Le moins que l’on puisse dire c’est que l’on ne s’est pas ennuyé hier et que l’on ne devrait pas non plus s’ennuyer ce vendredi. Et encore, je me dis qu’on a de la chance qu’il n’y ait pas 2 Trump et 3 Elon Musk sur terre, sinon mes chroniques ne seraient plus des chroniques, mais il faudrait faire un live toute la journée pour pouvoir gérer tout ce qui se passe. En tous les cas, cette fois on ne va pas se plaindre parce qu’il y a des montagnes de choses à dire. Des montagnes qui ne résolvent aucune équation et qui ne règlent rien, mais qui ont au moins le mérite de nous donner de quoi écrire des scénarios pour la future saison Netflix qu’on ne manquera pas de nous sortir...

L’Audio du 6 juin 2025

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La journée aura été chargée

Tout d’abord, la BCE a baissé les taux comme prévu et leur communication a été très floue, puisqu’en gros on sait que ça ne devrait plus baisser, sauf si la situation l’exige. Taux de dépôt à 2%, inflation attendue à 2% en 2025, croissance molle, mais on garde le sourire. Christine Lagarde nous fait du Lagarde : “on baisse, mais peut-être qu’on s’arrête”. Traduction : on a vidé la trousse de secours, et maintenant, on espère que ça cicatrise tout seul. Et puis Lagarde a aussi dit qu’elle ne quitterait pas son poste avant la fin de son mandat, histoire faire suite aux rumeurs de son départ en direction du World Economic Forum. Sa fidélité est touchante, mais en fait c’est juste que le WEF n’a pas encore mis assez de zéros sur le chèque. Côté Allemagne, le bâtiment est toujours en PLS, mais en revanche, le moral des patrons est toujours au top et c’est marrant parce que ça coïncide avec le chèque en blanc de 1’000 milliards signé par le gouvernement pour fêter leur arrivée au pouvoir.

Si le moral est bon c’est que tout le monde veut et espère une part du gâteau. Toujours est-il que le DAX est au plus haut de tous les temps, pendant que la Suisse s’emmerde dans son « range » de 250 points et termine sa journée avec pour seul titre de gloire, le fait d’avoir fini au-dessus des 12’300, tout en annonçant un chômage à 2.8%, inchangé. Chiant, comme le range du SMI. Et pour terminer, on notera que Paris était le seul indice local qui finissait dans le rouge. Un rouge léger, puisque le CAC reculait de 0.18%, mais le message était clair ; on aurait préféré que la BCE ne sous-entende pas que le cycle de baisse des taux touchait à sa fin. On aime bien vivre dans la perspective que la Banque Centrale va nous aider. Quand on comprend qu’elle n’a plus grand-chose à nous offrir, on grince des dents.

Le feuilleton

Ensuite, Trump a parlé à Xi. Peut-être la news qui était censée nous exciter le plus sauf que ça n’a pas été le cas. Le call a été « constructif », Xi a invité Trump à venir en Chine et Trump a invité Xi à venir aux USA – on espère qu’ils vont vérifier leurs agendas avant d’organiser les voyages, parce que ça serait ballot que Trump aille en Chine pendant que Xi est dans l’avion pour Washington. Pour faire simple : rien de neuf, du blabla diplomatique, des invitations à bouffer et un accord commun celui de continuer les négociations sur les droits de douane. Si, si, les mêmes qui sont au point mort depuis deux semaines. Résultat : on nous a chauffé sur cet échange téléphonique et ça a eu à peu près autant d’intérêt pour les bourses mondiales que la chamaillerie entre Macron et sa grand-mère l’autre jour en Asie. Et pendant que Trump discute, les marchés jouent au poker menteur et à Wall Street, on attend les chiffres de l’emploi comme on attend les résultats d’un test de grossesse, dans l’angoisse absolue.

Ensuite – et c’est là qu’on entre dans les choses intéressantes – c’est d’ailleurs clairement ça qui a mis de l’ambiance sur les marchés : La chronique d’un divorce. Vous croyiez que « Marié au premier regard » était le summum du suspense romantique et le pinacle du voyeurisme, tout en étant un des sommets de la connerie audio-visuelle ? Que nenni, c’était sans compter le nouveau DRAME qui se déroule en direct sous nos yeux et sur X : L’explosion en live de BROMANCE ENTRE TRUMP ET MUSK !

