimations de bénéfices, surtout sur les boîtes les plus sensibles à l’économie réelle. Conclusion : Oui, le S&P 500 monte. Mais non, le marché n’est pas serein. Il surfe sur quelques stars pendant que le reste rame. Un scénario déjà vu… et rarement durable. Même si depuis hier, tout le monde s’en fout encore plus qu’avant puisque la guerre est finie et que l’intelligence artificielle est à nouveau « the place to be ». Le S&P500 va aller au plus haut de tous les temps, probablement avant la fin du mois et ensuite, on pourra se poser des questions pendant l’été. Mais on en reparlera.

Les chiffres et le bonheur qui est dans le pré

Pour l’instant, tout va bien, Trump est formidable, les Israéliens et les Iraniens vont presque partir en vacances ensemble, l’Américain est déprimé mais on s’en fout parce ce que font les bombardiers B2, c’est quand même super et que là, c’est l’été et qu’on va pas se gâcher la fête. Côté chiffres du jour, il y aura les demandeurs d’emplois en France et Powell qui va RE-témoigner, ainsi que les inventaires pétroliers. Mais qui ne veulent plus rien dire maintenant que la guerre est finie et que détroit d’Ormuz est redevenu paisible et ouvert aux véliplanchistes.

À l’heure actuelle, les futures sont en hausse de 0.04% et la sérénité, ainsi que la zen attitude est parmi nous. Il faut quand même admettre que le monde de la finance est vraiment formidable. Excellente journée à tous et on se revoit demain. Toujours plus haut.

Thomas Veillet
Investir.ch

« Le marché peut rester irrationnel plus longtemps que vous ne pouvez rester solvable. »
— John Maynard Keynes

« Le marché peut ignorer une guerre nucléaire tant que Powell promet une baisse de taux. »
– Thomas Veillet