La note macro de Nicolas Blanc, Responsable de l’Allocation chez Ellipsis AM.

Le conflit commercial entre la Chine et les US donne enfin des signes positifs. Le porte parole du ministre du commerce chinois a annoncé qu’une voie de règlement du conflit aurait été trouvée. Il s’agirait d’accords successifs, chacun permettant de satisfaire une partie des demandes américaines et entrainant une baisse réciproque de certains droits de douane. L’administration américaine a confirmé l’information à la presse.

Cette manière de procéder permettrait, même si des différends importants subsistent, d’éviter les effets délétères du conflit sur la confiance des agents et donc sur l’activité globale, tout en maintenant ouvertes les négociations. Le conflit a eu, de fait, des retombées négatives bien au-delà de la Chine qui était seule visée par les US. Or, dans la campagne électorale qui s’ouvre, Donald Trump ne peut ni se permettre d’avoir une économie en récession, ni d’apparaître comme ayant abandonné ses objectifs d’équilibrage des pratiques commerciales chinoises, voire même de contenir leurs ambitions à moyen terme de devenir un acteur majeur des hautes technologies.

Si la solution proposée semble donc concilier harmonieusement ces impératifs, elle montre aussi, nous semble-t-il, la force de la position chinoise dans le conflit, grâce à une économie assez résistante et un pouvoir politique libre de contraintes électorales. L’optimisme suscité par ces développements a été contagieux, au point que Jean-Claude Juncker a déclaré être certain que les menaces américaines sur l’automobile seraient abandonnées. Il renforce un contexte déjà positivement marqué par les nouvelles du Brexit (la sortie sans accord semble très improbable) et des données économiques qui peuvent suggérer un retournement conjoncturel. Les marchés ont donc fortement réagi, avec une rotation des obligations souveraines vers les actions, et, au sein de celles-ci, une rotation des valeurs défensives vers les cycliques.

Les taux longs, eux, se trouvent sous la pression conjointe:

  • de la perspective d’une croissance et d’une inflation plus fortes (on a vu d’ailleurs un rebond marqué des swaps d’inflation) et
  • de l’idée que les banques centrales vont, dans ces conditions, réduire leur niveau accommodation, tout cela rappelant la configuration de «reflation» qui avait prévalu 2016/2017.

Plusieurs éléments modérateurs doivent cependant être considérés. L’évolution des profits reste contrainte par la hausse du coût unitaire du travail résultant de la hausse des salaires et de la stagnation de la productivité. Après une très longue expansion et un niveau de chômage globalement très bas, la croissance pourrait retrouver un niveau tendanciel mais probablement pas beaucoup plus, ce qui ne créerait donc pas d’amélioration très sensible de la profitabilité.

Dans le même temps, la hausse des taux pèse sur la valorisation des actions, alors que celle-ci est à un niveau élevé (voir La semaine en 4 graphiques). Elle pourrait d’ailleurs être, à terme, un élément de risque pour le contexte. La solvabilité de nombreux emprunteurs (souverains, entreprises ou ménages) est aujourd’hui assurée par le niveau très bas des taux. La disparition de ce soutien ne sera pas sans conséquences, d’autant que les actifs correspondants atteignent des valorisations très élevées. On peut penser, entre autres, à un ralentissement de l’immobilier américain ou des tensions ravivées sur les souverains périphériques européens. Sur le segment du crédit, d’ailleurs, les spreads n’ont pas connu d’embellie aussi nette que celle observée sur les actions.

Pour l’heure, les effets bénéfiques l’emportent clairement selon nous, notamment avec l’amélioration de la santé des banques. Au demeurant, rien n’indique aujourd’hui que les facteurs structurels qui maintiennent les taux à des niveaux très bas – excès d’épargne et faible réaction de l’inflation au cycle économique – soient significativement modifiés.