Et ça prend tellement d’importance et de temps aux médias et au bourses mondiales de se prendre la tête avec ça qu’aujoud’hui je suis presque obligé de me taper une édition spéciale dans l’édition spéciale, mâtinée de BREAKING NEWS pour aborder le sujet, nous voici donc dans le nouvel épisode de cette fabuleuse série d’amitié et de magouilles politiques et financière qui s’intitule :

Quand Trump divorce de Musk : chronique d’une amitié qui valait 150 milliards

Il y a encore trois mois, Elon Musk disait de Donald Trump :

« Je l’aime autant qu’un hétéro peut aimer un autre homme. »

Et hier, le fantasque milliardaire autiste et sous kétamine, balance que Trump est lié à Epstein et que c’est pour ça que l’on n’a toujours pas TOUS LES DOCUMENTS, qu’il sabote l’économie avec un “tas d’abominations fiscales”, et qu’il va débrancher les fusées de la NASA qui sont censés balader les astronautes américains dans l’espace. Et tout ça en public, sur X.

Graphique de Tesla – Source : Tradingview.com

Mais attention, Trump n’est pas en reste, puisque de son côté, il menace de couper 21 milliards de contrats fédéraux à SpaceX , un peu comme un père fâché qui reprend les clés de la voiture : « Puisque tu fais des conneries, t’es interdit de sortie !!! »

• Tesla perd pas loin de 200 milliards de valorisation, le titre a perdu 25% depuis le 29 mai.
• Trump Media chute de 8%.
• Et les marchés oscillent entre fou rire nerveux et panique sur Tesla.

Alors comment deux superstars qui avaient tout à gagner ensemble ont-elles pu déclencher un mini-krach juste avec leurs tweets ?

En réalité, c’est assez simple : l’égo, le pouvoir, le besoin irrépressible d’être au centre de l’attention et pas mal de pognon aussi.

Tout d’abord au Chapitre 1 – Il y a L’histoire d’amour

Tout commence comme un conte de fées politique : Trump devient Président pour la seconde fois et on ne peut pas nier que c’est un peu grâce à Musk. Le patron de Tesla injecte 300 millions dans la campagne de Trump et ensemble, ils rêvent d’un monde peuplé de voitures électriques, de fusées partout dans l’espace et de hausses de droits de douane sur tout ce qui n’est pas Made in America. Trump lui déroule le tapis rouge en retour d’ascenseur. Musk devient « haut fonctionnaire spécial », s’improvise nettoyeur de dépenses publiques, et se retrouve invité à la Maison-Blanche plus souvent que le livreur de chez Doordash. Tout le monde y gagne. Depuis LIBERATION DAY Tesla a repris 69%. SpaceX empoche des milliards de contrats. Et Trump peut jouer les techno-messie tout en martelant qu’ELON est tellement extraordinaire que s’en est presque gênant. Il organise des spots publicitaires pour Tesla devant la Maison Blanche et Musk est plus souvent à Mar-al-Lago qu’au board de Tesla.

Arrive ensuite le Chapitre 2 que l’on appellera : L’explosion non contrôlée

C’est là que le « Bill » arrive. Et là, je ne parle pas de Bill Gates. Comprenez que l’on parle du budget de Trump pour le pays. C’est une abomination fiscale selon Musk et il le dit. Haut et fort. Il dégaine sur X :

« C’est une abomination, c’est une honte de voter ça et on virera les traîtres »

Trump BIEN SÛR ne goûte pas l’ironie. Et commence sa vendetta :

1. Il menace de couper tous les contrats et subventions à Musk – Tesla, SpaceX..
2. Il l’accuse d’ingratitude.
3. Il le vire de son rôle d’influenceur à la Maison Blanche.
4. Il se moque de son œil au beurre noir
5. La rupture est consommée.

La réponse de Musk est sans appel :

“Sans moi, Trump perdait l’élection. Quelle ingratitude.”

Et la cerise sur le contrat de divorce :

“Trump est dans les fichiers Epstein”

Game over. Nous sommes passé de la « bromance » de l’année à un divorce médiatique écœurant qui ne fait que commencer.

En Conclusion, on commence à trouver que la guerre des égos coûte cher

Ce qu’on croyait être une alliance de génies s’est transformé en feuilleton géopolitico-boursier à rebondissements, avec pour seuls perdants : les marchés et les contribuables.
Musk menace de créer son propre parti, Trump menace de lui couper tous les vivres et la Bourse regarde ça en se demandant si on n’est pas tous coincés dans un mauvais épisode des Simpsons.

Alors que faut-il en penser sur le moyen terme ?

1. Volatilité politique amplifiée : tout ce que touche Musk devient explosif.
2. Tesla fragilisé : les investisseurs veulent un CEO, pas un sniper politique.
3. Trump de plus en plus imprévisible : la « Trumpflation » version 2025 est lancée.

Et surtout, cette affaire confirme une chose : les marchés détestent les ruptures, surtout quand elles sont aussi bruyantes. En moins d’un mois, on est passé de « Make Innovation Great Again » à « Kill Bill » et « Epstein Files ».

• L’éclatement du duo Trump–Musk a coûté des centaines de milliards aux marchés.
• Les investisseurs commencent à craindre un Musk plus occupé à faire la guerre politique qu’à diriger ses boîtes.
• Et la Bourse découvre que les clashs d’égo, même en 280 caractères, ont un prix.

Est-ce que cette rupture est définitive ? Impossible à dire. Mais une chose est sûre : entre les fusées qui explosent, les tweets qui incendient, et Tesla qui perd connaissance en bourse, ces deux clowns ont réussi à éclipser la guerre tarifaire et les négociations commerciales à deux balles entre USA et Chine. Hier c’était bien simple, on ne parlait presque que de ça. Tesla s’est pris plus de 14% dans les dents rien qu’hier et les marchés US terminaient tous en baisse pour fêter ce nouvel épisode qui frise quand même le tout grand n’importe quoi, puisque ça nous amène tout de même à réaliser que nous sommes toujours en train de baser nos décisions d’investissement sur les agissements et les réactions de deux mecs qui auraient tous les deux pu jouer le rôle du méchant dans n’importe quel James Bond.

Le reste, l’Asie et Broadcom

Alors oui, ce matin le divorce du siècle prend énormément de place – pour pas grand-chose – il faut le dire, mais l’actualité n’attend pas. Si l’on se penche sur l’Asie, l’ambiance et morne et terne ce matin. Tout le monde attend : les prochaines annonces (hypothétiques) de Trump sur la Chine, les chiffres de l’emploi US, et la décision de la banque centrale indienne – bon la banque centrale indienne n’est peut-être pas sur le podium des choses les plus attendues, mais quand même, ça donne l’impression qu’on sait aussi s’intéresser à autre chose que le compte Truth Social de Trump. Les indices ne font pas grand-chose, on notera la hausse du Nikkei (0.5%), pour des raisons qui peuvent laisser pantois le commun des mortels, puisqu’on annoncé que les Japonais dépensent moins que prévu. Et comme le consommateur ne consomme plus, du coup, la BOJ hésite à monter les taux. DONC ça monte. En résumé le mood n’est pas top, mais comme on ne montera pas les taux, c’est bon pour la bourse. Oui, je sais : faut suivre. En Chine, même après un appel « positif » entre Trump et Xi Jinping, les indices font du surplace. Les investisseurs ne veulent plus de promesses, ils veulent un deal. Un vrai. Et pendant ce temps, l’industrie chinoise se fait rincer par les tarifs US. Côté Inde, la banque centrale devrait baisser ses taux dans la journée. Logique : croissance molle, inflation sous contrôle, et besoin de soutien. Le marché indien devrait être dans le vert aujourd’hui. Merci au QE version curry. Du côté du pétrole, le baril est à 63.20$, l’or est à 3’395$, le Bitcoin est à 102’500$ et le rendement du 10 ans est à 4.387% dans un silence assourdissant.

Hier soir il y avait quelques publications trimestrielles qui méritaient d’être signalées. Tout d’abord, Broadcom était de sortie et l’autre empereur des semiconducteurs n’a pas déçu le marché. MAIS ! Oui, parce qu’en ce moment il y a souvent un « MAIS » et aussi fou que cela puisse paraître, dans le cas de Broadcom, ça n’est pas qu’ils ont déçu sur les attentes, puisqu’au contraire, ils ont fait mieux. Que les attentes. La logique voudrait donc que l’on cherche la raison de la baisse de 4% after close du côté de la guidance. Mais là encore : tout cru patate crue, la guidance est dans les clous. Il ne reste donc plus qu’à utiliser le bon vieil argument du : « oui, mais c’est quand même beaucoup monté » qui est souvent suivi par le traditionnel : « il est parfois bon de prendre les profits ». Bref, après un run de 88% en moins de deux mois pour « anticiper de bons chiffres ». Broadcom était en baisse de 4% pour prendre les profits. CQFD. Il y avait aussi Lululemon. Alors Lululemon, vous connaissez, c’est les fringues pour le yoga. Enfin, vous connaissez surtout si vous faites du yoga et vous vous en doutez, c’est pas trop mon truc, le yoga. Mais toujours est-il qu’hier Lululemon a fait le grand écart… et s’est déchiré les adducteurs. Résultats meilleurs que prévu, mais prévisions revues à la baisse à cause des tarifs douaniers et de ventes faiblardes en magasin.
Le titre s’effondre de 22% after close. Les ventes aux US reculent, les clients sont frileux, et la concurrence pousse fort.

Crypto is back, baby !

Et on termine avec l’IPO du jour, celle de Circle, le boss des stablecoins. Introduite à 31$ sous le ticker CRCL, l’action a ouvert à 69$, a fait un bond jusqu’à 103,75$ (soit +235%), et a fini à +168% à 83,23$. Derrière cette euphorie ? Une demande de dingue, une IPO sursouscrite, et une boîte qui imprime du cash grâce aux intérêts sur ses réserves de USDC, sa cryptomonnaie adossée au dollar. Résultat : une valorisation directe à 18,4 milliards. La boîte et ses investisseurs empochent 1,1 milliard au passage. Les signaux sont là : Trump adôôôre les cryptos, la SEC est moins punitive – voire même arrangeante – un projet de loi (le GENIUS Act) pourrait sécuriser les stablecoins, et tout le secteur jubile. Coinbase, Robinhood, Galaxy Digital, eToro… tout ce petit monde profite du vent favorable. Mais attention : Circle reste derrière Tether, encore numéro 1 du marché. La différence c’est que Tether est en mode pirate depuis El Salvador. Circle, plus réglo, espère que la régulation américaine jouera enfin pour les bons élèves. En résumé : crypto + Trump + régulation friendly = boom boursier. Et si l’IPO de Circle est un indicateur, préparez-vous, car d’autres vont suivre.

Les chiffres du jour

Du côté des chiffres du jour, nous aurons la production industrielle et le Trade Balance en Allemagne, le PIB en Europe et Lagarde qui parlera, sûrement pour ceux qui n’ont pas compris ce qu’elle a dit hier, et puis surtout, surtout, SURTOUT, il y aura les chiffres des Non Farm Payrolls – hier les chiffres des Jobless Claims étaient pourris pour la seconde semaine consécutive, on s’attend donc vraiment à des chiffres de merde. Les attentes sont à 126’000, le taux de chômage devrait rester à 4.2% et la croissance des salaires devrait être à 3.7%. perso, si la surprise est positive, je me lèverai et j’hurlerai : MAGOUILLE !!! très très fort…

Autrement, en attendant les futures sont en hausse de 0.25% parce que Musk n’a pas encore crashé une fusée Space X sur la Maison Blanche et que Trump n’a pas encore signé d’exécutive order contre Musk. Autrement, je vous rappelle que le 18 juin aura lieu le Swissquote Trading Day à Lausanne, ça durera presque 6 heures et ça finira avec un apéro – c’est gratuit, il faut vous inscrire et ça se rempli très très vite, donc il faut vous inscrire. Enfin, si vous n’avez rien de mieux à faire. Voici le lien : VOUS CLIQUEZ ICI !

J’en profite aussi pour vous signaler que dorénavant Investir.ch travaille main dans la main avec Zonebourse.com – nous allons republier certains de leurs articles et personnellement, je publierai une fois par semaine une vidéo sur leur chaîne YouTube avec pour thème : la finance. Quelle surprise, me direz-vous, mais là on parle de FINANCE DÉCOMPLEXÉE et c’est pas pareil. La vidéo sera publiée tous les vendredis matin à 6h00 et la seconde vient d’arriver ; la voici…

Pour le reste : demain c’est le week-end ; alors BON WEEK-END. Et en plus, c’est le week-end de Pentecôte, alors on se revoit mardi !!! Donc BON WEEK-END de Pentecôte !

À MARDI, histoire de voir si Musk nous annonce dimanche soir que Trump a AUSSI assassiné Kennedy.

Thomas Veillet
Investir.ch

« Les amitiés politiques, c’est comme les marchés haussiers : tout le monde y croit… jusqu’à ce que ça s’écroule sans prévenir. »
— Un trader lucide